Six-Fours – Théâtre Daudet
Le retour de la troupe du collège Reynier

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Au théâtre Daudet on entre dans une ruche virevoltante où une nuée d’abeilles parle, rit, gesticule et surtout – car ces abeilles sont des apprentis comédiens – répètent consciencieusement ce qui sera leur spectacle de fin d’année.
Un spectacle dont on ne savait pas, voilà une semaine, s’il pourrait être joué à cause de la situation sanitaire qu’il faut vivre au jour le jour.
Puis tout s’est précipité : le spectacle aura bien lieu et du coup, tout le monde s’affaire à son texte, à ses costumes, à la lumière, au son… autour de leur reine.
Cette reine est prof de français au collège Reynier… Enfin, était, puisqu’elle nous annonce sa retraite.

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L’équipe technique et… La reine des abeilles !

Come back : il y a 15 ans déjà, cette prof nommée Marie Paule Martinetti, fan de théâtre, décide de créer un spectacle de fin d’année. Ravis, les élèves relèvent le défi et vont, entre deux cours, retrouver la salle de répétitions. Fébrile, Marie-Paule ne savait pas ce que ça allait donner mais, fonceuse et énergique, elle y mit tout son cœur et ce fut un succès.
Forte de ce succès et des talents prometteurs découverts au fil des années scolaires, elle créé une
Une sorte de compagnie, la troupe de Reynier.
Du coup ce spectacle revient chaque année, avec des élèves nouveaux et quelques «anciens» qui s’accrochent et viennent au fil des années, même après avoir quitté le collège, comme Yannis Bannour-Lecoq et Victor Raquin, que j‘ai connus petits et qui ont bien grandi depuis… Enfin, pour l’un d’eux !
Ces ados sont on ne peut plus sympathiques, passionnés de théâtre, et ce qui est drôle et émouvant c’est qu’une année sur l’autre on les voit grandir, mûrir, s’affirmer, bien dans leur tête.

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Un vrai plaisir de les retrouver, tout comme Marie-Paule qui vibre toujours autant autour du théâtre et de ce qu’elle accomplit avec ces élèves avec qui elle partage, toujours avec autorité, complicité et je crois, une grande tendresse.
Au programme cette année, deux parties, la première, étant intitulée «Vous avez dit théâtre ?», une série de saynètes autour… du théâtre ! C’est à la fois drôle, pertinent, original et les voici passant de duos en trios, de scènes en thèmes où l’on retrouve le théâtre dans tous ses états, qu’ils interprètent avec brio, humour avec des textes drôles, quelquefois iconoclastes mais qu’ils s’approprient avec une grande assurance.
La seconde partie est une adaptation d’un roman de Daniel Keyes «Des fleurs pour Algernon» datant de 1966 au titre éponyme, ayant fait l’objet de nombreuses adaptations théâtrales, cinématographiques, télévisées.
C’est l’histoire de Charlie, 32 ans, retardé mental, qui, à l’hôpital, entouré de professeurs, se bat pour progresser. Il se bat aussi contre Algernon, une souris avec laquelle on le fait entrer en compétition. Elle a été opérée du cerveau et Charlie va l’être aussi.
Au départ, il n’évolue pas mais tout à coup son évolution est remarquable. Jusqu’au jour où Algernon commence à régresser puis à mourir, ce qui fait comprendre à Charlie que le même sort va lui être réservé.

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Une science-fiction qui raconte la lutte de ce jeune homme pour essayer de vivre normalement, malgré les humiliations et les moqueries de son entourage. C’est plein d’humanité, d’humour aussi quelquefois et une grande émotion vous parcourt grâce à Lucie Verdier qui joue Charlie avec une maîtrise incroyable, immense performance de ce petit bout de femme presque seule en scène et qui tient le rôle avec maestria de bout en bout. Elle a d’ailleurs reçu le prix d’interprétation féminine au Pôle Jeune Public des Comoni. La pièce ayant également reçu le prix du public et le trophée des collèges, prix tout à fait mérités tant cette pièce a été montée avec originalité et sobriété. Quant à Lucie, elle est peut-être à l’orée d’une carrière de comédienne. Tant elle est magnifique et bouleversante.
Et puis, après avoir laissé couler une petite larme, le spectacle va se terminer dans une cascades de larmes… de rires cette fois, avec nos deux  «vétérans» Victor et Yannis qui reprennent la chanson du groupe Il était une fois, «J’ai encore rêvé d’elle» façon les Frères Talloche, tout en mimes et grimaces, qui ont fait crouler de rire une salle qui leur a fait une standing ovation.

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Deux personnalités, deux talents comiques, un duo irrésistible et là encore, une belle performance pour clore cette soirée pleine de charme, de jeunesse, de vrais talents menée tambour battant par Marie-Paule Martinetti, une fois encore terminant sans voix et aussi très émue et fière de «ses petits»
«Je suis fière d’eux et ces trois prix sont la consécration finale pour ma retraite» me dit-elle avec émotion… De la voix qui lui reste !
La retraitée se porte bien, elle est déjà pleine projets car ce n’est pas encore qu’elle quitte ses petits protégés qui l’aiment et la respectent et sont heureux de monter sur scène avec elle.

Jacques Brachet