Toulon – Le Colbert
Les CHICHE CAPON ont frappé fort

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Ils sont quatre, comme les… trois mousquetaires, les Frères Jacques, les 4 barbus, Les Brutos, les Max Brothers (qui étaient 3 !). Les Beatles aussi !
En fait, les Chiche Capon, c’est un quatuor hybride et farfelu où l’on retrouve un peu de tous ces personnages burlesques, à la fois comédiens, clowns, chanteurs, musiciens, danseurs… pas dans « Le lac des Cygnes »… Quoique…
Ils se nomment : Richard lo Giudice, à la base musicien, Matthieu Pillard, longiligne personnage à la tête de Charlot, au regard inquiétant, Frédéric Blin, plus connu sous le prénom d’Estève, le neveu à côté de ses pompes d’Huguette et Raymond dans « Scènes de ménage », Patrick de Valette, petit, maigre, bondissant comme Bip Bip, l’ennemi de Vil Coyotte.
Vous voyez le tableau !

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Réunis sur scène, ils mêlent chacun leurs univers de clowns totalement déjantés dans des histoires plus loufoques les unes que les autres, parfois incongrues, souvent iconoclastes, toujours absurdes, sorte de cartoon vivant et avec leurs gueules inoubliables, ils ont fait hurler de rire les spectateurs du Colbert où ils sont venus en résidence peaufiner ce nouveau spectacle.
C’est du grand art car leur spectacle est comme un Feydeau, réglé comme du papier à musique, jouant sur les gags, les mots, les situations burlesques. Ils sont d’une inventivité totale et n’hésitent pas à en en rajouter une couche, à aller le plus loin possible dans la folie et l’absurde.
C’est avant le spectacle que je les rencontre et j’entre de plain pied dans leur monde car à la ville comme sur scène, ils sont un peu fêlés, du moins en apparence et il faut s’adapter très vite et essayer de tenir les rênes d’une interview dont on ne sait jamais si la réponse est vraie où si c’est une boutade. Et la séance photo n’a pas été triste !
Dans son coin, Frédéric Blin semble se désintéresser à la rencontre. Il pianote sur son téléphone mais écoute quand même ce qui se passe car de temps en temps, une réponse incertaine, sibylline, hésitante vient ponctuer la réponse de ses acolytes !

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Parlez-moi de votre rencontre
Matthieu :
Nous nous sommes connus, Frédéric, Patrick et moi à l’école de clowns Samovar. Nous étions dans le même cours. Entre nous, ça a très vite fonctionné. Au bout d’un an nous avons commencé à écrire des sketches ensemble et nous sommes partis à Avignon pour les proposer sous forme de spectacles de rues. Nous étions en 2001.
Comment est arrivé le quatrième larron ?
Richard :
Il leur fallait un vrai pro et je suis arrivé, et je les ai sauvés, et ça a commencé à marcher ! (il rigole). En fait, je les ai rejoints en 2005 parce qu’ils cherchaient un musicien et… je suis un orchestre à moi tout seul puisque je joue de la guitare, de la trompette, des samplers, de la flûte. Depuis je ne les ai plus quittés et nous en sommes à notre cinquième spectacle.
Qui a trouvé le nom du groupe ?
Matthieu :
C’est une idée de Patrick. Il est issu d’un roman de Pierre Very « Les disparus de Saint-Agil » dans lequel un groupe de trois copains, nommés les Chiche Capon, discutent avec un squelette nommé Martin et ont un rêve : partir aux Etats-Unis. D’ailleurs Christian Jacques en a tiré un film avec Mouloudji, Michel Simon, Eric von Stroheim. Nous, nous sommes quatre, nous n’avons pas de squelette et nous ne sommes pas encore allés aux Etats-Unis !

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Vous en êtes donc au cinquième spectacle. Chacun est chaque fois différent ?
Richard :
Oui, d’ailleurs nous jouons toujours en alternance et en permanence, les trois derniers. On va jouer un spectacle dans un théâtre et lorsqu’ils aiment ils nous reprogramment avec un autre. Le cinquième est en train de naître et nous avons passé d’ailleurs une semaine en résidence au Colbert. Il est loin d’être abouti et nous allons ainsi de résidence en résidence pour le peaufiner et nous le jouons à la fin de celle-ci. Nous avons fait de même dans l’Aveyron, à Lille, à Clermont Ferrand, nous continuons sur Marseille, Nantes, Strasbourg. A Toulon, c’est la cinquième fois que nous le jouons. Le spectacle sera définitif vers septembre 2018.
Comment travaillez-vous ?
Tous ensemble. Chacun apporte ses idées, à la base c’est plus sous forme d’impro. Petit à petit ça prend forme.
Pourquoi ces résidences ?
Parce qu’à chaque fois, à la fin, nous avons le retour du public. Nous avons besoin de l’avis du public car avec lui en face, c’est différent, on voit ce qui accroche, ce qui marche ou ne marche pas tout de suite.
A chaque spectacle il y a un thème ?
Plus ou moins. Celui-ci est plus basé sur le rêve de chacun et aussi sur le bilan de notre vie d’artistes, de notre vie ensemble. On parle aussi de la crise de la quarantaine, de la cinquantaine pour certains, la remise en question du métier.
Et alors… positive cette remise en question ?
Richard :
En général oui puisque nous sommes toujours ensemble ! C’est que ça fonctionne entre nous. En fait, nous sommes un couple à quatre mais… nous ne vous dirons pas qui fait quoi ! Sachez que nous ne sommes ni interchangeables, ni polyvalents !

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Et s’il y a un malade ?
Il n’y en a pas ! Même malade, on joue. Et on est sur les routes les trois quarts de l’année. En 15 ans on a annulé seulement deux spectacles… à cause de lui ! »
Lui, c’est Frédéric qui lève ses yeux de son téléphone pour balbutier quelque chose comme : « Oui mais… Mais moi… c’est vrai mais… d’ailleurs… » On n’en saura pas plus !
Qui met le spectacle en scène ?
Pareil que pour l’écriture, c’est une mise en scène collégiale, seulement aidés par un regard extérieur, celui de Patrice Jouffroy qui est comédien, qui a créé une compagnie à Lons le Saunier, qui est un super pote. On a confiance en lui.
Ca vous laisse du temps pour faire autre chose ?
Mathieu :
On y arrive. On joue à la télé, on fait du doublage, on fait des spectacles en guest. On essaie de se caler les uns avec les autres. C’est vrai que ce ne peut pas être sur une longue durée. Mais nous ne sommes pas frustrés !
Avez-vous pensé à faire du cinéma ?
Patrick
(qui vient d’arriver) : Des gens y ont pensé pour nous mais ça n’a pas abouti. Nous avons même tourné un pilote pour France 3 mais le projet est tombé à l’eau. Mais cela se fera, ou pas, en temps opportun.
Vous êtes-vous un jour fâchés, depuis le temps ?
Non, jamais. Il arrive qu’on s’engueule, qu’on ne soit pas d’accord mais ça s’arrête là.
Nous sommes une vraie famille.

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Jacques Brachet