Sanary – Théâtre Galli
La vie encore plus rêvée de Michel BOUJENAH

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Il rigole, il harangue, il perd son texte, il improvise, il vitupère, il prend le public à parti, gare aux premiers rangs et par moments, entre rires et émotion, il nous offre une leçon de vie.
Vie réelle ? Vie rêvée ? C’est sa vie rêvée qu’il a décidé de nous raconter par l’intermédiaire du personnage qu’il s’est inventé voici quelque trente ans, Maxo Boutboul en y ajoutant des portraits de sa mère, de son oncle, de son cousin, histoires drolatiques, douces-amères depuis leur exode, quittant le soleil d’Algérie pour les brumes du nord de la France.
Un spectacle coloré, qui fait suite à sa vie rêvée puisque cette fois il nous affirme qu’elle est encore plus rêvée. Mais elle touche au cœur, à la rate aussi, car on rit beaucoup et derrière ses tribulations au travers de sa vie et de ses personnages, il y a un homme « Moi », comme il aime à dire. Un « Moi » qui, sous couvert du rire, est un homme profond.
Et j’en parle en connaissance de cause car je le côtoie depuis quelques années, en tournée ou à Ramatuelle où, avec brio et depuis dix ans, il a remplacé l’ami Brialy aux manettes d’un festival magnifique… comme lui !
Un théâtre Galli, ce soir-là, où quelques spectateurs, apeurés par les manifestations des gilets jaunes, ont décommandé leur soirée, ce qui a attristé Michel mais ce qui n’en a pas enlevé sa pèche, son brio, ses altercations et son humour. Si la salle n’était pas totalement pleine, elle s’est levée pour l’ovationner et lui faire un triomphe. Un de plus.

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Auparavant, nous nous retrouvions dans sa loge où, comme toujours, il m’accueillait les bras ouverts, un peu déçu et surtout un peu crevé d’arriver d’un spectacle donné la veille à l’autre bout de la France, mais toujours chaleureux.
Alors Michel, où en es-tu de ce spectacle ?
Je commence à en vivre la fin puisque je terminerai en juin à Antibes à l’Anthea. Les deux version de ce spectacle, « Ma vie rêvée » et « Ma vie encore plus rêvée », je les ai joués 450 fois !
Tu abandonnes ton personnage ?
Non, j’abandonne… moi !
Mais je travaille déjà sur un autre spectacle que j’ai commencé à écrire. Mais tu me connais… Je travaille à mon rythme ! J’ai encore plein de choses à jouer.
Et en attendant ?
Je suis en train de terminer d’écrire mon quatrième film. Il s’appellera « Frères ».
Quel en est le sujet ?
Après une longue séparation, deux frères se retrouvent et vont régler leur compte. Mais ce n’est pas un drame, c’est une comédie tendre comme j’ai l’habitude de les écrire et là encore… c’est moi !
As-tu déjà prévu tes comédiens ? Va-t-on retrouver ton clan comme Berling, Elbaz… ?
Non, pas cette fois. J’ai envie de travailler avec des comédiens avec qui je n’ai jamais travaillé. Mais je n’ai pas encore décidé de qui ce serait. Le scénario est presque fini d’écrire et je pense que je le tournerai l’an prochain après le Festival de Ramatuelle.
A ce propos, tu es, je suppose, en préparation du festival ?
Oui, bien sûr mais je n’ai pas le droit d’en parler encore. Ce que je peux seulement te dire, c’est qu’il y aura de grosses surprises et qu’il sera encore plus fort que celui de cette année !
C’était déjà pas si mal !
Oui mais tu sais, chaque année la programmation dépend de beaucoup de choses : la liberté des artistes, la peur de ceux qui appréhendent de jouer en plein air… C’est toujours compliqué. Mais c’est ce qui en fait aussi le charme. Et puis, il faut que je prenne le temps d’aller voir des spectacles.

A

Justement, en as-tu le temps ?
Je le prends, entre les dates de la tournée. Je fais cinq à six spectacles par mois, le reste du temps, je le passe à écrire et à voir des spectacles.
Et avec tout ça, tu prends le temps de vivre ?
La aussi… je le prends ! Si je ne vis plus, je n’écris plus.
Vie réelle ou vie rêvée ?
Les deux mon général ! Lorsque j’écris, je rêve et le reste du temps, la vie est là. Et la vie est hyper belle. Par contre, il faudrait que les journées aient 48 heures.
Pourquoi ? Pour travailler plus ?
Non… pour pouvoir dormir 24 heures !
Le temps est la chose la plus luxueuse du monde. A vingt ans, on pense avoir tout le temps devant soi. Avec l’âge, on pense au temps qui nous reste. C’est pourquoi il faut en profiter !

Propos recueillis par Jacques Brachet