S’il est un artiste qu’on ne se lasse pas de rencontrer c’est bien Anthony Joubert, regard rieur, accent bien de chez nous, en perpétuel mouvement, ne restant pas en place trois seconde, volubile car il a toujours quelque chose à raconter ou une vanne à envoyer. C’est un régal !
Notre dernière rencontre s’était faite au bord d’une piscine dans laquelle il plongeait, revenait pour continuer l’interview, rigoler avec son équipe.
En ce vendredi, nous nous retrouvons au Colbert à Toulon et… il n’a pas changé, comme le dirait Iglésias. Il parle, bouge, sort fumer une cigarette, revient, lâche une blague et se rassoit pour essayer de parler sérieusement… Ce qui n’est pas gagné !
En plus, il est un peu déconnecté car la veille, il était… à Orlando !
Tu es allé faire « Antho l’américano » ??
(Il rigole) Figure-toi que je suis fada des parcs d’attraction… Et je suis parti là-bas pour en faire le plus possible… J’ai fait le parc Universal, les 4 parcs Disney, le Bush Garden… Quand l’ouragan est arrivé !
Je suis un poissard, je prends rarement des vacances et voilà qu’il y a un seul ouragan dans le monde et il est là où je suis ! Du coup, les parcs ont dû fermer… Et je suis rentré sans les avoir tous faits !
Ça vient de quoi cette passion ?
De tout petit, j’ai toujours aimé l’immersion dans ces attractions qui font monter l’adrénaline.
Et je suis prêt à tout pour découvrir ces sensations. Je suis allé dans les plus grandes attractions à Los Angeles, à Vegas, à Dubaï qui a les attractions les plus rapides du monde.
Et tu ne leur a pas fait un sketch, aux américains ?
Figure-toi que j’ai été invité par un copain à un Comedy Club… et que j’ai joué cinq minutes d’impro… en anglais et en français ! Ils n’ont pas compris grand-chose à mon anglais marseillais mais ils ont ri ! Je me suis quand même dit que jouer là-bas, ce n’était pas pour demain ! J’ai des progrès à faire en anglais.
Je regrette qu’en France on n’apprenne pas plus d’anglais à l’école car la barrière de la langue est handicapante. Et puis, l’humour des américains est plus subtil que le nôtre. Il se rapproche plus de l’humour anglais.
L’Amérique, en dehors des parcs, ça t’a plu ?
J’avoue qu’en dehors des parcs je n’ai pas vu grand-chose… à part des gens qui sont très gros et Dieu sait s’il y en a et même des jeunes de 7, 8 ans. Ils bouffent très salé, très sucré et on y mange très mal. Qu’est-ce qu’on mange bien en France !
Bon, à part ce voyage, quel sont tes projets ?
Tu as le temps ? Bon, je commence. D’abord, je suis en train d’écrire un livre qui s’intitulera « Le pantalon de mon père et les cheveux de ma mère ». Je raconte comment j’en suis arrivé là. Ce qu’on retrouve un peu dans mon spectacle. Puis je monte « Un dîner de cons », que je jouerai au théâtre d’Alès les 14, 20 et 27 octobre puis les 10, 11 et 12 novembre. 8 dates et c’est déjà complet !
Je jouerai avec une troupe de jeunes talentueux car j’aime aider les jeunes talents et pouvoir redonner ce qu’on m’a donné. Jouer une pièce, c’est nouveau pour moi et ça m’excite et m’angoisse à la fois.
Ça t’a pris comment ?
Je voulais un peu sortir de mon personnage d’amuseur. Je voulais prouver au public et à moi-même, que je peux faire autre chose. Bien entendu, je serai François Pignon !
A part ça, je suis en train d’écrire mon troisième one man show qui s’intitulera : « Quand est-ce que ça a merdé ? »
Tout un programme ! Ca parlera de quoi ?
De ma vie, de choses qui me sont arrivées, mêlées à des événements d’actualité. On y retrouvera des moments de ma vie que je raconte dans le livre mais ce sera plus percutant et en rapport avec ce qu’on vit aujourd’hui. Et avec ce que je vis aussi.
Du travail sur la planche donc…
Mais ce n’est pas tout ! Je suis aujourd’hui le directeur artistique de l’Espace de la Penne sur Huveaune !
Mais tu arrives à tout faire ?
Oui, je suis un boulimique mais je suis très organisé. Et puis, travailler, c’est ma passion. J’ai été très malheureux de tout arrêter durant la Covid. Du coup je créais des sketches, des chansons sur les réseaux sociaux, ça a marché au-delà de mes espérances. Et ça m’a permis de pouvoir remplir des salles.
Mais je ne sais pas m’arrêter, être sur scène c’est ma vie, le public c’est ma drogue, je suis un bourreau de travail, j’adore les challenges. D’ailleurs je vais refaire des sketches sur Internet et j’écris deux pièces dont une avec Éric Collado grâce à qui j’ai débuté et grâce à qui j’ai fait « La France a un incroyable talent »
Pour un ex timide, c’est pas mal !
C’est vrai, petit, j’étais d’une timidité maladive. Je passais mon temps à observer les autres, surtout les humoristes dont j’enviais l’aisance et que je m’amusais à imiter. Je me suis rendu compte que ça faisait rire les gens, que je devenais intéressant. Du coup, je n’ai pas eu besoin de thérapie, je l’ai trouvée et maintenant, je n’ai plus peur de rien !
Bon, ça y est ? On a fait le tour ?
Oh… j’ai encore d’autres projets mais je les garde pour notre prochaine rencontre !
De toutes façon, on aurait pu continuer mais l’heure du spectacle arrive et il est temps de rejoindre nos places pour découvrir un spectacle à cent à l’heure avec l’humour à tous les étages, accompagné de David son complice, tour à tour magicien qui rate tous ses tours, chanteurs ringard, mais aussi excellent chanteur lorsqu’il le veut, imitateur, reprenant ses chroniques radio, s’adressant au public du premier rang qui n’a pas regretté sa place… Bref, c’est une pile de bonne humeur, de rires et pourtant, à un moment, il nous parle de son père et là, l’émotion s’installe.
Car son père s’est beaucoup inquiété lorsqu’il lui a annoncé qu’il « montait à Paris faire l’artiste »
Il me l’avait dit durant notre rencontre et qu’il raconte au public
« Mais moi je savais que c’était ce que je voulais faire et pas entrer dans les postes ou dans une mairie. J’ai résisté. Aujourd’hui, j’ai d’abord perdu ma mère puis mon père est allé la rejoindre et je crois qu’ils sont fiers de ce qui m’arrive. Quand je les rejoindrai, je dirai à mon père : « Tu vois que j’ai eu raison d’insister. Et même si je ne suis qu’un micro-artiste, je vis de ma passion, je vis dans ta maison que j’ai rachetée et je suis heureux… »
Jacques Brachet
Photos Alain Lafon