TOULON – Hôtel des Arts
Enki BILAL, le magnifique

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Dessinateur, peintre, auteur de BD, créateur d’affiches, décorateur, réalisateur…
Ce Yougoslave nommé Enki Bilal est un artiste dans tous les sens du terme.
Artiste original s’il en est car son monde est tellement particulier qu’il en est devenu inclassable… Ce qui n’est pas un mal, bien au contraire.
Son univers est fait de violence et de poésie, d’amour et d’humour, plutôt noirs tous les deux, de fiction et de science-fiction et son travail est souvent visionnaire.

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Cet artiste complet, Riccardo Vasquez directeur des Affaires Culturelles de la Ville de Toulon et directeur de l’Hôtel des Arts, a voulu lui rendre hommage avec cette rétrospective inattendue puisque c’est la première fois qu’un créateur de bande dessinée entre en ce lieu dédié à l’art contemporain. Et il y a tout à fait sa place, comme il nous l’explique :
« C’est non seulement un dessinateur de BD mais aussi un artiste complet qui fait partie intégrante du monde de l’Art. De plus, son œuvre est méditerranéenne. Homme de mémoire, dont la réflexion politique est reconnue et c’est tout ce que nous défendons ici. »

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Cette exposition, précisons-le, est en grande partie due à Pascal Orsini, auteur de BD et créateur du Festival de BD de Solliès-Ville. Commissaire de l’exposition, il a été la passerelle entre Enki Bilal et l’Hôtel des Arts.

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Sur trois étages, nous découvrons donc son oeuvre, non exhaustive tant elle est riche, et son monde éclectique puisque, de salle en salle nous pouvons admirer des planches de ses bandes dessinées, ses peintures, ses dessins, ses encres de Chine, ses pastels, des affiches de spectacles, des clips qu’il a réalisés pour Birigitte Fontaine (« Crazy Horse », extrait de son album « J’ai l’honneur d’être ») ou Tcheky Karyo (« Crédo », dont les décors sont ceux utilisés dans sa BD « Animal’z »), un auto-reportage dans son atelier, un condensé des trois films qu’il a réalisés. : « Bunker Palace Hôtel », « Thyko Moon » et « Immortel »…

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Une impressionnante et superbe exposition que nous avons eu le privilège de découvrir en privé, en présence de l’artiste qui nous l’a commentée.
En dehors du fait qu’il est un grand plasticien, l’on a également découvert un homme d’une grande intelligence, d’une belle acuité, exigeant, réfléchi, engagé et cohérent dans tout ce qu’il entreprend. Un intellectuel à dimension humaine !
C’est un marginal de génie, totalement inspiré, sa source d’inspiration, nous avoue-t-il, étant l’Humain et ses stigmates du temps, avec ses souffrances, ses douleurs, ses incertitudes mais aussi sa sensualité et toujours avec l’espoir au bout du chemin.
« En fait -dit-il en riant – je ressasse toujours les mêmes thématiques. J’essaie de régler des problèmes sans jamais savoir vraiment lesquels ! »
Son oeuvre est violente et noire mais il dit encore avoir « l’amour et l’humour noir avec malgré tout, toujours, la confiance et l’espoir en l’humain ».

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L’on découvre ainsi des portraits saisissants de Georges Perec, de Montaigne, des illustrations de nombre de ses livres (« Bleu sang », « Le sommeil du monstre », « La femme piège », « Animal’z »)…) de superbes acryliques-pastels créés pour l’affiche du ballet d’Angelin Preljocaj « Roméo et Juliette », une série de toiles de femmes à travers  les décennies pour le livre « Un siècle d’amour », en immense format, la couverture de son dernier album « La couleur de l’air » et puis des toiles totalement inspirées par le Musée du Louvre dans lequel il a eu l’autorisation de se faire enfermer une nuit. Le musée vide de monde mais peuplé de fantômes, il a réalisé une série de photographies qu’il a retravaillées en mettant en situation des peintures, des personnages et des portraits, mêlant photo et acrylique pour une série d’œuvres surréalistes. « Les fantômes u Louvre » se sont matérialisés dans ses toiles.

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On le voit, son génie, son imagination sont infinis et ses projets nombreux et variés :
« Après un projet de film ambitieux, mais certainement trop ambitieux pour être réalisé, je vais certainement réaliser un film d’après « Animal »z » et j’ai un autre projet de docu-fiction, qui devient d’ailleurs de plus en plus « fiction-docu » autour d’un essai d’un journaliste américain Alan Weisman, écrit en 2007 qui s’intitule « Homo disparitus ». Il essaie d’imaginer la terre dans deux mille ans alors que l’homme a disparu… Que reste-t-il des vestiges humains, de la faune, de la flore ?
Immense question, sujet passionnant car il y a tout à créer dans la mesure où nous ne pouvons pas savoir ce qui restera de nous dans un temps si lointain.
Plus près de nous, je suis invité à Tokyo en 2016 pour deux expositions : l’une de tableaux inédits et en parallèle, une grande rétrospective dans l’un des plus grands musées de Tokyo ».

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Cet homme qui respire la sagesse et la sérénité n’a pas fini de nous surprendre et de nous séduire.

Jacques Brachet

Enki Bilal « Oxymore & more », jusqu’au 4 janvier – Hotel des Arts
236, Bd Ml Leclerc – Toulon – www.hdatoulon.fr – 04 83 95 18 40

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Photos :
1. Enki Bilal devant un calque à la mine de plomb et pastel pour le livre « Bleu sang »
2.Ricardo Vasquez et Pascal Orsini
3. Ricardo Vasquez et Enki Bilal
4 & 5 : Planche de BD première manière du livre « Partie de chasse »
6. « Un siècle d’amour »
7. Affiches des trois films qu’il a réalisés
8 & 9 : Images des deux clips qu’il a réalisés : « Crédo » avec Tcheky Karyo et « Crazy Horse avec Brigitte Fontaine
10 : Enki Bilal devant une image de « Animal’z », crayon gras et pastel
11 : Calques pour « Bleu sang »
12 : Peinture mixte photo et pastel
13 : « Chessboxer » & « Fin de partie », acrylique sur toile

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