Un petit locataire bien sympathique

f

Nicole (Karin Viard) est enceinte.
Ce pourrait être un « heureux événement » mais voilà… elle a 49 ans, déjà deux grands enfants, une fille qu’elle a eu à 15 ans et qui squatte l’appartement avec une infernale gamine, un mari au chômage qui n’en fout pas une rame et une mère qui a la maladie d’alzheimer.
Cela fait beaucoup de charges à assumer pour que la joie soit parfaite.
Gardera ? Gardera pas ? A vous de le découvrir dans ce premier film de Nadège Loiseau « Le petit locataire », une comédie douce-amère où rires et larmes, gags et engueulades se mêlent et où l’émotion n’est jamais loin. Les dialogues sont percutants, Karin Viard superbe de naturel et émouvante de questionnements, avec en prime Hélène Vincent en mamie qui perd la boule mais a de beaux éclairs de lucidité. Peut-être la personne la plus sensée dans cette famille déjantée vivant dans un parfait désordre. Beaucoup d’amour non dit derrière ces cris et ces bagarres et la réalisatrice a totalement maîtrisé ce film qui nous parle de la réalité de la vie : le chômage, la place de la femme entre boulot et maison, la jeunesse inconsciente, la vieillesse… Bref, beaucoup de thèmes qui font notre vie de tous les jours.
Cerise sur le gâteau : le film débute et se termine sur le port de Toulon !
Et plaisir de rencontrer au Six N’étoiles Nadège Loiseau et Côme Levin qui joue un copain de travail un peu à l’ouest… Normal qu’il soit donc là !

e
Tournage à Toulon

Nadège Loiseau : un accouchement « presque » sans douleur !
Mais avant de venir à Six-Fours, ils se sont arrêtés à Toulon en souvenir des premières scènes de tournage.
« C’est avec grand plaisir que j’ai retrouvé Toulon, surtout sous un beau soleil. Ca fait exactement un an que j’y commençais mon tournage et de plus, ça n’était pas prévu…
Pourquoi ?
Au départ nous devions tourner au Musée de la Marine de Cherbourg dans lequel il y a un sous-marin. C’est dans celui-ci que nous devions tourner les scène avec Raphaël Ferret qui joue le fils de Nicole. Une semaine avant le tournage, la Marine Nationale nous a retiré l’autorisation, prétextant que le sous-marin était trop vieux et pas représentatif des bâtiments d’aujourd’hui. Nous nous sommes donc rabattus sur Toulon à deux jours du tournage et au départ ça n’a pas été facile, on se regardait en chiens de faïence. J’étais très angoissée mais après une journée pour nous comprendre, nous avons tourné sans difficulté et même avec les vrais marins qui ont fait la figuration !
Vous avez mis quelque cinq ans pour faire ce film mais entre-temps il y a eu un court-métrage intitulé « Le locataire »… C’était un brouillon ?
En quelque sorte.
Toute jeune je passais mon temps à filmer tout le monde avec le caméscope de mon père, j’écrivais aussi des histoires. J’ai eu envie de faire un court métrage sur ce sujet qui me tenait à cœur… à tel point que j’ai eu envie de développer l’histoire et les personnages. Mais j’ai mis du temps à m’autoriser à le faire car, n’ayant pas fait d’école de cinéma, je ne me sentais pas légitime. Et puis, faire un long métrage, c’était une autre histoire !
D’autant que vous devenez alors scénariste et réalisatrice !
C’était, je crois, la condition sine qua non, sinon je ne l’aurais pas fait. De plus, étant à tous les postes, ça m’a très vite fait comprendre tous les mécanismes d’un tournage. J’ai mis du temps mais ça valait la peine !
J’ai cru voir au générique, Mazarine Pingeot ?
Oui, elle m’a été présentée par Sylvie Pialat car je commençais à m’empêtrer dans mon scénario qui était trop long et que je ne me décidais pas à couper; je m’en sentais incapable. Mazarine travaille souvent avec Fanny Burdino et toutes deux m’on aidée… et appris à couper !

