TOULON : L’Hermione superstar

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La folie des grands jours sur le port de Toulon en ce premier week-end du mois d’avril.
Et cette foule immense, pour qui ? Pour l’Hermione qui y a accosté pour une escale de quatre jours durant ce voyage le long des côtes méditerranéennes.
Doit-on présenter ce magnifique voilier des temps anciens, frégate dite « légère » né en 1778 à Rochefort dans l’arsenal du royaume de France.
1000 tonnes, 2200 mètres carrés de voiles, 44,20 mètres de long, 11 mètres de large, un mat de 54 mètres au-dessus de la quille, 26 canons; sa construction a nécessité 11 mois de travail pour tous les corps de métiers, des charpentiers aux calfats, des forgerons aux clouteurs, sans oublier les bagnards.
Il fit la campagne d’Amérique, de 1780 à 1782, puis escortera des navires marchands avant de sombrer en 1793.
Voici 25 ans, quelques fous-furieux décident de créer l’association Hermione-la Fayette afin de reconstruire cette mythique frégate à l’identique. Le président fondateur en est Eric Orsenna, avec l’appui de Benedict Donnely , américain spécialiste de la Fayette et l’aide du Maire de Rochefort Louis Frot.

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Il faudra plus de 20 ans pour que ce projet fou sorte des chantiers de Rochefort, aidé de quelque 4000 membres actifs que réunit l’association. Et voilà que renaît à l’identique ou presque ce bateau légendaire qui a mené, au bout de 36 jours, un certain Gilbert du Motier, marquis de la Fayette, en Amérique, venu lui demander son soutien.
Cette association ira plus loin que la « simple » construction d’un bateau, puisque celui-ci deviendra le symbole de la liberté, l’emblème de la langue française, réunissant 34 états et gouvernements membres de la Francophonie.
Ainsi en cette année 2018, l’Hermione, commandée par Yann Cariou, sillonne la Méditerranée en 12 escales. En fait 11, celle de Barcelone ayant dû être annulée à cause du mauvais temps.
Partie de Rochefort, son port d’attache les escales se suivent et se ressemblent par le succès que ce périple provoque partout où elle se pose, de Tanger à Bordeaux, de Sète à Port Vendres, de Marseille à Bastia, de Toulon à Nice…..
A Toulon, ce furent des centaines de mètres de queue pour pouvoir atteindre la passerelle et enfin mettre le pied sur cette merveille de réalisation.

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Tous ensemble pour une même aventure
Reçus par le lieutenant nantais Pierre Chiffoneau, fier de nous la faire visiter, il nous dit son plaisir de faire cette tournée en Méditerranée :
« C’est une tournée de parade et l’on est heureux de voir l’engouement qu’elle suscite. Notre but, évidemment, est de faire naviguer ce bateau et de le faire découvrir à un maximum de gens. L’équipe est composée de 12 marins professionnels et de 80 gabiers bénévoles qui ont été sélectionnés à Rochefort, d’abord pour leur passion de la mer, pour leurs qualités physiques, leurs capacités, leur cursus et entre autres, leur capacité à monter sur le mat, ce qui n’est pas la plus facile des choses ! Ils faut qu’ils soient polyvalents car il y a de nombreuses tâches à accomplir sur un tel bateau : de la barre à la cuisine en passant par les veilles et les rondes, la manœuvre, le gréement, la sécurité, l’entretien du navire Durant trois mois, ils ont fait des stages de 15 jours pour se former et ne viennent pas spécialement du milieu marin. ils faut aussi qu’ils puissent s’inscrire dans une collectivité car même si le navire est grand on y vit en circuit fermé. Et tous ces gabiers, garçons et filles, viennent de tous milieux, de tous horizons, sont de toutes nationalités, venant aussi bien de France que du Québec, d’Egypte, d’Afrique, du Cambodge, d’Arménie, de Pologne, de Tunisie…. »

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Le lieutenant Pierre Chiffoneau – Alban Vallery

Une belle aventure
Alban Vallery et un tout jeune gabier venu du Sud-Ouest, dont le métier est charpentier et la passion l’escalade. C’est dire si, physiquement, il répondait aux critères.
« J’ai toujours été amoureux du bateau et lorsque j’ai su qu’il y avait des stages de formation, je me suis présenté.; Nous devions écrire une lettre de motivation, faire des testes physiques. Nous avons eu une semaine de formation voile et dû apprendre des notions maritimes. Il faut savoir que ce sont des périodes de navigation temporaire, ce n’est pas un métier en soi. J’avais fait la transatlantique en 2015. J’ai repris mes fonctions le 12 mars à Tanger et je fais les escales de Sète, Toulon, Marseille puisque, entre temps, l’escale de Barcelone a été annulée.
Comment se passe votre travail à bord ?
Nous sommes des équipes travaillant en trois tiers : babord : 8h/12h et 20h/minuit – tribord : minuit/4 h et midi/4h – milieu : 4h/8h et 16h/20h. Nous sommes à chaque fois vingt volontaires encadrés par cinq pros. Les legs (périodes de navigation) peuvent être de 15 jours à trois semaines. Et il n’y a pas de grasses matinées ! Pour mois c’est une passion et un loisirs puisque, entre temps mon métier est d’être charpentier. Mais ça a donne tout de même envie d’y travailler à plein temps car il y a toujours du travail pour un charpentier sur un tel bateau.
Vous êtes combien en cabines ?
Nous dormons à 17, dans des bannettes ou des hamacs.
La promiscuité n’est-elle pas difficile à vivre ?
Pas vraiment. Évidemment, il faut faire la part des choses, on sait qu’il y a des contraintes, il peut y avoir de petits conflits comme partout où il y a une concentration de personnes mais nous avons une ligne de conduite à tenir et les petits conflits se règlent à l’amiable. On sait pourquoi on est là, quels sont les buts et les enjeux. Et c’est le principal ».

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De longues files d’attente

Comme on a pu se rendre compte, il règne sur l’Hermione une ambiance de sérénité, de franche camaraderie, de passion de la mer et chacun sait la chance qu’il a de pouvoir vivre une aventure hors du commun. Même si, comme l’a dit Alban, ce n’est qu’un moment dans la vie de chacun mais qui peut-être fera naître des vocations et surtout leur inculquera des notions de liberté, de vivre et travailler ensemble, de découvertes d’autres cultures, de se lancer des défis et d’aller au-delà de soi-même…
L’aventure est belle et restera pour tous ces gabiers en herbe, une expérience et un souvenir inoubliables.

Jacques Brachet
Photos Monique Scaletta

Dernière heure
Saint-Mandrier-sur-Mer rend hommage au premier commandant de l’Hermione, Latouche Tréville, dimanche 8 avril à 10h.
Dimanche 8 avril, Gilles Vincent, Maire de Saint-Mandrier-sur-Mer, Vice-Président de la Métropole TPM, rendra hommage à Latouche Tréville, au cimetière Franco-Italien à Saint-Mandrier.
A 10h, Monsieur le maire déposera une gerbe sur la tombe du commandant Louis-René-Madeleine de Latouche-Tréville, qui fut le premier commandant de la frégate de L’Hermione à partir de janvier 1779.
C’est à bord de L’Hermione qu’il a conduit La Fayette jusqu’à Boston au cours de la campagne d’Amérique, au printemps 1780.
Lieu : Cimetière Militaire Franco-Italien – route Semaphore, 83430 Saint-Mandrier-sur-Mer