Vicky a près de 30 ans mais, si elle a un nom célèbre, elle n’est pas arrivée à se faire une place entre son célèbre père Albert Bonhomme (François Berléand), comédien et son non moins célèbre frère, Tim (Jonathan Cohen), animateur de radio.
Alors elle mène une vie oisive, passant du sexe à l’alcool. Jusqu’au jour elle découvre sa voie… et sa voix.
C’est une jolie et, en partie vraie, histoire que nous racontent Denis Imbert, réalisateur et Victoria Bedos (fille de…), histoire écrite à quatre mains où se mêlent fiction et vécu dans une belle atmosphère musicale, entre poésie et humour, émotion et bonne humeur.
Tout droits débarqués du marché du film de Cannes où Guy Bedos les a rejoints en découvrant, très ému, le travail de sa fille (« Je suis fier de toi » lui a-t-il dit). Denis, Victoria et Olivier de Closmadeuc, dit « Banjo » (c’est plus simple, d’autant que son vrai nom est … Urvoy de Closmadeuc de Portzampac !), ont fait escale à Toulon pour nous parler de cette très jolie comédie qu’est « Vicky ».
Denis, comment arrive-t-on à monter un film lorsqu’on n’a encore jamais fait de long métrage et que les deux comédiens principaux… sont des chanteurs ?
Le rôle de Victoria a été déterminant car c’est elle qui a écrit le scénario de « La famille Bélier ». Avant qu’on ne connaisse le succès de ce film, des producteurs en avaient vu des teasers, qui les avaient rassurés sur le fait de son talent d’écriture. Quant à moi, j’ai été longtemps premier assistant réalisateur et j’ai aussi réalisé la série « Platane » avec Eric Judor (Eric et Ramzy) qui avait bien marché.
Votre rencontre avec Victoria ?
Elle date de l’époque de « La famille Bélier ». Je voulais écrire un film autour d’une femme, dans l’univers de la femme et la rencontrant, nous avons eu envie d’écrire ensemble, d’autant que si ce n’est pas biographique, il y a des choses qu’elle a vécu évidemment, entre son père et son frère. Quant à lui faire jouer le rôle de Vicky, le sujet étant très proche d’elle, je n’ai jamais envisagé quelqu’un d’autre, tant je trouvais qu’elle y était légitime.
Victoria, comment avez-vous sauté le pas, étant scénariste et chanteuse mais pas comédienne ?
Je crois que, enfouie en moi, devait être cette envie de devenir comédienne. Mais, sans être frustrée, je ne me voyais pas être la troisième Bedos à venir devant la scène. Pouvais-je me le permettre ? Voilà près de huit ans que je chante, que j’écris mes chansons et que le duo avec Olivier « Vicky Banjo » existe. Finalement, avec Denis, ça m’a semblé naturel. Notre rencontre a été magique et j’ai eu beaucoup de facilité à me livrer à lui car il n’avait aucun jugement sur moi.
J’étais alors en pleine transition dans ma vie, j’avais 30 ans, et j’ai tout de suite accepté.
Denis, est alors venu le choix du partenaire de Victoria.
Là aussi, ça a semblé une évidence lorsque je les ai vus ensemble. Il y avait la complicité, la sensualité (alors qu’ils ne sont pas ensemble !), la connivence. C’est vrai, il n’était pas comédien non plus mais il est plus facile de faire jouer un chanteur que de faire chanter un comédien ! Malgré tout c’était un risque et je n’ai vraiment été rassuré qu’aux premiers rushes !
Olivier, pour vous, jouer a été quelque chose de difficile ou de naturel ?
Ça a été très naturel dans la mesure où, depuis huit ans, avec Victoria, nous sommes sur scène et nous ne faisons pas que chanter. Nous jouons, nous parlons, nous faisons de petits sketches entre deux chansons. Ce n’est pas une suite de chansons mais un vrai spectacle musical. Donc, j’ai l’habitude de jouer. Malgré tout, j’ai quand même été coaché.
Denis, Victoria, comment avez-vous travaillé sur ce scénario ?
– Victoria : J’ai toujours eu une vision d’enfant sur le monde, un regard candide. J’ai grandi très doucement, je suis devenue adulte très tard, à tous les points de vue mais j’ai toujours eu cette liberté de dire et de faire ce que je voulais. Je voulais, comme pour « La famille Bélier », pouvoir écrire des choses graves avec légèreté. Mais je ne voulais surtout pas que ce soit un brûlot sur ma famille, que j’adore.
