Jeanne (Viginie Ledoyen), est une jeune femme libre, heureuse de vivre, à la sexualité débridée. Elle prend et jette les garçons sans état d’âme.
Jusqu’au jour où, bousculée dans le métro, elle tombe sur les genoux d’Olivier (Mathieu Demy) et c’est le coup de foudre de part et d’autre. Mais Olivier est, comme il dit « séropo ».
Jeanne qui n’a jamais cherché à garder un garçon va vouloir l’aimer et l’aider mais lui, qui sait où cette maladie va l’amener, rejette cet amour malgré lui.
Ce film « Jeanne et le garçon formidable », date de 25 ans. En plus qu’il n’ait pris aucune ride, l’on voit débuter une équipe de comédiens… formidables dont certains ont fait leur chemin : Virginie Ledoyen et Mathieu Demy étant entourés de Valérie Bonneton, Denis Podalydès, Frédéric Gorny, Jacques Bonnafé, tous en début de carrière dans ce film qui est une comédie musicale réalisée par Olivier Ducastel, dont le scénario et les paroles des chansons sont signés Jacques Martineau, sur une musique de Philippe Miller.
Un film frais, tendre, émouvant, avec de belles musiques,qui parle d’amour et de sida, qui ressort 25 ans après et qu’une nouvelle génération va connaître.
Olivier Ducastel, qui aime autant son film que nous (et aussi Noémie Dumas, la directrice du Six N’Etoiles qui en est allée de sa larme !) et qui est donc venu accompagner cette ressortie, ce qui est rare de voir ressurgir un film 25 ans après.
« Olivier, il est rare de voir ressortir un film 25 ans après. Comment cela s’est-il fait ?
C’est vrai qu’en principe, on ressort les films dits du répertoire lorsque le réalisateur est mort !
Mais là, il s’agit des distributeurs de Malavista qui ont adoré ce film et qui avaient travaillé sur les bonus de l’édition DVD. Une fois le film restauré, ils ont eu envie de le ressortir en salle. Ils ont trouvé intéressant qu’une nouvelle génération le découvre sur grand écran plutôt que sur un écran TV.
Au générique, il y a Mathieu Demy, le fils de Jacques Demy. On sait que vous avez travaillé avec le père. C’était une sorte de prolongement ?
C’est indirectement lié car j’ai eu la chance de travailler avec Jacques Demy sur son dernier film « 3 places pour les 26 » et j’ai toujours aimé tous ses films. Sabine Mamou en était la monteuse et lorsqu’on a commencé à préparer le film, c’est elle qui nous a parlé de Mathieu. Nous étions très gênés de lui en parler car il y avait peu de temps que la femme de Jacques Demy avait révélé, avec « Jacquot de Nantes » que Demy avait été très malade et était mort du sida. Dans le film ça n’était pas vraiment exprimé et le public n’avait pas vraiment compris. Elle venait de le révéler à Mathieu, qui avait alors 24 ans, et nous étions pleins de pudeur pour en parler avec lui. Sabine a organisé un repas. La rencontre a été très belle, il comprenait pourquoi on hésitait et il a accepté. Nous avons alors fait des essais avec Virginie Ledoyen et ça a tout de suite fonctionné entre eux.
Je peux vous dire que Jacques Demy était très présent sur le tournage.
Le film est d’ailleurs très inspiré de Jacques Demy !
Oui, nous étions très inspirés par la thématique, le mélange des genres, le mélange des couleurs mais nous avons fait très attention à ce que ce ne soit pas une copie de ses films.
Nous avons seulement gardé son esprit.
Et Virginie Ledoyen ?
Au départ, le rôle n’était pas pour elle mais pour une comédienne qui savait chanter : Jeanne Balibar. Mais pour diverses raisons, ça ne s’est pas fait et le choix s’est fait sur Virginie.
Ce qui est original c’est que ce sont les comédiens qui chantent. Ils ne sont pas doublés.
Oui, sauf pour Virginie car elle avait trop de choses à chanter mais je préfère avoir des comédiens qui chantent, même si c’est imparfait car nous préférons les vraies voix des artistes. C’est plus authentique et plus humain. Et c’est un vrai plaisir.
Votre rencontre avec Jacques Martineau ne date pas d’hier !
Elle date de ce projet. Jacques travaillait déjà avec Philippe Miller qui a composé les musiques des chansons. Sa femme était amie avec Camille Cote, qui était monteuse et avait vu mon court métrage qui était déjà une comédie musicale, « Le goût de plaire ». Elle nous a fait nous rencontrer et ça a marché.
Comment cela se passe pour la bande son ?
Toute la musique et les chansons sont enregistrées avant le tournage et l’on tourne avec le play-back. Chacun a eu un coach vocal et travaille ses partitions. En principe, on ne touche plus à ce qui a été enregistré.
Comment s’est fait le casting ?
Entre copains, chacun connaissant un jeune artiste, tous ont fait des essais et ça n’a pas été plus compliqué que ça. Le plus difficile a été Mathieu et Virginie car au départ l’histoire tournait autour d’un couple de trentenaires. Or, Mathieu avec 24 ans et Virginie en avait 20, même si elle avait déjà dix films à son actif ! En fait, ça a donné un côté plus naïf à leur personnage.
Pourquoi une comédie musicale ?
J’étais très proche des films de Demy et ça faisait cinq ans qu’il avait disparu. Beaucoup de gens disaient que, Demy disparu, il n’y aurait plus de comédies musicales au cinéma. C’est un peu ce qu’i s’est passé malgré quelques essais infructueux comme « Tra la la » des frères Larrieu, « « Don Juan » de Serge Bozon ou encore « La grande magie » de Noémie Lvosky. J’avais déjà écrit ce court métrage mais aussi une première comédie musicale « Ma vraie vie à Rouen » que je n’ai pas réussi à monter. Et j’ai rencontré Jacques Martineau qui était musicien, qui avait été chanteur lyrique et par contre, à part à l’université, il n’avait jamais écrit. Il ne pensait pas être auteur mais il a écrit le scénario pour s’amuser et nous faire plaisir.
Il y a quand même eu « Huit femmes » de François Ozon !
Oui mais c’est plus un film musical qui balance entre opérette et vaudeville ; c’est plus du théâtre filmé.
Pourquoi ça marche si peu en France ?
Pour beaucoup de raisons, d’abord parce que c’est très cher à produire, que les producteurs sont frileux, qu’il faut un scénario original et que peu d’artiste ne peuvent ou ne veulent pas s’engager dans un travail de longue durée car il faut savoir jouer, chanter danser, ça prend des mois à mettre en place et à tourner. Et peu d’artistes ne veulent s’investir dans ce long cheminement. Nous avons tenté de faire une autre comédie musicale avec des artistes comme Isia Higelin Julien Doré, Camélia Jordana, Eddie de Pretto. Mais entre leurs tournées et leurs enregistrements, ils n’ont pas le temps. Ils ne sont pas disponibles. Et si l’on n’a pas de nom connu, les producteurs ne se lancent pas.
Alors, qu’allez-vous faire maintenant. Seul ou toujours avec Jacques Martineau ?
Nous restons ensemble même si nous sommes séparés depuis dix ans. Nous sommes en train de peaufiner un scénario « Tanger au printemps » que nous espérons tourner l’an prochain. Ce n’est pas musical, c’est un film dramatique, un mélange des genres. Nous sommes en post-production. Mais il n’est pas impossible qu’on retente une comédie musicale ! »
Propos recueillis par Jacques Brachet