Archives de catégorie : Musique

Notes de musique

A LONG TRIP 22
Claudio Fasoli Samadhi Quartet – Enregistré en public à Rome en février 2022 Parco Della Musica records (MPR188CD)
Claudio Fasoli (ténor et soprano sax), Michelangelo Decorato (piano),Pietro Leveratto (contrebasse), Marco Zanoli (batterie).Sur des compositions, alternativement ou en commun, des quatre musiciens on embarque pour un « Long Trip » de savoureuse musique.
Claudio Fasoli est rayonnant et joue « Body and Soul » que ce soit au ténor ou au soprano, avec ce son chaleureux, ample et généreux, un modèle de phrasé, qui font les grands saxophonistes de jazz. Il a enregistré plusieurs dizaines de disques, reçu de nombreux prix et écrit trois livres. Un pianiste au jeu brillant et aéré qui fait parfois penser à Chick Corea. Un vrai batteur jazz, qui pulse, propulse et relance. Un contrebassiste au jeu pur, très fluide ; très imaginatif dans les solos. « Boerum Hill » donne à entendre toutes ces qualités ; seul morceau du disque en tempo rapide. Un autre morceau très représentatif des qualités du groupe , « Sext » : après un début très calme, lyrique, une montée crescendo, le ténor se déchaîne avant de retrouver la sérénité. 
Un disque apaisé, serein, qui prend son temps. Les musiciens jouent sur le même terrain, à égalité, avec de très riches échanges, une grande sensibilité, un sens de la mélodie avec un lyrisme au bord de l’âme, et un engagement total.
HASARD
Claudio Fasoli NeXt 4tet – Enregistré entre juin et juillet 2024 à Cinisello Balsamo (Ml). abeat records ABJZ 275.
Claudio Fasoli (ténor et soprano sax), Simone Massaron (Guitare et eletronics), Tito Mangialajo Rantzer (contrebasse), Stefano Grasso (batterie et percussions).
Il n’y a pas de « Hasard » quand d’excellents musiciens font de la très bonne musique, ce qui est le cas avec ce dernier disque de Claudio Fasoli ; celui-ci reste le maître des saxophones ténor et soprano ; un gros son limpide, un phrasé accrocheur au ténor, un son parfois très méditatif au soprano. Un guitariste au chant éthéré ou très rock en guitare saturée. Un bassiste au gros son, sans failles, envoûtant, des notes nettes et rondes, un batteur maître du tempo, très subtil comme dans « Pet », en duo avec le ténor.
Pour l’ensemble du disque on pourrait dire que c’est du bebop revu par Jean-Sabastien Bach, par exemple « Trio », morceau qui donne le ton, l’atmosphère du disque. Il me semble aussi que le groupe utilise quelque peu les harmonies impressionnistes, dont celles de Ravel comme dans « Claud », on y entend même des réminiscences du « Boléro ».
A noter le peu d’utilisation des electronics. Ajoutons que toutes les compositions sont de Claudio Fasoli.
Pas d’exploits technique chez ces musiciens, mais du partage, de l’écoute, un total engagement. De la musique qui vient de l’intérieur pour atteindre à la beauté qu’on partage dès les premières notes.
L’Italie sauvera le jazz.

Serge Baudot

ALTIERA… Tant pis ?… Non, tant mieux !

C’est une jolie jeune femme du nom d’Altiera.
De ses origines corso-polonaises, elle a le regard à la fois ensoleillé et nostalgique et sa première chanson, écrite et composée par elle-même « Tant pis », possède ce que l’on trouve dans les chansons brésiliennes, à la fois musicales et rythmées, saupoudrées de mélancolie, de « sausade ».
Mais dans la vie, elle garde ce soleil qu’on attrape de côté de la Méditerranée.« Altiera… D’où vient ce prénom ?
C’est en fait mon nom de scène qui m’a été suggéré par un tableau que j’avais fait, où j’avais écrit ce mot. Altiera en corse c’est tout simplement l’adjectif « Altière » c’est-à-dire « fière » et pour moi, ça a été une évidence.
Du Nord au Sud, vous avez donc deux origines très différentes. Qu’avez-vous de chacune ?
De Pologne, pas grand ’chose car, justement, ne n’en connais pas grand-chose. Peut-être l’âme slave qui m’apporte un peu de nostalgie. Et mon amour pour Chopin !
De la Corse j’ai la culture, j’ai grandi avec cette langue, j’ai donc ce côté insulaire.
Chantez-vous en corse ?
Oui, beaucoup. J’ai même eu un projet qu’un jour certainement je réaliserai.
Alors au départ, vous avez appris le piano classique puis vous vous êtes tournée vers l’histoire de l’art. La chanson dans tout ça ?
La chanson est venue bien avant tout ça, et même la composition. Dès l’âge de dix ans j’écrivais des chansons. J’avais même écrit une chanson pour ma jument ! Mais j’étais bien trop trouillarde pour chanter devant les gens. Donc je me suis tournée vers l’histoire de l’art et le piano avec lequel j’ai été professeur. Même si ça ne se dit pas, j’avais des préférences pour certains élèves avec lesquels j’ai gardé des liens !
J’ai eu aussi des projets de peinture mais le Covid a beaucoup changé de choses. Et la musique était une évidence. Depuis 23/24, avec le recul, j’ai compris que ce serait la musique.

Et voilà donc la première chanson qu’on peut entendre. Pourquoi une seule chanson ?
Au départ c’était l’écriture J’adore écrire, j’ai énormément de textes, de poésie que j’adorerais recueillir un jour dans un livre.
Vous pourriez en faire des slams !
C’est drôle que vous disiez cela car j’adore le slam et même le rap… Pas le rap « gangsta » mais il y a de merveilleux rappeurs qui sont des poètes magnifiques, dont les textes sont très écrits, comme le groupe I Am. Ce sont de vrais poètes. J’ai d’ailleurs une nouvelle chanson qui est plus dans ce style-là, avec un côté sociologique que j’aime bien.
J’ai aussi participé à une rencontre de rap dans laquelle j’étais la seule fille et j’ai beaucoup aimé.
Dans votre première chanson, pas de slam , pas de rap…
(Elle rit) Non, pour la première, j’ai pensé à deux chansons mais celle-ci me semblait plus logique, plus été, plus espoir.
Elle est pourtant plutôt triste…Le titre déjà est un peu fataliste…
Vous trouvez ? Je la trouve plutôt optimiste. Elle a un côté positif. Elle décortique l’amour, les sentiments. Elle a peut-être quelque chose qui ressemble à mon côté slave.
Pour en revenir à cette chanson, c’est un peu difficile de se faire une idée de votre personnalité, ce que vous êtes vraiment en une seule chanson, de votre univers.
C’est vrai mais à la rentrée, sortira un EP avec quatre ou cinq chansons. Il faut dire que j’avais un peu abandonné les réseaux sociaux et qu’il faut que je relance un peu tout ça et j’ai préféré commencer par une chanson pour qu’elle puisse être entendue et pas être perdue au milieu d’autres chansons.
A propos, quelles sont vos influences ?
Oh, il y en a beaucoup… Sade, Barbara, Lana del Rey, Billy Ellish… Et beaucoup d’autres chanteuses…
Comment définiriez-vous votre musique ?
Justement avec toutes ces influences, pop, électro, RnB. C’est ce qu’on trouvera dans mon EP.

N’avez-vous pas pensé tenter une émission comme «  The voice » ?
J’ai failli ! J’y ai pensé un temps mais rien que d’imaginer qu’aucun fauteuil ne se retourne, c’était très angoissant pour moi. Mais en fait, c’aurait été aussi angoissant si quelqu’un se retournait !
Ah bon, pourquoi ???
Parce qu’alors il aurait fallu que je me dévoile, que je parle de moi et ça aussi ça m’aurait beaucoup angoissée. C’est quelque chose qui m’aurait dérangée, de me dévoiler devant des milliers de téléspectateurs.
Dans ce cas, c’est vrai, ça devient impossible pour vous !
(Elle rit) Vous voyez, je suis un peu compliquée ! Je suis une grande traqueuse et travailler dans mon coin me désangoisse. Peut-être aujourd’hui, ayant pris confiance en moi, ce serait plus facile. Finalement, je préfère travailler à l’ancienne.
Alors, après ça, quels sont les projets ?
Un premier EP. Peut-être un second et aussi penser à la scène car je pense déjà au printemps prochain et tenter de faire de la scène, peut-être des festivals. Et pour cela il faut que j’aie d’autres chansons à faire entendre. Mais déjà, après près de deux mois de promo je vais m’octroyer quelques semaines de vacances en famille en Corse et retrouver mon piano et mon studio ! »

Propos recueillis par Jacques Brachet

Jean-Pierre SAVELLI…
Un vibrant hommage à Michel Legrand

Concert JP Savelli – 2 aout 2025

C’est dans le magnifique domaine de Beaudouvin à la Valette, que Jean-Pierre Savelli nous avait donné rendez-vous pour un spectacle-hommage à Michel Legrand.
Il faut savoir que le fameux Peter, du duo Peter et Sloane n’est autre que ce toulonnais, parti un jour à Paris pour chanter, qui y devait rencontrer son Pygmalion, un certain compositeur, musicien international Michel Legrand. Rencontré par hasard, il lui propose de le produire et de chanter une de ses compositions : la chanson du prince, issu du film de Jacques Demy « Peau d’Âne ». Suivra son premier succès « Un goût de soleil, de pomme et de miel » qui a fait le tour du monde, chanté par les plus grands chanteurs.

