Eh oui, il y a des moments magiques dans la vie où le spectacle est superbe, où le producteur vous reçoit bien (en l’occurrence Franck Bessaguet, citons-le car ça devient rare !) et où les artistes sont heureux de vous retrouver, de parler avec vous et de faire des photos…
Grâce à « Mozart », ce moment rare s’est réalisé.
En effet, Mozart revenait donc au Zénith-Oméga de Toulon en version symphonique avec le somptueux orchestre et les chœurs d’Ukraine et j’en profitai pour retrouver Mozart, alias Mikelangelo Loconte et Salieri, alias Florent Mothe.
Notre première rencontre remonte quelques mois avant la première de la comédie musicale.
C’était à Marseille pour la promo de la tournée qui allait suivre et c’était le jour de mon anniversaire. On avait donc fêté ça avec eux et c’est un joli souvenir.
Je n’avais plus rencontré Florent mais ma route s’est souvent croisée avec Mikelangelo et c’est toujours avec un grand plaisir qu’on se retrouve.
Une heure dans le calme de leur loge. Ce fut un grand plaisir.
Mikelangelo Loconte : un artiste déterminé
« Mikelangelo, comment un jeune Italien se retrouve en France, puis en Belgique, puis au Brésil avant d’intégrer l’équipe de « Mozart » ?
J’ai toujours aimé chanter, j’ai toujours su que je ferais de la musique mon métier car depuis tout petit, je n’aimais que les choses artistique : musique, théâtre, dessin… Et j’aimais déjà mêler la musique avec le théâtre.
Qu’est-ce qui a été le déclencheur ?
La chanteuse Rita Pavone.
Je lui dois beaucoup car c’est elle qui m’a découvert, ou presque. Elle organisait chaque année un concours intitulé « Festival des Inconnus ». A l’époque, je me sentais incompris dans ma musique. Je ne faisais pas des choses formatées, j’étais plutôt tourné vers le rock, ce qui n’était pas très prisé en Italie. On disait que j’en faisais trop.
Lorsqu’elle m’a écouté elle m’a dit que j’était tout à fait dans la mouvance du Swinging London, sur scène j’étais très efficace… mais pas pour l’Italie. Elle m’a conseillé d’aller ailleurs.
Et puis, j’ai gagné son concours à l’unanimité des artistes présents qui votaient. Elle m’a alors pris sous contrat. Mais, elle s’est rendue compte que ça ne marcherait pas en Italie et m’a rendu mon contrat en disant qu’elle n’était pas à la hauteur.
Courageux et honnête de sa part !
Oui, c’est une femme incroyable qui m’a vraiment donné confiance en moi.
Je suis donc parti vers la Suisse, puis la Belgique où j’ai rencontré des gens qui avaient un studio et avec qui je pouvais faire jusqu’à quatre heures de musique par jour. J’ai vraiment appris car je faisais du live, je mêlais théâtre et musique. Je passais dans un club qui n’existe plus « Le Lion Rouge » qui appartenait à un fou génial : Bouldou. Et j’ai joué là avec de grands musiciens.
Tu étais encore loin de la France ?
Pas tant que ça puisqu’un soir Zazie m’entend. je chantais dans un bistrot. Elle était avec Jean-Pierre Pilot, musicien, producteur (Johnny, Indochine, Wilhem, Bashung…) qui me prend en photo et l’envoie à Dove Attia qui était en plein casting. Il lui répond aussitôt : « J’ai trouvé mon Mozart… Est-ce qu’il chante bien au moins ? ». C’est comme ça que ça s’est fait.
Mozart, c’était loin de ton monde musical ?
Pas du tout, d’abord parce que c’est un opéra rock et puis parce que j’ai toujours aimé la musique classique et lorsque je compose, il me vient souvent des harmonies classiques, ce qui avait d’ailleurs beaucoup plu à Alec Mansion ! C’était donc très cohérent avec mon personnage et ce que je veux faire
Aujourd’hui, les jeunes chanteurs se contentent de faire du son avec des arrangements en croix. C’est souvent la chanson qui gagne alors que l’important c’est « la » musique. Je pense qu’il est essentiel d’avoir un projet musical et qu’on se foute de ce qu’en pense la télé et les radios crochets !
