Archives de catégorie : Musique

Notes de musiques

Perrine MANSUY – Murmures – Piano solo – EM23/1 (Inouïes distributions)- 12 Titres.
Pour son quinzième album depuis Maneggio en 2000, la voici pour la première fois en piano solo, sauf trois morceaux avec la présence d’un compagnon des premiers jours, Jean-Luc Difraya, très minimaliste à la batterie et aux percussions, qui sait s’insérer subtilement dans ces chants d’amour.
Dès les premières notes l’âme est prise dans les filets de la pianiste. Un son clair, un toucher soyeux, des attaques nettes, une précision à tous les niveaux, une main gauche chatoyante qui fait un tapis à la mélodie, par exemple « Murmures #1 » ; c’est le son Perrine Mansuy.C’est une musique qui vient de l’intérieur, apaisée, qui vous murmure à l’oreille des choses tendres. « Depuis toujours, des paroles murmurées près de moi me plongent instantanément dans une état de transe, comme si j’entrais en vibration », nous confie-t-elle sur la pochette.
« First light in muskota » qui ouvre le disque, sur un tempo très lent, qui laisse respirer les notes, nous met tout de suite dans l’ambiance de ces murmures-rêveries, ce qui n’exclut pas la force d’expression.
J’ai retrouvé dans ce disque les mêmes impressions, les mêmes sentiments, les mêmes aurores diaphanes, que dans le disque du retour à la musique, donc à la vie, de Keith Jarrett, « The Melody at Night, with you ».
Musique fragile et forte à la fois. Tous les thèmes sont des compositions de la pianiste, sauf trois « Murmures » entièrement improvisés.
L’art du piano solo en jazz est un art difficile, surtout quand on ne bombarde pas la musique d’une multitude de notes. Perrine Mansuy y réussit merveilleusement.

HOT HOUSE – The Complete Jazz at Massey Hall Recordings, Toronto 15 mai 1953– 2 CD
Réédition 2023 Craft Recordings.
Saluons la réédition de ce disque monument, qui est un sommet de l’histoire du jazz avec quelques-uns des plus grands créateurs du Bebop, de ceux qui ont contribué à faire l’histoire du jazz : Charlie Parker (as), Dizzy Gillespie (tp), Bud Powell (p), Charles Mingus (b), Max Roach (dm).
Le déferlement du feu de l’enfer et du souffle de dieu. Body and Soul. Et le tout dans une extrême complexité, technique, rythmique et harmonique. Et presque tout improvisé. Le Quintet s’exprime sur des grands standards: Salt Peanuts, Hot House, A Night in Tunisia… simples prétextes à des envolées bouquet final de feux d’artifice.
On n’a jamais retrouvé le son et la technique d’alto de Charlie Parker (peut-être Cannonball Adderley ?) si chaleureux, si prenant, si envoûtant, d’une urgence enflammée, comme si sa vie en dépendait. Bien sûr certains aujourd’hui ont une plus grande virtuosité que ces gars-là, due à l’évolution de la facture des instruments; mais la musique ce n’est pas que de la technique et des notes. Chez ces boppers chaque note est une bombe qui vous explose au cœur et à la tête.
Pour la petite histoire, l’ingénieur du son était tellement bourré qu’il a oublié d’ouvrir le micro de la contrebasse. Pris d’une rage folle Mingus s’enferma dans le studio et réenregistra toute la partie de basse, et on n’y entend que du feu. Ces deux disques sont un sommet de la musique. Ils devraient trôner à la place d’honneur de toute discothèque, d’amateurs de jazz, ou tout simplement de musique
Christina ROSMINI– Inti – (Couleurs d’orange – l’Autre Distribution CD0233317) – 14 titres.
Christina fait preuve de grandes ambitions. Elle se place d’entrée sous la protection d’Inti, une force divine reconnue par les peuples andins. Elle prétend exprimer « …ses indignations, ses rêves, ses espoirs…Un album photos des nombreux pays qu’elle a visités… Un voyage dans le temps…etc ». De plus chaque chanson dispose d’un texte qui l’explicite, et ça c’est bien on a les paroles. Bigre ! Et la musique dans tout ça.
Christina Rosmini chante et joue de la guitare et de nombreuses percussions. Elle est accompagnée par Bruno Caviglia à la guitare, Sébastien Debard à l’accordéon, au bandonéon et autres claviers, Xavier Sanchez, à la batterie et au cajòn, Bernard Menu à la basse ; plus quelques invités (voir la pochette).
Eh  bien surprise ! On a affaire  à une grande chanteuse, parolière, et compositrice. La voix juvénile, sensuelle et charmeuse s’appuie sur les mots, avec souvent des remontées délicieuses en fin de phrase, les mélodies sont belles et originales, savamment entourées par le groupe, sans esbroufes, sur des rythmes variés. Et chose rare aujourd’hui : une diction parfaite
Voilà un disque qui sort des sempiternelles aventures plus ou moins amoureuses et autres niaiseries intimes.
Christina Rosmini écrit bien, ses textes sont de véritables poèmes : sens des images, du rythme, des sonorités, et expression des sentiments divers. Tous les morceaux sont à citer tant la diversité des inspirations donne envie de tout écouter, et de remettre le disque. Pas étonnant toutes ces qualités, elle se revendique la nièce de Brassens ( cf.Tío Brassens).
Parmi les perles : « Tant de fleurs », un chachacha qui jouent avec malice sur les ambiguïtés sexuelles des termes musicaux, avec un hommage à Django. « Le Konnakol du bon vieux temps » basé sur les konnakols, des duels de percussions vocales contre les tablas. Le tout avec une facilité déconcertante.
Une grande voix de la chanson, de France et d’ailleurs, et un fabuleux voyage en musiques.

Serge baudot

Serge REGGIANI aurait 100 ans

Avec ses enfants

Si je vous parle aujourd’hui de Serge Reggiani, c’est qu’il aurait eu cent ans cette année et que ma carrière de journaliste a commencé (très mal !) avec lui
je viens tout juste d’entrer à Var-Matin, au milieu des années 60, alors que les «yéyés» sont en pleine explosion et que ma seule envie est de les rencontrer.
Et voilà que ma rédactrice en chef me demande, pour ma première grande interview, d’aller rencontrer… serge Reggiani qui passe à l’opéra de Toulon avec Jacques Martin et de faire un papier sur les deux artistes.
Martin, passe encore mais Reggiani, ce «vieux» comédien (qui n’a alors pas encore 50 ans !) je connais son nom, quelques titres de ses films mais le chanteur me parle peu
Contre mauvaise fortune bon cœur, de toutes manières je n’ai pas le choix. Je prends donc rendez-vous avec lui, bosse sa bio et me pointe à l’opéra où le monsieur m’attend et m’accueille chaleureusement, ce qui me rassure un peu.

