Six-Fours – Six N’étoiles : Le transgenre en question

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Christian Sondregger

Soirée particulièrement émouvante aux Six N’étoiles de Six-Fours qui nous proposait une soirée spéciale sur un sujet encore très délicat : le transgenre, ou lorsqu’un garçon ou une fille mal dans son enveloppe charnelle, décide de changer de sexe.
Cette soirée était une belle collaboration entre le cinéma six-fournais, Chateauvallon et l’association cinématographique « Lumières du Sud », présidée par Mireille Vercelino. Cela, suite à un spectacle donné le printemps dernier à Chateauvallon « Trans » donné par la Compagnie des Hommes qui eut un énorme succès et qui revient en ce lieu les 1er et 2 février prochain à 20h30.
Si le sujet est de moins en moins tabou, il reste tout de même beaucoup de questions à se poser sur la nature de l’homme ou de la femme qui se sent mal dans sa peau et décide d’entrer dans un processus à la fois long, douloureux, difficile mentalement et physiquement.
Le Six N’étoiles et « Lumières du Sud » avaient donc choisi deux films pour cette soirée : « Coby » de Christian Sondregger, en sa présence et « Girl » de Lukas Dhont, avec le jeune Lukas Polster qui fut ovationné au dernier festival de Cannes pour sa prestation dans le rôle de ce garçon qui devient une fille.

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Suzanna & Cody – Victor & Lara

Christian Sondregger, quant à lui, n’a pas eu à chercher loin son sujet et son héros puisqu’en fait Coby était tout simplement sa sœur dans la vie.
Enfant adopté, Christian, après un long cheminement, retrouve sa mère biologique et en même temps cette sœur qui est en train de devenir un garçon. Et c’est donc celui qui se fait appeler Coby, qui lui explique que, depuis un certain temps, il a décidé de changer de sexe et de se filmer durant toute cette transition et ce long et douloureux parcourt. Il lui demande de prendre le relais. Ce qu’a fait Christian en mêlant les films déjà tournés par son frère et dont il rajoute ce qu’il va filmer.
« J’ai retrouvé ma famille à 32 ans et ma sœur, alors encore Suzanna, qui avait 12 ans en 2010 et qu’on croyait lesbienne. C’est elle qui m’a proposé de faire ce film-témoignage. C’est un film très intime qui m’a aussi permis de faire mon propre cheminement vers cette famille que je découvrais et suivre en parallèle l’évolution de la transformation de Coby. Je dois dire que je n’ai pas dit oui tout de suite, j’ai beaucoup réfléchi mais je me suis rendu compte de ce que vivait cette famille toute centrée vers celui qui est aujourd’hui mon frère, qui l’a beaucoup aidée malgré beaucoup de questionnements, dont celui de perdre une fille et une sœur pour retrouver un fils et un frère, « ni tout à fait le même mais ni tout à fait autre » et surtout les jugements de valeurs et moraux de l’époque . J’ai tourné ce film durant trois fois trois mois, au fur et à mesure de l’évolution de Coby. Il y a eu quelques moments difficiles, beaucoup de moments émouvants mais toute la famille a grandi ensemble et quant à moi, ça m’a permis de rencontrer ce frère et cette famille biologique ».

B

C’est vrai que chacun peut avoir des à-priori sur ce sujet délicat mais justement Christian Sondregger nous le présente avec beaucoup de délicatesse, d’amour car dans ce film, l’amour est omniprésent au sein de cette famille soudée et l’on peut comprendre la psychologie d’un être qui ne se sent pas à sa place dans la peau que la nature lui a donné. C’est aussi une belle leçon de courage, de compréhension et comme le dit si justement Christian : « J’avais une vision très arrêtée de ce genre de situation, je cherchais le mal là où il n’y en a pas alors qu’en fait le mal vient de la norme qui s’instaure dès notre naissance, cette différence entre le bleu et le rose. Sans cela, il n’y aurait pas de problème ».
Quant au second film, « Girl » de Lukas Dhont, il évoque au contraire l’histoire d’un jeune garçon de 15 ans, Victor, qui va devenir une jeune adolescente prénommée Lara. Mais en dehors de cette transformation, elle ne rêve que de devenir danseuse étoile avec ce handicap de devoir beaucoup plus travailler qu’une jeune ballerine tout en suivant un traitement à la fois draconien et épuisant. Tout cela ne se fera pas sans problèmes évidemment, malgré l’aide à la fois de son père, de son professeur de danse et de l’équipe médicale qui la suit.
Film magnifique et bouleversant où le jeune comédien-danseur, devenu aujourd’hui danseur étoile des ballets d’Anvers, Victor Polster, fut la révélation de Cannes et obtint le prix d’interprétation dans la section « Un certain regard » alors que le film obtint la Caméra d’Or.
Cette soirée et ce spectacle à Chateauvallon seront prolongés par une conférence qui se déroulera à la FAC de la Garde le jeudi 24 janvier à 14h avec la présence de trois intervenants et des interventions en milieu scolaire, afin de libérer la parole sur un sujet encore brûlant et mieux le faire connaître et accepter.

Jacques Brachet