Donc depuis cinq ans tu es sur « Mozart ». N’es-tu pas lassé ?
Ce n’est pas cinq mais six ans que je m’y suis investi car il y a l’année de préparation.
Mais je n’en suis pas lassé car il y a d’abord eu la création du spectacle puis l’opéra-rock que nous avons joué partout et aujourd’hui avec un orchestre philharmonique ça prend une nouvelle dimension. Mais c’est vrai qu’il faut que je pense à passer à autre chose même si je me laisse un peu porter par les événements !
Et c’est quoi, cet autre chose ?
Mon disque avec mes musiques, mes compositions. J’y suis depuis quelques années mais jusqu’ici ma maison de disques n’est pas fan de ce je leur montre alors qu’elle me propose « le tube de l’été » dont je n’ai rien à faire. Je ne suis pas prêt à faire n’importe quoi et c’est là la difficulté. Mais ça ne me tracasse pas plus que ça. Je me comporte comme quelqu’un qui sait qu’il va gagner…
C’est à dire ?
Je sais tout au fond de moi qu’un jour ma musique va devenir célèbre et je ne veux pas négocier. Ce sera ce que je veux où ce ne sera pas. Où ce sera ailleurs.
En fait qu’est-ce qu’il va y avoir sur ce disque ?
D’abord des musiques à moi et puis des collaborations que j’ai choisies comme Boris Bergman, Zazie et Christophe Maé qui m’ont écrit une chanson. Enfin, au départ c’est Christophe qui devait la chanter mais ils me l’ont donnée. Il y a aussi une version anglaise et rock de « la javanaise » ! Elle avait été faite pour Ricky Lee Jones version country mais ça n’allait pas. Je l’ai revue en rock et elle a été validée par Jane Birkin. Il y a aussi une chanson qui s’appelle « La culotte » et dont la maison de disques ne veut pas entendre parler… Mais je te jure que je ferai le disque avec ma culotte !!!
Ce sera un album de style rock anglais, multi-langue avec entre autre un duo chanté en deux version : français-portugais, anglais portugais avec Luyanna, une chanteuse portugaise qui a une voix incroyable. Il n’y a qu’elle pour pouvoir chanter cette chanson ! C’est un animal.
Tu nous donnes envie. Et c’est pour quand ?
Le plus tôt possible. Je vais très rapidement entrer en studio car j’ai exigé d’enregistrer en studio et avec des musiciens et non avec des ordinateurs !
Tu es vraiment déterminé !
Ce qui compte, c’est la foi, pas la religion. On en a un bel exemple aujourd’hui. D’ailleurs je fais des concerts dans des églises de différentes religions !
Tu as beaucoup de chansons ?
Une cinquantaine. Je prendrai les plus séduisantes, celles qui me conviennent le mieux, pour qui j’aurai le coup de cœur. Tu sais, je suis un chanteur de laboratoire. J’écris beaucoup, je jette beaucoup, je vais là où je ne sais pas, ça peut me mener quelque part ou nulle part. »
Florent Mothe : « Je continue ma route »
Le beau, ténébreux et ambigu Salieri est en fait un garçon charmant et sympathique. Dans la vie il est tout autre qu’à la scène où, dans ce rôle, il se déchaîne. c’est calme et posé que je le rencontre un beau sourire à la clef qui, durant la transformation, deviendra quelque peu sardonique !
Florent, parle-nous un peu de ton cheminement avant d’avoir rejoint cet opéra-rock ?
J’ai d’abord fait des études de commerce mais parallèlement, pour le plaisir, je faisais de la musique. Je jouais dans des orchestres, je chantais dans une chorale. j’ai même fait une comédie musicale lorsque j’avais 18 ans, « L’alphomega », une sorte de spectacle post apocalyptique, virant sciences-fiction !
Après ça, je suis devenu analyste de vente et je suis allé travailler à Toronto.
Poussé par tes parents ?
Pas vraiment. ils m’ont poussé à faire des études et je leur en sais gré mais après ça, ils m’ont laissé agir à ma guise.
A Toronto, je gagnais bien ma vie et à côté de ça, je faisais toujours de la musique. Je faisais de la scène, des premières parties sur des spectacles gratuits, j’ai chanté dans des restaurants.