Répétitions dans le vent
La famille réunie

De là, un fil rouge a lié jusqu’à la fin les deux artistes et on les a souvent retrouvés liés à Jacques Demy ou Claude Lelouch, de « Peau d’Âne » à « Les uns et les autres » où son duo avec Nicole Croisille fut un énorme succès, en passant par « Un parfum de fin du monde », « Il était une fois l’espace », « Un été 42 », « Et demain que feras-tu de ta vie »….
Revenu dans le Var, à la Valette, voici quelques années, après cinquante ans de métier, il a décidé de rendre hommage à son maître en enregistrant un CD de ses plus belles chansons, dont celles qu’il a créées, et de lui consacrer un spectacle, celui qu’il nous a offert en ce samedi à Beaudouvin.

Laurent, Mattéo, Alexandra, Jean-Pierre, Antoine, Lilian, Mathis

Durant un moment, on a eu peur qu’un vent violent ne vienne annuler le concert mais il a eu la délicatesse de s’arrêter au moment où Jean-Pierre entrait en scène, entouré de cinq musiciens qui, hormis un nordiste, sont tous de la région. Et quels beaux musiciens !
Laurent au piano, Matéo au sax, Mathis à la trompette, Antoine le bassiste et guitariste, Lilian le batteur. La grande classe : tous sont vêtus d’une chemise parme, Jean-Pierre de blanc vêtu, lunettes noires. Et cerise sur le gâteau, Alexandra Milesi une magnifique chanteuse qui fera un superbe duo avec Jean-Pierre
Mais avant le spectacle, consciencieusement Jean-Pierre s’accorde avec ses musiciens, vérifie le moindre son afin que le spectacle soit parfait.

Duo avec Alexandra
Duo avec Lola

Et ce fut un magnifique feu d’artifice, un incroyable bouquet de chansons signées Legrand, dont les mélodies sont toutes dans la tête. L’âge passant JP a gardé sa superbe voix aux accents bluesy et jazzy, souvent aux intonations à la Legrand et l’on comprend pourquoi celui-ci a choisi de lui offrir ces belles chansons.
Un concert à la fois plein d’énergie et aussi d’émotion, surtout lorsque sa fille Lola monte sur scène faire un duo avec son père.
Ce fut une belle et émouvante soirée, sous le regard bienveillant de Sandry, son épouse, danseuse et chorégraphe, qu’on retrouvera dans un show exceptionnel le 29 août place Jean-Jaurès, à la Valette où toute la famille sera réunie sur scène avec une pléiade d’artistes issus de leurs studios.
A ne pas manquer.
Par contre, si vous avez raté ce concert, vous pourrez le retrouver le dimanche 9 novembre au Palais Neptune de Toulon.

Duo d’amour, de musique & de danse

Jacques Brachet
Photos Alain Lafon
Merci à Bernard Roux qui nous a fort gentiment accueillis sur le domaine

Villa Simone : Paul LAY et ses complices… Du grand art !

Villa Simone : Paul LAY et ses complices… Du grand art ! Tout commence par une mélopée aux accents irlandais, chantée d’une voix cristalline par Isabelle Sorling, accompagnée du pianiste Paul Lay qui effleure les touches avec finesse et du contrebassiste Simon Tailleu qui rythme cette litanie. Musique étrange, voix d’ange, accentuée par la stridulation des cigales qui ont décidé de s’immiscer dans le récital.
Et l’on change de rythme avec, nous dit le pianiste, trois chansons américaines d’un autre temps, entre 1860 et 1900. Chansons d’amour, de guerre et de liberté. Le rythme a changé, entre charleston, Gershwin et Dave Brubeck, des musiques sous influence que le pianiste fait allègrement sonner.
On sent le plaisir de l’artiste qui danse sur son tabouret et voilà qu’il nous propose un moment d’anthologie avec cette « battle » qu’il nous offre avec son contrebassiste, d’une dextérité, d’une énergie, d’une intensité qui fait crier et applaudir le public. On sent toute la complicité des trois artistes qui jouent ensemble depuis onze ans. Et si Paul Lay avoue les avoir trompés avec d’autres musiciens pour d’autres aventures, ce trio demeure sa famille et il se retrouve toujours à certains moments de leur parcours
Autre instant à la fois magique et émouvant : Cette chanson qu’a composé le pianiste sur un poème d’un jeune garçon de 17 ans qui suivait ses cours en Allemagne, qui dut, par la force des choses, combattre contre ses amis et mourir dans les tranchées. Poème chanté avec une rare émotion par Isabelle Sorling. Car dans ce trio, chacun a son morceau de bravoure, soutenu par les deux autres.
Et nous voilà à la – presque – fin du concert avec ce nouveau grand moment :  « The battle of the Républic » où quand un gospel – en l’occurrence « Glory Alléluia » – devient jazzy par la voix d’Isabelle Sorling qui nous offre une performance incroyable, entre grave et aigu, entourée des deux autres musiciens. C’est du grand art !
A tel point que le public, subjugué, en redemande debout et que notre trio reviendra deux fois !


Ce fut un superbe spectacle dans ce magnifique lieu qu’est la villa Simone.
Un seul bémol : l’on nous avait placés sur le côté, le temps d’admirer durant tout le concert, le dos du pianiste ! On aurait beaucoup aimé voir les expressions de son visage, tant il y avait de jubilation dans sa façon de s’exprimer.
Mais on eut le temps de le voir de face durant l’entretien qu’il nous accorda après le spectacle… Dans  la pénombre et le chaos des chaises que l’on rempilait !« Paul, il paraît que vous avez commencé à jouer du piano à trois ans ?
(Il rit) Non ! A trois ans, mes parents m’avaient offert un petit clavier pour Noël et j’arrivais, au bout de quelques mois à jouer les chansons qu’on apprenait à l’école ! Ils se sont alors dit que je devais avoir de l’oreille et donc, au fil des ans, j’ai eu des claviers un peu plus larges. Et j’ai commencé vers mes cinq ans, des études de piano avec une prof superbe Mme Lamothe qui était dans les Landes.
Vous êtes des Landes ?
Des Pyrénées Atlantiques. Mais j’ai vécu à Mont de Marsan.
Tout de suite vous avez eu envie d’en faire votre métier ?
J’ai découvert le jazz vers 10/11 ans, et à partir de ce moment-là, grâce à mes parents qui écoutaient des musiques différentes, j’ai très vite vu que le jazz permettait d’improviser, on pouvait inventer de la musique en temps réel et j’ai compris que c’était ça que je voulais faire, que c’était la musique vers laquelle je voulais aller.
C’est incroyable, si tôt  car à cet âge on est plutôt tourné vers la variété. Y avait-il des gens autour de vous ?
Dans mon école de musique, il y avait un atelier jazz, mon prof de piano classique, qui était aussi professeur de jazz m’y a fait entrer. J’avais 11 ans et le fait de pouvoir improviser a été une révélation.

Quelles étaient alors vos influences ?
Je ne connaissais pas grand-chose, je découvrais Herbie Hancock, Miles Davis, Bill Evans, et peu à peu le fil s’est déroulé, les profs et les amis m’ont fait connaître toutes sortes de choses…
A quel moment avez-vous commencé à composer ?
Assez tôt. D’abord pour moi puis à l’adolescence. J’ai essayé de composer des choses et à les jouer avec les copains.
Quelles études avez-vous faites ?
D’abord le conservatoire de Toulouse puis je suis entré au département jazz du CNSM de Paris…
Depuis, vous avez eu un nombre incalculable de prix dont les Victoires de la Musique, L’Académie Charles Cros… et vous êtes jeune !
(Il rit) Je fais jeune mais j’ai déjà 40 ans ! Oui, je passais beaucoup de concours à l’époque, des tremplins qui aident, après, il faut accepter le temps qu’il faut pour s’insérer, que les projets mûrissent et se développent.
Parlez-moi un peu de ce trio magique avec lequel vous avez joué ce soir…
Il est né en 2013, ça fait presque douze ans, au moment où on célébrait Marseille ville culturelle européenne. Nous avons été invités par le théâtre de la Criée pour jouer un programmaeautour de Marseille, avec Isabelle qui ne parlait alors pas vraiment français.
 Nous avons repris des chansons d’Alibert, de Tino Rossi, du folklore marseillais et provençal…
On était loin du jazz !
C’était du Music-Hall venu de l’Alcazar dont on a fait un disque. Et on a beaucoup tourné avec ce répertoire. Après, pour les commémorations des cent ans du jazz à Nantes, l’on a bifurqué vers un autre répertoire en 2017.
Et le classique dans tout ça ?
J’ai commencé par le classique à l’âge de 5/6 ans mais aujourd’hui je continue pour moi. C’est une de mes grandes inspirations, une très bonne manière de continuer à étudier la musique et l’instrument. C’est une énorme source d’inspiration.
Comment sont venues les master classes que l’on peut voir sur les réseaux sociaux ?
C’est dans le cadre de la revue « Pianiste » qui n’existe plus depuis peu, destinée plutôt aux pianistes amateurs de tous niveaux, j’avais la charge  de la partie jazz. J’écrivais une composition assez simple à monter pour les lecteurs, et j’expliquais les rudiments de l’improvisation. J’ai fait ça pendant quatre ans, sur vingt-cinq à trente morceaux, pour le magazine et pour Internet.

