Ciné, télé, théâtre…
Ils ont tout fait, les bougres… et continuent d’ailleurs, tant leur talent n’a d’égal que leur popularité, on a pu s’en rendre compte au Théâtre Galli de Sanary devant une salle pleine, venant les applaudir dans une pièce signée Christine Delaroche : « Tout reste à faire »
Une heure et demi de ping pong verbal faisant mouche à tous les coups et, dix minutes après leur sortie de scène, frais comme des gardons, les voici devant moi pour une interview croisée.
« Christine Delaroche – me confie Henri – c’est une complice de toujours. Lorsque j’ai un rôle pour elle dans une pièce, je l’appelle. Lorsqu’elle écrit une pièce, elle m’appelle. Nous nous retrouvons avec toujours le même plaisir, même si elle vit souvent du côté de Marseille.
C’est important ?
Vous savez, ce métier est fait de clans. On se crée une famille de gens avec qui l’on aime jouer, avec qui l’on aime être pour se retrouver, jouer, rigoler… Des gens avec qui on sait qu’on va bien s’entendre, ce qui est important lorsque, par exemple pour cette pièce, on va se retrouver tous les soirs jusqu’au 6 juin ! Imaginez si l’on ne s’entend pas : ça devient vite infernal.
Franck, vous avez rejoint l’équipe en cours de route, remplaçant Marcel Philippot souffrant. Est-ce difficile ?
Oui et non. C’est difficile d’arriver sur une pièce où tout le monde est déjà rodé. Il y a toujours un peu de peur. Mais déjà, avec Henri, nous nous connaissons depuis près de 20 ans. Nous avions joué une pièce de Marc Camoletti « Darling Chérie » et nous sommes restés amis. J’avais donc déjà un repaire. Et puis il se trouve que Jane Desmond, qui joue la belle-fille d’Henri est venue remplacer au pied levée la comédienne qui jouait le rôle. Elle a eu deux jours pour l’apprendre et nous sommes à seulement notre troisième soirée. Donc, on se sent moins seul !
Et vous Henri, est-ce que ça vous perturbe de changer de partenaire?
Toujours un peu car évidemment, chacun a sa façon de jouer. Mais je dois dire qu’il y a tellement de complicité avec Franck que je me sens même mieux qu’avec Marcel, ce qui n’enlève pas son talent à celui-ci ! Quant à Jane, elle a été tellement vite dans le rôle, dans l’action que rien ne m’a en fait perturbé. Et vous jamais, aujourd’hui je suis un vétéran et j’en ai vu d’autres !
Vous venez tous les deux du théâtre même si vous avez bifurqué sur ciné et télé. Vous, Henri, vous avez été de du café-théâtre de Bouteille et Coluche ?
Oui mais n’oubliez pas qu’avant ça j’étais chez Vilar ! J’ai joué Brecht, Sophocle, de vraies tragédies. Et puis je me suis essayé au cabaret pour savoir si je pouvais faire rire… Et ça a marché !
Et vous Franck ?
J’ai débuté avec Claude Piéplu, que je considère comme mon mentor, mon parrain. Nous avons joué ensemble six cents fois « Six heures au plus tard » de Marc Perrier ! Et puis j’ai joué aussi quelque autres pièce trois, quatre cents fois.
Cinéma, télé… Comment est-ce venu ?
HENRI : Naturellement. Petit rôle après petit rôle, j’ai fait pas mal de cnéma, entre autre avec Georges Lautner qui était un fidèle. Et puis il y a eu l’énorme succès de « Rabbi Jacob » de Gérard Oury, où je jouais Salomon, le chauffeur d’un de Funès raciste. Ca a été un phénoménal succès.
Aujourd’hui, on ne me propose plus rien. Les producteurs doivent penser que je suis mort ! Heureusement qu’à la télé, ils ont de temps en temps besoin d’un vieux !
Mais bon, aujourd’hui je ne m’en fais plus. J’ai toujours vécu, et plutôt bien, de ce métier, j’ai fait beaucoup de belles choses et je continue à travailler. Que demander de plus ?
FRANCK : Je n’ai pas fait énormément de cinéma mais par contre, beaucoup de télévision. J’ai joué dans « Arsène Lupin », « RIS », Section de recherches et surtout « Une femme d’honneur » qui ralliait plus de dix millions de téléspectateur par épisode. C’était énorme.
Il y a aussi « Une famille formidable » avec Bernard Lecoq et Anny Dupereyet je pars d’ailleurs bientôt rejoindre l’équipe à Strasbourg.
Côté cinéma, mon souvenir le plus cuisant c’est « A nos amours » de Pialat. J’ai tourné dix jours et au montage, toutes mes scènes ont été coupées !
Pour en revenir à Anny Duperey, j’ai joué avec elle au théâtre « La folle de Chaillot ». J’en garde un merveilleux souvenir
Vous avez aussi en commun le doublage !
FRANCK : Oui, j’en ai fait beaucoup et non des moindres. J’ai été la voix de Bras Pitt, d’Andy Garcia, Nick Nolte. J’ai un autre beau souvenir. La comédienne Perrette Pradier me demande de venir doubler un film retrouver inédit pour doubler… Montgomery Clift ! Pas mal, non ?
HENRI : Moi, c’est plutôt dans les films d’animation, peut-être parce que j’ai une tête de comique ! J’ai donc fait entre autres Rex le petit dinosaure de « Toy Story », Plouc dans « Mille et une pattes » ou encore Underlingk dans « Vaillant, pigeon de combat » ! C’est très agréable à faire.
En fait, tous les deux, votre vrai lieu de vie, c’est le théâtre ?
HENRI : Oui, j’adore la scène, j’aime voir briller les yeux des premiers rangs, j’aime entendre rire le public, sentir sa réaction car elle est immédiate au théâtre. Et chaque soir on joue différemment. Sans compter qu’on est seul maître à bord. Quand le metteur en scène nous a lâchés, on fait ce qu’on veut. Là, on n’est pas coupé comme mon pauvre camarade !
FRANCK : Le théâtre est un art à part et un art de vivre ensemble. Il y a des liens de complicité qui se tissent et c’est pour cela qu’il est important qu’on s’entende dès le départ avec ses partenaires. Déjà dans un théâtre on est dans un cocon et lorsqu’on est en tournée on vit dans une bulle durant des semaines. »
C’est donc ce que vont vivre nos deux amis durant ces six mois.
On ne peut que leur souhaiter la même écoute et le même succès qu’à Sanary.
Propos recueillis par Jacques Brachet