Sylvie GAUTIER : « Je viens de nulle part ! »

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Karine (Céline Salette) est femme de ménage le soir tard dans des bureaux. Elle vit seule avec son fils Ziggy (Thomas Gioria) et a formé un quatuor amical et indissociable avec Adèle (Camille Lellouche), Maryse (Souad Amidou) et Djamila (Eye Haidara). Complices, elles s’épaulent  car elles ont toutes des vies compliquées et cabossées.
Lorsque l’entreprise dans laquelle elles travaillent, est reprise, les filles s’insurgent contre le nouveau patron qui veut les obliger à en faire plus, loin de chez elles et pas mieux payées. Elles nomment Karine pour les défendre mais elles ne savent pas qu’elle est illettrée et qu’elle a toujours été aidée par son fils.
C’est pour elle un cataclysme car elle a trop honte de dire qu’elle ne sait pas lire mais elle veut aider ses collègues en allant affronter le patron.
« Brillantes » est le premier film de fiction et le premier long métrage de Sylvie Gauthier, plus habituée à écrire des documentaires. Et c’est une réussite, car il est bouleversant et le choix des comédiennes est épatant. A ajouter au quatuor, Julie Ferrier en cheffe qui est prise entre le patron et les employées, à Bruno Salomone, pêcheur, qui tombe amoureux d’une Karine qui n’ose pas avouer son illettrisme et à Thomas Gioria, très protecteur, plein d’amour et d’affection pour sa mère

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Tous dans leurs rôles, sont magnifiques, émouvants. Le film est tout en tendresse et en même temps, montre la difficulté de certaines femmes, dépendantes d’un patron, à s’en sortir, la pression et le chantage étant les armes de ce dernier.
On sort vraiment bouleversé de ce film et l’on retrouve cette jeune réalisatrice toute en pudeur, un peu effrayée devant affronter pour la première fois le public… et la presse, ce dont elle n’est pas habituée, cachée derrière ses documentaires !

« Ce n’est pas un film sur l’illettrisme, même si c’est un des sujets du film car j’ai été moi-même surprise de me rendre compte du nombre de personnes illettrées, encore aujourd’hui, malgré la scolarité obligatoire. Surtout dans ce genre de métier que l’on ne fait pas par envie ou passion mais par obligation car on ne peut pas faire autre chose.
Comme ce film me sort des documentaires je voulais faire un film positif, montrer que la solidarité des femmes n’est pas un vain mot. Et poser des questions universelles sur ces femmes comme : comment s’en sortir, lutter, se révolter contre la vie et ses inégalités ?
Ce n’est ni un film caricatural, ni misérable, ni désespéré, au contraire mais un film qui montre des clefs pour s’ouvrir aux autres, avoir le courage de résister grâce à l’entraide.

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Le personnage de Karine, malgré ses problèmes, est solaire…
Lorsque je l’ai rencontrée, c’est son regard qui m’a aussitôt attirée, un regard à la fois lumineux et grave. Je ne la connaissais pas mais je me suis très vite rendu compte de ses possibilités car elle n’est jamais tiède, elle m’a beaucoup étonnée par, à la fois sa force et sa fragilité. Elle a de plus un amour fusionnel avec son fils dont le rapport est plus père-fille que mère-fils. Un fils qui est prêt à tout lâcher pour aider sa mère.
Vous avez aussi utilisé Julie Ferrier à contre-emploi !
Et elle a aimé car on la connaît surtout dans des comédies légères et là, elle a un rôle ambivalent car elle est coincée entre ces femmes dont elle voit les problèmes et le courage et le patron à qui elle doit obéir au risque de perdre sa place elle aussi. Et pour sauver sa place elle profite des failles de ces femmes : obéir, accepter ou être virées.

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Vous connaissiez ce milieu ou l’aviez vécu ?
Non, moi je viens de nulle part ! J’ai passé mon bac, puis à 30 ans j’ai choisi de travailler dans l’audio-visuel et faire des documentaires aussi bien culturels que sociétaux. Je me suis intéressée aux femmes et à leur travail car je crois au travail des femmes, quel qu’il soit, qui leur permet d’avoir leur indépendance, même si c’est quelquefois compliqué. Je travaille beaucoup avec les femmes.
Mais j’ai également fait des documentaires culturels, par exemple sur Jules Verne, Victor Hugo, qui sont des personnages importants et populaires dont on ne connaît pas toujours leur vie d’hommes. Je viens de terminer un film un peu particulier, une sorte de comédie musicale autour des migrants qui se révèlent par la musique…
C’est donc votre premier long métrage… Comment l’appréhendez-vous ?
Avec pas mal de stress car c’est la première fois que je vais être confrontée au public. C’est aussi la première fois que je rencontre des journalistes… Tout est nouveau pour moi. Mais déjà je suis très surprise et heureuse du public que je rencontre à ces avant-premières. Un public très fin dans la compréhension des choses.
Je doute beaucoup, tout le temps de tout ce que je fais car je mets toujours beaucoup de moi et là je m’expose, et je sais que ce peut être violent.
Comment choisissez-vous vos sujets ?
J’écris au fil de mes rencontres. Je ne suis jamais sur une enquête, sur un sujet. Le sujet vient du fait que j’aime parler avec les gens et de là, me viennent des idées à creuser

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Ce film vous a-t-il donné envie de continuer dans cette voie ?
Pourquoi pas, si ce film marche assez pour récidiver !
Mais monter un film est très difficile car il faut trouver un sujet assez porteur pour en faire un film de fiction. Puis il faut trouver de l’argent et aussi des comédiens. C’est plus compliqué mais je suis ouverte à toute éventualité. J’ai déjà quelques idées !

Propos recueillis par Jacques Brachet
Sortie du film le 18 janvier