Le collectif TESTE
agitateur en poésie à Toulon, et ailleurs

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Cédric Lerible, grand agitateur en poésie devant l’éternel, participe à un collectif réuni dans l’association Parole d’Auteur, et qui produit la revue « Teste », mot énigmatique mais qu’on peut référer au Monsieur Teste de Paul Valéry, au test, à texte en provençal ; mais surtout à tête et à témoin. En fait cette revue a pris le relai de la revue « Testament » fondée par Emmanuel Rastouil, abrégeant ce titre en Teste, dans le but d’un nouveau départ, d’une renaissance, afin aussi de garder un lien avec le passé.
Autour de Cédric Lerible et Emmanuel Rastouil se sont réunis Paul Antoine, Patrick Sirot, Emmanuelle Malaterre, plus spécialisée dans les collages, et la poète-slameuse Mü. Toutes et tous fondamentalement poètes dans leurs différentes expressions.
Rencontre à la Bibliothèque des Beaux Arts de Toulon avec Cédric Lerible et Paul Antoine, et comme le disent nos deux interlocuteurs : « Le fait que le siège de la revue se trouve dans une école d’art permet d’être en prise directe avec la création contemporaine ».
Donc à l’origine était la revue « Testament » fondée en 2010 et qui réunissait une quinzaine d’auteurs, en relation avec le réseau Encre d’Art, il y avait déjà rencontre entre écriture et arts plastiques.
« Teste » qui a pris le relai au numéro 16 a déposé ses statuts et fait son lieu de résidence à Toulon afin d’être ancré dans la ville où vivent ses membres. Elle se déclare « recueil éphémère, empreinte d’une saison ».
Cette revue reprend le flambeau d’une longue tradition de revues et d’éditions de poésie à Toulon, telles La Chandelle Verte, La Cave, Chemin, Telo Martius, Les Amateurs Maladroits, marquées par les poètes Marcel Spada, Raymond Jardin, Pierre Caminade, André Portal, Michel Flayeux, Pierre Tilman, Marcel Migozzi, Patrick Lorenzini, Michel Costagutto, Gilbert Renouf, et quelques autres, eux-mêmes précédés par Germain Nouveau, François Fabié, Jean Aicard, Léon Vérane pour ne parler que des plus connus… On voit que la chaîne n’est pas rompue.
« Teste » se veut un véhicule poétique, c’est à dire donner à lire la poésie en train de s’écrire, avec l‘éclectisme le plus total : pas d’étiquettes, pas de chapelles, pas de suivisme des modes. Seul critère, la qualité des œuvres, reconnues par le Comité de Lecture, composé des membres du collectif. Le collectif s’en tient à une revue de 80 pages, ce qui donne un cadre et une unité de parution.

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La revue est ouverte aux arts graphiques : dessins, collages, peintures, photos : là aussi le choix est fait en Comité. Dire également que la revue se veut avant tout une aventure humaine et amicale.
Un auteur peut prendre en mains l’organisation d’un numéro de la revue, mettre en parallèle, en résonance, voire en contradiction, les textes et les œuvres graphiques, après justement une réflexion pour les enchaînements des textes et des œuvres graphiques, dans le but d’en faire une œuvre cohérente et pas seulement une juxtaposition aléatoire. C’est aussi dans ce but que la revue n’est pas paginée ; ce qui permet une lecture au hasard des pages.
En ce siècle de revues numériques il faut saluer ce qui est véritablement un acte de résistance : produire une revue papier, et de plus de poésie ! Rien ne remplacera le livre. On peut le consulter partout, sans souci de rupture de batterie, le poser sur une table et le voir chaque fois qu’on passe devant, et le prendre, lire un texte, le conserver sur des rayons, et peut-être le retrouver un jour chez un bouquiniste… Oui, je sais, je le fais, on peut imprimer les textes numériques, mais c’est un autre monde.
La revue paraît tous les trimestres à chaque passage de saison. Le lancement se fait à la librairie « Le Carré des Mots » à Toulon, vraie librairie tenue par de vrais libraires qui savent parler des livres qu’ils vendent et proposent des livres choisis. Ces lancements sont une occasion de conserver la substance des choses par une présence physique entre public et artistes. S’y ajoutent une exposition et une intervention musicale, toujours de haut niveau.
Ce collectif ne se contente pas de la production d’une revue, ce qui est en soit un exploit, mais il participe à nombre d’événements avec par exemple l’association Plaine Page, Les Amis de Léon Vérane à Solliès-Ville, Le festival VIP (Ville d’Intérêt Poétique) dans la Vallée du Gapeau entre la Farlède et Solliès Toucas, qui dure quatre week-ends au printemps, le PASSOC (les anciens de l’école d’art), le PLAC (Petit Lieu d’Art Contemporain).
Le numéro 23 vient de paraître avec un sommaire de textes très riches reflétant bien les tendances et les recherches actuelles en poésie. Et le rappel d’un poète né à Toulon, André Martel (1893-1976), qui se faisait appeler « Papapafol » et le « Martelandre », qui inventa une langue prodigieuse : le paralloïdre. Il faut dire qu’il fut régent du Collège de ‘Pataphysique. Du Paralloïdre au Slam, la chaîne de la poésie continue. Dans ce numéro de remarquables photos d’une très jeune israélienne, Julia Gat ; on peut dire qu’elle a un œil, et un sens du cadrage, pour proposer des personnages émouvants. Dans ce même numéro une poète, israélienne elle aussi, déjà confirmée, Diti Ronen. Ces invitations affirment la volonté de la revue de s’ouvrir aux expressions d’autres pays. Ajoutons que cette revue est un bel objet, avec une couverture nouvelle pour chaque numéro, ce qui ajoute à sa volonté d’être toujours en mouvement.
Les projets : un numéro spécial à propos de Léon Vérane, et pour le numéro 24 une carte blanche est donnée à Hildegarde Laszrak organisatrice du Festival VRRR… au Musée d’Art de Toulon.

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Serge Baudot
Où se procurer la revue : Librairie le Carré des Mots : 4 place à l’Huile à Toulon
ou bien à <contactparoledauteur@laposte.net