Jazz Azur à La Cadière d’Azur
Ça jazze au village !

A

Il est à La Cadière d’Azur un grand philanthrope, un doux personnage courageux et généreux, qui depuis 29 ans œuvre pour le jazz, avec pour nouvelle ambition, celle d’arriver à boucler les trente ans, et même plus. Hélas, crise oblige, les subventions ont disparu, sauf celle de la Municipalité, qui a toujours défendu la scène jazz, et la culture en général. Alors avec ses glorieux bénévoles de « Jazz Azur », et quelques amis mécènes, Jacques Julien lutte avec ténacité pour continuer à programmer des concerts de jazz dans ce riant et vivant village qu’est La Cadière d’Azur. Avec des concerts de haute qualité !
En ce samedi soir de février, Jacques Julien avait réuni un quartette de musiciens qui ont un lien privilégié avec « Jazz Azur » pour fêter l’anniversaire du batteur ; ce sera pour un soir le « Gilles Alamel Birthday 4tet » avec Daniel Huck au saxophone alto et au chant, Robert Persi au piano, Marion Ruault à la contrebasse.
Le batteur Gilles Alamel a fait ses premières apparitions à « Jazz Azur » ; il est devenu un excellent batteur, avec un chabada imperturbable, une touche des baguettes claires et précises, parfait au soutien et à la relance, une mise en place impeccable, le tout avec la décontraction des grands batteurs. Marion Ruault est pratiquement née de Jazz Azur, où sa chanteuse de mère, Kristin Marion, s’est souvent produite. La jeune fille est de l’étoffe des vrais bassistes de jazz : une attaque tranchante et ronde, un son gros et pur, un engagement total, on voit ses lèvres chanter les notes dans les solos. Une musicienne à suivre. Le pianiste niçois Robert Persi est lui aussi un habitué de « Jazz Azur » ; il enseigne au CNR de Nice ; il a déjà un beau passif de jazzman ayant été longtemps le pianiste attitré de Claude Nougaro, puis de Christian Escoudé (g), et Olivier Ker Ourio (hca)…Pianiste lyrique, expansif, il s’envole dans de longues phrases expressives qui touchent au cœur. En parfaite osmose avec le batteur et la contrebassiste pour une rythmique aux petits oignons qui ne pouvait que propulser Daniel Huck dans ses délires si captivants. En plus d’être un brillant saxophoniste, une encyclopédie du jazz, il est, avec le trompettiste Jean-Loup Longnon, l’un des plus grand scatteurs d’aujourd’hui. Impossible de résister à son swing, et à ses acrobaties verbales. A l’alto on pourrait dire qu’il est un mélange de Charlie Parker et Jackie McLean : un son d’enfer, un phrasé diabolique, un lyrisme et une expressivité enflammés. Avec lui pas de déballage technique, du jazz pur et dur, du fond de l’âme. Il y eut de grands moments comme avec ce « Body and Soul » très émouvant que Daniel Huck dédia à sa femme, Monique, également chanteuse, qu’on eut déjà le plaisir d’entendre à La Cadière. Il nous émut encore et nous enchanta sur un magnifique « You’ve Changed », là l’émotion était au rendez-vous ; et quel chanteur ! idem avec « What is this thing called love ». Daniel est un habitué de « Jazz » Azur. Je me souviens que lui aussi était venu y fêter son anniversaire il y a quelques années.
Ajoutons l’humour et le sens de la fête de l’altiste et on comprendra que la soirée fut belle. Elle se termina par un bœuf de circonstance puisque parmi le public se tenaient le trompettiste anglais, Inigo Kilborn, brillant disciple de Chet Baker, et la chanteuse Valérie Pecot du groupe « Quai des brunes ». On eut droit à un chaud partage sur le célèbre «It don’t mean a thing if it ain’t got that swing » de Duke Ellington avec les « dou wap » de circonstance, bouquet final de cette chaleureuse soirée, menée par un quartette d’un soir, qu’on aimerait voir perdurer.

Serge Baudot
Renseignements : 06 81 82 57 57 – 06 11 72 32 77