Et vous continuez les master classes ?
Aujourd’hui je suis professeur au CNSM de Paris où j’ai intégré le corps pédagogique voici trois ans. J’enseigne aux élèves qui se professionnalisent. C’est rigolo aujourd’hui, de les voir là où j’étais il y a vingt ans ! Ils ont vingt ans, j’en ai quarante, la roue tourne !
Ici, nous vous avons vus en trio mais faites-vous des concerts solo ?
Oui, bien sûr. Demain je suis à Saint-Jamet mais selon les cas, je joue en solo, en trio. Avec celui-ci on a fait des centaines de concerts depuis douze ans. Mais je joue aussi avec d’autres trios piano-basse-batterie et je joue aussi avec orchestres. Nous avons d’ailleurs célébré les cent ans de « La rapsodie in blue » de Gerschwin avec l’orchestre de Strasbourg. Je l’ai joué aussi avec l’orchestre de Tokyo, avec le  Varsovia Symphonia de Varsovie et on va le jouer à la Roque d’Anthéron le 14 juillet.
Il y a une chose que j’apprécie sur vos disques, ce sont les pochettes toujours très belles et très originales…
C’est un travail que nous faisons ensemble avec mon photographe. Il s’appelle Sylvain Gripoix et je lui fais une entière confiance. Je lui envoie la musique du disque et je lui demande de trouver un sujet qui l’inspire. Nous nous faisons mutuellement confiance, Il me fait des propositions. Tout comme la photo des Victoires de la Musique.
Viendrez-vous un jour à des concerts classiques ?
Je n’en ai vraiment jamais fait car j’ai des collègues qui le font mille fois mieux que moi et surtout, même si j’adore ça, ça n’est pas mon mode d’expression. Pour me sentir vraiment bien sur scène, il faut que je puisse improviser. Jouer juste une sonate de Beethoven, je pourrais éventuellement le faire mais ce n’est pas là que je me sens le mieux. J’ai besoin de créer dans l’instant donc je pourrais faire de l’improvisation autour d’une œuvre de Beethoven car c’est mon élément, c’est mon univers. Mais jouer comme des concertistes,  où c’est vraiment leur univers où ils trouvent leur forme de liberté dans l’interprétation, ce n’est pas ce que j’aime. Moi, j’ai besoin de changer, de créer, de travailler la matière.

Et dans ce concert de ce soir, il y a donc de l’impro ?
A 90% ! Il y a juste la mélodie, qui est en fait une partition sommaire de trente secondes et l’on crée tout autour.
Et vos musiciens arrivent à suivre ?
Oui mais ça se travaille, c’est le fruit du mûrissement de dizaines d’années d’études mais l’improvisation se repose sur des codes, sur un langage, sur une histoire, sur un héritage qu’il faut connaître, appréhender, assimiler et ensuite on comprend les règles du jeu et on se fait mutuellement confiance. Pour ce que vous appelez « la battle », c’est complètement improvisé, on ne sait jamais ce qu’on va faire dix secondes après. On se retrouve sur le rythme, sur le tempo. L’une des particularités du jazz c’est le swing, une manière de scander le rythme, de vivre la pulsation corporellement et c’est ça qui nous rassemble.
Alors, le prochain disque ?
Ce sera en mars prochain, avec un magnifique chœur toulousain de dix-sept choristes dirigé par Joël Subiet, « Les Eléments » et un trio piano-basse-batterie. J’ai j’ai écrit une heure de musique sur le thème de la lumière, sur des poèmes de Victor Hugo,  d’Emilie Dickinson,  de Pablo Néruda. On reprend aussi des œuvres de Bach, de Purcell. Il s’intitulera « Waves of light » (Vagues de lumière). Puis nous emmènerons le concert en tournée en mars et en juin ».

Propos recueillis par Jacques Brachet

Nicole CROISILLE :
La plus belle voix de France s’est éteinte

Johnny… Johnny… Johnny !
Le stade Mayol de Toulon et bondé.
Et ce n’est pas pour assister à un match mais pour applaudir l’idole des jeunes. Oui mais voilà, il y a une première partie et la chanteuse qui doit passer à la casserole n’en mène pas large dans les coulisses. Elle est dans ses petits souliers car l’animateur vient juste de l’annoncer et, depuis qu’on a dit son nom, les fans de Jojo n’ont pas mis longtemps à scander son nom à lui, chose qu’ils font depuis une heure.
Alors, la chanteuse de la première partie, celle qu’on a l’habitude d’appeler la vedette « américaine », est un peu sur les nerfs. D’autant que ce jour-là, tout s’est mal passé : des problèmes de voiture qui l’avaient faite arriver en retard sur les lieux du concert et l’avaient empêchée de répéter. Dès son arrivée, elle était empêtrée avec un problème de contrat et elle n’avait vraiment pas la tête à ça. Enfin, au moment de passer sur scène, voilà que la foule, venue uniquement pour Johnny et se fichant pas mal de quelque première partie que ce soit, scande le nom de celui qu’ils attentent.
Tout est donc au top !
Préparée en catastrophe elle est prête à entrer dans l’arène au moment où les cris redoublent.
Johnny… Johnny… Johnny…
Elle est là, en bas de la scène, morte de trac, à bout de nerfs. Elle respire, ferme les yeux, se raidit et crie, avant de se jeter dans la fosse aux lions : « Les salauds… Je les aurai !. Et la voilà qui se précipite sur scène, toute de noir vêtue, mue par un ressort, sous les cris de cette foule qui n’est pas – ou si peu ! – pour elle. Première chanson : « Les ronds dans l’eau ». C’est une chanson qui, en plus, démarre lentement, qui est sublime mais qu’elle entonne sous les cris. Je la regarde, je tremble pour elle et je me dis qu’elle court à la catastrophe. Mais peu à peu, la chanson démarrée tout en demi-teinte, s’accélère, monte avec cette voix unique qui tout à coup éclate comme un orage et qu’elle va terminer sur un tempo à couper le souffle – sauf le sien ! – et avec une puissance de voix qui, tout à coup, cloue le public sur place. Le souffle, c’est à eux qu’il commence à manquer et il y a tour à tour un effet de surprise, d’ébahissement, de curiosité et enfin d’admiration et de respect. Jamais public toulonnais n’a eu l’occasion d’entendre une telle voix, française de surcroît ! Du coup, ils arrêtent leur chahut pour découvrir une authentique artiste qui, en quelques chansons, leur prouvera son talent, en chantant du rock comme leur idole, mâtiné bluesy et jazzy, en se mouvant sur scène avec un rythme et une grâce uniques.
En une demi-heure, elle a retourné une salle hurlante qui est subjuguée et heureuse et lui fait une ovation. A tel point que Johnny, curieux et surpris, vient jeter un œil. Il dira en riant : « Ça va être dur de passer après elle ! »
En fait, c’est la première fois que je rencontre cette artiste. Je l’avoue, j’étais aussi venu pour Johnny et je suis totalement subjugué. Je succombe à une admiration qui ne se démentira jamais. Je viens de rencontrer Nicole Croisille !

Première rencontre à Toulon
Un show magnifique et unique avec Jean-Pierre Cassel
Vladimir Cosma & Nicole, mes invités de la Ciotat

Après ce grand coup de poing dans le ventre, je m’empresse à l’entracte, d’aller la saluer, la féliciter et lui demander un moment d’entretien. Elle est KO même si elle est heureuse d’avoir gagné ce rude combat. Elle a besoin de se remettre et je le conçois. Mais comme elle dort à Toulon, elle me donne rendez-vous le lendemain midi à l’hôtel… Et m’invite à déjeuner avec elle au bord de la piscine !
Elle me reçoit en toute simplicité, en maillot de bain. Toute fraîche et remise de ses émotions de la veille. Le soleil brille, on fait des photos dans la piscine et l’on se met à table. Je lui dis toute l’admiration et tous les sentiments qu’elle a provoqués en moi. Elle en est heureuse et rit, de ce beau rire clair que j’apprendrai à connaître car de ce jour, nous ne nous quitterons plus. Je deviendrai son fan et son ami et nous continuerons à nous retrouves pendant des décennies avec le même plaisir et évoquerons souvent, cette première rencontre, cette galère qu’elle a transformée en triomphe :
« La plus belle trouille de ma carrière ! J’avais le trac comme jamais je ne l’ai plus eu de ma vie, même avec Claude François avec qui la même chose s’est à peu près passée. Mais le public de Claude était plus jeune, plus malléable que les purs et durs de Johnny ! Ce soir-là, je ne savais plus si je devais monter sur scène ou m’enfuir à toutes jambes. Mais ma réputation était en jeu et je ne pouvais pas reculer. Je ne l’aurais d’ailleurs pas accepté si on me l’avait proposé car je suis quand même une battante et j’aime arriver à convaincre quand je sens de la réticence. Mais là, c’était plus que de la réticence, c’était un rejet total. Donc ça te galvanise et tu te dis qu’il n’y a qu’une solution : gagner et penser très fort : « je les aurai ». Et je crois que ce soir-là je les ai eu au-dessus de toute espérance ! »

Concert à Aix-en-Provence
Au festival de Cannes émission de Drucker avec l’ami Brialy
La Ciotat avec Xavier Deluc


Le temps allait souder une belle amitié et toujours, pour ma part, une grande admiration pour cette artiste multiple, cette femme énergique et belle, au caractère bien trempé, qui appelle un chat un chat – ce qui n’a pas l’heur de plaire à tout le monde mais qui me plaît bien ! – et qui est toujours là où on ne l’attend pas. Car elle est unique dans notre panorama artistique. Et je ne dis pas « musical » car, pour elle, c’est réducteur dans la mesure où elle sait chanter, danser, mimer, jouer… Elle a suivi des voies originales et tout à fait atypiques, a fait du jazz quand le rock débarquait, du mime quand tout le monde parlait, dansé dans les ballets de Plashaert au lieu de ne se consacrer qu’à la chanson, chantant en anglais quand tout le monde traduisait les chansons anglo-saxonnes en français, (-Ca a bien changé !) donnant de la voix à une époque où les chanteuses n’en avaient plus… Bref, elle savait tout faire mais voilà : elle habitait en France et la France alors n’était pas l’Amérique où là-bas, savoir tout faire est un atout. A l’époque, et même encore quelquefois aujourd’hui, il faut cataloguer, étiqueter, mettre des noms et des qualifications sur des petites boites. C’est pour cela qu’on a eu du mal à imposer les comédies musicales en France car il fallait savoir tout faire. Et savoir tout faire, en France, durant longtemps, ça voulait dire s’éparpiller, ne rien faire à fond, survoler des disciplines…
Même si elle a fait de belles choses dans les années 60, elle avait déjà dépassé les 16/18 ans pour que, à l’instar d’Isabelle Aubret, de Dalida, de Pétula Clark, elle intéresse «Salut les copains». Même si, en 66 il y avait eu le fameux «Da ba da ba da». Même si en 68 il y avait eu «I’ll never leave you» consacré au MIDEM sous le nom de Tuesday Jackson. Même si, en 69 elle a gagné le prix d’interprétation au festival de la Rose d’Or d’Antibes avec «Quand nous n’aurons que la tendresse»
Pourtant, tout ce qu’a fait Nicole, elle ne l’a jamais fait en survolant. Elle y est toujours allée à fond. Elle a, il faut le dire, des dons pour tout. La danse où, très vite remarquée par son sens du rythme et ses dons exceptionnels, elle est engagée dans une troupe américaine. Elle jouera même, comme elle le dit en riant « avec des plumes au cul » ! Donnant de la voix, elle excelle tout autant dans les demi-teintes et sait faire « monter la sauce » comme personne.