A l’Opéra de Toulon
Encore à Toulon, quelques temps après

Il m’invite à m’asseoir, je sors mon petit magnéto de poche dont je me sers pour la première fois et je pose ma première question à laquelle il commence à répondre. Mais très vite, il s’arrête de parler et me dit : «Votre magnéto ne tourne pas».
Panique. Quand on m’appelle «jako la bricole» c’est par ironie car je ne sais pas planter un clou ! Alors la mécanique, n’imaginez même pas !
Après plusieurs essais infructueux, de plus en plus paniqué, Reggiani voyant ça, me dit : «attendez, je m’y connais un peu donnez-moi l’appareil». Et la sentence tombe très vite : «Vous n’avez pas mis de pile !».
Je rougis de confusion mais notre Reggiani, toujours d’une gentillesse extrême (il a très vite compris qu’il a affaire à un néophyte, dans tout le sens du terme !) me dit alors : «Ce n’est pas grave, c’est pour un journal, prenez des notes…»
Et re-panique car je n’ai ni papier ni stylo. Je sens le fiasco et surtout j’appréhende la colère de l’artiste… qui me propose alors son stylo et son bloc-notes !
De plus en plus confus, je reprends en tremblant l’interview mais j’écris vite, mes questions le rassurent car il voit que j’ai bossé, que je sais ce qu’il a fait et qu’en fait mes questions sont pertinentes.
Comme il doit se préparer pour aller chanter, que Jacques Martin a presque terminé et que je lui dis que je dois à son tour l’interviewer, il me dit en souriant : «Gardez mon stylo et mon bloc, vous les déposerez dans la loge en partant»

A Aix-en-Provence durant son exposition
Après le spectacle

Je pousse un grand ouf de soulagement, m’excuse et le remercie chaleureusement. Il me dit en riant : «Il y a un début à tout et vous saurez ce qu’il faut faire la prochaine fois. Bon courage».
On ne pouvait pas être plus gentil.
Mais là ne s’arrête pas l’histoire.
Je vais donc à la rencontre de Jacques Martin et là, tout se passe bien, je suis équipé. Même si le monsieur n’est pas aussi simple et gentil que le premier. Mais bon, j’ai mon interview et je peux passer dans la fosse d’orchestre pour aller faire quelques photos de Serge Reggiani.
J’ai un appareil photo… qui marche… et qui flashe malheureusement.
Au premier flash, l’artiste s’arrête de chanter, pointe son doigt vers moi (heureusement, je suis dans le noir !) et s’écrie : «J’ai dit pas de flash… Sortez !».
Je ne demande pas mon reste… Courage, fuyons !
Revenu dans les loges, je me dis que je vais attendre la fin du tour de chant pour m’excuser, arguant que je n’étais pas dans la fosse quand il a demandé de ne pas flasher. Aujourd’hui, on n’a plus de flash mais à l’époque…
Je rencontre le directeur de l’opéra, qui est un ami de mon père, à qui je raconte mon histoire. Il rit de bon cœur et me suggère : «Je serais toi, je partirais sans le revoir. Il ne t’a sûrement pas reconnu »

Je crois qu’il a raison. Je vais déposer bloc et stylo dans sa loge… Et je m’enfuie comme un voleur.
C’aurait pu être la fin de «ma carrière» si je n’étais pas tombé sur un type épatant comme Serge Reggiani qui, ce jour-là, m’a donné une belle leçon. De ce jour j’ai toujours été précautionneux, vérifiant le magnéto, ayant toujours un bloc et plusieurs stylos (on ne sait jamais !) dans ma sacoche.
Deux, trois ans plus tard, j’ai de nouveau rencontré Serge Reggiani pour l’avant-première du film «Comptes à rebours» qu’il était venu présenter à Toulon avec le réalisateur Roger Pigaut. Je lui rappelai notre première rencontre dont d’ailleurs il ne se souvenait pas mais cela l’a fait rire.
Je devais le retrouver une  fois encore à la fin de sa vie. Invité d’honneur au Festival de la Chanson Française à Aix-en-Provence. Il était déjà très affaibli et venait présenter son livre, une exposition de ses œuvres car il avait découvert la peinture sur le tard et donner un récital. Qu’il donna d’assis car il avait du mal à se mouvoir. C’était à la fois pathétique et émouvant. Émouvant surtout car  il était entouré de ses enfants Karine et Simon qui vinrent le rejoindre pour chanter avec lui.
Mais le repas donné en son honneur fut joyeux et brillant car il nous raconta plein d’anecdotes.
Voilà comment je débutais dans ce métier qui aurait ne pas avoir de suite… Et que je poursuis depuis plus de 50 ans !

Jacques Brachet

Fernand BONIFAY… Trent ans déjà !

C’est le 29 août 1993 que notre ami toulonnais l’auteur-compositeur Fernand Bonifay  est parti rejoindre tous les artistes à qui il avait écrit de si belles chansons comme « Maman, la plus belle du monde », « Jambalaya », « Petite fleur », « 24.00 baisers », « Arivederci Roma »  et des centaines d’autres.

Dalida, Annie Cordy, Danielle Darrieux, Johnny Hallyday, Luis Mariano , Mouloudji, Dario Moreno, Gloria Lasso, Colette Renard, André Claveau, Bourvil, Georges Guétary, Marcel Amont… La liste est longue de nos chers disparus qui ont chanté Fernand.
Mais d’autres, encore parmi nous (heureusement !) comme Pétula Clark, Hugues Aufray, Mireille Mathieu, Vincent Niclo, Eddy Mitchell, Thomas Dutronc, Michèle Torr, ont pris la relève.
Quand la chanson est bonne, elle ne meurt jamais et renaît à chaque fois, toujours aussi belle. Surtout si, comme Andrée Bonifay, sa cousine fait tout pour qu’on ne l’oublie pas, en ayant créé l’association « Les amis de Fernand Bonifay », en organisant des repas, des spectacles, des conférences et en aidant de jeunes chanteurs comme Jimmy Bregy (Photo) qui, grâce à elle, ont pu chanter au Théâtre Galli de Sanary. Ou encore en éditant un CD des chansons de son cousin chantées par la jeune génération varoise.
Pour ce trentième anniversaire, elle ne pouvait donc pas passer à côté et organise, le 4 septembre au restaurant l’Escale aux Sablettes, une belle soirée faite de joie et d’émotion, d’abord parce à qui le public sera reçu par le maître des lieux, Bernard Benet, qui fut un ami de Fernand et avec qui il organisa « Le tiercé de la chanson » dont ce dernier fut le président du jury en 91 et 92 un peu avant sa disparition.
La soirée débutera à 19h par une messe dite par Laurent Lenne, qui a la singularité d’être auteur, compositeur, chanteur… et prêtre !
A 20h un repas sera servi, suivi d’un concert où de jeunes chanteurs varois viendront rendre hommage au poète en interprétant ses chansons
Par contre, il vous faudra réserver au 06 60 39 43 33 ou par mail à : amis.fernand.bonifay@gmail .com (30 € le repas).
30 ans déjà… On se souvient

Jacques Brachet

Yves PUJOL… L’Aïoli a bien pris !


