Six-Fours – Maison du Cygne
Roger BOUBENEC, le plasticien de l’eau

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Après Lucie Barra, voilà que le service culturel de Six-Fours – première commune à avoir rouvert ses galeries – nous présente les dernières œuvres de Roger Boubenec, à la Maison du Cygne et ce, jusqu’au 5 juillet.
Tout comme la veille à la Batterie du Cap Nègre, c’est à un vernissage très intime que la même équipe culturelle nous invite autour du «plasticien de l’eau», ce qui sera un moment d’exception et je dirais de grâce tant l’homme est aussi passionnant et volubile que le sont ses toiles.
Ce Toulonnais qui, enfant, a failli se noyer dans le port n’a pourtant pas été traumatisé puisque l’eau est devenu son univers, d’abord devenant plongeur dans la Marine Nationale, nageur de combat, scaphandrier descendant jusqu’à 218 mètres de fond.
Mais cet éternel voyageur qui a connu tous les océans, prends aussi le temps de regarder «l’eau qui vient de la bouche des fontaines», titre de cette exposition, tous nos souvenirs enfouis, affirme-t-il, venant de l’eau, souvenirs du fond des âges, du fond de l’âme et qui l’inspirent pour créer ces somptueuses aquarelles rehaussées d’empreintes de fleurs, de plantes, qu’il va cueillir à l’aube, dans la nature qui l’entoure.
Toute cette technique de ruissellement est un travail d’art mais aussi un travail de force car il travaille à plat par terre, jette ses couleurs et y fait ruisseler l’eau en remuant ses grands supports papiers de bas en haut, attendant ensuite que ça sèche pour y apposer les empreintes ou y ajouter des motifs à l’encre de Chine du plus bel effet.
Il nous plonge ainsi dans le monde de la mer, des végétaux, ajoutant poissons et papillons multicolores. Il pense ses toiles mais laisse l’eau faire son travail de mélanges qu’il ne maîtrise pas et il en sort des œuvres aussi belles que mystérieuses, inattendues, créées par ce qu’il appelle des incidents de parcours.

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Durant sa remontée en caisson de ses 218 mètres, il a eu le temps, dans ce confinement choisi, de créer des œuvres mais qui, dues à la pression de cet enfermement solitaire d’un mois  et des gaz qui s’en échappaient, ont donné à l’arrivée, des œuvres tout à fait inattendues, différents de ce qu’il avait imaginées, la lumière descendant dans le caisson comme au travers d’un vitrail d’église, sublimant son  œuvre.
Philosophe à ses heures, durant un mois il a eu le temps de réfléchir sur l’être, la solitude le rendant hypersensible, dans un lâcher prise total, un apaisement, les sens se modifiant par rapport aux phénomènes chimiques qui l’environnaient dans ce no man’s land.
Roger Boubenec fait un avec la nature dont il est très proche, le végétal et l’eau faisant un tout qui, en liaison avec l’aquarelle, le pastel, l’encre, les végétaux lui fait donner naissance à des œuvres sensibles, poétiques, quelquefois impressionnistes mais toujours d’une beauté presque irréelle, magique.

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Notons aussi ce magnifique oiseau, une sculpture faite de fleurs de papier qu’il découpe et peint à l’aquarelle, et les juxtaposant une à une, donnant des camaïeux de roses, de beiges du plus bel effet. Et encore ces cœurs de papillons, dont il varie les tons, d’une grande diversité vus de près et d’une belle unité vus de loin.
On entre dans le monde de Boubenec comme dans un monde surnaturel, apaisant, fait de rêves, d’irréel comme si on descendrait dans des abysses de beauté.
On est ravi de le retrouver dans ce lieu où il fut invité pour donner des master classes qui, cette fois hélas, à cause des circonstances, ne pourront pas avoir lieu.
Mais vous pourrez le retrouver au lycée Peiresc où il reprendra ses cours dès la rentrée.
En attendant, il ne pouvait trouver plus bel écrin que dans ce lieu entouré d’une végétation luxuriante qui fait écho avec son travail «d’aquarelliste-voyageur»

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Jacques Brachet