Gisèle CASADESUS : « Le jeu de l’amour et du théâtre » (Ed Philippe Rey)
« 100 ans… C’est passé si vite ! »
C’est ce qu’avec éblouissement Gisèle Casadesus, bon pied, bon œil, bonne mémoire, résume en une phrase pour résumer sa vie de femme et d’artiste.
Belle, lumineuse, loin d’une vieille dame indigne, cette comédienne est aussi cultivée que talentueuse et dans ce livre, elle évoque sa vie partagée entre cinéma et théâtre mais aussi sa vie de femme. Femme de passion qui, née dans une famille de musiciens (sa mère était harpiste, son père compositeur et violoniste) compte aujour’hui quelque quarante artistes, comédiens ou musiciens, dont son fils Jean-Claude, chef d’orchestre, Caroline sa petite-fille, fille de Jean-Claude, mariée à Didier Lockwood, Gréco Casadesus, compositeur… On s’arrête là tant il y en a à nommer !
Leur vrai nom, Kazadsy, vient d’Espagne mais a depuis longtemps été francisé et Gisèle, baignée de musique, de théâtre, de peinture, a choisi d’être comédienne et aujourd’hui encore elle dit avec gourmandise : « Si je ne joue plus au théâtre, pour le cinéma… je suis libre ! »
Elle joué tous les grands auteurs et est entrée à 20 ans à la Comédie Française et depuis lors, sa vie a été faite de la passion de jouer. Elle égrène ses souvenirs sans nostalgie, avec beaucoup de tendresse, en ne gardant que les bons souvenirs et on sent tout le plaisir qu’elle a eu en se souvenant des artistes qui ont marqué sa vie, même si les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître certains. De Raimu à Madeleine Renaud en passant par Michel Simon, Fresnay, Copeau, Jouvet, Francen, Gabin et bien d’autres avec qui elle a partagé un bout de planches, un bout de pellicule.
Elle a toujours vécu dans le monde de l’Art avec un grand A et si souvent le surnom de « Monstre sacré » est galvaudé, il lui va comme un gant, même si elle fut toute sa vie un gentil monstre. Et une grande dame.
Et quelle simplicité, en dehors du fait qu’elle fut une grande comédienne, qu’elle est une admirable conteuse et qu’en plus… on aimerait l’avoir pour mamie !
Comme dirait Drucker… Quelle femme épatante !
Laurent RUQUIER : « Radiographie » (Ed Cherche Midi)
Garçon à la fois volubile et passionné, à force de radiographier les autres, il a décidé de s’auto radiographier en nous racontant sa vie et sa passion qu’il avait en lui dès son plus jeune âge, alors que ses parents étaient loin de tout ça, entre un père qui a toujours eu envie de se cultiver, ses livres de chevet étant le Quid et le Petit Larousse et une mère qui, déçue de n’avoir pas eu une fille, ne lui a pas beaucoup donné de démonstrations affective… ceci expliquant cela, diront très vite certains !
Contre vents et marées, il a toujours poursuivi ses rêves et les a atteint brillamment, comme on le sait, malgré un physique qui, au départ, n’était pas celui de Brad Pitt et avec un cheveu sur la langue.
Mais sa répartie, son esprit vif, son humour ont fait qu’il est aujourd’hui un animateur incontournable, qui a gardé la tête froide car il sait qu’on peut tomber d’un piédestal du jour au lendemain. Et surtout, il sait se souvenir d’où il vient et, s’il est heureux et fier d’avoir atteint son but, il sait qu’il ne faut jamais lâcher l’affaire. Et il nous raconte aventures et avatars avec son humeur joyeuse, son humour toujours prêt à fuser et son regard qui est resté celui de l’enfant émerveillé devant un métier qui est devenu le sien, les gens qui ont semé sa route de petits bonheurs, ses expériences avec ses hauts et ses bas.
Il vit à 100 à l’heure une vie de folie mais c’est celle qu’il a toujours désirée du plus loin qu’il se souvienne de sa petite enfance au Havre.
Evidemment, il ne peut s’empêcher de faire un bon mot avec cette gourmandise qui le caractérise car il est bon public et aime rire de ses saillies, tout comme son public qui le suit.
Avec ce livre on lui découvre un autre talent : celui de conteur et on prend un réel plaisir à le lire.
Véronique GENEST : « 22, v’la Julie ! » (Ed Michel Lafon)
Elle écrit comme elle parle : à l’emporte pièce, haut et fort, allant d’une idée, d’une anecdote, d’un souvenir à l’autre, faisant des apartés, revenant sur le sujet… Bref, vous l’aurez compris, ce n’est pas de la grande littérature mais si on aime Julie-Véronique, on aime son franc parlé, son langage peu châtié, son grain de folie.