Depuis que Gilbert Bécaud a chanté que sur les marchés de Provence l’accent se promène, il s’est tellement promené qu’il a fait des émules. Sans être jamais ringard ni vulgaire, il a servi à Mado la Niçoise, Gigi la toulonnaise, Zize du Panier de Marseille et… Yves Pujol, toulonnais bon teint qui a créé un groupe qui est devenu « le groupe toulonnais le plus mondialement connu… dans le Var » !!!
Et ça fait trente ans que ça dure  avec Aïoli.
André de Santos, Franck Pantin, Julien Pierre, Sylvestre Etienne  et la belle Carie Libessant parcourent les routes du Var et d’ailleurs avec l’énergie, le soleil, l’humour qu’on attrape en naissant du côté de Toulon, sans oublier la mer et les cigales, tout ça faisant l’objet de chansons « avé l’assent » qui n’ont rien de folkloriques, puisque chantées en français sur des rythmes rock ou reggae… toutes pleines d’humour et de galéjades comme « Y a pas de hasard, je suis du Var », « Touche pas aux cigales », « Moi si j’étais breton », « Non, pas à l’oignon », « L’arsenal » ou encore « Qui mange un chien chie ouah ouah ».
Bien sûr, ce n’est pas du Molière ou du Musset et ça ne veut surtout pas l’être puisque ce sont des chansons « pour de rire » et l’on rit bien, croyez-moi ! Ce qui est le but du jeu !
Lorsqu’il nous offre un « tribute », genre très à la mode, c’est pour nous offrir des simili-sosies de Mike Brant qui rêve de voler, Claude François dans sa baignoire, ou Johnny Hallyday qui a une furieuse envie… Et même si ses musiciens crient au scandale en criant « On ne se moque pas »… ça devient drôlissime.

Et comme Fregoli, l’homme au tennis vert et au tennis rouge, change à chaque fois de tenue, de perruque pour mieux incarner un personnage haut en couleur.
Complicité totale avec ses quatre musiciens et la belle Carine avec qui il chante souvent en duo.
Ça fait donc trente ans que ça dure, j’étais aux balbutiements du groupe et Yves Pujol est devenu un ami au fil du temps, je l’ai suivi dans ses folies musicales mais aussi dans ses one man shows, au théâtre, au cinéma car en plus, il sait tout faire et aime varier les plaisirs.
Pour la nième fois je le retrouve au Brusc, en plein cagnard de l’après-midi mais, chance, le vent vient de s’arrêter pour laisser place à une soirée de rêve, malgré la fraîcheur qui descend des étoiles !
Auparavant juste une mise au point avec l’ami Pujol.


« Yves, trente ans d’Aïoli »… Aurais-tu cru que ça dure autant ?
Oui, trente ans, on attaque la trente et unième année !
Et non, je ne pensais pas que ça durerait. Au départ, on a fait ça pour s’amuser, et jouer avec les copains des morceaux qu’on avait écrits,  mais je ne me suis jamais projeté dans l’avenir, je n’ai jamais, jamais pensé à en faire carrière. Franchement. Sérieusement ! Même maintenant, je fais mon métier d’une année sur l’autre, ça roule, ça me va. Après, ça roule cent ans c’est magnifique, ça roule trente ans c’est magnifique, on fait un disque qui devient disque d’or, j’en suis ravi, mais ce n’est jamais avec le but de devenir « vedettes » !.
Et le but alors ?
C’est de voir mes amis, de travailler ensemble. Comme tu le vois, on est une belle équipe. Pour moi c’est mieux que d’avoir une belle voiture et ça suffit à mon bonheur
En plus, tu as su varier les plaisirs !
Oui, j’aime ça. J’aime écrire alors je « me »  suis écrit des one-man shows : « Une affaire de famille », « J’aime ma femme », « J’aime toujours ma femme », « Pujol sort ses dossiers », « Pujol, le meilleur du mieux »
Et puis il y a eu la pièce avec Patrick Sébastien « Le secret des cigales »…
Comment ça s’est passé avec lui ?

A la fois bien et mal. Bien parce que ça avait bien démarré et mal parce qu’on a dû arrêter en plein vol à cause du covid. On avait trente dates à faire, on n’a pu en faire que dix. J’espère qu’il aura envie de reprendre la pièce et qu’on puisse à nouveau la jouer.


Et encore, le cinéma !
Oui, grâce aux Chevaliers du Ciel grâce avec qui j’ai joué leurs deux films sur « Les Municipaux, « Ces héros » et « Trop c’est trop » ; je serais ravisde les retrouver et s’ils m’appellent je suis partant pour un troisième épisode !
Et les one man shows ?
C’est toujours d’actualité ! Je laisse mes camarades d’Aïoli se reposer l’hiver,  vaquer à leurs occupations puisqu’ils sont professeurs de musique, jouent dans des groupes, Chacun fait sa route et on se retrouve tous l’été pour le plaisir. Cet été nous avons fait une trentaine de spectacles. C’est pas mal ! Je prépare mon quatrième spectacle et j’ai quelques spectacles de mon Best off  à venir en décembre, à Gonfaron à Lyon, à Saint-Etienne et pour le jour de l’An je serai au Théâtre Daudet à Six-Fours !
Comment s’appelle ton prochain spectacle ?
Je ne sais pas encore… Si tu le sais, tu me le dis ! Mais il y a déjà des sketches de prêts.
Et tes projets avec Aïoli ?
On est en train de finir un album qui sortira l’année prochaine. Ce sera le sixième et on prépare la saison prochaine avec des dates à venir. On travaille sur de nouvelles compos. Il faut qu’on reste actif pour que ça continue d’avancer ».


