Sanary – Hôtel la Farandole : De la Russie à la Provence

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Olesya Sudzhan, Eugenia Plokikh, Georges Klimoff, Svetlana, son père Sergey Gherasimov, Konstantin Lupanov

C’est aujourd’hui un événement devenu incontournable : Les rendez-vous artistiques, deux fois par an à l’Hôtel la Farandole, à Sanary. Rendez-vous concoctés par Olesya Sudzhan, qui possède la galerie Kvartiras à Moscou et sa collaboratrice, Eugenia Plokikh. N’oublions pas Geoges Klimoff, le plus russe des Seynois, dont la Russie et sa langue n’ont aucun secret et qui est à l’instigation de nombre d’événements concernant son pays d’origine.
Le principe est sympathique : deux ou trois plasticiens russes sont invités en résidence à l’hôtel durant une quinzaine de jours, afin de découvrir notre région, de s’en imprégner, de s’en inspirer pour y créer des oeuvres qui seront exposées, avec quelques œuvres plus anciennes.
Ce sont deux artistes au style tout à fait différent qui s’y sont collés cette fois et travaillent autour du thème choisi : les cinq sens… Vaste sujet !
Le vernissage aura lieu à l’hôtel le samedi 8 juin à partir de 17heures en présence des deux artistes invités : Konstantin Lupanov et Sergey Gherasimov, parrainés par le photographe français José Nicolas.

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Konstantin Lupanov
C’est un jeune homme de 40 ans… J’écris « jeune homme » car il en paraît à peine 30 ! A cette réflexion que je lui adresse, il répond en riant : « Dès que je suis arrivé ici, j’ai immédiatement rajeuni tant l’atmosphère a effacé mon âge ! »
Original parcours pour cet artiste qui, à 7 ans à l’école, en cours de dessin, s’est confronté à une autre élève très douée. Alors qu’elle avait peint un vase en verre rouge, elle en avait donné toute sa transparence alors que lui avait débordé de toutes parts. Honteux, cachant son travail à sa professeure celle-ci l’obligea à le lui montrer et au lieu de le rabrouer elle lui conseilla de dire à sa mère de l’inscrire dans une école d’art.
Il n’était pas plus attiré que ça mais obéit à ces deux femmes et très vite il a pris goût à cet art qui est devenu une vraie passion.
Aujourd’hui, et depuis près de 15 ans, il vit de son art.
Comment travaillez-vous, Konstantin ?
J’aime observer les gens, leur comportement, ce qui me fait avancer ce sont les rencontres que je fais car je peins beaucoup de personnages. Le fais des croquis, des esquisses, des photos et pour créer j’ai besoin d’être dans une atmosphère de joie car la joie est l’espoir du monde.
Connaissez-vous l’angoisse de la toile blanche ?
Non, ça ne m’a jamais bloqué. D’abord, je la monte moi-même, ce qui me met en condition et une fois le fond choisi, j’ai déjà dans ma tête ce que je vais faire. C’est chez moi quelque chose de spontané et ça démarre très vite.
Avez-vous beaucoup d’expositions à votre actif ?
J’ai fait plusieurs expositions à Moscou mais aussi à Paris, à Carrare en Italie.
Est-ce que la Provence vous a inspiré ?
La Provence exprime cette joie dont j’ai besoin, beaucoup de sensations se bousculent en moi, il y a les odeurs d’iode sur mes bras, des fleurs… et aussi des oursins !
Je m’évade totalement, la joie m’envahit et c’est très important pour moi. Cette joie, c’est le sourire de Dieu.
Ma venue en Provence va certainement changer ma façon de peindre. Du moins je j’espère.

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Sergey Gherasimov
Tout en étant plus âgé, Sergey a également un parcours original.
« Enfant – me dit-il – l’idée de m’était pas venir d’être peintre professionnel même si, à 4 ans, je dessinais tout ce que je voyais. C’est ma mère qui m’a inscrit dans un institut des Beaux-Arts alors que j’avais une image du peintre très négative. Je le voyais barbu, ivrogne et sale ! Mais ma mère m’a posé un ultimatum : la peinture ou le violon. J’ai vite choisi !
C’était donc une contrainte ?
Pas vraiment mais je m’ennuyais car je travaillais très vite par rapport aux autres élèves et le reste du temps je m’embêtais ou embêtais les autres. Bref, comme on dit chez vous, je mettais le bordel !
Vous n’avez jamais été renvoyé ?
(Il rit). C’est au bout de deux ans que je me suis moi-même renvoyé ! Je revois ma mère lorsque je le lui ai annoncé : elle avait à la main un bouquet de lilas qu’elle m’a jeté à la figure ! Et donc, retour à l’institut où j’ai choisi la restauration de tableaux que j’ai finalement pratiqué durant 27 ans, tout en copiant des oeuvres de grands maîtres puis en peignant mes propres toiles.
Où avez-vous travaillé ?
Entre autre au Musée Pouchkine où j’ai beaucoup appris en découvrant les collections françaises que j’ai d’ailleurs accompagnées pour une exposition au Japon.
La peinture française vous a-t-elle inspiré ?
Evidemment. C’est une peinture qui a marqué le monde entier depuis le XIXème siècle. En peinture, il y a pour moi deux marqueurs importants : L’impressionnisme pour la France et l’avant-garde pour la Russie.
Pourquoi vos toiles sont-elles signées Youry-Guerman ?
D’abord c’est un nom d’emprunt pour dissocier mes deux travaux de restauration et de création et puis puisque nous sommes deux et formons un duo idéal !
Expliquez !
Nous peignons à deux ! Chacun fait ce qu’il veut mais c’est moi qui termine le tableau. Mais on n’est pas les premiers à faire ça : Bruegel peignait les paysages, Rubens ajoutait les personnages. On est différent mais on se complète bien.

A ses côtés, une jolie jeune fille sourit. C’est – m’avoue-t-il -Svetlana ma fille et ma muse. Elle est architecte. C’est d’ailleurs elle qui va cette fois mettre en scène l’exposition à la Farandole et elle nous promet des surprises.
A noter que Sergey a exposé deux fois au Grand Palais à Paris, en Bourgogne, à Corbella, Singapour, Beden-Baden. Il a également vécu en Italie, Florence, Bologne et a entre autre restauré le plafond de la cathédrale de Ravenne.
Nos deux artistes s’entendent comme larrons en foire et la foire, ils la font depuis qu’ils sont chez nous ! Deux enfants ! Ils nous révèlent avoir été ensemble, avec trois autres peintres, exposer au Congo, invités par l’Ambassade de Russie. Et sur la lancée, ils y ont créé un musée d’art contemporain !
Ils découvrent notre région avec une joie sans pareille et seront les invités du Domaine de la Bégude au Camp du Castellet, le 6 juin à partir de 19h… Ca promet une belle soirée en attendant le vernissage du 8 juin à la Farandole !

Jacques Brachet