Ça aurait pu durer longtemps !
Oui mais, au bout de trois ans j’étais un peu lassé d’un travail qui ne me passionnait pas plus que ça. J’ai commencé à faire des maquettes que j’ai mises sur My Space.
C’est à ce moment-là que tu as enregistré « Bohémian Rhapsodie » de Queen, que tu as repris plus tard chez Patrick Sébastien dans « Les années bonheur » ?
Oui mais très différemment car c’était en guitare-voix, ça n’avait rien de la somptueuse version de Freddy Mercury ! Mais j’étais fou de joie de rencontrer Brian May et qu’il accepte ma version ! Je chantais aussi Piaf, Aznavour car je voulais aussi chanter français et que la bas ils ne connaissent qu’eux ! J’aimais aussi chanter jazzy et chez Aznavour, certaines chansons le sont. mais je ne suis pas un puriste.
Alors, Mozart ?
C’est lui qui m’a contacté !!!
Enfin, plutôt Dove Attia après m’avoir vu sur My Space. Il m’a demandé si je pouvais venir en France faire le casting.
J’étais alors dans une période où je me posais beaucoup de questions : continuer de chanter pour le plaisir ou me lancer. J’avais fait le tour de mon boulot et je me suis dit qu’il était temps de me décider. Je suis revenu en France, j’ai été pris au casting, je suis reparti à Toronto pour quitter mon boulot, dire au revoir aux amis et je suis revenu. Je ne l’ai pas regretté même si j’ai un peu la nostalgie de mes années de jeunesse et si mes amis me manquent. Je vais les voir de temps en temps.
Aujourd’hui tu as fait un album « Rocking chair » et tu reprends Mozart en Version symphonique… Pas de saturation ?
Comment pourrais-je être saturé par cette belle aventure. Nous avons joué 350 fois l’opéra-rock et aujourd’hui nous avons la chance inouïe d’avoir un orchestre symphonique ! Nous aurions tort de nous plaindre, c’est un véritable bonheur.
Ce premier album « Rocking chair », a-t-il été difficile à sortir ?
Pas vraiment avec simplement la difficulté de penser que ce n’était pas mon premier mais mon second, puisqu’il y avait eu celui de Mozart et j’avais un peu peur de la réaction du public qui avait apprécié ma prestation. Finalement tout s’est bien passé et il a été bien reçu.
Je suis déjà sur le vrai deuxième cette fois et cela me semble plus facile. J’ai aujourd’hui beaucoup plus de liberté, mon champ des possibles est plus large. Sur le premier album, j’attendais qu’on m’apporte des chansons cette fois j’écris tout, avec des collaborations bien sûr mais des gens que je choisis. Il y a donc moins de pression, naturellement et je pense qu’il sera plus personnel, plus moderne avec en plus Warner derrière moi qui m’aide et ne m’impose rien
C’est rare aujourd’hui !
Oui mais tu sais, c’est à l’artiste d’apporter son univers, de savoir ce qu’il a envie de faire. Évidemment, la maison de disques a une logique de profit mais les vrais succès se font lorsque l’artiste sait où il va, sait prendre des risques et a un univers original. Sinon tout le monde peut faire un disque, chanter n’importe quoi, un peu comme un karaoké.
Où en es-tu de ce disque ?
J’ai déjà une dizaine de chansons avec une vraie direction artistique. Je travaille avec L.I.M,un rappeur avec qui je m’entends bien. Nous avons écrit les textes ensemble. Le réalisateur est Renaud Robillot.
Si ça n’avait pas marché, aurais-tu pu faire une émission comme « The voice » ?
Au Canada on me l’a proposé mais je ne suis pas fan de ça et j’avoue que ça ne m’est pas venu à l’esprit. C’est peut-être aussi une histoire d’opportunité Je suis par contre admiratif de ceux qui le font. Et puis, si je n’avais pas eu Mozart, qui dit qu’un jour je ne l’aurais pas tenté ?
La scène en solo ?
J’ai fait une petite tournée avec le duo Fréro-Delavega. Maintenant je prépare ce disque et après je continuerai ma route ! »
Reportage Jacques Brachet