Et on le lui souhaite ainsi qu’à ses petits copains de 30 ans (Une fille en plus !) qui nous font passer de joyeux moments…
A suivre…
Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Patrick Carpentier

DAVE : « Je n’ai pas à me plaindre »


Avec Dave, c’est une rencontre qui date de son premier énorme succès qu’est « Vanina ».
Nous nous sommes souvent croisés sur la route des tournées qui, à l’époque, duraient trois mois d’été. Je l’avais même invité aux journées culturelles que j’organisais à la Foire de Toulon qui a aujourd’hui disparu.
Puis nous nous sommes retrouvés sur les tournées « Age Tendre » où, en
coulisse, retrouvant tous les artistes de ces années-là et plus, nous nous marrions bien !
Mais le covid est venu et l’on n’a plus vu personne.
Aujourd’hui chacun reprend sa route et comme tous les artistes, Dave retrouve le chemin des scènes.
Le voici au Pradet où je ne pouvais pas le rater. Une interview ? Non, plutôt une conversation complice que nous retrouvons aussitôt.
Même si nous avons quelque peu vieilli, je retrouve avec plaisir son humour, sa gentillesse.
La première question et de savoir comment il va car on se souvient qu’il a eu un grave accident en chutant dans ses escaliers en 22.

« Eh bien écoute, ça ne va pas trop mal depuis cette petite – non, disons grosse – chute. Je me suis remis mais le problème est que je n’ai plus récupéré le goût et l’odorat et qu’à mon âge – j’ai 79 ans – le plaisir physique se faisant rare (enfin, presque !) il ne me restait plus que le plaisir de manger et ça, ça me pénalise vraiment. Manger et boire deux fois par jour, c’est très désagréable de ne plus avoir ce plaisir. Sinon, il reste de beaux moments d’oubli comme la lecture, les voyages, les rencontres et surtout retrouver la scène et le public qui est toujours sympa. Ça reste de beaux moments à vivre. De toute façon, comme on sait comment ça va se terminer pour tous, c’est bien de vivre ces moments-là.
Et tu as une longue tournée cet été !
Oui. Après deux ans de confinement, je suis heureux de repartir sur les routes, de retrouver la scène et le public. Tous mes copains, chanteurs ou comédiens, comme mon ami Daniel Auteuil, sont restés sans travailler durant deux ans et nous aimons tous notre travail, qui n’est pas un travail comme les autres. On ne pense jamais à partir à la retraite. On n’arrête pas… Tu connais ça toi aussi même si, à côté de moi, tu es un gamin !
Je te signale qu’on n’a que deux ans de différence !
Mais c’est énorme ! Si l’on avait été à l’école ensemble, avec deux ans de moins que moi je ne t’aurais même pas parlé… Même si depuis on s’est rattrapé !


Bon, alors, cette tournée. Comment se passe-t-elle ? Tu sautes toujours autant sur scène ?
Mais oui, je continue à sauter… Mais je saute doucement, disons que je sautille mais je vais toujours dans le public… Tout en regardant où je mets les pieds afin que ça ne se termine pas mal !
Tu sais, lorsqu’on est sur scène on est envahi par quelque chose et parfois on ne fait pas attention à ce qu’on fait. Je ne vais pas demander un escalier comme Line Renaud. Mais elle, elle est âgée !!!
Tu parlais de Daniel Auteuil. Le vois-tu toujours ? Que penses-tu de sa « carrière » de chanteur ?
Eh oui, aujourd’hui il fait carrière de chanteur ! Depuis la fin du confinement il commencé une nouvelle carrière. Je devrais dire « recommencé » car nous avons débuté ensemble  dans une comédie musicale « Gospel » fin 71… Mon Dieu que c’est loin ! Puis il a eu sa carrière d’acteur et a toujours regretté de ne plus avoir le temps de chanter. C’était toujours dans sa tête et il réalise un rêve. Mais il n’a pas arrêté son métier de comédien. D’ailleurs il prépare un film produit par une de ses filles et il jouera avec une autre de ses filles… C’est rigolo !
Figure-toi que j’ai découvert que tu avais failli représenter ton pays à l’Eurovision… Je ne le savais pas !
Là aussi, il y a très… très longtemps !
On m’avait demandé de représenter mon pays et au premier tour je me croyais bien placé et je pensais que les jurés étaient tous pour moi… Mais c’est une fille qui a gagné.
Alors qu’on a été concurrent, se retrouver animateur de ce concours, qu’est-ce que ça fait ?
On m’a proposé ça en 2003 et c’est là que j’ai eu la joie de rencontrer Olivier Fogiel. Nous avons réitéré l’année d’après puis on nous a virés car nous disions trop de conneries !
Dommage car c’était d’autant plus drôle que, avouons-le, le concours est plutôt…
Oui, je vois ce que tu veux dire ! Mais ça n’a pas plu à tout le monde, c’était pour certains un peu trop caustique… Un peu beaucoup, même, je l’avoue.
Mais j’étais avec Marco tout-à-l’heure. Il était de passage avec son compagnon et ses deux enfants. Il partait en Sicile chez ses beaux-parents. Ce qui est drôle avec lui, c’est que, pendant qu’on parle, il ne quitte pas son Iphone. Il est directeur général de BFM TV et il est occupé 24 heures sur 24.

Avec Pascal Campens, adjoint au Maire du Pradet

Tu es un des rares chanteurs de ces années 70 à ne pas avoir eu de trou dans ta carrière…
Non, j’ai eu, comme tous les chanteurs, de moments, disons, de calme. Je ne suis pas toujours resté au premier plan. Ce qui m’a sauvé c’est qu’on aimait m’inviter par ce que j’étais spontané, je faisais rire et du coup, je n’ai pas trop à me plaindre. Mais pour les nouvelles générations, je suis plus un animateur qu’un chanteur, ce qui est normal. Ils connaissent tous « Vanina » parce qu’à chaque fois on me demande de la chanter. Mais à mon époque, quand je voyais Tino Rossi, je me demandais ce qu’il foutait là !
Donc, la roue tourne ! »

Et le voici sur scène avec toujours la même pêche, le même rapport avec le public qui a vieilli avec lui. C’est vrai, il saute moins haut, ce qui ne l’empêche pas de sauter au milieu du public… Avec un peu de difficulté pour remonter !
Il est magnifique, la voix est toujours là et il enchaîne tube sur tube : « Sugar baby love », « Mon cœur est malade », « Dansez maintenant », « Du côté de chez Swann », « La décision », adaptation d’une musique de Brahms, « Est-ce par hasard ? », « Lettre à Hélène », « Allo Elisa »…
Pas de « Vanina » à l’horizon ?
Mais si, bien sûr car après une fausse sortie ou le public le rappelle et scande le titre de la chanson, le revoici qui vient la chanter avec toujours cette haute voix que lui seul peut donner. Et il enchaîne avec la chanson de Piaf-Aznavour « Jézabel » pour terminer avec l’Ave Maria de Schubert, superbement soutenu par l’orchestre de Richard Gardet.
Le parc Cravero était plein à craquer et l’Ami Dave a prouvé que, comme le chantait « presque » Brassens, le temps ne fait rien à l’affaire, quand on est bon… on est bon !