Lorsqu’on a lit… on l’entend, avec sa fantaisie et sa façon de parler et de raconter ses plus de vingt ans d’une série qui a fait sa gloire à tel point qu’on amalgame l’artiste et son rôle, ce qui ne la gêne pas plus que ça puisqu’elle nous fait entrer de plain pied dans les coulisses du tournage de cette série-culte que fut « Julie Lescaut ».
Chose originale, dans ses pérégrinations, elle s’est inventé un personnage, nommé Diablotin, qui intervient sporadiquement dans le livre pour relever une phrase souligner une situation ou la remettre dans le droit fil de ses souvenirs…
Ce n’est pas vraiment une autobiographie mais un documentaire sur l’envers du décor puisqu’elle nous présente tour à tour tous les corps de métier, les personnages avec qui elle a partagé sa vie depuis 22 ans, et avec qui elle fait corps, les différentes phases d’un tournage, nous en expliquant le fonctionnement, le tout, truffé d’anecdotes, chargé d’énergie, d’un peu d’émotion, lorsque, par exemple, elle évoque son complice Mouss Diouff, son « Moustique », son gros nounours disparu.
C’est un livre plein d’amour, plein d’humour, teinté d’un peu de nostalgie qui ne fait que passer car la battante qu’elle est ne vit pas de regrets.
En fait, c’est Véronique Genest dans toute sa splendeur !
VIGNOL-HERAN : « Renaud, chansons à la plume et au pinceau (Ed Didier Carpentier)
Alors que nombre de chanteurs de la jeune génération lui rendent hommage en enregistrant ses chansons, Renaud, dont on annonce sporadiquement « le grand retour » reste dans l’ombre mais il fait aujourd’hui partie de la légende de la chanson française et est loin d’être oublié. Hormis ses chansons que l’on entend toujours et encore, voici deux dessinateurs qui, eux non plus, ne l’ont pas oublié : Baptiste Vignol et Heran, qui lui offrent un superbe album préfacé par le frère de l’artiste, David Séchan. Un album à la fois beau et original puisque, outre les paroles de ses grandes chansons et la genèse de celles-ci, tout deux se sont mis à la plume et au pinceau pour les illustrer de manière superbe. Et, de « Mistral gagnant » à « Morgane de toi » en passant par « Marche à l’ombre », « En cloque », « Laisse béton », nous remontons vers des souvenirs proches (Renaud n’a que vingt ans de carrière), vers des succès incontournables et nous les redécouvrons grâce à ces dessins qui sont de véritables oeuvres d’art qui ne dépareilleraient pas sur un mur. Ils sont pleins de charme, d’humour et de tendresse et cela nous donne encore plus envie de voir revenir ce bel artiste…
ANNABELLE & GREGORY : « Mouloudji athée ! O grâce à Dieu ! » (Ed Didier Carpentier)
Enfin un hommage rendu à cet artiste majeur de la chanson française.
Artiste qui, hélas mais de son fait, fut toujours un peu à part, un peu marginal car n’ayant jamais voulu entrer dans le moule, dans le carcan du show business, épris de liberté et restant libre de ses mouvements, de ses idéaux, de ses envies, passant du cinéma à la chanson et, dans ce domaine, fort exigeant et intransigeant, personne ne lui ayant jamais imposé quoi que ce soit.
C’est un magnifique portrait à deux voix : ses deux enfants, Annabelle et Grégory (copie conforme physique de son père !) qui nous ouvrent à la fois leur cœur, leurs souvenirs de l’artiste et du père et leur trésor : photos et documents conservés avec amour.
S’il fut un grand poète, un bel artiste, il a vécu dans un monde qu’il s’était fabriqué, le nez dans les étoiles, peut-être un peu trop détaché du monde qui l’entourait pour être un père modèle même si l’amour qu’il portait à ses enfants était sincère.
Ils nous racontent chacun leur expérience, leur vie d’enfants, sinon de star, du moins d’artiste qui peut être l’égal des Brel, Gréco, Brassens, Ferré et autres Ferrat.
Un grand monsieur très discret, peut-être trop par rapport à son talent, dont on découvre plein de facettes grâce à ses enfants, dans ce superbe album qui ne pouvait être édité que par Didier Carpentier, amoureux des artistes et des beaux albums qu’il nous offre à longueur d’année.
C’est très beau, à la fois passionnant et émouvant et l’on navigue dans une époque où la chanson française prenait toute son importance et voulait dire quelque chose, artistiquement et culturellement.
Jacques Brachet