ISABELLE FORET… LE VIN AU FEMINI

Lorsqu’on on a pour origine lointaine, du sang polonais et du sang bourguignons, automatiquement le vin vient à vous à la naissance. Ce qui est arrivé à Isabelle Forêt que la grand’mère bourguignonne a élevée toute petite avec un sucre teinté de ce breuvage… ou presque !
Elle s’initiera d’abord aux vins moelleux des Pays de Loire puis plus tard aux rouges de Chateauneuf du Pape.
Elle s’éloigne du vin pour devenir mannequin à Paris et, le temps de donner deux fils à un certain Claude François, lui aussi fin palais, dont la cave était renommée, la voici dans le Midi où sa passion pour le vin revient au galop.

 « Etant lui aussi un esthète en la matière, Claude m’a initiée aux Bordeaux alors que je l’initiais aux Bourgogne et aux vins de la vallée du Rhône ».

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 Développant sa passion pour l’œnologie et devenant journaliste spécialisée, elle crée le fameux guide « Fémivin » dédié aux femmes de plus en plus nombreuses, qui oeuvrent dans les vignes, les domaines, les caves. Gros succès du guide qui aura sa version aux Etats-Unis.
C’est donc tout naturellement qu’après mes tournées avec l’idole, je retrouve Isabelle au milieu des vignes, dans les domaines, les salons du vin comme cette journée à Hyères où les vins des Côtes de Provence régnaient en maîtres pour présenter le millésime 2013

 « Pour toi, Isabelle, que représentent ces vins varois ?
Pour moi ce sont d’abord les rosés qui ont fait d’énormes progrès. Le rosé est un vin difficile à réaliser, c’est un art véritable et l’on trouve aujourd’hui dans le Var de grands rosés. La région a beaucoup évolué et sa qualité peut aujourd’hui rivaliser avec les plus grands vins.

Que penses-tu du millésime 2013 ?
Je ne les ai pas encore tous testés mais ce que j’en ai appréhendé me paraît être un bon millésime, un vrai millésime de vignerons qui ont su tirer le meilleur parti du climat qui a été particulier cette année, avec un été sec, un automne humide, des vendanges tardives. Il y a beaucoup de fraîcheur.

 En tant que spécialiste des vins « féminins » quel est celui qui t’a particulièrement étonnée ou intéressée ?
Je dirais d’abord que celui d’Aurélie Bertin du domaine Ste Roseline à la Motte est toujours de grande qualité. Et puis il y a ce Clos de Madame du Château Rasque à Taradeau où Monique et Gérard Biancone ont réalisé un rosé magnifique.

Claude François chantait « Bordeaux Rosé », or aujourd’hui il semble y avoir une polémique autour de celui-ci…
Ce n’est pas vraiment une polémique mais les Bordelais ont décidé de lancer auprès des jeunes des écoles de commerce, un concours qui a pour mission de travailler sur une image nouvelle, jeune, moderne du Rosé de Bordeaux. Pourquoi pas ? D’autant qu’ils ont d’énormes moyens de communication que nous n’avons pas. Mais n’oublions pas que le slogan des Vins de Provence est justement « Le rosé est né en Provence », qu’ils le revendique et qu’ils tiennent à garder ces prérogatives !
Bordeaux veut aller plus loin et peut-être que cette initiative va booster le rosé en général à l’extérieur et que ce peut être bénéfique pour tout le monde et jusqu’en Amérique.

 L’Amérique justement, avec laquelle tu travailles beaucoup. Comment notre vin est-il perçu ?
Le rosé se vend aujourd’hui très bien aux Etats-Unis et je fais en sorte de le promouvoir au maximum car justement, la femme américaine est en train d’en faire son vin de prédilection

Comment t’y prends-tu ?
Je reçois chaque année chez moi des stagiaires américaines qui poursuivent leurs études à Sofia Antipolis. Je les initie aux vins que je leur fais découvrir et associer avec la gastronomie car pour moi, l’un ne va pas sans l’autre. Elles ont un regard très différend du nôtre, nous échangeons beaucoup, elles m’apportent également soutien et connaissances et elles sont un peu mon porte-parole là bas car la communication y est efficace. Elles m’aident à développer ma présence auprès des réseaux sociaux américains.

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Justement, aujourd’hui, où en est « Fémivin » ?
Il est aujourd’hui en ligne sur mon site femivin.com. Il marche très fort et je l’alimente sans cesse. Je suis par ailleurs en train de créer, avec un Anglais et un Américain qui sont venus me chercher, une boutique en ligne ainsi qu’un Ibook. Il se trouve qu’aujourd’hui, au bout de deux ans, j’ai une certaine crédibilité et donc, on vient vers moi.

Oenologue, journaliste spécialisée… Où te situes-tu ?
Je pense être plus journaliste spécialisée qu’œnologue, quoique, avec le temps, tout ça évolue. Je n’ai pas suivi la véritable route pour être oenologue, je n’en ai déjà pas les diplômes mais j’ai tout appris « sur le tas » d’abord avec ma grand-mère, un peu avec Claude et en lisant quelques trois cents bouquins sur ce thème ! C’est ma passion et j’ai appris sur le terrain.

Où en est aujourd’hui le vin dit « féminin » dans le Var ?
Je suis ravie de constater qu’il y a aujourd’hui 28% de domaines féminins chez nous et je travaille beaucoup avec ceux-ci. Je reste leur porte-parole, j’ai avec ces femmes des relations privilégiées et ça me comble de joie car on va vers la parité dans un domaine où jusqu’alors c’était une chasse gardée masculine !
Il y a d’ailleurs une association qui a été créée : les Eléonores de Provence, présidée par Véronique Baccino du domaine des Peirecèdes à Cuers, qui véhicule le savoir-faire et le savoir-vivre du vin à la manière féminine et provençale. Il y a une grande solidarité entre ces vigneronnes et elles donnent une belle image d’elles et de leur travail.
Elles se donnent beaucoup de mal et se sont appropriées le rosé en démystifiant le côté solennel et en mettant en avant le plaisir et l’émotion. »

Le vin est un produit masculin. Mais au féminin, il a de beaux jours devant lui !

 Jacques Brachet