« Femme » est une chanson que personne, à part peut-être Céline Dion, pourrait arriver à chanter aussi haut qu’elle ! En plus, elle a la voix pour chanter du jazz. Une voix de noire qui d’ailleurs, par un subterfuge, lui donnera l’un de ses plus grands succès. Je vais y revenir.
Nous sommes dans les années 60 et la chanteuse existe déjà… dans l’ombre. Car avant d’exploser, elle fut, pour gagner sa vie, choriste d’autres chanteurs qui naissaient alors et allaient surfer sur la vague dite «yéyé». : Claude François (Le Nabout twiste, son premier disque sous le nom de Coco). On y trouve aussi la voix d’Hugues Aufray ! Frank Alamo (Biche ma biche), Pierre Perret, Pierre Vassiliu, Claude Bolling dont elle fut l’une des quatre «Parisiennes» pour le disque seulement. Elle fut aussi des tournées avec Jacques Brel et… Johnny Hallyday débutant. Un premier album en 63 passé inaperçu, un autre de jazz puis le fameux «Da ba da ba da » où l’on ne connaissait alors que sa voix qui fit le tour du monde avec cette chanson du film «Un homme, une femme»
A l’époque, elle était très déçue de ne pouvoir monter une comédie musicale en France alors qu’en Angleterre et aux Etats-Unis, ça cartonnait
« En France , à cette époque, la comédie musicale est un problème insurmontable, insoluble. C’est presque devenu un sujet tabou. D’abord, les idées manquent, ça c’est un fait, ensuite, peu d’artistes peuvent donner tout ce qu’on attend d’un spectacle. Les comédiens ne savent pas chanter, les chanteurs ne savent pas danser, les danseurs ne savent pas jouer… Il y en a, si l’on cherche bien mais il faut chercher longtemps ! Et puis, si tu es cataloguée dans une discipline, il faut te battre pour en changer.
Regarde Marie Laforêt, qui s’est battue pour pouvoir faire accepter qu’elle savait « aussi » chanter ! Mais une fois passée sur scène, on ne lui proposait plus rien au cinéma ! On ne s’en sort pas ! Moi, on me propose encore moins car on ne sait pas où me ranger ! J’ai d’abord été cataloguée comme chanteuse de jazz, puis j’ai fait la doublure de  Zizi Jeanmaire, dans « La dame de chez Maxim’s » de Feydeau (Toujours dans l’ombre car en fait je ne l’ai jamais doublée… Elle avait la santé !). Du jour au lendemain on s’est dit : « Mais alors, elle est comédienne ! ». Cela a été renforcé par le fait que j’entrais à la Comédie française… comme danseuse ! Avec Annie Girardot. De ce jour, je ne pouvais plus me permettre de chanter. J’ai tenu bon et suis revenue à la chanson, par le biais d’une supercherie. J’en ai même effaré plus d’un quand on a su que j’avais fait du mime avec Marcel Marceau ! »


A tel point que, malgré son « Da ba da ba da » et son « I never leave you » (Voir plus loin), elle a mis un certain temps pour s’imposer vraiment. Son premier disque date de 61. «Femme avec toi» de… 75 !
Et tout à coup la révélation et deux tubes énormes : « Parlez-moi de lui » et « Femme avec toi ».« Eh oui, le hasard est ainsi fait : lorsque j’ai enregistré « Parlez-moi de lui », je l’ai fait comme à chaque fois que j’ai enregistré : avec conviction et parce que la chanson me plaisait. On espère toujours qu’on fera un succès mais là, on n’est pas maître du jeu. Et ça a marché. Pourquoi ? Dieu seul le sait. La chanson a plu, c’était dans l’air du temps, c’était le bon moment… Du jour au lendemain, je suis devenue une vendeuse de disque que tout le monde s’arrachait : les tourneurs, la presse, la télé. Je n’avais pas changé mais j’étais devenue populaire. On m’a couverte de lauriers, d’honneurs, de compliments et… d’amitié aussi car tout à coup tout le monde me disait qu’on avait toujours cru en moi… Mais bon, tout cela fait partie du jeu. Ça ne m’a ni aigrie, ni étonnée. J’ai pris tout ça avec humour, fatalité et surtout avec joie, lucidité et recul, en étant consciente que tout ça retomberait vite. Je commençais à connaître ce métier et ça ne me tombait pas dessus à 18 ans. Avec mes deux premiers succès, j’étais considérée comme une chanteuse « à coups ». Du jour au lendemain j’ai été considérée comme une chanteuse « à tubes »… Jusqu’à ce que ça passe ! »

C’est vrai que Nicole est toujours restée lucide, consciente de son potentiel, de ses talents mais sachant que ça ne suffit pas pour rester toujours au premier plan, le métier étant cruel, le public versatile même s’il reste toujours des poignées d’inconditionnels. De plus, elle n’a jamais fonctionné en pensant à sa carrière mais sur des coups de cœur, des envies. La preuve : tous les disques à thème qu’elle a pu enregistrer sans se poser de questions mais tout simplement par envie. Tour à tour elle a joué la carte des « coups de cœur » magnifique disque où elle chante Brel, Aznavour, Ferré, Nougaro et quelques autres, puis ce fut ce superbe « Paris-Québec », reprise de chansons de nos amis francophones. Puis « Jazzille » où elle a donné le meilleur d’elle-même dans un style qui lui va comme un gant, Puis elle est passée aux musiques de films… Elle en a tellement chanté, entre autres pour Lelouch. N’oublions pas ce disque « Black et blanche» aux couleurs africaines si magnifique que le même Lelouch a produit et lui a fait un superbe clip… Elle a également rendu hommage à son ami Nougaro avant de revenir au jazz.
Nicole n’a jamais vécu dans le stress d’un succès aléatoire. Elle vit simplement son métier à fond, avec passion. Ce qui, souvent a fait vaciller  sa carrière… et ses finances !
On la retrouve ainsi avec un spectacle musical sur Victor Hugo Hugo, une pièce de théâtre, reprenant un rôle de Maillan, un film de Lelouch, une télé, un disque particulier, un concert piano-voix. Sa carrière est faite comme ça, toujours avec talent et qualité et même si ça n’est pas toujours un super succès, c’est toujours une magnifique réussite.
Le film de son grand ami Lelouch « Un homme, une femme » a été un énorme succès. La fameuse chanson « Da ba da ba da » a fait le tour du monde mais on a mis longtemps à savoir qui la chantait.
Quant à l’aventure des « Jeunes loups », film de Marcel Carné, l’histoire est belle et drôle. Elle avait une folle envie d’enregistrer la chanson générique mais on l’a refusée sous prétexte que la production cherchait une voix noire américaine.
Elle a donc enregistré le titre sous le nom de Tuesday Jackson et les producteurs n’y ont vu que du feu ! Le pot aux roses a été découvert au MIDEM car la chanson avait superbement marché et l’on remettait un prix à Tuesday Jackson… et c’est Nicole qui est arrivée, chanteuse on ne peut plus blanche, blonde et française ! Sans cela, elle aurait pu rester dans l’ombre. Mais elle l’aurait quand même fait !
Quand on pense qu’après l’énorme succès de « Parlez-moi de lui » qui lui ouvrait alors toutes les portes, elle est partie sur une aventure sans lendemain qui aurait pu arrêter sa carrière. Souvenez-vous : Elle est Numéro 1 partout et au lieu d’en profiter, elle se lance dans une comédie musicale, ce qui, à l’époque, était voué d’avance à l’échec. En plus de ça, pour corser le tout, elle se retrouve dans ce projet intitulé « Comme une neige en hiver » auprès d’artistes dont on n’entend plus parler : Catherine Sauvage, qui a remplacé Régine, Mouloudji. Ce fut un bide dont elle faillit ne pas se relever. Heureusement, on en a parlé si peu que rien n’a empêché le second énorme succès d’arriver. C’était « Femme avec toi ». Lucide, elle savait qu’elle risquait sa carrière, mais elle croyait au projet et avait envie de le faire. Et rien ne l’en aurait empêchée !

