La Rochelle – Festival de la Fiction TV
La place des femmes dans l’audiovisuel… Encore du travail !

A D
Marion Sarraut – Sylvie Ayme

Cette année, le festival de la Rochelle a eu envie – enfin ! – d’étudier la place que les femmes avaient au cinéma ou à la télévision.
Ce n’est pas très brillant !
Aussi, deux tables rondes étaient organisées avec 4 productrices et 4 réalisatrices.
Ne pouvant hélas pas couvrir tous les événements qui, en trois jours, sont pléthore, c’est vers les réalisatrices que je me suis tourné, le quatuor étant composé de :
Marion Sarraut, une pionnière, qui, peu de temps comédienne, passe à la réalisation en 1970 en réalisant quelque 200 émissions avec Maritie et Gilbert Carpentier.
Puis, cette fille de ministre, nommée chevalier des Arts et Lettres et Chevalier de la Légion d’Honneur, passe en 1970 à la réalisation de séries et Dieu sait si elle en a réalisé, de « Julie Lescaut à « Une femme d’honneur » en passant par « Les Cordier », « Louis la Brocante », « Famille d’accueil », « Docteur Sylvestre », « Père et maire »…
Bénédicte Delmas, qui fut elle aussi comédienne dans « Navarro », « Hélène et les garçons » et surtout « Sous le soleil » dont elle réalisa un épisode. Puis elle devient réalisatrice en 2000 avec « Léa Parker », « Caïn », « Mongeville », Sections de recherches », « Plus belle la vie »…
Laurence Katrian, qui démarre en 1993 avec quelques courts métrages, puis quelques séries dès 1997 avec entre autres « Joséphine, ange gardien », « Les toqués » et beaucoup de téléfilms dont « A trois c’est mieux », « La loi selon Bartoli », « RIS », « Meurtres à Strasbourg », « Meurtres à Lille »…
Sylvie Ayme, qui elle, a démarré sa carrière au cinéma en 1991 avec des courts métrages, des documentaires, des docu-fiction et des web séries. Elle vient à la télévision en 1999 avec des séries comme « Docks », « Sous le soleil », « Candice Renoir », « Cassandre », « Camping Paradis »…

C B
Laurence Katrian – Bénédicte Delmas

Toutes sont là pour dire que se faire accepter par ce « métier de mecs » n’a pas toujours été un long fleuve tranquille et aujourd’hui, malgré tout ce qu’on peut dire, question parité on est loin du compte puisqu’on n’y trouve que 30% de femmes à qui l’on confie des créations.
Laurence : Cela fait partie de l’inconscient collectif à tel point que même des productrices ne pensent pas toujours à nous faire confiance, même si quelquefois, elles choisissent des hommes moins compétents que nous !
Bénédicte : C’est vrai que les producteurs et les productrices ne pensent pas obligatoirement à prendre une réalisatrice. J’ai quand même l’impression que c’est un peu en train de changer. Il ne faudrait pourtant pas qu’ils attendent qu’on ait 40 ans pour penser qu’on peut « limiter les risques ». Réaliser pour des débutantes est toujours difficile et il faut longtemps avant qu’on les prenne au sérieux, beaucoup plus longtemps que les hommes pour pouvoir faire leurs preuves.
Marion : Il prétextent souvent que ce n’est pas une question de sexe mais une question de talent, ce qui est idiot car, s’ils ne font pas confiance à une femme, comment peuvent-ils savoir si elle a du talent ?
Sylvie : C’est pour cela que, très souvent, les jeunes réalisatrices perdent confiance en elles car on les met dans cette situation et pourtant, elles ont des armes, des arguments, une sensibilité différente. Ils faut qu’elles se battent et qu’elles soient capables d’affronter des producteurs, ce qui n’est pas toujours facile. Par exemple, ils ne peuvent pas admettre qu’une femme puisse tourner un film d’action !
Bénédicte : Mais ce n’est pas qu’au cinéma ou à la télévision car on admet aussi mal qu’une femme puisse être chirurgien ou pilote. Dans l’inconscient, ces métiers sont des métiers d’hommes.
Laurence : C’est toujours aujourd’hui les hommes qui, en général, ont le pouvoir et qui veulent toujours garder le dessus. Ils acceptent difficilement que ce soit une femme qui puisse avoir le pouvoir, l’autorité. Pour eux, ça ne se conjugue pas avec féminité et ils ne supportent pas devant être sous les ordres d’une femme ou qu’une femme leur fasse une critique.
Bénédicte : Malgré tout ça, je pense que nous avons des arguments pour nous faire entendre. Il faut montrer qu’on sait travailler, qu’on sait ce qu’on fait, qu’on le fait bien et s’ils arrivent à le comprendre, c’est gagné.
Laurence : Vous savez tous qu’un homme a du caractère et qu’une femme… est caractérielle !!!
Sylvie : Comme il y a encore peu de modèles féminins, il faut que la femme apprenne à acquérir une autorité sans être autoritaire.
Marion : On se rend compte quand même que dans notre métier il y a encore beaucoup plus de chefs hommes que femmes et beaucoup plus d’assistantes ! Mais nous avons ouvert la route et il faut que ça continue. Il faut savoir taper sur la table et s’imposer..

Lorsque nous leur demandons quelles sont, pour elles, les qualités que doivent avoir une femme, elles répondent à l’unisson : Courage, opiniâtreté, travail, obstination et surtout solidarité, pour faire en sorte que celles qui ont réussi aident celles qui arrivent !

Propos recueillis par Jacques Brachet