Toulon – Palais Neptue
ZIZE revient en famille !

B

Thierry Wilson est un charmant garçon qui ne paie pas de mine et qui passe inaperçu dans la rue. Mais il suffit qu’il franchisse l’entrée des artistes, qu’il s’installe dans une loge et une heure après nous apparaît Zize, dans toute sa splendeur et sa rotondité.
J’ai eu le privilège de voir le monsieur se transformer en dame et, croyez-moi, c’est un art véritable, un travail de patience et l’effet est saisissant.
J’ai donc voulu en savoir un peu plus sur Thierry-Zize. Un Thierry posé et calme, une Zize volcanique.

Thierry, comment est né ce personnage de Zize ?
C’est une longue histoire – me dit-il en commençant un minutieux maquillage – car à 14 ans, je me suis retrouvé dans les coulisses du théâtre Toursky dirigé par Richard Martin qui montait « L’opéra des rats » avec Léo Ferré.et j’ai été subjugué par un personnage travesti. J’ai trouvé ça très fort, magique.
Je me suis alors dit que je voulais être comédien et faire « ça ».
Tu étais très jeune !
Oui, ai alors fait le conservatoire de Marseille avec Irène Lambeton qui m’a totalement ouvert à l’art du théâtre. Ayant réussi mon bac, j’ai demandé comme cadeau à mes parents de m’offrir un stage au cours Florent où là encore, j’ai rencontré un homme magnifique, Raymond Aquaviva. J’ai quand même des bases de comédien !
Il y a eu un autre « tilt » !
Oui car un soir des copains m’emmènent boire un coup chez Madame Arthur. Je pensais que c’était une de leurs copines car j’étais alors très naïf ! Et je me retrouvé dans ce cabaret, entouré de folles à découvrir un spectacle de travestis. Quand, à la fin du spectacle, apparaît Coccinelle qui chantait de belles chansons françaises. Dans toute ma naïveté je n’ai pas tout de suite compris que c’était un transsexuel. Je n’ai vu qu’une femme incroyablement belle au regard bleu, qui chantait « Vous qui passez sans me voir »… Tout ce que j’aimais ! Je venais de découvrir une star, une vraie .
Et alors ? Et alors ?!
Je pars en vacances en Corse et je découvre un livre : « Coccinelle par Coccinelle ». Je dévore le livre et mon grand père me dit : « J’ai rencontré une Coccinelle mais ce ne peut être elle, elle doit être vieille ! ». Mais c’était elle !
A la rentrée, je vais lui faire signer le livre. Elle me regarde, me dit « Vous avez de jolis yeux » et moi, ému, je lui répond en toute innocence : « Vous savez, mon grand père vous a connue »
Très délicat !
(Il rit) effectivement et pourtant, on commence à parler, elle m’invite à boire un verre, on sympathise et de là est née une grande amitié. Nous ne nous somme pratiquement plus jamais quittés. Je suis devenu « Monsieur Coccinelle » !A la fin de sa vie, un jour, je lui demande pourquoi elle avais flashé sur moi : « Avec ton innocence et ton accent, je savais que tu ne pouvais pas me faire de mal, on m’en a tant fait ! En fait tu es le fils que je n’ai jamais eu ». (Moment d’émotion)
Plus que le fils !
Oui puisque j’ai été, durant 20 ans, son mari mais surtout sa nounou, son producteur, son confident, son docteur même et accessoirement son mari qui l’aimait d’un amour vrai et platonique.

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Et à l’occasion tu étais artiste quand même !
Ah oui, j’ai fait du chant, de la comédie, du cabaret, j’ai travaillé chez Michou, où j’ai fait Lara Fabian, Tina Arena, Lââm… Il faut dire qu’à l’époque j’étais mince ! Après… j’ai fait Muriel Robin et Régine !!!
Mais Coccinelle m’avait averti : « pense à faire autre chose car tu sais, jeune tu fais rêver, vieux, tu fais rire… Et dans ce métier, on devient très vite vieu »x.
Du coup j’ai fait en parallèle une école de maquillage avec Tslilla Chelton (Taty Danièle). Et puis, j’ai décidé d’écrire mon propre spectacle. Des souvenirs d’enfance me sont revenus, je me suis souvenu d’une femme que j’avais connue et j’ai commencé à écrire autour d’elle. Je voulais qu’elle dégage de l’énergie, de l’amour, de la générosité, qu’elle puisse dire des choses osées sans être jamais vulgaire et surtout qu’elle garde cet accent de Marseille que je revendique. Ainsi est née Zize qui est en fait ma marionnette. Un peu comme Jeff Panacloc avec Jean-Marc mais qu’à la différence moi je suis deux en un !
Et depuis ?
Ça a eu du mal à démarrer mais grâce à des gens comme Drucker et mon producteur Samuel Ducros et quelques autres, c’est parti en flèche, j’ai fait trois festivals d’Avignon à guichets fermés, je viens de faire cinq mois à Paris à la Comédie Caumartin et au Petit Palais des Glaces, 35 représentations, 35.000 spectateurs et aujourd’hui une grande tournée à travers la France, puis la Belgique, la Suisse et le Canada !
Avec, n’oublie pas de le dire, arrêt au Théâtre Galli de Sanary, le vendredi 13 avril !
On est loin du petit garçon de 14 ans qui rêvait dans les coulisses du Toursky !
Oui et figure-toi que l’histoire continue ou alors qu’on va boucler la boucle : je suis allé jouer au théâtre Toursky. Richard Martin m’y accueille car il aime ce qu’il fait et je lui a appris, il y a peu de temps, que tout avait commencé là. Il était très ému et en plus il m’avoue qu’il a très envie de jouer une pièce avec moi.
Où tu quitterais Zize ?
Evidemment car je suis avant tout un comédien. D’ailleurs je précise que je ne suis pas un travesti mais un comédien qui joue un rôle de femme ! Je lui ai donc proposé une pièce que j’aime particulièrement : une adaptation de « Debureau » de Sacha Guitry. Il se peut que ça se concrétise…
A suivre…

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Et voilà notre ami-amie qui fait une entrée tonitruante dans la salle du Palais Neptune où, durant une heure et demie, elle va nous parler avec sa gouaille et son accent, de sa famille « Mama mia », son fils Paulo qui n’a rien trouvé de mieux que de trouver, pour épouse, une suédoise qui se languit de son pays en allant respirer le bois des meubles chez Ikéa, qui a des parents barjots, bobos et radins, une copine de 90 ans qui veut se refaire une jeunesse, de sa visite au Cap d’Agde dans un camp de nudistes où les beaux-parents ont un chalet… qui est en fait une caravane… Bref, avec son énergie, son franc parler, son bon sens méridional, sa façon d’appeler un chat un… gros chat, elle rigole, elle gronde, elle houspille son mari, elle nous décrit sa sœur en nous faisant mourir de rire…
Mama mia ! Les zygomatiques en prennent un coup et le public sort du spectacle exténué et ravi.
A voir… et revoir de toute urgence !

Jacques Brachet