Encore un exemple de cette passion et de ce coup de cœur. Une chose que très peu de gens ont vue et que j’ai la chance d’avoir vécu : monter pour un soir, à l’occasion d’un gala privé pour le centenaire de l’Ecole de Commerce de Marseille, un spectacle musical avec Jean-Pierre Cassel, tous deux au mieux de leur forme. Un enchantement de les voir évoluer, légers, gracieux, élégants, étourdissants, de faire des claquettes et d’unir leurs voix… Pour le plaisir d’un soir car personne après ça n’a eu le courage de reprendre ce spectacle qui méritait d’être montré au plus large public possible. C’était merveilleux de les voir tous deux se renvoyer la balle avec une belle énergie, sur la même longueur d’onde. Du beau travail. Pour un soir seulement.
Je suis heureux d’avoir été témoin de ce moment magique où virevoltaient nos Ginger Rogers-Fred Astaire français !
La mode étant aujourd’hui aux comédies musicales, personne encore n’a pensé à elle… Bizarre, non ? Sans compter qu’à part « Starmania », les sujets n’ont rien d’original, d’ « Ali Baba » aux « Dix commandements » en passant par « Notre-Dame de Paris », « Autant en emporte le vent », « Le petit Prince », « Cindy », « Roméo et Juliette », « Les demoiselles de Rochefort »… N’y aurait-il plus d’auteurs et d’idées nouvelles pour monter une vraie comédie musicale originale
Bref, le sujet original aujourd’hui n’est pas de mise mais peut-être est-ce pour cela qu’on ne l’y voit pas. Mais on l’a vue dans un très joli spectacle musical autour de la vie de Victor Hugo, « Ce lion superbe et généreux » monté par Marie-Sylvia Manuel, fille de Robert Manuel et Claudine Coster où elle montrait, une fois de plus, ses talents de comédienne et de chanteuse auprès d’Anne Roumanoff, de Bernard Lavalette, de Claudine Coster et de Patrick Préjean. On l’a tout de même vue aussi dans une très belle reprise de « Hello Dolly » en anglais qui, hélas, n’est pas restée longtemps à l’affiche. Il ne reste en souvenir qu’un joli petit disque.
Mais aujourd’hui, si elle ne fait toujours que ce qu’elle aime, elle a quelque peu ralenti pour pouvoir se reposer, vivre pour elle, découvrir des pays. Elle a instauré le système des tournées-vacances où, partant pour plusieurs concerts dans un pays, elle les échelonne pour, entre temps, avoir le temps de visiter le pays en question.
« J’ai passé des années à ne connaître des villes ou des pays que je parcourais, que les salles et les loges, les restaurants et les hôtels.
Aujourd’hui je prends le temps de visiter, de musarder, d’étirer le temps, de connaître les lieux et leurs habitants ».
Elle y retrouve souvent des amis, car elle en a un peu partout, au music-hall, dans le show-biz, même dans des cirques qu’elle aime beaucoup.
« C’est au cirque que tu rencontres les gens les plus humbles qui font souvent d’énormes prouesses. C’est un monde qui travaille pour la plupart du temps avec peu de moyens mais qui vit sur l’illusion, la féerie, la performance qui paraît si simple à voir. Ce sont de vrais saltimbanques qui te donnent la banane. Et l’on en a besoin dans cette époque où la merde s’installe partout ! Nous autres artistes, nous devrions planer dans l’inconscience pour voler, créer, imaginer, faire rêver. Il faut arriver à occulter tous les problèmes pour faire passer notre plaisir au public. Ça devient dur aujourd’hui ! Pourtant le public compte sur nous. Ça n’a l’air de rien mais une chanson peut aider à vivre si elle est chargée d’espoir, de gaieté. Ce n’est pas pour rien si aujourd’hui, les comiques tiennent le haut du pavé et sont si nombreux ».
Sensation, émotion, échange, partage…
Ce sont les maîtres-mots, les mots-clés de la vie de Nicole.

Hugo, Nicole & Anne Roumanoff
Eddy Barclay remet une rose d’or d’honneur à Antibes
Avec Aldo Frank, son musicien de toujours

Je vous le disais : elle sait tout faire !
Voici quelques années, elle est encore arrivée à nous surprendre en jouant une femme des plus moches, des plus rouées, des plus méchantes, des plus calculatrices dans la saga qui a fait un boum sur TF1 : « Dolmen ». Elle y était époustouflante ! Elle était d’ailleurs venue présenter la série en avant-première, avec mon ami Xavier Deluc, au festival de la Ciotat où je l’avais invitée.
Et puis elle est passée à un hommage sublimissime à l’ami Nougaro…
En sept ans, elle joué quatre comédies musicales : «Follies» en 2013, «Cabaret» en 2014, «Irma la douce» en 2015, «L’Opéra de quat’sous» en 2016, et a enchainé sur trois pièces de théâtre : «Jeanne» en 2017, «Hard» en 2018, «N’écoutez pas mesdames» de Guitry en 2019 ! A 88 ans, elle n’aurait pas fini de nous surprendre si ce n’est la maladie qui l’a surprise. Je perle encore d’elle au présent car c’est une artiste qui a beaucoup compté pour moi. Et je suis fier d’avoir été son ami et de l’avoir toujours suivie, à quelque endroit qu’elle ait été et pour quelque projet que ce soit.
Je t’aimais, je t’aime et je t’aimerai toujous

Jacques Brachet

La Ciota
Sanary
Follies à l’Opéra de Toulon

John GADE… « Je suis un éternel romantique » !

Il a tout du romantique : cheveux longs et frisés, regard sombre, tout de noir vêtu.
John Gade est cannois, il est pianiste, violoniste et à 27 ans, il a déjà une longue série de prix, de festivals, de concerts. Il vient de publier son premier album « Opium » (Scala Music) consacré à 8 sonates pour piano d’Alexandre Scriabine. Une petite merveille de douceur et d’exubérance, d’énergie et de mystère. J’avoue que ne connaissant pas ses œuvres, j’aurais pu penser à Chopin, par sa fougue et son romantisme qui va très bien à notre pianiste virtuose
J’ai voulu en savoir plus sur artiste talentueux.

« John, d’où vient ce nom qui, malgré votre naissance, ne fait pas très « cannois » ?
 (Il rit) Effectivement, il est américain pour le prénom et hébreux pour le nom.
D’où vous vient cet amour de la musique ?
Mes parents étaient mélomanes et j’écoutais beaucoup de musique grâce à eux. Mais j’ai eu le coup de foudre pour le Requiem de Mozart  à en devenir schizophrène. A tel point que je jouais à être Mozart !
Du coup je suis entré au conservatoire de Nice où, je me suis partagé entre violon et piano durant trois ans et où j’ai eu le prix. J’ai fait mes études de piano au Conservatoire National Supérieur de Paris où j’ai eu mon master J’ai commencé très vite à composer pour un trio avec piano à cordes. D’ailleurs lorsque je compose je suis synesthésique…
C’est-à-dire ?
Pour moi, chaque note, chaque instrument porte une couleur. La musique de Scriabine est pour moi quelque chose d’obsessionnel et de très coloré. Elle me fait voir beaucoup de couleurs car c’est pour moi elle est mystique, poétique, addictive, explosive… Narcotique et hypnotique ! D’où le titre de l’album « Opium » consacré à 4 sonates des plus emblématiques sous le label Scala Music. C’est vraiment une musique qui me transporte.
La découvrir a été un énorme choc, ça a nourri mon imaginaire. Ces sonates, cela commence en douceur, très romantique, comme un rêve contemplatif et peu à peu ça va crescendo, de plus en plus vite,  à la huitième ça devient très cosmique, c’est même diabolique !

Ce qui est fou, c’est que votre premier prix, vous l’avez remporté au concours international… Scriabine !
Oui, j’étais très jeune, et j’avais découvert le compositeur vers 18/20 ans. De ce jour j’ai alors délaissé les autres compositeurs que je jouais.  Il a cette âme russe romantique dans laquelle je me reconnais.
Vous avez eu de beaux professeurs au conservatoire national de Paris et vous avez déjà joué avec les grands.
Oui, j’ai eu la chance d’avoir Bruno Rigutto, Misha Katz, Igor Lazko, Denis Pascal, Franck Braley. Et j’ai joué sous la direction de Philippe Bender et Jean-Jacques Kantorov…
Vous êtes aussi allé jouer à Rome et au festival de musique de film. En avez-vous composé ?
Alors, j’ai joué au Palais Farnèse de Rome où j’ai été invité par l’Ambassadeur d’Italie. Puis en Sacile pour un festival de pianos prestigieux. C’était à la Grande Fabrique Fazioli où j’ai rencontré son créateur Paolo Fazioli qui m’a dit qu’il n’avait  jamais entendu un aussi bon pianiste depuis Trifonov. J’ai tes ses pianos devant lui pour en choisir un lors d’un concert. Quant au festival du film en question il s’est déroulé à Lambersart. C’est un festival de musiques de films muets et j’ai joué sur « A film Johnny » de Charlie Chaplin devant son petit-fils
Une belle rencontre.
Oui mais j’ai aussi rencontré le petit-fils de Rachmaninov…
Racontez
Etant cannois je suis allé au festival de Cannes, invité par un producteur qui devait faire un film sur ce compositeur. Il était accompagné du petit-fils de Rachmaninov et il m’avait proposé de jouer le compositeur jeune aux côtés d’Adrian Brody qui devait jouer le compositeur adulte. Le film ne s’est jamais fait mais j’ai eu le plaisir de rencontrer son petit-fils. D’ailleurs, je serai le 25 mai à la Scala de Paris pour « Opium » et un concerto de Rachmaninov sur le thème de Paganini, quoique tous deux de la même époque mais de tempéraments très différents.
Ce sera une version inédite pour piano et percussions avec Pierre-Olivier Schmitt.