Jacques Brachet
Photos Patrick Carpentier

DORIAND : Parolier cœur fidèle


Il se nomme Laurent Lescaret, se prénomme Dorian mais, afin qu’on ne l’appelle « Doriann » il a ajouté à son prénom un D, devenu son nom d’artiste « Doriand ».
Sur la couverture de son livre « Un homme de paroles » paru aux éditions Léo Scheer, il apparaît en dandy mâtiné Gainsbourg, regard sûr de lui, presque arrogant.
Dans la vie c’est tout autre : timide, peu sûr de lui, doutant sans arrêt.
Parolier talentueux, homme de l’ombre, il eut aimé être chanteur dans la lumière mais l’auteur a pris le pas sur le chanteur qui a écrit avec bonheur et succès pour Lio, Etienne Daho, Julien Doré, Héléna Nogueira, Camélia Jordana, Sylvie Vartan, Mika, Michel Polnareff, les L5…
La chance et le hasard vont lui faire se rapprocher de ses idoles : Lio, qu’il adore tout jeune, qui possède ses poster dans sa chambre et qui, par miracle va venir s’installer près de chez lui. Il ira sonner à sa porte et elle le recevra en toute simplicité, alors qu’elle n’a pas la réputation d’être simple ! Il adore Daho et a beaucoup de points communs avec ce chanteur qui, découvrant une de ses chansons; lui laisse un message… sans coordonnées. Et voilà qu’un peu plus tard il se retrouve à ses côtés dans un bar ! Au fil du temps, il deviendra l’un de ses plus fidèles amis. Pareil pour Bashung, pour Mika, pour Polnareff !
Ce dernier tient tête depuis 20 ans à sa maison de disques pour finir un album. Alors que nombre d’auteurs se sont fait virer, on l’envoie à Palm Spring se frotter à lui… Et c’est la chance. Outre qu’il ne se fait pas virer, il va travailler avec lui et devenir son ami ! N’oublions pas sa rencontre avec Karen Ann avec qui il collabore depuis des années, complice et amie. Et ça dure !
Si Doriand a une carrière en dents de scie en tant que chanteur, qu’il doute toujours autant de lui et de son talent, il se rend compte de la chance qu’il a eu de rencontrer de beaux artistes avec qui il a collaboré.
Malheureux en amour, heureux en amitié. Malheureux en chanteur, heureux en parolier, un métier qui se perd aujourd’hui.

Aujourd’hui il nous raconte cette vie d’artiste dans ce livre à la fois drôle et émouvant, évidemment superbement écrit où il nous parle de ses rencontres, ses chemins de traverse, ses joies et ses peines, ses succès et ses déceptions, avec une certaine naïveté, car il est resté fan et est à la fois surpris, heureux de ces rencontres, lui le « petit parolier de l’ombre » qui est si rafraîchissant, si étonnant, si détonnant dans ce show biz sinistre, superficiel et sans pitié.
A le lire, on a comme Mika, Michel, Etienne et les autres, très envie d’être son ami.
D’autant qu’après avoir écrit, il accepte qu’on en parle.

« Alors, cette couverture « à la Gainsbourg », pourquoi ?
(Il rit) Vous n’êtes pas le premier à me le dire et pourtant, lorsqu’on l’a fait, on n’a pas du tout pensé à Gainsbourg mais à… Lucky Luke ! Au départ il avait une cigarette mais il dû la changer pour une paille et moi je l’ai transformée en stylo, ce qui me représente mieux. Et quoique j’adore Gainsbourg, ce n’est pas un hommage !
Sur les photos ou les pochettes de disques, vous ne souriez jamais… Pourquoi ?
Et pourtant je crois sourire souvent et même rire mais sur les photos… Je souris intérieurement ! Ce n’est pas si facile de sourire devant l’objectif. Disons que je suis le nouveau Sardou ! (Et là il rit carrément !)
Bon, vous êtes timide mais vous osez quand même aller frapper chez votre idole : Lio. Et en plus, elle vous reçoit !
Je crois que lorsque je suis motivé, j’ose, je ne veux passer  à côté de ce que j’ai envie de faire. Je crois que c’est une force qui me pousse malgré ma timidité et la situation complexe. J’avais passé une heure  et demie de route en voiture, j’étais devant la porte et je ne pouvais plus reculer. On était en pleine campagne, ce qui est déjà plus facile que de trouver une maison dans une ville. Par contre j’étais dans le froid et la neige, on se serait cru dans un film suédois ! Au départ ce n’était pas gagné mais je crois que Lio et son mari ont eu pitié de nous. Le rêve se concrétisait et finalement je n’étais pas plus surpris que ça et ce qui m’a fait le plus plaisir c’est que je sentais que j’existais dans leurs yeux.
La chance est avec vous puisqu’à la sortie de votre premier disque c’est Etienne Daho « in person » qui vous téléphone pour vous dire qu’il a aimé !
Daho faisait aussi partie de mes idoles et, alors que j’étais absent de chez moi, il me laisse un message sans laisser ses coordonnées. Ça a été un grand regret. Trois semaines plus tard, je monte pour la première fois à Paris avec deux copains, nous allons boire un verre aux Folies Pigalle… et je tombe sur Daho ! Pourquoi on est venu là ? Le hasard, la chance… La vie vous attend quelque part !

Encore une chance : On vous envoie à Palm Spring essayer de convaincre Polnareff de finir l’album que sa maison de disques attend depuis… vingt ans ! D’autres auteurs se sont fait virer, vous, vous vous installez chez lui et vous terminez ce disque !
C’est vrai que je pratique un métier de l’ombre, que je manque souvent d’assurance mais quand je veux quelque chose, je m’accroche. Ça devient pour moi un défi, je ne laisse pas ma place. J’avais décidé !
Facile de travailler avec lui ?
C’est un peu comme les montagnes russes, un jour tout va bien, le lendemain tout est à refaire. Mais si ce n’est pas toujours simple, c’est envisageable ! Sans compter que si j’aime l’artiste, l’homme me touche. Il faut faire le dos rond, mettre son égo dans la piscine et comme elle est à 50°, on n’a pas froid !
Alors que dans ce métier on se tutoie très facilement, vous vous êtes toujours vouvoyés. Pourquoi ?
Ça vient surtout de moi, j’aime qu’il y ait une distance, ça m’est plus facile pour travailler. Je veux garder mon espace, mon territoire et rester « moi » dans une relation.
Alors que votre talent est reconnu et pas par les moindres, vous avez toujours l’air surpris qu’on s’intéresse à vous !
C’est vrai que je suis toujours étonné qu’on s’intéresse à mon travail. Comme je suis timide, j’ai toujours peur qu’après une rencontre, les gens ne se souviennent pas de moi. Mais malgré mon manque d’assurance, mes doutes, j’aime répondre aux défis.
Vous avez fait de belles rencontres mais il y a eu quelques loupés. Comme Camélia Jordana.
Ce n’est pas un loupé puisque sa première chanson, que je lui ai écrite  « Non, non, non (écouter Barbara) » a été son premier tube. Mais son succès a fait qu’on ne parlait pas de l’album et elle a fait un rejet et n’a plus voulu la chanter. C’est souvent le cas lorsqu’un premier succès est trop envahissant qu’il occulte tout le reste. Il n’y a que le temps qui fera qu’un jour elle pourra la rechanter.


