Francis Huster est devenu « le sociétaire » de ce magnifique et unique festival de théâtre de la région « In Situ » à Carqueiranne puisqu’il y revient chaque année, toujours avec le même succès.
Lorsqu’on connaît la boulimie de travail de l’artiste, il est facile pour lui de proposer une pièce puisqu’il en joue quelquefois deux ou trois dans la même année.
Passionné, on ne peut l’être plus que lui et c’est un plaisir que de retrouver l’artiste et l’ami au fil des mois dans différents théâtres de Nice à Marseille. Et dans différents rôles.
Après nous avoir offert cet hiver au Théâtre Galli de Sanary « L’affrontement » avec Davy Sardou, le voici avec « Le joueur d’échecs » cette année à Carqueiranne.
La mise en scène est encore signée de Steve Suissa qui est devenu un collaborateur et ami fidèle du comédien.
Cette pièce a été montée d’après la dernière nouvelle qu’ait écrit Stephan Sweig puisque datant de 1942, à quatre mois de son suicide.
Elle se passe sur un bateau où le narrateur va raconter l’affrontement (encore !) entre le champion du monde d’échecs Mirko Czentovic et un aristocrate autrichien qui fut emprisonné par les nazis. Durant cet isolement, tombant sur un manuel d’échecs et pour passer le temps, il apprit à jouer à ce jeu et, apprenant la présence du champion sur le bateau, décide de le défier.
A travers ces tête à tête, il raconte son histoire.
C’est donc Francis Huster, seul en scène, qui raconte ce moment de vie à huis clos sur un bateau. Conteur magnifique, Huster joue tous ces personnages, à la fois fougueux et grave, pudique et emporté. Il joue sur toute une palette de sentiments magnifiquement et on se laisse porter par sa voix, son omniprésence, dans cette histoire hors du commun.
La mise en scène est donc signée de Steve Suissa avec qui Francis a travaillé sur « L’affrontement » de Bill C Davis et « Bronx » de Chazz Palmenteri. Steve, qui avait déjà mis en scène « 24 heures de la vie d’une femme » su même Sweig et qui travaille également beaucoup avec Eric-Emmanuel Schmitt.
Il était ce soir-là « In situ » et Francis ne tarit pas d’éloges sur lui :
« J’ai toujours bien partagé mon travail de comédien et celui de metteur en scène. Lorsque je ne suis que comédien, je fais totalement confiance au metteur en scène et Steve Suissa fait partie de cette génération qui pense en premier lieu au bien être de son acteur. Lorsqu’on tombe sur un metteur en scène comme lui, à la technique imparable, on ne le lâche pas car il a un vrai regard. Il est comme un chef d’orchestre : Ce dernier ne se permettra pas de dire au virtuose : « Joue comme ça » car il n’a rien à lui apprendre au niveau musical mais s’il n’y a pas de chef d’orchestre, le virtuose, aussi grand soit-il, ne sait pas jusqu’où il peut aller.
Ce qui me plaît chez Steve Suissa c’est qu’il est un docteur de l’âme. Il doit découvrir avant l’acteur le problème que celui-ci va rencontrer par rapport au texte, à l’histoire, afin de pouvoir le dévier de ces obstacles. Il n’est pas plus intelligent que l’acteur mais il a l’avantage de connaître celui-ci et donc, de pouvoir deviner ce qui va le gêner et lui proposer des solutions ».
Durant le repas et malgré le stress habituel qu’a Francis avant de monter sur scène, plus un rhume arrivé à l’improviste, on sent la complicité entre les deux hommes qui, déjà, ont des projets communs en tête.
Ce fut une belle soirée sous une lune pleine, et, le vent étant tombé, l’on put apprécier cette magnifique histoire contée par un Francis Huster magistral.
Jacques Brachet