– Denis : Je voulais écrire une comédie universelle, un peu « à l’italienne », où les sentiments se mêlent, où la comédie fonctionne lorsqu’on est dans l’opposition. Nous avons tous des histoires de famille, nous nous sommes raconté les notres et peu à peu nos histoires se sont imbriquées. Nous avons partagé des choses très fortes.
– Victoria : Denis m’a permis de me canaliser car j’ai une nature très forte. Et puis, il m’a aussi permis de sortir de ma torpeur. Le chant m’avait déjà sorti de cette torpeur, devenir comédienne a fait le reste.
Les seconds rôles sont quand même interprétés par deux beaux premiers rôles !
Oui, il me fallait quelques noms afin de rassurer les producteurs ! Pour le rôle du père, je voulais un comédien de théâtre, investi dans son travail. Je le voulais tendre, protecteur. Quelqu’un dans le style de Michel Bouquet ou… François Berléand qui est un boulimique et dit oui à tout ce qui passe, qui joue et tourne beaucoup et par chance, il était libre. Il a beaucoup de recul et d’humour mais je suis allé le chercher sur le terrain de l’émotion. Et je trouve qu’il est touchant.
Quant à Chantal Lauby, elle a très vite dit oui, d’autant qu’elle a une fille qui chante, Jennifer Ayache (Superbus) et qu’elle connaît bien cette situation, étant très complice avec sa propre fille. Ce qui a été le cas sur le tournage
– Victoria : Lorsqu’elle a vu le film, elle a été très émue car elle s’est retrouvée dans les mêmes situations qu’avec sa fille..
Victoria, justement, comment joue-t-on ces scènes d’amour assez torrides ?
(Elle rit) Si je suis très timide, très pudique dans mes sentiments, je n’ai aucun problème avec la nudité et entre deux scènes je me baladais à poil sans problème. J’ai une « pudeur inversée », je me sens protégée quand je suis à poil ! De plus, je jouais avec des copains de mon frère qui sont aussi les miens, comme Benjamin Biolay, Michel Cohen. Mais je pense qu’ils étaient plus flippés que moi… par rapport à mon frère ! quant aux gémissements, ils n’étaient pas feints car j’avais une côte cassée et j’avais mal !!!
A la limite, j’ai plus été gêne par le baiser avec Olivier car on est copains depuis des années et nous n’avons jamais été dans cette situation !
Olivier – dit Banjo ! – vous formez donc ce duo « Vicky Banjo » avec Victotria. Comment avez-vous réagi lorsqu’on vous a proposé le rôle ?
Ça a été très bizarre car lorsqu’on se retrouvait avec Victoria, on parlait du scénrio qu’elle écrivait, on blaguait, et au fur et à mesure, je retrouvais des situations qu’on avait vécues, des choses dont on parlait. En fait, j’étais très heureux qu’on me permette de participer à l’aventure car c’est finalement notre parcours à tout les deux en dehors du fait qu’il n’y a jamais eu d’histoire d’amour entre nous. D’ailleurs, c’est vrai, le plus difficile pour moi a été ce baiser car il me semblait que j’embrassais ma sœur ! On a mis longtemps à ce que ça paraisse naturel, on ne faisait que rigoler car on était aussi embarrassé l’un que l’autre !
Le film sort le 8 juin. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Denis : Assez confiant même si c’est toujours un grand moment de doute et d’appréhension. Au marché du film à Cannes, il a été bien accueilli, il y a eu de bons retours mais c’est le public qui va juger.
Victoria : C’est vrai que ce qu’on en a entendu et… l’appréciation de Papa, font qu’on peut être confiants sans être totalement rassurés. Et puis, le même jour, sortira notre disque avec les chansons du film et d’autres chansons que nous avons écrites avec Olivier.
Et écrire pour le papa ou le frère ?
On y a déjà pensé… pourquoi pas, maintenant que j’ai leur caution, même si pour mon frère ça a été un peu plus difficile. Mais pour ce film, je n’ai pas voulu en parler à mon père. Je ne voulais pas qu’il soit dans mes pattes !
Prochaine étape ?
Denis : Nous avons signé pour deux autres films. Le second est prêt et va bientôt être tourné. Le troisième n’est pas terminé. J’adore travailler avec Victoria mais aujourd’hui, elle démarre aussi une carrière de comédienne et il faudra qu’elle « vole » sans moi !
Victoria : J’aime varier les plaisir, écrire, chanter, jouer. Mais pour ce premier rôle, j’étais très en confiance, très protégée par Denis. Je commence à recevoir des propositions mais est-ce que j’aurai le courage d’aller au-delà de Denis et surtout de jouer avec le scénario de quelqu’un d’autre, pour lequel je n’aurai pas collaboré ? On verra.
Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos : Philippe Starzomski
Sortie le 8 juin 2016