Notes de musiques

Max DARMON : La grande aventure (Antipodes Music – 6 titres)
Max Darmon est d’abord bassiste, puis auteur compositeur, et le voilà qui se frotte à la chanson ; oui « C’est une grande aventure », réussie. Voix chaude et virile, qui reste dans le médium, avec du charme, et de la douceur. « Fuis-moi » est assez représentative de ses différentes qualités. Il est entouré par des claviers et des perçus, et même un oud, sur de arrangements assez bateaux.
Les thèmes tournent autour de l’amour, le plus souvent malheureux. Il utilise parfois le parlé chanté rythmé, comme dans « La grande aventure ».
Un chanteur en devenir. A suivre.
AÎTONE : Follow (Musigamy / Inouïe Distribution – 11 titres)
Aïtone, c’est une forêt en Corse, et c’est aussi un groupe corse, qui revendique sa « corsitude ». Voici leur second album réalisé par François Poitou. C’est un groupe homogène avec un son de groupe personnel, des arrangements (de François Poitou) qui se fondent dans la voix, qui devient un instrument comme les autres.
Le chanteur joue d’une voix intimiste, comme sortie de la nuit (« Inner Child »), qui peut monter dans l’aigu (« Nightmare »), ou devenir rauque et puissante (« Le temps de l’autre ».
Ce groupe est parfaitement à la place d’honneur dans ce qu’on appelle la pop anglo-saxonne.

Caesar SPENCER : Get Out Into Yourself (New Radio Records – 11 titres)
Un magnifique livret façon BD, qui donne les paroles des chansons. Bravo !
On nous présente Caesar Spencer comme Anglais né au Pérou, également Suédois, mais qui réside en France depuis 2008. Extraits d’une interview de Paris Move : « Je voulais donner quelque chose en retour à un pays qui m’a tant offert (…).Je voulais démontrer qu’en France, il y a une sophistication dans la créativité musicale qui n’existe nulle part ailleurs. Je prends mon univers anglo-saxon et je le déplace dans un contexte français… C’est à la fois étrange, et fascinant.” C’est bien vu. Le chanteur possède une voix grave, vibrante, au charme très particulier. Par la voix, la façon de chanter, le son du groupe, on est très proche de l’Australien Nick Cave and the Bad Seeds, en plus solaire. « Isn’t that what jimi said » (hommage à Hendrix ?) est assez emblématique du fonctionnement du groupe.
Les mélodies sont belles, prenantes ; elles restent en mémoire, même si elles sont proches musicalement les unes des autres, reposant souvent sur des chœurs et des arrangements bien moulés et efficaces. Pas mal d’invités aussi. Un beau duo avec Mareva Galanter sur « When I whisper in your ear », beau chant d’amour. Les thèmes sont assez variés.
Ce disque exerce une sorte de fascination par le côté lancinant des mélodies qui vous enveloppent et ce chant des songes dégagé par l’ensemble. Groupe qui a tout à fait sa place dans l’univers pop rock British-French dans ce qu’il a de meilleur.
Louis ARLETTE : Sacrilèges (Le Bruit Blanc)
Quelques-uns des plus grands poèmes du patrimoine mis en chansons ; formidable ! Rare de nos jours. Je mets avec gourmandise le disque sur la platine. Hélas, première déception, « La Ballade des Pendus » est susurrée sur une scansion slam, pas une mauvaise idée, mais les paroles sont inaudibles même quand on connaît le poème par cœur. « A son âme » de Ronsard, plus réussi. « Tristesse » de Musset, chanté  sur un air agréable. « El desdichado », chanté façon Renaud. « La fin de la journée » de Baudelaire, chantée aussi, mais là encore, difficile de comprendre les mots. Mauvaise prise de son ? Les airs sont assez banals. On est loin de Brassens, ou de Léo Ferré par exemple, même si la démarche est autre. Certes le CD s’intitule « Sacrilèges », donc volonté de déboulonner les statues, peut-être de déconstruire ; mais après il faut reconstruire. On espère une suite plus corsée. On est quand même au degré zéro de la poésie. Je ne peux m’empêcher de penser à Victor Hugo, qui déclarait : « Défense de déposer de la musique le long de mes vers ». Mais l’appropriation est libre ; le tout c’est de la réussir, d’être au niveau du poème.

Serge Baudot