Vous avez été invité dans nombre de festivals. Et obtenu de nombreux prix…
Oui, j’ai cette chance et je suis ambassadeur de la Fondation Banque Populaire. Et j’ai été invité dans de nombreux festivals.
Mon prochain concert sera le jeudi 3 avril à la Scala Provence d’Avignon. J’y interprèterai des extraits d »Opium » « La pensée des morts » de Liszt, la sonate N°5 de Scriabine et « Alborada del gracioso » de Ravel.
Des projets ?
Oui, mon second album « Mémento » dédié à Schubert avec David Moreau, toujours chez Scala Music John gade déjà un immense pianiste… Peut-être le verrons-nous un jour au festival « La Vague Classique » de Six-Fours ?
Jacques Brachet

DALIDA au « Grand Echiquier »… Désenchanté

MIDEM à Cannes

Lorsque il a été annoncé un « Grand Echiquier » consacré  à Dalida, moi qui l’aimais et la connaissais bien, j’ai été enchanté de voir qu’une telle émission de prestige était consacrée à une telle icône qui 38 ans après sa disparition, continuait à traverser les décennies, chantée par la jeune génération, étant présente dans nombre de films jusqu’à se retrouver en générique de « James Bond !
J’avoue donc que je m’attendais à beaucoup de joie et d’émotion avec une émission brillante, chaleureuse en la retrouvant.
Hélas, je fus, comme le dis Mylène Farmer, on ne peut plus désenchanté, d’abord parce que, rendant hommage à la chanteuse, je m’attendais à la retrouver avec des documents, alors que la grande absente de l’émission était… Dalida elle-même ! Quant aux chanteurs venus soi-disant l’honorer, à part quelques exceptions, ils ont massacré les chansons. Marc Lavoine, fringué comme s’il allait au sport, avec un survêt, des baskets rouges et un manteau dans lequel il nageait, a massacré « 18 ans » et en a fait une chanson gay ! Barbara Pravi a pas si mal chanté « Bambino », malgré ses croix noires scotchées sur les seins et les fesses à l’air. On a fait venir Dave pourquoi ? Le seul qui, à part Orlando, connaissait Dalida et a souvent chanté avec elle, n’a eu que deux minutes de paroles. Ne pouvait-on pas passer un duo avec elle ? Il y en a eu plusieurs chez les Carpentier. Et que dire de la mezzo-soprano Farrah el Dibany vêtue en choucroute-chantilly qui a fait de Dalida une chanteuse d’opéra. Emma Peters a chanté « Mourir sur scène » comme si elle-même allait y mourir à la fin. Alain Chamfort, lui, est juste venu faire la promo de son nouveau disque. Manoukian, lui, a fait du Manoukian en s’emberlificotant, comme à chaque fois, dans ses discours incompréhensibles. Même Orlando, qui est d’habitude volubile lorsqu’il s’agit de sa sœur, était comme éteint. Il faut dire que Claire Chazal ne lui a pas beaucoup laissé la parole.

En tournée
Rose d’Or d’Antibes
Hyères, dernière rencontre

Heureusement Luz Cazal, voix merveilleuse et émouvante a fait une merveilleuse version de « Fini la comédie » et Vladimir Kornéev qui a chanté « Le temps des fleurs » à la manière slave. Il a donc fallu deux étrangers pour vraiment honorer notre Dalida.
Il y avait plein d’autres personnes à inviter : Lara Fabian qui a merveilleusement chanté Dalida, ou encore Michèle Torr qui a fait une émouvante reprise de « Pour ne pas vivre seule ».
Il y avait le couple Lama-Dona qui a écrit et chanté « Je suis malade ». Il y avait Ibrahim Maalouf qui a consacré un superbe disque aux musiques de Dalida. Il y avait Catherine Rihoit qui, sur les instances d’Orlando, a écrit la biographie de la chanteuse « Mon frère, tu écriras mes mémoires ». Il y avait Lisa Azuelos (fille de Marie Laforêt) qui a signé le magnifique biopic « Dalida…
Bref, il y avait beaucoup de gens, en particulier des femmes, qui auraient pu être de cet hommage, plutôt que ces artistes qui ne l’ont pas connue et ont pour certains « estropié » ses chansons
Et du coup, on s’est cordialement ennuyé à cet hommage qui n’en était pas un et nombre de fans ont dû être déçus.
Moi en premier.

Texte et photos Jacques Brachet

Olympia

Herbert LEONARD : Ce fut un plaisir

Nous sommes en 1968, en plein dans les années dites « yéyé » et voilà qu’un chanteur beau comme un dieu à la voix puissante débarque dans la chanson.
Herbert Léonard qui fait aussitôt un tube avec « Quelque chose en moi tient mon cœur », suivi de « Pour être sincère ». Il devient une des idoles des jeunes et de « Salut les copains ».
Le succès de ce chanteur prometteur va se fracasser avec un accident de voiture qui va le laisser dans un triste état.
Il ne reviendra pas sur le devant de la scène et changera de métier. Il deviendra journaliste spécialisé dans l’aviation, sa passion.

Première rencontre

Mais voilà qu’arrive une certaine Vline Buggy. Elle est parolière et a signé de nombreux succès pour CloClo dont le fameux « Belles, belles, belles » et de nombreux autres jusqu’au presque dernier « C’est comme ça que l’on s’est connu ». Mais elle a signé plein de tubes pour d’autres chanteurs : Sardou « Et mourir de plaisir », Hugues Aufray « Céline », Johnny Hallyday « Le pénitencier… Chamfort, Vartan, Nicoletta, Pétula Clark, Hervé Vilard, et même Paul Anka et bien d’autres, dont Anne-Marie David qui gagne l’Eurovision  en 73 avec « Tu te reconnaîtras.
Je la rencontre pour la première fois aux disques Flèche, y allant voir Claude François.
De son côté elle rencontre en 70 un animateur compositeur nommé  Julien Lepers et ils commencent à écrire des chansons. Mais à qui les donner ?

C’était de l’eau !

C’est alors qu’Herbert refait surface et ils décident de faire un album pour lui. Album dont aucune maison de disques ne veut entendre parler, Herbert ayant disparu depuis trop longtemps. Du coup, Vline décide de produire son album dans lequel il y a entre autres « Pour le plaisir » qui, dès sa sortie sera un carton.
Ils décident de partir en tournée et c’est là que je retrouve Vline et Herbert et fais connaissance avec Martine Clémenceau et Julien Lepers.
La tournée est un vrai succès et remet Herbert sur les rails qui va se retrouver en tête des ventes avec des chansons comme « Puissance et gloire », de la série « Chateauvallon » ou encore « Amoureux fous » en duo avec Julie Pietri.

Je les retrouverai tout au long des tournées « Âge Tendre », toujours aussi beaux, aussi sympathiques et avec Herbert, on se retrouve comme sur la tournée 70.
Entre les deux spectacles de la journée, on a le temps de manger ensemble, de discuter, de rire car Herbert était un joyeux drille. Nous avons passé des heures à rire avec Patrick Topaloff que je retrouvais aussi après une tournée avec Stone et Charden, C.Jérôme, Michel Jonasz, Charlotte Jullian. Qu’est-ce qu’on a pu rire avec tout ce beau monde. Quelquefois, Julien Lepers venait le rejoindre sur les tournées Âge Tendre, s’emparait du piano et c’était la folie.
On a appris son mal en espérant qu’il s’en sortirait mais hélas le cancer ne l’a pas lâché.
Encore un départ de ces belles tournées, quelques jours après Jean Sarrus des Charlots.
Mais je garde de jolis souvenirs d’un garçon d’une grande gentillesse qui savait survolter les foules avec sa voix de velours et son charme incontestable.

Jacques Brachet
Photos Christian Servandier & Jacques Brachet

Jean-Pierre SAVELLI… Et Peter redevient Jean-Pierre

Il s’appelait Jean-Pierre Savelli, Puis il s’est appelé Peter et le voici redevenu Savelli.
De l’eau a coulé sur les ponts depuis que ce jeune toulonnais est parti conquérir Paris et a rencontré un certain Michel Legrand qui a décidé de le produire.
Michel Legrand avec qui il a gardé jusqu’au bout des liens d’amitié et avec qui il a travaillé tout au long de sa vie, épisodiquement.
Après avoir eu une vie on ne peut plus remplie, le voici, depuis quelques années, revenu plein d’usages et raison dans sa ville natale. Mais ne croyez pas qu’il y soit revenu prendre sa retraite car il n’a jamais autant travaillé, entre spectacles divers, CD tout aussi divers et même un livre qui sortira à la fin du mois.
Il y a presque soixante ans qu’on se connaît, qu’on a sillonné la France en tournées et galas et maintenant qu’il s’est posé chez nous, il était temps qu’on prolonge cette amitié par un portrait d’un artiste à la carrière incroyable.
On aurait dû le retrouver au Théâtre Galli de Sanary ce 26 janvier mais un problème de nodules sur les cordes vocales a dû repousser le concert-hommage à Michel Legrand qu’il nous proposait. Ce n’est que partie remise et si pour l’instant il ne peut plus chanter, il peut à nouveau parler… On en profite !