Et Françoise Hardy ?
C’est une de mes chanteuses préférées et, là encore, le jour où j’ai entendu sa voix au téléphone, ça m’a paru bizarre tellement c’était intime. C’était perturbant. Elle m’appelait après avoir entendu la chanson de Julien Doré « Les bords de mer » et voulait que je lui écrive un texte sur une musique d’Alain Lubrano. Elle a aimé le texte mais Lubrano n’aimait plus sa musique et a refusé de la lui donner. Du coup, ça ne s’est pas fait et c’est un grand regret car je crois que le texte lui allait bien. Mais ce sont les aléas du métier.
Alors, que voilà un drôle de trio : Philippe Katherine, Mika… et vous !
C’est une drôle d’histoire. Avec Philippe on se connait depuis vingt ans et pour rigoler on écrit un jour une chanson marrante « Danser entre hommes ». Que Barclay refuse, c’était trop rigolo pour lui ! Vingt ans après, on reparle de cette chanson, Mika était là et on décide de l’enregistrer tous les trois !
Vous êtes très éclectique, passer de Françoise Hardy aux L5, de Polnareff à Sylvie Vartan, de Lio à Bashung…
Pour moi il n’y a pas de différence tant que c’est de la chanson pop, que ça n’est pas de la variété, ça reste dans mon domaine et que ce soit au second degré si possible. J’ai aimé écrire « Toutes les femmes de ta vie » pour les L5 tout comme j’ai aimé écrire « Elle me dit » pour Mika ou encore « Nos âmes à l’abri pour Bashung…
Et votre rencontre avec Emmanuelle Seigner ?
Une très belle rencontre. J’avais écrit « Dingue » avec Karen Ann et il se trouve qu’Emmanuelle adore et décide de faire tout un album avec nous. On l’écrit entre Paris, Barcelone, Tel Aviv, on l’enregistre et au moment de sa sortie l’affaire Polanski éclate et il est arrêté en Suisse. La presse s’emballe et plus question de sortir le disque. Un an de travail, un an de notre vie. Il ne sortira que six mois après mais les radios sont frileuses, elles ont peur de prendre parti. On a eu seulement quelques beaux articles. Plus tard, Dani a repris « Dingue ». Ça a été son dernier enregistrement.
Alors, avec tout ça, où en est le chanteur ?
Il chante toujours ! Il reste stable, dans l’ombre ! Pour moi qui suis très discret c’est un confort de ne pas avoir la notoriété d’un chanteur, je ne le supporterais pas. J’aime faire des disques pour les autres et quelquefois j’en fais un pour me faire plaisir. Le 31 août sortira un single inédit « Himalaya » écrit avec Karen Ann au piano, qui parle de la froideur de l’amour. Mais j’ai toujours besoin des deux. Un jour Etienne Daho m’a dit : « N’oublie pas pourquoi tu es monté à Paris ». Je ne l’oublie pas ».

Nous nous sommes donné rendez-vous, non pas dans vingt ans, ce serait trop pour moi, mais un jour dans le Midi, d’autant qu’il a de très beaux souvenirs de ses premières vacances… à Six-fours !


Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Audoin Desforges
Photo couv : Ludovic Sarmento

Solliès-Pont – Festival du Château
Sofiane PAMART, un pianiste venu d’ailleurs


Il y a longtemps que l’on avait vu une salle déchaînée comme celle qui accueillait le prodige pianistique qu’est Sofiane Pamart.
Mais avant la venue de la star, apparaissait sur scène Anabelle, issue de l’émission « La nouvelle star ».
Sculpturale et belle, elle déboule avec de l’énergie à revendre, le rythme dans la peau, la voix superbe et elle accroche tout de suite le public tant elle est souriante et a le contact immédiat avec lui. Avec ses immenses tresses dont elle joue lascivement, elle nous chante la lune et le soleil, soleil qu’elle est elle-même.
Il faut savoir happer le public lorsqu’on démarre un spectacle alors qu’il fait encore jour et qu’il est venu pour un autre artiste. Mais sa voix, sa beauté, son sourire, ses chansons qu’elle compose sur un rythme très actuel et surtout son dialogue avec le public nous ont séduits, totalement charmés.
A suivre… De très près !

Et puis vient Sofiane Pamart qui semble arriver de la plage avec son bob, ses lunettes de soleil et sa chemise hawaïenne. Il s’avance lentement, sourit sous les applaudissements déjà bien nourris.
Il s’assied au piano et, dès les premières notes, c’est l’enchantement. Ses doigts glissent sur le clavier, comme une caresse, avec légèreté et une grande dextérité. C’est du « classique » pur jus et l’on est déjà sous le charme.
Mais alors qu’on se laisse bercer par sa musique intimiste, un coup de tonnerre explose et le batteur nous annonce une autre musique et piano et batterie mettent aussitôt le public en transe. Une orgie de rythme, nous submerge, appuyée par des images qui nous laissent voir « de près » ses mains qui dansent sur les notes, entremêlées de celles du batteur et d’images animées oniriques et superbes.


L’ensemble nous entraîne dans un autre monde. C’est de la haute voltige et il nous fait passer du romantisme au hip hop, du rap à la musique arabisante, il nous fait voyager et le public le suit avec bonheur.
Sans dire un mot de tout le spectacle, il se lève, fait lever le public qui n’attend que ça et qui tape frénétiquement dans les mains avec lui, totalement subjugué.
C’est presque irréel et on est totalement sous le charme de cet artiste hors du commun qu’on ne veut plus laisser partir.
Une voix s’élève : « Reviens, on n’en a… pas marre !!! »
Il y a longtemps que je n’avais vu un tel engouement pour un artiste qui ne chante pas et l’on se dit que, lorsque le talent est là, un piano et une batterie… Ca suffit largement !
Un moment magique : lorsque, du piano, il s’installe au synthétiseur et nous joue une partition qui semble émaner de Brahms… Impressionnant !
Ce fut une soirée à laquelle il y a longtemps que je n’avais participé, pleine de talent, d’énergie et de folie, à l’unisson d’un public déchaîné.
Un pianiste venu d’ailleurs dont on se souviendra longtemps.

