Anne Mariage : Chevaux d’aventure (Ed Actes Sud)
Anne Mariage a créé « Cheval d’aventure », un nouveau mode de tourisme équestre en 1972. Passionnée de cheval, d’ouverture sur le monde, Anne Mariage a commencé sa vie professionnelle en Lozère ; son esprit de découverte la mène en Colombie où elle partage le travail des vaqueros chargés de conduire d’immenses troupeaux de vaches aux changements de saison. Sa vie sera désormais en relation étroite avec les animaux, la nature et les hommes.
Son enthousiasme, sa volonté de rencontrer les gens du « cru », leurs coutumes, leurs croyances, leurs chants, leurs difficultés dans les contrées les plus reculées du monde et toujours cette joie de monter toutes les races de chevaux, tout est relaté dans ce livre très judicieusement sous-titré « rencontres autour du monde ». L’auteur est la merveilleuse conteuse qui nous fait partager ses soirées en Afrique, Asie, Amérique du Nord et du Sud, soirées passées autour d’un feu de bois, ou dans une yourte ou chez l’habitant, des liens indéfectibles se tissent entre les organisateurs et les locaux qui ouvrent généreusement leur maison et leur cœur.
Anne Mariage a parcouru tous les pays où il y a des chevaux, manque donc le Vietnam, pays sans tradition équestre. La passion d’Anne Mariage ne s’arrête pas aux randonnées, elle est également une experte en lecture des constellations des hémisphères nord et sud, également largement documentée en faune et flore qu’elle décrit avec passion.
Une vie choisie, exclusivement tournée vers le cheval comprenant l’impossibilité de créer une vie de famille, mais sa famille est grande et chaleureuse, elle compte des milliers de souvenirs recueillis dans ce livre. N’oublions pas qu’Anne Mariage était professeur de français dans une première vie, son écriture est variée, légère, visuelle, pas besoin de film, tout est dit.
Michèle GRAZIER : Les Convalescentes (Ed Le Seuil)
Nous sommes à Saint Libran les Bains dans l’arrière pays languedocien et partageons le quotidien de trois héroïnes venues retrouver le goût à la vie dans un centre de soins.
Il y a Lise, professeur d’anglais, soignée pour dépression, Oriane, jeune anorexique et Daisy l’américaine clouée dans un fauteuil roulant, qui se remet d’un accident de la circulation.
Dans le huis clos de cette maison de convalescence les trois femmes vont faire connaissance. Tout d’abord distantes, elles vont peu à peu s’apprivoiser. Le hasard les a réunies et bien qu’à des âges différents, nous découvrirons leur complicité autour d’un thé quotidien dans les jardins d’un hôtel.
La parenthèse que leur offre cette convalescence est aussi l’occasion de porter un nouveau regard sur leurs vies : Lise voit sa vérité ; elle s’est trompée : ni son métier, ni son mari, ni son petit garçon ne la satisfont. Elle s’est juste projetée dans le regard des autres ! Oriane violée à douze ans, vient régulièrement dans le centre puisque ses parents « payent pour sa santé »Elle essaie de se reconstruire ; la voix des autres devrait l’aider ! Quant à Daisy, toujours accompagnée de son mari Maxime, comblée semble-t-il par la présence attentive de ce dernier, elle a épousé le mari d’une amie décédée ; un bien énigmatique personnage.
Le roman bascule en effet autour de Maxime, « l’homme en noir » et parce que son identité reste confuse, il est le sujet des désirs et répulsions des pensionnaires de Saint Libran.
Plus que l’intrigue et son dénouement, c’est l’échange, la possibilité de regarder l’autre, dans ce lieu de nulle part qui donne tout son intérêt au livre. Ici tous les rêves sont possibles et cet intermède participera vraisemblablement au rétablissement des trois femmes.
Un livre facile, à l’écriture fluide, avec de belles images champêtres, intéressant et sociologiquement correct.
Solange BIED CHARRETON : Nous sommes jeunes, et fiers (Ed Stock)
Un jeune couple de trentenaires vivant à Paris en 2010, Noémie enseignante et Yvan mannequin, ont tout pour réussir. Lui, Homme cliché pétri par son milieu dont il est le reflet, va se retrouver en fauteuil roulant suite à un accident et leur vie va basculer. Pétris de bonnes intentions, obéissant aux règles sociales et morales ils vont chercher autour d’eux la réponse : que sont- ils, où vont-ils ? D’étapes en étapes en cherchant toujours la nouveauté ils vont se lancer dans une sorte de road-movie qui peu à peu les éloigne de toute vie sociale et les marginalise. C’est la recherche d’un retour à la nature mais qu’en es- il de leur confort alors qu’ils sont prisonniers de la modernité, de la consommation, des réseaux sociaux. Leur désir d’avancer est sincère mais ils vont se heurter à des problèmes insolubles .Enfants du néant ,c’est-à-dire haïssant le passé, la tradition, l’histoire ils s’avancent ,fiers de leur quête à la recherche d’autre chose, cette quête qui doit leur apporter le bonheur
Beaucoup de réflexions sur une certaine société actuelle,sur le parisianisme, la critique permanente, l’insatisfaction à tout propos et les clichés véhiculés dans la plupart des milieux nantis sans excès, sur les illusions liées à ces clichés,, Le livre est bien écrit, la construction en est correcte mais il ne déchaîne ni le rire ni la pitié ni l’enthousiasme, tout juste un haussement d’épaules devant tant de naïveté et un manque de maturité navrant
Hélène GAUDY : Plein hiver (Ed Actes Sud)
Lisbon, petite ville imaginée par l’auteur à la frontière du Canada. « On y passe, sans s’arrêter, on y reste quand on y est né, quand on la quitte, on n’y retourne pas. »
Alors que revient y faire David Horn disparu mystérieusement quatre ans plus tôt à quatorze ans, jeune meneur d’une petite bande composée d’adolescents disparates et d’une seule fille Prudence bien évidemment amoureuse de David ? Le traumatisme créé par la disparition du jeune garçon après une sortie dangereuse sur un lac gelé a généré un silence odieux car l’enquête policière a abouti sur rien, pas d’explication, pas de corps retrouvé, jnste un plutôt confortable oubli qui masque une vérité qui n’a jamais vraiment voulu faire surface.