Avec Eddy Barclay,
Rose d’Or d’Antibes
Avec Nicoletta & Patrick Juvet
au MIDEM
Avec Sloane… Envie de rien, besoin de toi
Avec Michel Hidalgo…
Les rois du sport !
Avec Michel Orso,
deux toulonnais en vadrouille
France-Italie : Avec Bobby Solo

« J’avais trois semaines de répétitions avec les musiciens, du coup, tout est remis en question.
Mais ce n’est que repoussé ?
Oui, j’espère pouvoir jouer avant la fin de la saison.
En attendant, on peut parler d’une activité débordante,
Oui, il y a un coffret de trois CD qui retrace tout ce que j’ai pu faire. Il est sorti chez Marianne Melody grâce à Mathieu Moulin qui a fait des recherches et qui a dû surtout jongler avec les maisons de disques sur lesquelles j’ai enregistré pour avoir les droits. C’est un travail de Titan car il a dû se battre avec certaines et fouiner pour retrouver certains enregistrements que les maisons de disques ne voulaient pas donner au départ. Il m’a même retrouvé des versions italiennes, espagnoles, japonaises et des chansons chez Barclay qui n’étaient jamais sorties. Et puis il a même sorti un album de 18 chansons de mon père, Carlo Cotti.
Comment est née cette idée ?
C’est une idée de Mathieu que j’ai rencontré il y a deux ans sur un concert de chansons françaises des années  60 à 80 auquel je participais et il m’a proposé ce projet auquel évidemment j’ai tout de suite adhéré et à la fin c’est un bel objet qui retrace toute ma carrière.
A côté de ça, tu travailles comme un fou, même depuis que tu as définitivement quitté Paris depuis quelques années !
Je suis revenu définitivement à Toulon en juillet 2017. J’ai ma maison de productions Minuit 10, je fais pas mal de concerts, un peu partout, en solo avec différents spectacles que j’ai montés, il y a aussi, les spectacles que fait ma femme, Sandry, sur les comédies musicales, les spectacles Cabaret, auxquels je collabore, le dernier étant étant « Les décennies » un spectacle qui commence des années 1950 jusqu’aux années 2000,  avec des chanteurs, des danseurs, des musiciens, un transformiste, des sosies… Quatorze personnes sur scène. On fera une tournée cet été. On a monté ensemble les ateliers de comédies musicales pour les enfants, les ados, les adultes, Sandry a monté des cours de zumba et un nouveau cours « Ladies Style », des femmes qui viennent danser en talons et qui a un succès incroyable.
Les cours se font pour certains à la Valette, d’autres à Solliès-Pont. Et le samedi, lorsqu’on n’est pas en concert, on est en studio, où on fait travailler nos élèves avec du vrai matériel, où ils découvrent leurs voix.

Tournée « Âge Tendre » avec Sloane et Jean-Jacques Lafon

Avec tout ça un CD de seize chansons et un spectacle-hommage à Michel Legrand.
Michel, comme tu le sais, a été au départ de ma carrière dans les années 70, c’est lui qui m’a écrit et produit deux disques : « Peau d’Âne » et « Un goût de soleil, de pomme et de miel ».
L’an dernier je suis contacté par le réalisateur David Herzog-Dessites qui me propose de participer à son film-hommage avec une petite interview  et une chanson de Michel que je chante. Il a choisi « Il était une fois l’espace ». Il me dit «  s’il y a quelqu’un de crédible pour chanter Legrand, c’est toi ». Pourquoi pas ? Du coup j’ai monté un spectacle autour de chansons de Michel, celle que j’ai chantées, d’autres que j’aime, j’ai pris des musiciens du conservatoire de Toulon, une choriste et j’ai enregistré 14 chansons dont « Un parfum de fin du monde »  du film de Lelouch « Les uns et les autres », « Mon amour sans concession, sans mensonges » que m’avait écrit Michel pour le festival de Tokyo, les musiques des « Demoiselles de Rochefort, « Les parapluies de Cherbourg » et des succès comme « Les moulins de mon cœur », « L’été 42 », « La valse des lilas » et quelques autres. De nombreuses dates commencent à arriver.
Pourquoi n’a-t-il pas continué à te produire ?
D’abord parce que je suis parti 16 mois au service militaire et lorsque je suis revenu, il commençait à travailler aux Etats-Unis. Comme sa maison de production était un petit label, il a arrêté. Mais nous avons toujours gardé le contact et il a souvent fait appel à moi.
Il avait sorti cinq 45 tours de moi quand même. Il m’a recommandé chez Barclay et mon premier disque « Ciel » a gagné la Rose d’Or !
Mais beaucoup, soit ne connaissent pas Michel Legrand soit ne savent pas que c’est moi qui ai chanté certaines de ses chansons. On me dit alors : « Ah, c’était vous ? ». Je l’ai tellement entendu que ça failli être le titre de mon livre. Finalement on a choisi « Regarde, le jour se lève » car c’est plus sur cette intro de « Besoin de rien, envie de toi » qu’on me connaît.

Alors, justement, ce livre…
… Il sortira le 15 mars, distribution sur Amazon ; j’y parle de ma vie, de Toulon, du stade Mayol, des sportifs avec qui j’ai joué comme Ginola, Olmetta… Bref, je parle de toutes les aventures que j’ai vécu tout au long de ces nombreuses années, mes rencontres avec Michel, ma belle aventure avec Claude-Michel Schonberg avec qui j’ai fait la comédie musicale « La révolution française », Barclay et la Rose d’Or d’Antibes que j’ai gagnée avec « Ciel », les tournées Renzulli où nous nous sommes rencontrés, toutes mes rencontres qui ont semé ma carrière, ma famille bien sûr et mon père Carlo Cotti qui était chanteur.
Il y a donc eu aussi « La Révolution Française »
Un jour en 73, je terminais une tournée avec Serge Lama, Claude-Michel Schonberg et Alain Boublil me contactent, me proposant de faire un casting. Ils cherchaient des voix pour la comédie musicale orchestrée par Jean-Claude Petit. Ils m’ont joué au piano « Charles Gauthier », « Les droits de l’Homme », j’ai fait ma voix… Ils m’ont choisi et on a enregistré le double album. C’est un magnifique souvenir et c’est dommage que ça n’ait pas pris autant que « Les misérables » du même Schonberg, car il y a de merveilleuses chansons. Et puis on retrouvait Bashung, Chamfort, les Martin Circus, les Charlots, Antoine, Daniel Balavoine, Jean-François Michaël, Jean Schulteis, Claude-Michel Schonberg… Il y avait du beau monde dans cette aventure !
Après ça, il y a eu la série des mangas !
Figure-toi que je suis dans un bureau de la maison d’édition Intersong qui me fait signer un contrat d’édition, il produisait Noam, qui avait alors 13 ans, m’invite dans son bureau où tu croisais alors Patrick Bruel pas encore connu, Alain Prescurvic qui allait travailler avec lui, Renaud entre autres. Il m’appelle pour me faire enregistrer la suite de « Goldorak » dont le premier avait été chanté par Noam. C’était la version japonaise… Une catastrophe. Je refuse. Du coup il va chercher Pascal Auriat pour refaire les titres avec Pierre Delanoé. Là, ça prend tout de suite une autre tournure et j’accepte pour les deux et trois. Mais ma productrice, Carla, refuse que je les chante. Du coup, je le ferai quand même sous le pseudonyme des Goldies.

Pourquoi ce nom ?
Tout simplement parce que je vais boire un café en bas des bureaux et qu’il y a une bijouterie qui s’appelle Goldies. Voilà… J’avais trouvé le nom ! Après on a quand même su que c’était moi qui chantait. On a vendu 1 million 800.000 45 tours !
Tu viens aussi de ressortie un CD des dessins animés !
J’ai repris tous les génériques que j’avais enregistrés et des reprises d’autres mangas. Je suis invité dans tous les salons mangas et j’en vends à chaque fois des centaines !
Il y a quatre/cinq ans, jérémy Cerrone, le fils de Marc me dit qu’il veut produire un spectacle sur Goldorak et me demande venir chanter mes génériques. Il a rempli le grand Rex. 2500 personnes l’après-midi, 2000 le soir ! Il a récidivé avec le même succès. Les gens viennent avec les costumes de Goldorak et ils achètent tous l’album !
Bon, difficile de ne pas parler de Peter et Sloane !
Déjà, lorsque le 45 tour sort vous êtes tous les deux de dos !

Toujours pareil : Carla ne veut pas entendre parler de ça, du coup, on le fait quand même en se servant du pseudonyme : Peter pour Pierre et Slow, sur un titre que j’avais écrit et Anne.
Il y a alors eu l’avènement de Canal + et la création du Top 50 où nous avons été les premiers durant quatorze semaines, puis troisièmes et encore premiers durant neuf semaines.
Aujourd’hui on donne un disque d’or pour 50.000 ventes, nous c’était un million et platine deux millions ! Ce sont des scores qui ne se font plus sauf chez les stars américaines. Du coup, après déjà 3.000 45 tours, la prod a tourné la pochette !

Et ça a duré combien de temps ?
Le disque est sorti en 84, tournée en 85 avec Michel Leeb on a fait un album de six titres mais ça n’a rien donné. En 2011 On a fait la tournée « Âge Tendre » puis « Stars 80 », accompagnée par les deux films. Mais j’avais envie de reprendre mon nom et de redevenir soliste. Je n’étais pas heureux, on ne se parlait plus et se retrouver à deux, main dans la main, j’en ai eu marre et j’ai repris ma liberté. C’était en 2016. Terminé.
Depuis, avec ma femme on est revenu ici, on fait plein de choses, on est très heureux dans notre vie.
Travailler sous le ciel bleu, que demander de mieux ? »

Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Alain Lafon & Jacques Brachet

En famille !

