Pour l’ouverture de la saison, l’association « Lumières du Sud » nous proposait de découvrir le premier long métrage de Jean-Philippe Gaud « Tezzaka », en présence du réalisateur venu en voisin de Draguignan et, par la même occasion fêtant avec le public son anniversaire.
Le film se passe en deux parties, d’abord au Maroc puis à Paris.
Elias (Madi Belem) a été éduqué par sa grand mère qui lui a inculqué, dès l’enfance, l’art de la cuisine qui est pour le gosse devenu une véritable passion, au point qu’il apprend par cœur les recettes de Noël Rebuchon et qu’il ne manque aucune émission télévisée du grand chef Julien Blanc (Olivier Sitruk). Un jour celui-ci débarque dans l’épicerie de Yussef (Abbes Zahmani). Il lui prépare un couscous et un dessert à sa manière dont le chef se délecte et lui propose de venir le voir à Paris.
Il n’en faudra pas plus pour qu’il s’envole vers ce qu’il croit l’Eldorado. Il déchantera, devenant ouvrier clandestin, ne tenant bon que grâce à Souleymane (Adama Diop) un africain qui travaille avec lui et le prend sous son aile, avec sa famille. Malgré de nombreuses embûches, il finira par rencontrer Julien Blanc qui l’aidera à accomplir son rêve.
C’est un film original, tendre, plein d’humanité, interprété par Madi Belem, lumineux comédien avec lequel on va suivre avec émotion le cheminement d’une passion qui ne faillira pas. Entre comédie et mélodrame, il est complètement porté par le sourire, le regard, la bonté d’Elias, que l’on accompagne avec émotion vers le destin qu’il s’est choisi.
Jean-Philippe Gaud, d’origine algérienne par sa mère et varoise par son père, joue sur ces deux culture, le film étant partagé en deux : la vie au Maroc, pleine de magnifiques paysages et de sérénité et la vie trépidante et difficile de la capitale française.
« La construction du film, nous explique Jean-Philippe, est similaire à celle de la culture que j’ai en moi. Je voulais parler de l’immigration en restant toujours sur un film en drame et légèreté. Mais c’est aussi un film sur la passion, la persévérance et sur la transmission ».
En fait, ce film est un conte moderne, un rève qui se réalise à force de volonté. Quant aux comédiens, ils sont tous épatants.
Madi Belem avec Abbes Zahmani et Olivier Sitruk
« Ce sont – nous dit-il encore – des comédiens qui, pour la plupart, ne sont pas connus, hormis Olivier Sitruk et Abbes Zahamani, et c’est ce que je désirais.
C’est le premier grand rôle de Madi Bellem. Je l’avais trouvé remarquable dand « Le convoi » ou encore « Le baron noir » où il affronte des comédiens comme Benoît Magimel ou Kad Merad avec brio. Dès qu’on s’est rencontré au casting, j’ai su que c’était mon Elias. D’ailleurs, après qu’on se soit vu, il m’a appelé pour me dire : « Ce rôle est pour moi, nous avons le même cheminement, Elias et moi ».
Abbes Zahamani passe de la comédie comme « Camping » ou « La vie est un long fleuve tranquille », avec le théâtre d’auteur sans problème. Il est ambivalant, à la fois solaire et dramatique.
Adama Diop est d’origine sénégalaise, il a fait le conservatoire, il a joé « Macbeth ». C’est un beau comédien et c’est son premier film.
Ouidad Elma est franco-marocaine. Je l’ai découverte au Maroc où elle passait ses vacances au bled… comme dans le film !
Comment avez-vous tourné ce film ?
Avec difficulté car ça a été un long cheminement, n’ayant pas de producteur. J’ai tourné la première partie au Maroc en mai 2016, je n’avais pas d’investisseur. Comme je suis également monteur, j’ai monté cette partie pour la montrer à des investisseurs et j’ai tourné la partie Paris en avril 2017. Et je remercie Madi d’avoir pu attendre aussi longtemps. Mais je n’avais pas de distributeur. Je l’ai trouvé lors d’un festival où je projetais mon film.
Il y a beaucoup d’ellipses dans votre film…
Oui et c’est évidemment voulu car je pense que le spectateur a assez d’infos pour les comprendre et recoller les morceaux. Je voulais lui offrir de l’imaginaire et donc, sauter certaines étapes qu’il comprend lui même. Je n’aime pas expliquer les choses lorsqu’elles sont là, je préfère les lui faire ressentir plutôt que de les montrer.
C’est ma vision des choses ».
Propos recueillis par Jacques Brachet