Après le frère… l’autre frère !
Pour la troisième fois le violoncelliste Gautier Capuçon a enflammé la cour d’honneur de la maison du Cygne.
Il a tout du gendre idéal : beau, simple, souriant, chaleureux… Et par-dessus tout ça, avec son violoncelle il enflamme le public.
Il arrive tout souriant avec son pianiste Franck Braley, regard de connivence et aussitôt Gautier nous souhaite une bonne soirée et, à l’opposé de son frère, Renaud, plus réservé, plus intériorisé, les yeux, fermés, comme dans une bulle, il va, tout au long de la soirée, nous raconter l’histoire de chaque morceau qu’il interprètera et c’est toujours passionnant de savoir comment est née une œuvre, pourquoi elle est née et comment elle a pu évoluer avec le temps, être détournée en passant d’un instrument à l’autre.
Il démarre tout en énergie avec un adagio-allegro de Robert Schumann, en passant de l’un à l’autre avec élégance. Puis il passe à « Louange » d’Olivier Messiaen, œuvre écrite durant l’internement du compositeur en 1940 et qu’il a interprété pour la première fois dans le camp où il était interné. Gautier rend également hommage au grand pianiste Nicholas Angelich qui vient de décéder le 19 avril à l’âge de 51 ans et qui, comme son frère, a joué avec lui. Moment émouvant avec une minute de silence. Il en profite pour également rendre hommage à l’Ukraine où il a donné deux concerts en avril et où il garde tendresse et tristesse.
Et puis, première surprise, il invite un jeune pianiste hyérois, Kim Bernard qui a reçu le prix de la fondation qu’il a créée pour accompagner et transmettre ses valeurs artistique à un jeune musicien d’exception, et dont le premier album sortira le 17 juin.
Il lui laisse la scène pour deux morceaux et, à 22 ans, il a déjà tout d’un grand, la maîtrise, la concentration et il a totalement charmé le public avec deux extraits de ce CD : « Reflets dans l’eau » et « Isle joyeuse » de Claude Debussy.. Il reviendra plus tard pour un duo avec le maître, une magnifique interprétation d’un morceau de Piazzola « Oblivion ».
Après « Vocalise » de Rackmaninov, écrit sans paroles pour une soprano et que Gautier remanie avec infiniment d’inventivité, il se lance dans ce qu’on appelle « un morceau de bravoure » signé Paganini dont l’histoire est édifiante : le morceau est tellement rapide et enlevé qu’un soir le compositeur en casse trois cordes de son violon et finira avec une corde ! Rossini, paraît-il, en a pleuré !
Gautier a gardé ses cordes mais ses doigts, comme des papillons, virevoltent sur les quatre avec une folle agilité. Et son pianiste, en toute complicité est en totale osmose avec lui.
Et puis, après la splendide sonate N°3 de Beethoven, le premier final nous offre encore un moment extraordinaire, qu’on avait déjà pu apprécier lors de son premier passage au Cygne, l’incroyable « Gzardaz » de Monti, avec, là encore, une incroyable performance.
Mais ce n’était pas fini pour autant puisque revoilà le violoncelliste et les deux pianistes, bien serrés sur la banquette pour nous offrir une œuvre… pour six mains !
Ce fut du délire et sur cette originale interprétation, le public partit le cœur d’étoiles.
L’on devait retrouver Gautier le lendemain matin à 8h30 (Fallait le faire !) pour venir, en compagnie de jeunes musiciens et du maire de Six-Fours, Jean-Sébastien Vialatte, changer l’archet de son violon pour… une pelle avec laquelle ils plantèrent un chêne (enfin symboliquement, l’arbre ayant déjà trois mètres de haut) et jetèrent la terre au pied de celui-ci !
A 8h45, tout était fait et Gautier partit très vite vers Marignane pour prendre un avion qui l’emmenait… à Istanbul, avant de repartir au château de Schönbrunn en Autriche, son voyage musical l’emmenant dans le monde entier.
Mais il reviendra pour sa tournée « Un été en France », comme l’an dernier, et il nous offrira, le dimanche 24 juillet, son dernier concert estival au Parc de la Méditerranée, accompagné de jeunes musiciens et d’une compagnie de danse. Concert gratuit à 21h, suivi d’un feu d’artifice, où vous pourrez assister au spectacle en pique-niquant dans l’herbe !
Le feu d’artifice, nous l’avons eu avec ce dernier concert des Nuits du Cygne.
Bravo l’artiste ! Et bravo la Municipalité pour cet étincelant festival.
PS. Le temps entre son arrivée et son départ de Six-Fours, ne nous a pas permis de faire une interview avec Gautier Caapuçon… mais qu’il m’a promis qu’il aurait lieu lors de son retour en juillet.
Dont acte !
Jacques Brachet