Toulon – Théâtre Liberté
Lutter contre le harcèlement à l’école
et le cyber harcèlement

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En cette fin de mois de juin le Théâtre Liberté présentait de concert avec le Ministère de l’Education Nationale et la Protection Judiciaire de la Jeunesse le résultat du chantier mis en œuvre en décembre 2014 (voir article décembre 2014) sous la houlette de Charles Berling et Patrick Bruel, avec la projection des trois court-métrages d’Amandine Stelletta permettant de mettre à la parole les tenants et aboutissants du drame. C’était le premier temps du projet.
Deuxième temps avec les ateliers vidéo coordonnés par Amandine Selleta et l’équipe vidéo de BlackTwin.
Troisième temps : l’après midi au Théâtre Liberté avec la rencontre des artistes-élèves des collèges concernés avec les adultes impliqués.
Et le soir pour tous publics. On assistait aux résultats de ces travaux avec la présentation de trois films tournés par les élèves de trois classes de 4° des collèges Maurice Genevoix, Pierre Puget, La Marquisanne, collèges situés en zone de sécurité prioritaire, et deux films tournés par un groupe de jeunes sous main de justice, suivis par la Protection Judiciaire de la Jeunesse.
Pour la présentation des œuvres filmées et pour la table ronde ainsi que pour la partie débats, étaient réunis sur scène : Charles Berling et Pascale Boegler tous deux pour l’accueil et la présentation, Amandine Stelletta, réalisatrice des trois films de décembre, et fer de lance de la réalisation des films par les élèves, ainsi que les divers intervenants, et les différents acteurs officiels de la lutte contre le harcèlement.
Tous dirent et redirent l’émotion, le plaisir, les découvertes, les remises en question d’eux-mêmes qu’ils avaient vécus en travaillant avec les élèves. Ils insistèrent sur le sérieux de ces derniers, leur engagement et leur capacité à vite s’emparer des diverses taches de la réalisation des films, pour finir par agir comme de vrais professionnels. Le résultat justifie ces éloges chargés d’émotion.
Ces ateliers visaient trois objectifs :
-La formation : découvrir le fonctionnement d’une équipe vidéo et du Théâtre Liberté.
-La sensibilisation : fédérer autour du projet collectif et comprendre les tenants et aboutissants du harcèlement.
-L’expression : Révéler leur potentiel créatif.

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Les films :
– « La vengeance d’Arthur » montre un garçon harcelé par une fille, il se mure dans le silence, mais finalement il se souvient que trois ans plus tôt c’est lui qui harcelait cette fille. Démonstration magistrale de comment le harcelé devient parfois harceleur.
-« Témoins d’un cauchemar », c’est la bonne élève d’une classe de zozos, harcelée par le groupe jusque dans son travail numérique. Elle aussi se mure dans le silence et subit son sort victime de la minorité agissante et de la majorité passive. Et c’est ainsi que les dictatures règnent sur la terre.
-Le troisième film nous montre le harcèlement par photo qu’on fait circuler. Une fille aide sa copine à attacher son soutien gorge, une photo prise au moment du passage de la main dans le corsage va faire le buzz. Et la gamine se trouve exclue, au bord du suicide.
Dans les deux courts films produits par la PJJ, ce sont deux garçons qui se racontent, exprimant par la voix et le dessin leur mal être, leurs souffrances, leur besoin de se trouver, de reconnaissance.
Les grands thèmes du harcèlement ado sont parfaitement mais en situation, avec des acteurs criant de vérité, permettant une prise de conscience de ces situations dramatiques qui marquent à vie les victimes, et mêmes les persécuteurs, et conduisent parfois au suicide, tant le regard et le jugement des autres est essentiel pour les ados.
Il apparaît que l’essentiel dans la lutte contre le harcèlement à l’école soit d’être attentif au changement de comportement de l’ado, pratiquer l’écoute et la parole, et la prise au sérieux de chaque cas.
Le débat fut long, animé, et profond. Les questions posées par le public et les réponses données par les intervenants ont permis de faire le tour de la question, d’offrir des solutions aux parents dont les enfants sont victimes de harcèlement, tel ce père venu témoigner avec sa fille victime de harcèlement depuis trois ans dans son collège, sans qu’elle ose en parler. Ce père dit avoir tout essayé pour trouver une solution avec l’établissement, duquel il n’eut comme réponse que « c’est une affaire de gosses, ce n’est pas grave. » Il a donc décidé de porter plainte et a mis sa fille dans le privé. Ce cas prouve que si la plupart des établissements agissent avec conviction et engagement contre ce fléau (25% des élèves sont touchés), d’autres ont besoin de prendre conscience du sérieux du problème, et des actions comme celle qui vient d’être enclenchée par le Théâtre Liberté devrait être à même de les mettre sur les rails.

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Serge Baudot