Six-Fours – Six N’étoiles
« Un violent désir du bonheur »…
Une belle découverte cinématographique

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Gabriel est un jeune abbé qui vit dans un monastère du sud, en toute sérénité, sans se poser de questions existentielles, au milieu d’une nature belle, lumineuse, vivant dans l’amour de Dieu. Et la vie s’égrène ainsi au fil des saisons. Jusqu’à ce que l’armée révolutionnaire de 1789 ne vienne déranger ce monde contemplatif qui va tout remettre en question et lui faire découvrir qu’une autre vie existe, faite de violence mais aussi d’amour, cet amour charnel qu’il va découvrir. Ainsi va-t-il faire sa propre révolution, s’ouvrir sur un autre monde auquel il va peut-être succomber, devenant soldat tout en gardant la foi et vouloir conserver ce lieu dans lequel il vit au fil des saisons et des récoltes. Dans tout ça, le bonheur, c’est quoi ? et, comme le dit Christophe Maé… le bonheur, il est où ?
« Un violent désir de bonheur » est un film plein de poésie signé Clément Schneider, que l’association « Lumières du Sud », l’ACID et le cinéma Six N’étoiles ont reçu et où il est venu, accompagné de la productrice, Alice Begon, qui est Seynoise et Thomas Choury, programmateur à l’ACID.

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Thomas Choury, programmateur à l’ACID, Noémie Dumas, programmatrice du Six N’étoiles, Mireille Vercellino, présidente de « Lumières du Sud », Clément Schneider et Alice Begon

Le film repose sur deux magnifiques comédiens : Quentin Dolmaire, au visage d’ange et Grâce Seri, une comédienne black au regard intense.
Des images somptueuses, très picturales et par contre une musique très rock pour un film se passant à cette époque de la Révolution, puisqu’on y reconnaît les voix de Patti Smith et de Marianne Faithfull entre autres.
« Pourquoi ce choix musical, Clément ?
C’est un choix délibéré afin de ne pas tomber dans la vision-cliché qu’on a du film historique.
La vérité historique n’est jamais définitive, elle est souvent subjective et j’avais envie de remplir ce vide par un décalage, un anachronisme. Je ne suis pas obsédé par la vérité temporelle, c’est une mise en scène du passé qui correspond aussi à certaines choses de notre présent. Les deux chanteuses étaient, dans les années 60, des personnes révoltées.
Et je précise que, dès le scénario écrit, j’avais choisi ces musiques.

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Vous avez filmé dans un format qu’on utilise peu aujourd’hui : le 4/3
Là encore ça a été un choix délibéré et intuitif. C’est d’abord le format qui est à la genèse de la création du cinéma., ça donne un cadre particulier pour les paysages et les gros plans et puis… Quand on a des moyens assez humbles on resserre sur un cadre aussi humble. Sans compter que ce n’est pas une fresque historique, ce n’est pas une épopée, c’est un film assez intimiste et ce format convient bien, je crois, au sujet. la Révolution se passe à Paris avant de venir en province, c’est donc en hors champ et ça rend plus sensible ce qu’on ne voit pas.
Vous avez choisi deux superbes jeunes comédiens. Comment les avez-vous trouvés ?
J’ai découvert Quentin en 2015 dans son premier film : « Trois souvenirs de ma jeunesse ». J’avais adoré ce film et remarqué Quentin. En 2016, j’ai commencé à penser à faire mon film et lorsqu’il s’est agi de chercher le comédien, Quentin m’est revenu très vite à l’esprit. On s’est rencontré et j’ai eu tout de suite la sensation que c’était bien lui, le personnage de Gabriel. Et lui aussi !
Quant à Grâce, je cherchais une comédienne noire et il y en a peu. Je l’ai découverte au théâtre d’abord où elle venait de terminer le conservatoire, nous nous sommes alors rencontrés plusieurs fois et elle s’est imposée à moi. Il n’y a pas eu de casting, j’en fais très peu. Là encore une fois, je me fie à mon intuition. Je n’aime pas vraiment les castings car d’abord, souvent l’artiste a le trac et est figé et puis, j’aime m’aventurer sur la confiance. C’est de l’ordre du pari et je trouve cela salutaire.
Les images sont somptueuses, malgré le cadre réduit et les paysages font souvent penser à des tableaux. Et les gros plans des comédiens sont aussi très beaux.
J’avoue qu’il n’y a pas de réflexion préalable, ce n’est pas recherché. J’aime faire des images simples, les plus belles, les plus vivantes possibles, la picturalité est venue toute seule. J’ai laissé le décor suggérer la lumière. Pour les gros plans, je me laisse porter par les comédiens. Je trouve le visage de Quentin très « Boticcellien » !

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Scénariste, réalisateur, producteur… Comment travaillez-vous ?
D’abord en triangle. Il y a une co-productrice, Alice Begon, une co-scénariste, Chloé Chevalier et moi. Nous travaillons tout le temps ensemble sans jamais aucun affrontement. Le scénario écrit nous en discutons et la dure, l’impitoyable réalité se présente : l’argent. Il y a donc des choses qu’on doit revoir à la baisse, des changements à apporter. Mais cette contrainte est aussi intéressante pour nous obliger à aller vers l’essentiel. C’est en fait un risque que l’on prend, collectif et joyeux.
Et ce travail collectif se poursuit après, avec les distributeurs, les salles de cinéma, comme le Six N’étoiles, les associations comme « Lumières du Sud », qui nous reçoivent ici ce soir et l’aide de l’ACID (Association du Cinéma Indépendant pour la Diffusion), qui nous aide beaucoup dans nos démarches, pour trouver un distributeur, des salles et nous aider à la promotion du film. Il y a toujours quelqu’un de l’ACID qui nous accompagne et c’est réconfortant ».

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Réconfortant également que grâce à tous ces gens passionnés, nombre de films de ce genre puissent voir le jour. C’est en le présentant au festival de Cannes dans une section parallèle que ce film a trouvé un distributeur et quel plaisir que de découvrir de tels films et de tels jeunes réalisateurs pleins d’avenir.
C’est aussi une certaine idée du bonheur… cinématographique !

Propos recueillis par Jacques Brachet