Centre d’Art de Sainte-Anastasie
Compositions photographiques : Manuela DONATINI – Elian BACHINI

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Sainte-Anastasie-sur-Issole s’est donnée en 2012 un magnifique Centre d’Art, peu ordinaire, dans l’ancienne cave coopérative, baptisée galerie Albert Garnier du nom du fondateur de la cave.
La galerie à laquelle on accède par une volée d’escalier en pierres sèches se compose d’une très grande salle à l’entrée dont les murs servent à montrer les collages de Manuela Donatini. Puis on pénètre dans une très longue salle, très sombre, sorte de couloir géant parsemé à intervalles réguliers de grandes ouvertures sur les anciennes cuves, offrant maintenant de grandes niches, écrins sublimes pour les grands formats d’Elian Bachini. Ces deux artistes ont été choisis par Eliette Berthet et Michel Potier.
Dans la première salle, très lumineuse, les murs accueillent les collages de Manuela Donatini sur le thème « La vie à l’envers ». C’est un travail minutieux. Elle découpe ses éléments dans des magazines et les assemble au gré de sa fantaisie et de ses sentiments. C’est alternativement surréaliste, humoristique, drôle, émouvant, parfois le tout en même temps. Le collage est si précis, si parfait, qu’on a l’impression de se trouver face à une photo en soi. C’est un plaisir sans fin d’admirer, de se promener dans chaque œuvre, d’essayer de la décrypter, ou encore de la prendre comme une image pour elle-même, et de se laisser emporter dans la rêverie ou le rêve que toutes provoquent. Les œuvres sont présentées dans des cadres sous-verre qui donnent de la profondeur au collage. L’accrochage les met bien en valeur et propose un savant parcours.

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Le photographe Elian Bachini n’est plus à présenter. Rappelons qu’il fut attaché pendant plus de 20 ans à Châteauvallon, qui était alors le Théâtre de la Danse et de l’Image, que depuis 1991 il est chaque année invité aux « Hivernales d’Avignon. Il eut l’idée de sortir du tirage sur papier pour présenter ses photographies sur différents supports : toile de jute, de lin, pierre, papier aquarelle…ce qui tire souvent la photo vers la peinture. Ses photographies sont vues dans le monde entier ; on ne compte plus les expositions auxquelles il a participé.
Pour Sainte-Anastasie il présente « Osmoses minérales II ». Ce sont des créations photographiques numériques dans lesquelles matières minérales et autres s‘unissent aux corps, aux visages. Le rendu est époustouflant. L’utilisation des couleurs, de la lumière, les superpositions d’éléments divers créent un envoûtement qui vous emporte dans un ailleurs où tout est  beauté, trouble, et volupté. Mais Bachini n’oublie pas la réalité, l’esclavage, le migrant, l’horreur souvent là, hélas. Cependant  tout est sublimé par l’art d’Elian Bachini qui, partant du réel, nous aide à nous en  détacher pour mieux l’affronter.
Je cite l’artiste : « Osmoses minérales II est la suite d’Osmoses minérales I, mais en couleurs, avec des personnages d’origines différentes et une technique qui a évolué avec le temps. Je puise la part humaine de mes compositions dans mes archives de spectacles : danseurs, comédiens, amis…

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La matière, je la trouve sur les murs délabrés, le crépi des façades, les vieux bois, la roche. Parfois, dans cette recherche, des restes délavés de réclames peintes me renvoient vers le passé, la Renaissance, Pompéi, les cavernes…
Depuis la plus lointaine époque, l’homme laisse les traces de son passage dans les grottes, sur les murs qu’il construit, les pierres et les bois qu’il taille. Traces qui arrivent jusqu’à nous souvent décolorées, rongées par le temps. Mais fortes de sens, touchantes, mystérieuses aussi, elles nous parlent de la vie d’autrefois. »
On entre dans ce large couloir, très sombre, sorte de caverne ancienne, chaque œuvre offerte au regardeur par un éclairage minimaliste, mais les yeux s’habituent, on est dans l’intime, dans le mystère de la création, chaque photographie envahit le regard, l’esprit, excite les sens.
Il faut voir chaque grand format trônant au centre d’une niche. Il prend toute la place, magnifié ; il vous plonge dans la contemplation, puis en vous-même. Difficile de s’en détacher. Et ces images vous poursuivrons longtemps.

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Un bémol quant à la répartition des œuvres. Je ne comprends pas qu’on ait cru bon de placer quelques collages parmi les photographies. Ils ont une place de choix dans la grande salle. Chacun la sienne. Ce sont des œuvres de natures complètement différentes, montrées dans des atmosphères antagonistes.
Deux grandes et belles expositions. Il y faudrait un catalogue pour emporter avec soi la trace de toutes ces images, même si elles restent vivantes dans la mémoire.

Serge Baudot
Exposition du 16 octobre au 8 décembre 2019 – Du vendredi au dimanche de 14 à 18h
06 33 27 43 61www.caprovenceverte.fr