Andrée BONIFAY… En souvenir de Fernand

Andrée Bonifay, c’est une boule d’énergie qui ne reste pas cinq minutes en place, qui a mille idées à la seconde, qui est une femme multitâches, qui passe son temps à créer, animer, s’occuper de différentes animations, peindre ; femme on ne peut plus passionnée, volubile, défendant aussi bien les gens dans le besoin que la chanson française qui est sa passion.
Passion aussi pour son petit cousin, auteur, compositeur de près de trois mille chansons et dont elle porte le nom : Fernand Bonifay.
De Johnny Hallyday à Dalida, de Pétula Clark à Michèle Torr, d’Annie Cordy à Bourvil, de Luis Mariano à Georges Guétary, de Georges Brassens à Maurice Chevalier, de Sacha Distel à Henri Salvador, de Frank Alamo à Richard Anthony, de Gloria Lasso à Sidney Bechet… Bon on arrête là car on ne peut pas citer tous les artiste qui l’on chanté sur plusieurs génération.
« Souvenirs, souvenirs », « Maman la plus belle du monde », « Je me suis souvent demandé », « 24.000 baisers », « Jambalaya », « Romantica », « Petite fleur »… Là encore je m’arrête car la liste des succès est longue.
Qu’il soit auteur, compositeur ou les deux, la vie de Fernand Bonifay est émaillée de ce qu’on n’appelait pas encore des tubes mais des succès.
Ce seynois né en 1920 et décédé en  1993, est encore vivant dans l’esprit des gens d’un « âge certain », ses chansons vivaces et Andrée en est l’artisan, tant elle se démène pour qu’il soit toujours présent dans la chanson française car les chansons sont toujours là, longtemps, longtemps après que l’artiste ait disparu. Et elle le fait savoir.
Son appartement est rempli de photos, de disques, de partitions, d’articles de presse, d’écrits d’artistes, de quoi constituer un musée.
Andrée a pris en main l’association « Les amis de Fernand Bonifay », à la suite de Jacques Suzanne qui l’a créé et elle y anime des conférences, des rencontres, des soirées dansantes et fait venir de jeunes chanteurs d’aujourd’hui pour interpréter les chansons de son cousin, avec des orchestrations qui en font des chansons intemporelles. Elle en a même fait un CD qui prouve l’intemporalité de ces chansons remises au goût du jour.
Elle méritait bien un portrait, même si, depuis les décennies qu’on se connaît, j’ai déjà eu l’occasion de le faire.

« C’est vrai que j’ai très peu connu Fernand. Je suis peut-être celle de la famille qui l’a le moins rencontré…. Mais qui le connaît le mieux et qui en parle le plus !
Pourquoi ?
Je me suis prise de passion pour lui, pour son répertoire. Lorsque j’étais petite, mon père chantait ses chansons. Il se cachait de mes grands-parents pour les chanter Mais déjà, j’aimais ses chansons. Il faut savoir que les Bonifay, c’est une grande famille très nombreuse et éclatée, il y avait toujours des histoires de famille. Sa tante Jacqueline avait un peu la main mise sur lui, du coup j’ai entendu parler de lui par hasard, lorsque je travaillais au service des eaux : un jour il appelle le service pour un problème, il se présente : « Je suis Mr Bonifay et j’ai un problème ». Je lui réponds « Je suis Andrée Bonifay, je suis votre cousine et je vais essayer de résoudre votre problème ! ». C’est ainsi qu’on s’est connu. Nous avons eu le temps de nous rencontrer quelquefois puis il est tombé malade et il a disparu.
Du coup, j’ai commencé à découvrir ses chansons, je me suis prise de passion.
Jusqu’à créer l’association des Amis de Fernand Bonifay ? Non, c’est Jacques Suzanne qui a créé l’association en 2003, que j’ai reprise en 2011 lorsqu’il s’est arrêté. On avait déjà fait l’inauguration du chemin en 2001 et grâce à l’association, j’ai fait des connaissances qui m’ont permis de découvrir des côtés du personnage que je ne connaissais pas, comme d’apprendre qu’il avait un diplôme d’aviateur que j’ai retrouvé sur Ibay !
A l’époque, tu n’avais rien de lui ?
Que quelques photos et des coupures de journaux afin de le découvrir sa vie d’artiste. Peu à peu, en cherchant, je trouvais des photos, des interviewes, entre autre celle de Jacqueline Lenoir où il raconte pourquoi il est né à Paris.
Il n’est donc pas né à la Seyne ?
Non. Son père était cheminot, il voyageait souvent et il était à Paris lorsqu’il est né. Mais la maison familiale était à la Seyne. On l’a d’ailleurs mis en internat et il était déjà un peu rebelle… Tu vois de qui je tiens ! D’ailleurs Jacques Suzanne me fait un immense plaisir lorsqu’il me dit : « Tu es aussi casse c….s » que ton cousin ! Comme lui, je suis perfectionniste à l’extrême. Lorsque j’organise quelque chose, il faut que ce soit toujours au carré… Même si ça me stresse !

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Donc, tu découvres Fernand et tu commences à collectionner…
…Tout ce que je trouve sur lui, je commence à découvrir ses chansons. Il faut dire qu’il y en a plus de 2.300 dont 120 Succès. Internet m’a beaucoup aidé. J’ai récupéré des tonnes de partitions, d’articles, de documents, de courriers. On m’en a beaucoup donné aussi
Tu savais qui chantait quoi ?
Pas forcément car il y a des artistes que je ne connaissais pas comme Yvette Giraud qui chantait « Je me sens si bien ». Mais ma chanson préférée est « Je me suis souvent demandé » que chantait Richard Anthony. Dalida a beaucoup chanté de chansons de Fernand, « Romantica », « Je pars », « Tu n’as pas très bon caractère »… Michèle Torr a fait une merveilleuse interprétation de « Jimbalaya » qu’ont aussi chanté Mireille Mathieu, Hugues Aufray, Eddy Mitchell, Lucienne Delyle… Nombre de chansons ont été reprises par plusieurs chanteurs et chanteuses. Comme « Maman, la plus belle du monde »… Roberto Alagna, Dalida, Henri Salvador, Mathieu Sampéré, Luis Mariano, André Claveau, Vincent Niclo, Karen Cheryl, Tino Rossi, Michèle Torr… Et j’en passe.
Ils savent que ce sont des chansons ou des paroles de Fernand ?
Pour certains, je ne crois pas. Tu sais les auteurs et compositeurs sont des artistes de l’ombre. On dit que c’est la chanson de tel chanteur, rarement de celui qui l’a écrite ou composée. Ce sont ceux que l’on oublie le plus vite. On se souvient de la chanson, de celui ou celle qui la chante mais pas de leurs créateurs.
Fernand a commencé d’écrire à quelle époque ?
Très jeune, à l’école mais il a vraiment commencé à écrire à 15/16 ans, dans les années d’après-guerre et il a continué jusqu’à sa mort.
Tu as une photo de Fernand avec Brassens. Etaient-ils amis où ont-ils travaillé ensemble ?
Ils ont écrit « sur mon phono ». A la base, je crois qu’elle était écrite pour Bourvil qui l’a chantée. Chez Bourvil le titre est « Mon vieux phono ». Mais ce sont les mêmes paroles. Pour Bourvil il a aussi écrit « T’épier »… Tu vois le jeu de mots ?! Il adorait les jeux de mots et a été à bonne école car il a fait de l’art dramatique avec Raymond Devos.

Alors, tu as réalisé un CD avec la jeune génération !
Jacques Suzanne était encore président de l’association et lorsque j’ai annoncé que je voulais faire un CD. Personne n’a cru cela possible ! Je suis allée voir Fred Ambroggi de la Fabrique Sonore qui m’a dit qu’il allait m’aider, j’ai rencontré de jeunes chanteurs comme Laurent Lenne, Jennifer Marchiona, Cyril Wajnberg, Gilles Gaignaire et quelques autres artistes de la région et le CD est sorti sous le titre « 20 ans après »
Tu as dû avoir nombre d’apprentis chanteurs pour le disque.
Oui, j’en ai même eu un qui se prenait pour Mike Brant, il avait une assez belle voix mais il chantait faux et est arrivé tout de blanc vêtu… La chanson était un carnage ! Il s’est présenté à « The voice », bien sûr il n’a pas été retenu et… il s’est pendu dans la loge !!!
Aujourd’hui, donc, tu continues ?
Dans la mesure de mes moyens, le Covid a bousculé pas mal de choses, la salle Guillaume Apollinaire est fermée, louer une salle – et il y en a peu ! – devient très cher mais bon, je continue tant que je peux faire des choses. J’ai beaucoup mis de ma poche mais je me faisais plaisir. Et surtout, j’ai fait connaître Fernand que personne ne connaissait dans sa propre ville. Pour moi, c’est une belle satisfaction. Mon rêve serait que la Seyne fasse quelque chose… C’est peut-être naïf, par contre, je ne crois pas que ça intéresse beaucoup la ville. Qu’est-ce que je vais faire de tous ces documents ? Je ne sais pas…
Tant que je suis là, ça va… Mais après ?
A qui vont les droits d’auteur de Fernand ?
Ils tournent pendant 70 ans après la mort de l’auteur et ceux de Fernand vont à… sa compagne qu’on a découverte ! Déjà personne ne savait qu’il avait été marié, entretemps il avait divorcé et s’était mis en ménage avec une autre femme qui a hérité de tous ses biens et de ses droits d’auteur. Toute la famille a été en procès pour détournement de l’héritage.
Moi, je ne l’ai jamais rencontrée, elle ne m’a jamais fait d’histoire… et pour cause, puisque chaque fois que je fais quelque chose, c’est elle qui encaisse !
Ce que j’ai su plus tard c’est qu’au départ l’association avait été créée pour le procès. J’ai tout de suite mis le holà car ce qui m’intéressait c’était de faire connaître le patrimoine de Fernand, pas d’entrer dans ces combines.
Ce qui me fait plaisir, c’est d’avoir pu nommer une rue à la Seyne et une à Six-Fours, entre Jacques Brel et Edith Piaf et de faire connaître son œuvre. »

Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Alain Lafon et collection personnelle d’Andrée Bonifay
Les Amis de Fernand Bonifay – 06 60 39 43 33