Hyères – Théâtre Denis
Jazz à Porquerolles
présente Virginie Teychené Quartet
Vendredi 30 septembre à 20h30

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La chanteuse Virginie Teychené est l’une des nouvelles et grandes chanteuses de jazz. La presse spécialisée ne s’y est pas trompée puisqu’elle ne tarit pas déloge à la parution de chacun des disques et à chacune des prestations de l’artiste dans les festivals de jazz.
Elle est entourée par un trio de rêve, Gérard Maurin (b, g), Stéphane Bernard (p), Jean-Pierre Arnaud (dm). Gérard Maurin en est l’âme directrice. L’orchestre est un ensemble cohérant qui joue collectif enroulant la chanteuse et la portant dans son chant divinement beau.
Nombre de musiciens de jazz se sont emparé des chansons populaires pour en faire des thèmes de jazz, depuis Louis Armstrong avec « La vie en rose » et « C’est si bon », que nombre de critiques lui reprochèrent à l’époque. « Les feuilles mortes » de Kosma, devenues « Autumn Leaves » aux USA fait partie des standards les plus joués. Et la plupart des grands standards du jazz étaient de simples chansons à l’origine. Ce qui fait le jazz, ce n’est pas le matériau, mais l’interprétation. Il était parfaitement logique que Virginie Teychené s’emparent de chansons célèbres aussi bien françaises, que brésiliennes et américaines.
Le Quartet présentera donc les chansons de son dernier disque « Encore » :Jolie Môme, Elle ou moi, Madame rêve, Eu sei que tu amar, Allée des brouillards, Before the Dawn, Oralice, Both Sides Now, C’était bien, A bout de souffle, But not for me, Encore, 13 septembre.
Voici la chronique que j’avais faite de son disque dans Jazz Hot. Disque enregistré en décembre 2014 – avec en plus un invité, Olivier Ker Ourio à l’harmonica – à Pompignan (Gard), d’une durée de 53’ 10’’ et publié par :Jazz Village JV 570081 (Harmonia Mundi)
« Virginie Teychené s’attaque avec bonheur à de célèbres chansons françaises ; gageure risquée pour une jazzwoman, car elle peut s’engluer dans l’interprétation variété de la chose. Pari gagné car ces chansons reprennent vie, deviennent autres par la grâce de la chanteuse et les arrangements du tandem Maurin-Bernard. Virginie chante aussi à la perfection en brésilien et en anglais. Voyons d‘abord les chansons françaises. Sur « Jolie môme » de Ferré elle démarre seule, et là on peut goûter la pureté, la tendresse de sa voix, la délicatesse du vibrato, la perfection de la diction, et des inflexions dont elle a le secret, et qui amènent tout naturellement la chanson au jazz. « Madame rêve » du regretté Bashung nous emmène effectivement dans un rêve éveillé, et l’harmonica de Ker Ourio fait merveille ; il est certainement le plus grand harmoniciste d’aujourd’hui. Dans « Allée des brouillards » de Nougaro et Galliano elle se promène dans cette allée précédent un somptueux solo de Ker Ourio, avant de revenir au tableau. Un formidable « A bout de souffle » écrit par Nougaro sur le « Blue Rondo a la Turk » de Brubeck. Virginie s’en sort avec une apparente facilité, chaque syllabe éclate, avec entre autres un magnifique contrechant main gauche du pianiste et une riche partie de contrebasse. « C’était bien » le petit bal perdu de Bourvil ; Virginie nous fait oublier, ou plutôt non, son chant se superpose à la douce nostalgie de la voix de Bourvil dans notre mémoire. Tant de tendresse et de « saudade » et puis le solo d’harmonica. La chanson est devenue une valse-jazz, un chef d’œuvre. Le « Septembre » de Barbara, toute la douceur de l’automne teinté de regrets s’avance par l’harmonica seule, puis juste la chanteuse et la contrebasse qui s’enrichit d’un contrechant de l’harmonica : on est dans le sublime. Le morceau respire le bonheur malgré l’adieu à l’amour qui s’en va, car on sait qu’il reviendra.

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En français encore « Elle ou moi » de Gérard Maurin et Marcus Malte, un joli texte avec un beau travail du batteur sur un rythme latino, et un arrangement aux petits oignons. « Encore » qui donne son titre au disque, de Virginie Teychené et Gérard Maurin voit celui-ci à la guitare dans une belle intro sur tempo médium lent avec le piano. Entendre comment Virginie tient la note, chose qui se perd chez les chanteuses aujourd’hui. L’hiver peut bien venir dit la chanson, oui, avec une telle musique on sera au chaud.
Les deux titres en brésilien « Eu sei que tu amar » de Moraes et Jobim avec intro guitare-harmonica est une bossa de la meilleure tradition avec le charme caressant de la voix ; « Doralice » d’Almeida et Caymmi est une samba prise vocal batterie, du pur brésilien, un bijou. « Before the Dawn », en anglais, de Bernard et Teychené nous vaut une longue et splendide introduction du piano très Chopin où prévaut la délicatesse et le romantisme du pianiste, puis la chanteuse se mêle au piano : émotion garantie. Le standard des frères Gershwin « But not for me » repose sur une belle partie basse-batterie sans piano. C’est le seul morceau vraiment scatté ; Virignie passe de l’aigu au grave avec une rapidité et une facilité confondantes, en fait elle chante comme si elle jouait du saxophone, avec une décontraction à la Sinatra. Du grand jazz.
La chanson c’est la vie : ce disque est un pur diamant de 100 carats. »
En première partie on découvrira le trio « Un Poco Loco » avec Fidel Fourneyron : trombone, Geoffroy Gesser : saxophone ténor, clarinette et Sébastien Beliah : contrebasse. Ce sont trois improvisateurs qui s’attaquent au répertoire bebop. Ils ont pris ce nom de groupe d’après la composition hétéronyme de Bud Powell, le pianiste majeur du bebop. Ne les connaissant pas suffisamment je reprendrai l’annonce de Jazz Migration:
« Un Poco Loco est la relecture par trois improvisateurs français du répertoire be-bop des années 40 et 50 avec une préférence pour les standards teintés d’exotisme. Avec respect et fantaisie, le trio s’empare de thèmes méconnus ou inattendus pour élaborer un travail raffiné sur le son et la dramaturgie, mêlant au vocabulaire traditionnel leur langage de musiciens baignés dans la culture contemporaine.
Complices de longue date, ces trois musiciens actifs de la scène parisienne (collectifs Umlaut, COAX…) se réunissent ici avec en tête l’élégance du son acoustique de la musique West Coast (Jimmy Giuffre), mais aussi la puissance rythmique et mélodique du jazz des années 30, mêlant au vocabulaire traditionnel leur langage de musiciens baignés dans la culture contemporaine. »
J’ajoute que c’est une musique acoustique et vivante, très facile d’écoute. Nul doute que ce sera une belle découverte.

Serge Baudot
Renseignements : Théâtre Denis, 12 cours Strasbourg, 83400 Hyères. Tel : 06 31 79 81 90.