a

Ca a été facile ?
Oh que non ! Au départ, je ne voulais pas partager l’écriture mais ça m’a permis de reprendre mon souffle, de prendre de la distance et aller à l’essentiel.
Karine Viard pour un premier film… sympa, non ?
Ca, ça a été une chance énorme que je n’osais espérer. J’ai tout de suite pensé à elle car je la suis depuis des années, j’ai vu tous ses films, je l’admire et lorsque mon producteur m’a demandé qui je voyais d’autre dans le rôle de Nicole, au cas où elle refuserait, j’avoue que je n’avais pas de plan B. J’aurais eu certainement beaucoup de mal à faire le film sans elle.
Autre cadeau : Hélène Vincent qui joue la mère et qui est formidable !
Je suis du Nord et j’ai été nourrie par le film « La vie est un long fleuve tranquille ». J’ai vu le film je ne sais combien de fois et Mme Lequesnois me fascinait ! Mais je cherchais une comédienne qui ait l’âge du rôle, c’est à dire plus de 80 ans et lorsque l’on a pensé à elle, je me suis dit « Mais c’est bien sûr ! » Mais il fallait qu’elle accepte de se vieillir, ce qu’elle a aussitôt accepté car elle voulait être de l’aventure. Ca a encore été un merveilleux cadeau.
Les autres comédiens sont moins connus et plusieurs viennent de la télé comme Côme Levin (Petits meurtres d’Agatha Christie, Fais pas ci, fais pas ça), Raphaël Ferret (Plus belle la vie, Profilage), Grégoire Bonnet (Clem, Scènes de ménage)…
Ca a été le hasard du casting. Je les connaissais sans les connaître car j’avoue que je n’ai pas regardé la télé depuis un certain temps. Mais ils sont tous talentueux même s’ils ne sont pas des stars, ce qui est bien pour que le public s’intéresse plus aux personnages qu’à ceux qui les incarnent.
Comme Philippe Rebbot, qui joue le mari de Karine
C’est elle qui a pensé à lui car ils avaient déjà tourné ensemble. Il a 50 ans mais il est resté longtemps derrière la caméra. C’est son premier grand rôle et je le trouve magnifique.
Comme Nicole, vous avez eu une période de gestation, même si elle a été un peu plus longue ! Aujourd’hui que vous avez accouché du film, comment vous sentez-vous ?
Je suis encore totalement immergée dans le film, je suis encore très fébrile. Tant qu’il ne sera pas sorti, je ne pourrai pas m’en défaire. A vous dire vrai, je n’avais pas envie de le montrer ! Mais par contre, le faire m’a fait beaucoup de bien et me permet d’accoucher sans douleur !
D’autant que tous mes comédiens sont restés très proches de moi et m’accompagnent dans ces présentations du film. Nous sommes restés une vraie famille et c’est important pour moi car je suis un animal social qui aime vivre en bande !

b c

Côme Levin, un jeune comédien plein de promesse
Bonne bouille rigolote, regard bleu, sourire craquant sous sa sage coupe de cheveux roux, Côme Levin, un comédien qui monte. Malgré sa jeunesse, il a déjà une jolie carrière partagée entre cinéma et télévision.
« C’est vrai – me dit-il – que la tendance est en train de s’inverser et qu’on a aujourd’hui plus de facilités à passer de la télé au cinéma et vice versa. J’avoue que je ne me suis jamais préoccupé de ça et je tourne ce qu’on me propose, lorsque ça me convient. L’intérêt d’un comédien est de tourner et de vivre de son métier, et je suis aussi à l’aise d’un côté comme de l’autre. J’ai la chance d’avoir la liberté de choix et j’en profite.
Dans le film tu joues un personnage un peu naïf…
Carrément couillon, tu veux dire ! Mais j’aime bien jouer les couillons et là, j’ai joué tel que Nadège concevait mon rôle, c’est-à-dire un vrai rôle de gentil couillon, sans surtout vouloir l’intellectualiser !
Rassure-moi… c’est un rôle de composition ?
(Il rit) Je te rassure… Du moins je l’espère ! Avec Nadège, on a beaucoup parlé du rôle. Je tournais le vendredi car je joue un rôle épisodique mais entre temps, elle m’a fait beaucoup travailler, on a beaucoup parlé du rôle, elle a été très proche de moi.
On sent beaucoup de complicité entre vous.
Elle est devenue une personne essentielle dans ma vie et j’ai très envie de continuer l’aventure avec elle. J’ai beaucoup aimé le tournage, ça a été un vrai plaisir. Nadège est devenue mon porte-bonheur, je ne la lâche plus, elle ne se débarrassera pas de moi comme ça !
Tu es tout jeune (26 ans) mais tu as déjà une filmographie impressionnante !
J’avoue que j’ai beaucoup de chance. En dehors du « Petit locataire », j’ai enchaîné « Le correspondant » de Jean-Michel Ben Soussan,, « Cigarettes et chocolat chaud » de Sophie Reine, « Five » d’Igor Gotesman, « Gangsterdam » de Romain Levy avec Kev Adams, Manon Azem, Patrick Timsit, Manu Payet…
Ca va pour toi ?!
Je ne peux qu’être heureux mais « Le petit locataire » restera pour moi une très belle aventure car j’ai rencontré une belle personne, une femme exceptionnelle. Ce film gardera une place à part dans ma vie et j’ai ajouté un membre à ma famille !

 Propos recueillis par Jacques Brachet