David revient et ouvre la boite de Pandore car la vie a repris à Lisbon, sans lui. Pour certains, la personnalité de David devenait trop pesante et après sa disparition la vie semblait plus souriante. La mère de David accueille ce retour miraculeux, la vie sera à nouveau merveilleuse, elle ne pose aucune question, mais oublie que son fils a désormais dix-huit et que son retour a une signification. L’épreuve de vérité aura lieu, les liens exploseront, il y aura bien une explication sur le terrain.
Par touches discrètes, Hélène Gaudy revèle la vie dans une toute petite ville américaine où rien ne se passe, mais où chaque rideau cache un voyeur. Lisbon tragi-comique homonyme de la capitale du Portugal, ville où l’on vit, où l’on meurt, Lisbon qui a vécu son fait divers relaté dans le journal local mais ne veut surtout pas vivre le deuxième acte car ne rien dire , ne rien voir semble plus facile à supporter.
L’auteur manie admirablement l’atmosphère étouffante de l’ennui, de la manifestation de l’adolescence qui pressent un avenir bouché, bloqué, dans pourtant la ville réputée grâce à la présence du plus petit fleuve des Etats-Unis, long de soixante et un mètres et pompeusement nommé Atlantic River !
David Horn, disparu, revenu, reparti, n’a pas sa place à Lisbon. Peut-être est-il le seul à ne pas supporter le plein hiver d’Hélène Gaudy ?
Yves BICHET : L’homme qui marche (Ed Mercure de France)
Ancien pion au Lycée agricole d’Embrun, Robert Coublevie, devenu chemineau depuis que sa femme l’a quitté, marche le long de la frontière Italie-France, frontière qu’il ne franchit jamais. Il retrouve son ami Jean, le chartreux défroqué avec lequel il a des discussions métaphysiques .Que fuit-il ? car il fuit. Il descend parfois à Briançon et se réfugie au café du Nord où il retrouve Tissot l’agrégé des douanes, qui sera la victime d’un meurtre
Ce chemineau philosophe vagabondant dans les Alpes avec sa chienne Elias, fasciné par les gentianes bleues et la nature, va se trouver mêlé à une tragédie. Ce solitaire s’est attaché à Camille, la fille du patron du café, et se sacrifiera pour la protéger et ne pas trahir ses secrets.
La liberté est le thème central de ce texte poétique, mystérieux, où l’on s’attache aux pas d’un être balloté par la vie, en marge de la société mais jamais coupé du monde des humains. Le style est clair et rend parfaitement la beauté de la montagne comme des âmes, mais aussi leur noirceur.
L’épilogue est imprévu. On est troublé par ce roman noir « plein d’énigmes et de bonté ». Notre marcheur a tout compris, la beauté de la nature, l’impureté des hommes et la possibilité d’un Dieu.
Michel-Marie ZANOTTI-SORKINE : Le passeur de Dieu (Ed Robert Laffont)
Xavier, journaliste, vient de rompre avec Sarah. Découragé, il décide d’aller faire une retraite spirituelle dans l’ermitage du père Stanislas, grand ami de sa tante Amelie
Après quelques difficultés, il parvient à trouver l’église. Surpris par l’isolement, l’austérité et le manque de confort de l’hébergement, l’accueil chaleureux du père le reconforte. Ce dernier installe Xavier dans sa cellule puis l’abandonne à sa solitude pour la soirée et la nuit. Durant les 4 ou 5 jours suivant, il partge la vie simple des moines, découvre leur vie simple et riche, leur bon sens, leur foi exigeante et pratique, leurs travaux et leurs prières.
L’un d’eux, entré en religion après son veuvage, reçoit sa famille. Ce sera pour Xavier l’occasion d’une rencontre
Écrit par un homme d’église dans un style simple sans prétention, les pesonnages debattent de la vie actuelle et des problèmes spirituels qu’elle peut engendrer. Bon sens et sagesse sont dans ces conversations qui sont proches du prêche. Il y est fait un tableau partial et idyllique de la vie retirée des quatre religieux.
Beau livre facile à lire pour qui n’est pas allergique à la religion.