NOTES de LECTURES
par les PLUMES D’AZUR

DE ST PIERRE Gaudé+®-®Jacques Gavard

Isaure de SAINT PIERRE : Le roi des rêves,  Louis II de Bavière   (Ed Albin Michel)
L’auteure nous donne dans ce livre une biographie de Louis II de Bavière appréhendée sous un jour nouveau. Elle met en lumière son rôle de roi qui s’opposa à Bismarck et défendit l’indépendance de la Bavière même s’il n’était pas fait pour régner. Amateur d’art, il ruina son pays en entretenant Wagner qu’il fit découvrir à son peuple, et en faisant construire d’extravagants chateaux qui font maintenant partie du patrimoine bavarois.
Très belles descriptions,  ecriture recherchée au poiint d’être parfois un peu pompeuse, cette biographie se lit facilement. Elle tente de faire connaître  l’homme qui se cache derrière le personnage extravagant de ce roi de légende.

Laurent GAUDE : Danser les ombres (Ed Actes Sud)
Lucine retourne à Port-au-Prince, ville quittée cinq ans à regret cinq ans auparavant pour s’occuper des enfants de sa sœur. Ce retour est porteur d’espoir, elle croit en la vie, elle oublie les vieux souvenirs douloureux de la dictature de Duvalier et de ses tontons macoutes. Les quarante- cinq secondes  de secousse d’un terrible tremblement de terre interrompent et broient  la vie de ce peuple peint magnifiquement par Laurent Gaudé. Car la terre a libéré les forces de l’enfer, c’est le rendez-vous joyeux d’un carnaval macabre conduit par une vieille haïtienne, meneuse de revue !
Laurent Gaudé a utilisé des tragédies naturelles ou politiques pour écrire Ouragan ou Eldorado, il a démontré son talent pour placer le lecteur au cœur du désarroi de peuples martyrisés, c’est dans ce dernier roman le tremblement de terre  de Haïti qui l’a inspiré. Son écriture suit le rythme des évènements, la magie opère, tout est dit avec le souffle puissant de ces dieux vaudous qui ranime et remonte les murs écroulés. Ce roman redonne vie à ces ombres si vivantes qu’elles ne peuvent que danser.

Ruth Rendell TRUCY-Copier

Ruth  RENDELL :  Une vie si convenable (Ed des deux terres)
Voici un beau roman traduit de l’anglais par Johan-Frédérik Guedj, écrit dans un style fluide et agréable .  Une universitaire fait une thèse sur la situation des mères célibataires fin 19ième et début 20ième siècle . Elle partage avec son frère la grande maison héritée de leur grand-mère . Quand le compagnon de celui-ci vient habiter avec eux, les problèmes commencent , plus ou moins liés à leur homosexualité et aux difficultés inhérentes à toute cohabitation .                       Elle se plonge dans un livre écrit début 20ième  et publié à compte d’auteur en raison du sujet jugé scabreux pour l’époque, livre qui traite à la fois de son sujet de thèse et de l’homosexualité  .  La juxtaposition des deux livres traitant des mêmes sujets à deux époques différentes contribue à mettre en évidence l’évolution des mœurs pour les deux problèmes de société traités . Les personnages bien campés sont présentés avec talent, on est pris par leur histoire à laquelle on porte intérêt sans hésitation . Si vous aimez qu’on vous raconte une histoire, vous serez séduit par ce roman qui vous en raconte deux .

François TRUCY : Les Suspects (Ed Livres en Seyne)
Le Docteur François Trucy, ancien Sénateur et Maire de Toulon, nous narre dans ce récit, les mésaventures de huit varois pendant la Terreur de 1793 où Jacobins, sans-culottes et fédéralistes anti-conventionnels s’affrontent  dans le Var. Ces huit varois font partie d’un convoi de trente et une personnes envoyées à Paris, sous la pression de l’accusateur public du Var Jean-Baptiste Vachier, pour y être jugés et guillotinés.
Parmi eux deux ancêtres de l’auteur, Victor Trucy, notaire à Barjols et son fils aîné François, arrêtés par le conventionnel  Barras alors en mission auprès de l’armée d’Italie et qui s’emploie à « pacifier le département du Var ».
Grâce au récit du voyage  des Trente et un Provençaux, rédigé par Mougins de Roquefort, aidé par les Trucy, et aux manuscrits trouvés dans les archives,  l’auteur nous décrit dans cet ouvrage très bien documenté et intéressant,  la haine et la terreur qui régnaient à l’époque en  France.

SHALEV WIAZEMSKY Anne photo sacha 2011 COUL 1

Zeruya SHALEV :  Ce qui reste de nos vies (Ed Gallimard)
Hemda vit sans doute ses derniers jours dans sa petite chambre et heure après heure elle dévide la pelote de sa vie depuis le Kiboutz où elle née , élevée par un Ce n’est plus qu’un fil qui la retient à la vie et c’est le lac de son enfance qui l’a toujours terrorisée qu’elle évoque à travers ses souvenirs d’enfance. Tristes souvenirs que ceux qu’elle a vécus à travers une enfance difficile , un mariage sans amour et des enfants adorés mais qu’elle n’a pas compris et qui vont se déchirer.
Etrange roman d’amours étranges où tout le monde aime mais souffre, s’étiole, se déchire mais ne sait pas donner. Ce livre écrit à la troisième personne,sans véritables dialogues est d’un abord difficile, les phrases longues et sinueuses perdent un peu le lecteur qui ne sait plus qui s’exprime .Roman puissant et très émouvant   Trop de flashback dans lesquels on s’égare. ce qui rend le roman désolant et répétitif malgré une écriture dense et évocatrice.

Anne WIAZEMSKY : Un an après (Ed NRF Gallimard)
« Un an après », c’est aussi un an de la vie d’Anne Wiazemsky petite fille de François Mauriac et jeune épouse de Jean Luc Godard.
Nous sommes à Paris, dès le début des manifestations de Mai 1968. Anne, jeune mariée, vient de s’installer Rue Saint Jacques avec Jean Luc. Elle a vingt ans, est issue de la grande bourgeoisie ; elle déteste les excès et les dérapages. Lui, trente sept ans, représente le cinéma d’avant-garde ; il s’affiche comme le gourou d’une génération. Nous le savons nerveux, velléitaire, en rupture avec tous les systèmes.
Et pourtant les voilà réunis dans ce grand élan de solidarité et d’espoir qui devait changer la société. Immersion dans la foule des manifestants, rencontre avec la brutalité policière… Lui, maoïste, milite tandis qu’avec une copine, elle découvre dans la foule, les joies du patin à roulettes ! Ils se retrouvent pourtant avec émerveillement et sensualité dans leur petit appartement du Vème arrondissement.
Le récit alerte, est souvent cocasse,(le lecteur appréciera particulièrement l’anecdote de la tasse de thé prise sous une table avec Paul Mc Cartney !) ; la peinture de cette époque nous renvoie à nos souvenirs même si la perception d’une rencontre avec l’Histoire ne nous parait pas évidente – du point de vue de l’auteure.-
Il s’agira plus de l’histoire de l’héroïne et du délitement du couple face au chaos provoqué par les évènements. Les divergences s’affichent : conflit de génération et d’opinion aggravé par la jalousie maladive du cinéaste. La tentative de suicide  de Jean Luc Godard (un an après !) mettra un terme à leur idylle.
En résumé, le récit autobiographique d’une révolution en patin à roulettes !