Prévert, Vian, Desnos…
Trois écrivains, trois poètes dits « libertaires » qui ont marqué la seconde moitié du XXème siècle par leur talent, leurs prises de position et l’éventail d’un travail magnifique entre romans, nouvelles, poèmes, chansons…
Ils font aujourd’hui partie du patrimoine littéraire français et lorsqu’on parcourt leur oeuvre, l’on peut se rendre compte de leur modernité, de l’acuité de leurs propos mais aussi de leur étendue, allant de la poésie pure à des écrits totalement iconoclastes, en passant par un humour décapant.
Visionnaires, ils ont beaucoup de points communs dont celui de jouer avec gourmandise avec les mots, ce qui n’a pas échappé à Jean-Louis Trintignant qui a décidé, voici quelque temps, de monter un spectacle en mêlant leurs écrits, seul sur scène, uniquement accompagné par l’accordéon de Daniel Mille et le violoncelle de Grégoire Korniluk.
A l’occasion de la Fête du Livre de Toulon, Charles Berling a invité Jean-Louis et ses comparses pour offrir ce spectacle au public puis a eu l’idée de s’immiscer dans leur intimité.
C’est ainsi qu’ils ont fait l’ouverture de la saison au Théâtre Liberté avec ce spectacle revu et modifié puisque un quatrième larron est venu se joindre à eux.
Deux grands comédiens, deux personnalités diamétralement différentes, l’un étant posé, caressant les mots, installant des silences, mettant quelquefois de la distance et en jouant tantôt sur l’émotion, tantôt sur l’humour, de cette belle voix grave, reconnaissable entre toutes. L’autre, fougueux, énergique, trublion jouant sur les mots avec une belle force persuasive, un goût du coup de théâtre calculé et faisant mouche à tous les coups.
Aussi dissemblables que possible et pourtant si proches, à l’unisson lorsqu’ils disent et fredonnent ensemble « Le déserteur » ou « Barbara », souligné par les deux instruments de musique.
Temps suspendu où l’émotion est palpable.
Ce fut un grand moment et le public, subjugué, fit une très longue standing ovation, chose rarement vécue avec autant d’intensité dans ce théâtre.
Évidemment, si Charles est chez lui sur cette scène où il est apprécié, Jean-Louis y venait pour la première fois et fut à la fois heureux et presque gêné de ces rappels à l’envi qui n’en finissaient pas.
On ne pouvait pas mieux démarrer la saison.
Jacques Brachet