Jacques Brachet

Festival de la Collégiale
Un anniversaire frénétique !


Déchaîné !!!
Notre ami Jean-Christophe Spinosi était déchaîné pour fêter ce dixième anniversaire du festival de la collégiale !
L’ayant rencontré la veille, tout à son excitation il m’avait résumé ce concert mais c’était au-delà de ce qu’il m’avait raconté.
Tout d’abord il arrive sur scène après que tous ses musiciens se soient installés et c’est déjà une ovation d’un public qui a investi le lieu. Souriant, sautillant, on le sent prêt à nous proposer un spectacle incroyable, original, avec tous les invités qu’il a réunis.
Il a décidé de nous offrir un voyage à travers la France, l’Italie, l’Egypte, l’Argentine, Cuba…
Bien sûr Haendel et Vivaldi, ses compositeurs de prédilection, ne seront pas oubliés, interprétés par son orchestre et la voix ample et généreuse de Margherita-Maria Sala qui va jouer un duo d’amour et d’humour avec le maître, s’envoyant des œillades, se frôlant, s’embrassant. On sent entre eux une complicité incroyable. Il ira jusqu’à lui faire chanter du Monteverdi… en salsa ! Fallait oser !


Mais les surprises s’enchaînent car il a invité deux musiciens qu’il a connus en Egypte avec qui il a joué : Mohamed Abozeky qui joue de l’oud et John Samir qui joue du ney. Tous deux, accompagnés au violon par Jean-Christophe, nous emmènent aux fins fonds de la naissance de la musique, sur des rythmes arabisants ensorcelants. N’oublions pas le flûtiste Jean-Marie Goujon, qui nous a offerts de brillants solos.Parmi les surprises, notons aussi une très belle version de « The girl from Ipanema » que Margherita-Maria chantera sur des rythmes brésiliens avec des poses et des regards langoureux. Autre moment inattendu que celui où il interprète un extrait des « Quatre saisons » de Vivaldi … sur des rythmes cubains. Encore un très beau moment de communion avec le public lorsque Jean-Christophe entame au violon, accompagné de l’accordéoniste Alexis Lambert, la chanson éternelle de Prévert et Kosma « Les feuilles mortes » et qu’il fait chanter la salle qui connait cette chanson par cœur. Et il terminera sur un débridé « Joyeux anniversaire le festival de la Collégiale » qui fera lever tout le public sous une standing ovation bien méritée.

Après cette performance, on retrouvait le maître autour d’un somptueux gâteau, avec le maire, Jean-Sébastien Vialatte, l’adjointe à la culture Fabiola Casagrande, que Jean-Christophe coupa et distribua lui-même.
Puis ce fut la ruée, d’une part sur le buffet, comme toujours pour certains, mais aussi autour de Jean-Christophe qui aime ce moment de communication avec ce public qu’il aime et qui le lui rend bien.
On se souviendra longtemps de ce moment suspendu dans la chaleur de l’été.
Et on est prêt pour dix ans encore à venir !

Jacques Brachet

Six-Fours – la collégiale
Margherita-Maria SALA : « Je ne me ferme aucune porte »


Une voix, une énergie… et un accent italien marivigiloso !
Elle dit parler « un po » en français, tout en s’excusant et,  avec cet accent chantant qui est déjà musique, on la comprend parfaitement.
Elle est toute joie, tout sourire et, à l’ombre de la Collégiale, elle nous parle de sa vie qui n’est que musique. « Je viens, comme vous l’avez compris d’Italie, née dans une famille musicienne, mon père étant pianiste et chanteur et ma mère musicologue. Donc difficile de ne pas aimer la musique et de ne pas chanter !
Je suis la quatrième de cinq enfants et les trois premiers sont aussi musiciens. Le cinquième viendra plus tard.
J’ai commencé à chanter à 5 ans, Avec mes frères nous avons joué dans des opéras en tant qu’enfants, dans « Tosca » et dans « Werther ». Chanter, c’était pour nous très naturel.. Nous avons même créé un groupe vocal où nous chantions du classique, du jazz, des variétés comme les Beatles. Ca dépendait du contexte !
Comment êtes-vous devenue soliste ?
Nous avons d’abord chanté comme choristes, entre autre dans les chœurs de la Fenice à Venise.
Puis, j’ai voulu devenir soliste. Je me suis présentée au concours de musique baroque d’Innsbruck où j’ai gagné le premier prix et le prix du public. L’on m’a engée au Concert House de Vienne.
Vous avez découvert la musique baroque ?
Oui, au départ j’étais alto et j’ai trouvé plus de choses à chanter en tant que contralto dans la musique baroque. C’était plus facile pour moi de trouver un répertoire qui s’adaptait à ma voix. Mais j’ai toujours aimé varier les plaisirs, je ne me ferme aucune porte et c’est ce qui me fait être en progrès continu. Je suis curieuse de savoir ce que l’avenir m’apportera.

Votre rencontre avec Jean-Christophe ?
Tout simplement parce qu’il a appelé mon agent car il cherchait une interprète pour un programme qu’il avait choisi. Je ne connaissais pas les œuvres qu’il voulait que je chante mais j’ai étudié son programme et ça a été le début d’une collaboration intense car depuis, nous avons fait beaucoup de choses ensemble dont, l’an passé, un concert dans un festival de jazz.
Vous êtes donc multiple !
(Elle rit) Oui car j’aime toutes les musiques. Bien sûr, le baroque est la musique de prédilection de Jean-Christophe et j’ai beaucoup chanté du Vivaldi, du Haendel… Nous nous sommes vraiment trouvés, nous sommes devenus complices et c’est toujours un grand plaisir de travailler avec lui.
Et en dehors de lui ?
Je chante lorsqu’on m’appelle et d’ailleurs plus en France qu’en Italie.
Pourquoi ?
Je travaille un peu en Italie mais pas comme en France, en Allemagne, en Autriche où la musique baroque est plus jouée qu’en Italie où elle reste un peu confidentielle, même si ça commence à changer. Les Italiens préfèrent les grands opéras classiques romantiques comme Verdi ou Puccini. C’est plus traditionnel.
Alors, votre prochaine aventure ?
Je suis rentrée ce matin d’Innsbruck  où je suis en pleine répétition de concerts qui auront lieu les 2, 4, 6, 8 août. C’est une nouvelle production. C’est difficile mais c’est très excitant. Et puis, je retrouve Innsbruck que j’adore, où tout a commencé, où j’ai trouvé une vraie famille, une vraie amitié avec les musiciens et je vais tous les ans avec plaisir y travailler
Mais vous reviendrez chez nous ?
Bien sûr, avec grand plaisir, si Jean-Christophe me le demande ! »

Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Patrick Carpentier  

10ème anniversaire du festival de la Collégiale
Jean-Christophe SPINOSI :
« Un moment essentiel de ma vie d’artiste »


10 ans … Déjà 10 ans que Jean-Sébastien Vialatte (au prénom prémonitoire !) le maire de Six-Fours a décidé de créer ce festival dans un lieu magique : la Collégiale. Et Jean-Christophe Spinosi et son ensemble Matheus s’y est lové, y a fait sa maison, comme il aime à le dire, et chaque année nous avons la joie de l’y retrouver avec des concerts magnifiques.
Avec les années, nous sommes devenus amis et j’ai toujours un grand plaisir à retrouver ce grand musicien, aussi simple que talentueux, souriant, énergique, toujours tellement amical. Et très volubile tant il est passionné par son métier.
Il regarde le superbe panorama que nous avons de cette Collégiale qu’il aime :

« Lorsque j’arrive ici, je suis heureux. Je suis amoureux de ce lieu, de ce paysage et je ne remercierai jamais assez le maire de m’avoir offert « ça » ! Dans une vie de musicien, c’est tout simplement merveilleux.
Alors, Jean-Christophe, résume-moi ces 10 ans !
(Il rit) Ça ne nous rajeunit pas mais ça nous fait de beaux souvenirs !
Justement, quels souvenirs en as-tu gardés ?
Je ne pourrais pas vraiment dégager de meilleurs souvenirs, tant ils sont nombreux. Plus le temps passe, plus cela prend une valeur profonde à mes yeux. Chaque année est pour moi un moment essentiel, un privilège, tant sur le plan musical qu’amical, la joie de l’échange qui se fait avec les musiciens, le public, tous les gens qui travaillent à ce festival. J’ai l’impression de prendre chaque fois un peu plus de hauteur, d’être toujours un peu plus près du ciel à chaque année qui passe…
Avec les initiales de ton prénom, c’est évident !
(Il rit) Si, dans une autre vie, j’arrive à monter jusqu’au ciel, j’avoue que je suis de plus en plus profondément ému à l’idée de « monter » à la Collégiale. Cette ascension me fait monter de plus en plus haut et ça me rapproche de plus en plus des gens.
La musique est pour moi de plus en plus importante vu l’état du monde qui est compliqué en ce moment. Elle nous protège, elle nous défend, elle nous répare et nous lie les uns aux autres. Elle nous fait communier.
Et ça te rend heureux ?
Bien sûr et ce qui me rend aussi très heureux, c’est cette volonté de l’équipe municipale d’avoir voulu et pu offrir aux gens ces moments de convivialité, des concerts qui ne se ressemblent pas qui, je l’espère, sont pour moi et pour le public, des moments incroyables qui se font dans un esprit de simplicité. Les discussions que nous avons avec le public après le concert sont des moments de grâce et c’est pour moi le but ultime de la musique.
C’est peut-être aussi le lieu qui veut ça ?
Oui, c’est la spiritualité de ce lieu à la fois plein de gravité, de joie, de lumière. C’est pour moi un acte spirituel que de venir y jouer car c’est un lieu d’échange, un acte d’amour avec le public car plus les années passent plus il y a de proximité. C’est une profession de foi et rien que d’en parler ça m’émeut. La collégiale est pour moi l’un des plus beaux endroits du monde.

Tu as dû pourtant en voir, de beaux endroits !
Oui, c’est vrai, c’est le privilège du métier de musicien d’aller un peu partout dans le monde et de découvrir des lieux magnifiques. Mais je reviens à la collégiale comme si je revenais à la source. Il y a tout ce parcours avec le public, l’organisation, la mairie. C’est comme construire une œuvre d’art depuis dix ans. Dix ans, c’est peu de temps par rapport à celui qu’il a fallu pour construire la collégiale mais ça s’inscrit dans la temporalité. C’est un lieu apaisant qui apporte la sérénité et en même temps, il y a une grande énergie qui s’en dégage.
Le programme de cet anniversaire est-il particulier ?
Pour ces dix ans, j’ai souhaité offrir au public à la fois des pièces nouvelles mais aussi revenir sur des choses que nous avons faites car ces dix ans ont été des rencontres musicales qui ressemblent au lieu. Il me semblait tout à fait logique d’inviter Margherita Maria Sala avec qui j’ai beaucoup travaillé dans différents pays. Elle est la gentillesse, la simplicité, l’originalité, elle n’a pas peur d’aller dans l’impro. Elle est une des plus grandes chanteuses de sa génération de l’opéra baroque. C’est l’artiste « multi-genres » qu’il nous fallait pour représenter l’histoire de la musique traditionnelle, de l’opéra, de la musique populaire.
Mais je voulais aller au-delà et c’est pour ça que j’ai invité Mohamed Abozekry, qui joue de l’oud et John Samir qui jouer du ney. Deux musiciens que j’ai rencontrés en Egypte, avec qui j’ai joué. Nous allons donc remonter aux sources de la musique car on vient tous de là.
Les deux autres concerts sont un hymne à la nature !
Le 18  nous proposons « Les quatre saisons » de Vivaldi et le 19 « La symphonie pastorale » de Beethoven. Ce sont deux œuvres qui  m’ont toujours accompagné, deux œuvres qui se rapprochent de la nature, on pourrait dire deux œuvres qui parlent d’écologie avant l’heure à travers la musique, qui véhiculent l’émotion et sensibilisent les gens aux problèmes de la planète. On y voit la nature en cinémascope !
Ça me permettra également de présenter notre académie Haendel-Hendrix…

Raconte
C’est une académie que nous avons créée pour les jeunes musiciens venus de toute l’Europe, sortant du conservatoire, ce qui nous a permis d’aller jouer à Hambourg, à Amsterdam au Parlement Européen à Bruxelles. Elle a été créée pour aider les futurs musiciens qui sont prêts à être professionnels, afin de leur donner une plus grande fantaisie que ce qu’ils ont appris au conservatoire, un esprit d’aventure qu’ils apporteront partout dans des lieux différents, pas que dans des théâtres ou des festivals mais là où l’on peut faire de la musique, afin que la musique survive. Afin aussi de leur donner une autonomie, un sens de l’improvisation…
En fait, c’est la relève !
Exactement ! »

Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Patrick Carpentier et Jacques Brachet