Il nous vient du Lubéron avec ses presque 2 mètres de hauteur, son regard malicieux, son sourire qui rit dans sa barbe.
Cet ancien guide touristique a un jour décidé de nous faire rire… Et comme il a bien fait !
Car ce grand mec dégingandé a le chic d’aborder tous les sujets avec drôlerie et intelligence, dans l’absurde ou la finesse, l’humour franc ou l’humour noir, sans une once de vulgarité – Ca change des pseudo humoristes qui visent sous la ceinture ! – faisant mouche à chaque histoire, à chaque personnage, à chaque mimique, à chaque jeu de mots… Et comme il sait jongler avec les mots… C’est un régal !
Son spectacle est à 200 à ‘heure, on n’a pas le temps d’analyser ce qu’il vient de nous assener pour qu’une seconde rafale arrive. On prend baffe sur baffe… et on en redemande !
J’avoue avoir rarement autant ri, d’un bout à l’autre d’un spectacle.
Il passe avec l’aisance des grands d’un sketch à l’autre, d’un personnage, d’un accent à l’autre avec une apparente facilité, une aisance diabolique, joue avec les mots avec une sacrée dextérité… Ah, ce sketch où il change les « i » en « ou » et inversement… C’est du grand art !
Quand on pense qu’au départ il ne voulait qu’écrire… Il a bien fait de revoir sa copie et de ne pas s’y tenir car c’est à la fois une belle plume et un beau comédien qui a un contact immédiat avec le public qui le lui rend aussi instantanément.
De l’Imam au curé pédophile en passant par le directeur de banque ou le pauvre mec à qui on a volé Fifine… sa poule… il est irrésistible.
Et le rencontrer a été également un grand plaisir, tant il est à la fois lucide et simple (profitez-en tant que je suis abordable, dit-il en riant !).
Romain, comment passe-t-on de guide touristique à humoriste ?
Justement en revenant d’Inde où j’ai été guide pendant deux ans et où j’ai eu du mal à me réadapter à la vie en France. J’ai commencé à écrire des sketches avec l’idée de les proposer à des comédiens. Mais une fois écrits, je n’ai plus eu envie de les donner, j’ai voulu les tester moi-même alors qu’au départ je n’avais pas d’envie de devenir comédien. Pour moi, l’écriture était la chose la plus importante mais à partir du moment où je suis monté sur scène, j’ai compris que ma place était là.
Comment ça s’est fait ?
Je me suis présenté à Nice , au cours de théâtre des Oiseaux de Noëlle Perna, alias Mado et j’ai pris des cours avec Caroline Bonhomme… qui m’a débauché en me proposant le rôle de Carbon dans « Cyrano de Bergerac » que montait Marc Duret ! Je ne savais pas ce qui m’arrivait ! Puis elle m’a présenté Jean-Félix Lalane…
Le musicien ?
Oui car il montait une pièce qu’il avait écrite où il y avait quatre rôles. Il cherchait un imitateur pour faire des voix de chanteurs connus, Je suis un imitateur très approximatif, du coup je l’ai joué dans la caricature et mes imitations mal faites lui ont plu !
On est loin du one man show !
Non car Jean-Félix a décidé en parallèle de produire mon spectacle et m’a signé un contrat de cinq ans. Mais on vient de rompre ce contrat car, trop pris par ses projets de musicien, il n’avait pas le temps de s’occuper de moi. Du coup nous nous sommes séparés, il y a un mois, tout en restant amis. J’ai quand même eu le temps de faire en trois ans trois fois le festival d’Avignon. Je me suis donc retrouvé tout seul, ce qui n’est pas évident car Caroline Bonhomme qui m’avait mis en scène, restait à Nice et je voulais monter à Paris.
Je suis donc dans une période de transition où je suis à tous les postes. Heureusement, je rencontre des gens comme Ghislaine Lesept (dite Gigi !) grâce à qui je suis ici à Six-Fours.
Vous tournez quand même ?
Oui, je suis en tournée jusqu’au mois de mai et ça marche bien. La preuve j’ai obtenu le prix Casino Barrière en octobre à St Raphaël et j’ai raflé deux prix : celui du public et celui du jury au festival d’Orchies… Ca rassure !
Comment vous viennent les idées de sketches ?
L’inspiration a ses raisons que la raison ignore… Ecrivez ça, je trouve que c’est une belle phrase !… Faut bien que je me la pête un peu… je suis comédien, que diable et puis, ça fait le mec qui est sûr de lui !
Non, je n’ai pas de recettes, je peux écrire un sketch en dix minutes ou… y rester dessus durant un an et demi !
A ce propos… vous êtes sûr de vous ?
C’est très compliqué car pour réussir, il vaut mieux être sûr de soi mais quand on est seul en scène, on a toujours des doutes. Plus on est sûr de soi, mieux on est et le public s’en rend très vite compte. Le public est comme un miroir et si l’on n’est pas sûr de soi, il le ressent.
La tournée continue donc ?
Oui, jusqu’en mai avec ces dix sketches que je propose. Ca fait trois ans que je le joue et il évolue au fur et à mesure. Vous savez, c’est dur de se frayer un chemin dans ce métier et il n’y a qu’une chose qui paye : le travail. Il faut toujours bosser, toujours se remettre en question et trouver un style.
Avec Ghislaine Lesept… qui paraît si petite à côté de Romain !
Donc vous resterez sur le « one » ?
Non, par forcément. Je pense déjà à un prochain spectacle seul en scène mais je joue à Paris, en alternance avec la tournée, une pièce intitulée « Vous les femmes » de Robert Punzano.
Je vais également jouer une autre pièce d’Olivier Birgenstock et Julien Ségalas « La guerre des sexes aura-t-elle lieu ? »
Ça ne vous rend pas schizophrène ?
Non, car nous sommes plusieurs comédiens et nous tournons chacun selon nos possibilités et nos temps de liberté et je ne joue pas le one man show tous les soirs.
En tout cas, si j’ai un conseil à vous donner en ce samedi 23 décembre, notre ami Romain est encore au théâtre Daudet. Courrez-y, vous ne le regretterez pas… et ça vous donnera un bel apéritif pour démarrer les fêtes de fin d’année !
Jacques Brachet