Avec Dave, c’est une rencontre qui date de son premier énorme succès qu’est « Vanina ».
Nous nous sommes souvent croisés sur la route des tournées qui, à l’époque, duraient trois mois d’été. Je l’avais même invité aux journées culturelles que j’organisais à la Foire de Toulon qui a aujourd’hui disparu.
Puis nous nous sommes retrouvés sur les tournées « Age Tendre » où, en
coulisse, retrouvant tous les artistes de ces années-là et plus, nous nous marrions bien !
Mais le covid est venu et l’on n’a plus vu personne.
Aujourd’hui chacun reprend sa route et comme tous les artistes, Dave retrouve le chemin des scènes.
Le voici au Pradet où je ne pouvais pas le rater. Une interview ? Non, plutôt une conversation complice que nous retrouvons aussitôt.
Même si nous avons quelque peu vieilli, je retrouve avec plaisir son humour, sa gentillesse.
La première question et de savoir comment il va car on se souvient qu’il a eu un grave accident en chutant dans ses escaliers en 22.
« Eh bien écoute, ça ne va pas trop mal depuis cette petite – non, disons grosse – chute. Je me suis remis mais le problème est que je n’ai plus récupéré le goût et l’odorat et qu’à mon âge – j’ai 79 ans – le plaisir physique se faisant rare (enfin, presque !) il ne me restait plus que le plaisir de manger et ça, ça me pénalise vraiment. Manger et boire deux fois par jour, c’est très désagréable de ne plus avoir ce plaisir. Sinon, il reste de beaux moments d’oubli comme la lecture, les voyages, les rencontres et surtout retrouver la scène et le public qui est toujours sympa. Ça reste de beaux moments à vivre. De toute façon, comme on sait comment ça va se terminer pour tous, c’est bien de vivre ces moments-là.
Et tu as une longue tournée cet été !
Oui. Après deux ans de confinement, je suis heureux de repartir sur les routes, de retrouver la scène et le public. Tous mes copains, chanteurs ou comédiens, comme mon ami Daniel Auteuil, sont restés sans travailler durant deux ans et nous aimons tous notre travail, qui n’est pas un travail comme les autres. On ne pense jamais à partir à la retraite. On n’arrête pas… Tu connais ça toi aussi même si, à côté de moi, tu es un gamin !
Je te signale qu’on n’a que deux ans de différence !
Mais c’est énorme ! Si l’on avait été à l’école ensemble, avec deux ans de moins que moi je ne t’aurais même pas parlé… Même si depuis on s’est rattrapé !
Bon, alors, cette tournée. Comment se passe-t-elle ? Tu sautes toujours autant sur scène ?
Mais oui, je continue à sauter… Mais je saute doucement, disons que je sautille mais je vais toujours dans le public… Tout en regardant où je mets les pieds afin que ça ne se termine pas mal !
Tu sais, lorsqu’on est sur scène on est envahi par quelque chose et parfois on ne fait pas attention à ce qu’on fait. Je ne vais pas demander un escalier comme Line Renaud. Mais elle, elle est âgée !!!
Tu parlais de Daniel Auteuil. Le vois-tu toujours ? Que penses-tu de sa « carrière » de chanteur ?
Eh oui, aujourd’hui il fait carrière de chanteur ! Depuis la fin du confinement il commencé une nouvelle carrière. Je devrais dire « recommencé » car nous avons débuté ensemble dans une comédie musicale « Gospel » fin 71… Mon Dieu que c’est loin ! Puis il a eu sa carrière d’acteur et a toujours regretté de ne plus avoir le temps de chanter. C’était toujours dans sa tête et il réalise un rêve. Mais il n’a pas arrêté son métier de comédien. D’ailleurs il prépare un film produit par une de ses filles et il jouera avec une autre de ses filles… C’est rigolo !
Figure-toi que j’ai découvert que tu avais failli représenter ton pays à l’Eurovision… Je ne le savais pas !
Là aussi, il y a très… très longtemps !
On m’avait demandé de représenter mon pays et au premier tour je me croyais bien placé et je pensais que les jurés étaient tous pour moi… Mais c’est une fille qui a gagné.
Alors qu’on a été concurrent, se retrouver animateur de ce concours, qu’est-ce que ça fait ?
On m’a proposé ça en 2003 et c’est là que j’ai eu la joie de rencontrer Olivier Fogiel. Nous avons réitéré l’année d’après puis on nous a virés car nous disions trop de conneries !
Dommage car c’était d’autant plus drôle que, avouons-le, le concours est plutôt…
Oui, je vois ce que tu veux dire ! Mais ça n’a pas plu à tout le monde, c’était pour certains un peu trop caustique… Un peu beaucoup, même, je l’avoue.
Mais j’étais avec Marco tout-à-l’heure. Il était de passage avec son compagnon et ses deux enfants. Il partait en Sicile chez ses beaux-parents. Ce qui est drôle avec lui, c’est que, pendant qu’on parle, il ne quitte pas son Iphone. Il est directeur général de BFM TV et il est occupé 24 heures sur 24.
Tu es un des rares chanteurs de ces années 70 à ne pas avoir eu de trou dans ta carrière…
Non, j’ai eu, comme tous les chanteurs, de moments, disons, de calme. Je ne suis pas toujours resté au premier plan. Ce qui m’a sauvé c’est qu’on aimait m’inviter par ce que j’étais spontané, je faisais rire et du coup, je n’ai pas trop à me plaindre. Mais pour les nouvelles générations, je suis plus un animateur qu’un chanteur, ce qui est normal. Ils connaissent tous « Vanina » parce qu’à chaque fois on me demande de la chanter. Mais à mon époque, quand je voyais Tino Rossi, je me demandais ce qu’il foutait là !
Donc, la roue tourne ! »
Et le voici sur scène avec toujours la même pêche, le même rapport avec le public qui a vieilli avec lui. C’est vrai, il saute moins haut, ce qui ne l’empêche pas de sauter au milieu du public… Avec un peu de difficulté pour remonter !
Il est magnifique, la voix est toujours là et il enchaîne tube sur tube : « Sugar baby love », « Mon cœur est malade », « Dansez maintenant », « Du côté de chez Swann », « La décision », adaptation d’une musique de Brahms, « Est-ce par hasard ? », « Lettre à Hélène », « Allo Elisa »…
Pas de « Vanina » à l’horizon ?
Mais si, bien sûr car après une fausse sortie ou le public le rappelle et scande le titre de la chanson, le revoici qui vient la chanter avec toujours cette haute voix que lui seul peut donner. Et il enchaîne avec la chanson de Piaf-Aznavour « Jézabel » pour terminer avec l’Ave Maria de Schubert, superbement soutenu par l’orchestre de Richard Gardet.
Le parc Cravero était plein à craquer et l’Ami Dave a prouvé que, comme le chantait « presque » Brassens, le temps ne fait rien à l’affaire, quand on est bon… on est bon !
Jacques Brachet
Photos Patrick Carpentier