Deux filles et quatre garçons, d’une élégance impeccable, tout sourire dehors, ce sont les « Voix Animées » qui s’installaient en demi cercle dans le hall du Théâtre Liberté pour un concert intitulé « Sur les pas du Roy René ».
Ce Roy René était détenteur d’un nombre incroyable de titres : Comte de Guise, Duc de Bar, Comte de Provence et de Forcalquier, Roi de Naples, Duc d’Anjou et de Lorraine, roi titulaire de Jérusalem, d’Aragon et de Sicile, Marquis de Pont-à-Mousson , pair de France et fondateur de l’ordre du Croissant. Ce bon Roi René (1409-1480) fut l’un des mécènes les plus importants de la fin du Moyen-Âge. Il aimait la musique, les livres, la peinture, et s’entoura de nombreux artistes. C’est donc une fort judicieuse idée que d’aller sur ses pas.
Le concert est très varié. Les chants seront entrecoupés de textes de poètes de l’époque déclamés à tour de rôle par les chanteurs. C’est ainsi qu’on entendra La Ballade sur le trépas de Du Guesclin, d’Eustache Deschamps ; un texte de Christine de Pisan ; le Printemps, de Charles d’Orléans ; la Ballade des Dames du Temps Jadis et la Ballade des Seigneurs du Temps Jadis, de François Villon ; un extrait d’Utopia, de Thomas More. Tous textes dits avec, autant que faire se peut, l’accent reconstitué d’époque, avec parfois une petite pointe québécoise, ce qui donne un tour plaisant à la performance.
On entendit des musiques des quinzième et seizième siècles de Josquin des Prés ; de Pierre de La Rue, Autant en emporte le vent (rien à voir ni avec Margaret Mitchell, ni avec le film !) ; un chant pour la Reine de France de Jean Mouton ; le psaume 135 de Salomone Rossi ; Madonna mia fa, d’Adrian Willaert avec des paroles amusantes : pour séduire une femme offrez lui un coq ; Lodovico Agostini ; et j’en oublie… Répertoire très varié qui ne pouvait qu’emporter l’adhésion et nous offrit de belles découvertes.
Fin quinzième, début seizième siècle on arrive à l’apogée de la musique vocale polyphonique, que les Voix Animées, groupe a capella, maîtrise parfaitement, utilisant le canon, le contrepoint, les tenues, dans un partage roboratif. Le choix des timbres est parfait et très captivant, avec peut-être la voix de la soprano parfois trop en avant. On sent le plaisir de chanter, d’offrir la musique, en toute simplicité, dans le culte de la beauté.
Et ces « Voix Animées » possèdent pas mal de cordes à leur arc puisque l’Ensemble a plusieurs répertoires, actions et projets en réserve. Il ira même chanter en Chine en novembre. Mais « leur répertoire de prédilection est celui de la grande polyphonie de la Renaissance, le « Stile Antico », qui s’étend de la fin du Moyen-Âge aux prémices du Baroque. »
Cet ensemble de chant a cappella fut créé à Paris en 2008 par Luc Coadou et la mezzo-soprano Laurence Recchia qui en est maintenant l’administratrice, tandis que Luc Coadou en est le directeur musical. Notons que depuis 2010, les « Voix Animées » sont établies à Toulon et qu’elles ont déjà à leur actif trois disques et qu’elles en seront à 200 concerts cet automne.
Succès oblige, les « Voix Animées » partait le soir même pour un concert à Londres au Victoria and Albert Museum.
Serge Baudot
04 98 00 56 76)- www.theatre-liberte.fr