Danièle GILBERT nous raconte

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Durant des années, nous avons déjeuné avec elle, avec sa gentillesse et sa douceur, avec son sourire immuable, avec quelquefois sa naïveté mais toujours avec beaucoup d’empathie et de bienveillance envers les personnalités qu’elle recevait.
Grâce à elle, nous avons visité la France, découvert de jeunes artistes, entendu les succès de nos artistes préférés.
Bref, Danièle Gilbert, c’était le bonheur incarné et la simplicité d’une présentatrice qui a toujours gardé une grande mansuétude et qui ne faisait pas de différence entre une star et un jeune débutant.
Cela parce qu’elle aimait aller vers les autres, elle était curieuse des autres et savait les accompagner dans leur stress, dans la peur des interviewes car chez elle, rien, jamais, de scandaleux, de questions qui pouvaient mettre mal à l’aise un invité.
Et ce qui est fou, c’est qu’elle fut souvent critiquée pour sa bonhomie, sa gentillesse, son éternel sourire face à un Jacques Martin qui n’était pas tendre et qui savait la malmener lorsqu’ils présentaient en duo. D’ailleurs, lorsqu’elle fut seule à animer l’émission, on a pu la voir ouvrir ses ailes et se rendre compte qu’elle n’était pas qu’une faire valoir, qu’un souffre douleur…. « Qu’une speakerine », comme lui avait dit un jour Martin qui savait être vache avec le sourire !
Aujourd’hui, dans ce livre qu’elle nous offre « Il faut que je vous raconte… » (Talent éditions), on la retrouve telle qu’on l’a connue à l’écran, nous racontant sa vie dans le show biz, milieu violent et peu tendre, comme si elle était Alice au pays des merveilles.
Jamais un mot méchant pour qui que ce soit, jamais une parole acerbe mais par contre plein de jolies anecdotes avec ces artistes quelquefois capricieux, imbus de leur personne, acerbes mais à qui elle trouve toujours une excuse et quelque chose de positif. Et même lorsqu’elle est « virée », elle ne polémique pas, elle n’accuse personne, elle ne règle pas ses comptes.
Ce livre est un vent de fraîcheur et de jolis souvenirs, elle nous fait entrer dans les coulisses d’une émission qui est restée légendaire et qu’on regrette toujours, comme on regrette sa disparition.
Comme disait de Gaulle de Brigitte Bardot : Danièle Gilbert a une simplicité de bon aloi !

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Avec Jacques Martin – Avec Joe Dassin

Et discuter avec elle est un plaisir, car l’interview s’efface très vite devant sa simplicité et devient une conversation entre amis.
Alors Danièle, je trouve chez vous un certain paradoxe : d’abord, avant d’être l’animatrice que l’on connaît, vous avez passé une licence d’Allemand alors que votre père est un rescapé de Dachau…
Je ne crois pas que ce soit paradoxal car ma mère était alsacienne et on parlait pas mal allemand. Ce qui fait que je me suis tourné vers cette langue naturellement. D’ailleurs mon père n’a pas mal pris la chose, au contraire, il a été aussi heureux que si j’avais choisi une autre langue. Chez lui,, comme chez moi d’ailleurs, il n’y avait ni haine ni revanche à prendre. Evidemment, on n’oublie jamais mais le principal est qu’il s’en était sorti et qu’il pouvait ouvrir une fenêtre et respirer. Pour lui c’était énorme, par rapport à tant de gens qui ont eu moins de chance que lui. Regardez Simone Weill qui a été une femme remarquable. Il n’y avait pas de haine chez elle.
Lorsqu’on voit tout ce qui s’est passé dans l’Histoire et hélas, tout ce qui se passe encore aujourd’hui, à ce moment-là, on ne doit plus apprendre une autre langue que la sienne.
Bon, OK et vouloir être prof, lorsqu’on a une telle timidité en soi ?
Mais parce que ce n’était pas moi que je mettais en avant, c’était le savoir que je voulais partager. L’autre jour j’étais à Clermont-Ferrand pour une signature et j’ai retrouvé ma prof d’Histoire de 5ème qui confirmait que j’étais timide mais que je savais écouter. Et partager. Pour moi était un challenge car j’ai toujours voulu faire ce pourquoi je n’étais pas faite ! Pour mon examen, j’ai surmonté cette timidité et j’ai fait une expo en Allemand sur un livre jamais traduit, écrit en lettres gothiques… C’était un challenge !
Pour mon premier passage à la télé en Auvergne, ça a été pareil : mon premier jour en direct, je l’attendais et une fois fait, je me suis dit : « Qu’est-ce que je me sens bien.. Mieux que dans ma vie quotidienne ! »

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Bain de foule – Avec Yves Lecoq

C’est donc ça qui vous fait avancer ?
Oui, et le fait de rencontrer des gens de tous âges, de tous milieux et pas seulement ce qu’on appelle « des vedettes ». Et puis il y a le public que je continue à rencontrer aujourd’hui et qui m’est resté fidèle. J’ai toujours aimé aller vers l’autre et je suis aussi à l’aise avec les uns qu’avec les autres, où que je sois, quoi que je fasse.
C’est inné chez vous ?
Je le crois. De tous temps j’ai été comme ça et je l’ai pris et appris de mes parents. Ma famille est une boule d’affection, une famille fusionnelle, qui m’a inculqué tout cela.
Et ce métier est un cadeau magnifique, même s’il ne m’a pas toujours épargnée. Lorsque j’ai animé l’émission toute seule, j’ai eu envie d’aller en province pour rencontrer les gens et il ne faut pas croire que le public est une masse informe. Chaque personne a un cœur, une âme, une personnalité. C’est un être humain tout aussi respectable, qu’il soit jeune ou vieux, célèbre ou inconnu, riche ou moins riche. La richesse en fait, c’est de l’affectif. De la communication.
Justement, aujourd’hui, la communication qui passe par toutes ces machines…
C’est le progrès, on ne peut le nier mais savoir s’en servir, ne pas en abuser. Envoyer un SMS, c’est pratique car on n’a pas toujours le temps mais il faut aussi savoir se parler, ne pas oublier comment on faisait avant. Et surtout ne pas oublier l’orthographe, la grammaire. C’est ce qui nous apprend à réfléchir, à donner du sens à la vie. Il faut savoir garder la mémoire des sentiments, des ressentis, des impressions.
Comment avez-vous écrit ce livre ? Vous avez tellement de souvenirs à nous raconter !
J’ai voulu l’écrire comme lorsque je parle avec quelqu’un. J’ai imaginé un lecteur avec qui je discuterais, des souvenirs me venaient, que je racontais, avec des digressions, des histoires dont je me souvenais. Il n’y avait aucun plan, ce n’est pas de la littérature mais une conversation. C’est pour cela que je l’ai intitulé « Il faut que je vous raconte »… J’écrivais selon mon humeur, mes envies, mes souvenirs qui revenaient. C’est pour cela que je ne parle pas de tout le monde.
Avez-vous gardé beaucoup des amitiés avec certains artistes ?
Pas vraiment car je n’avais pas le temps de devenir copine avec eux, de sortir avec eux, d’aller en boîte… Mais je ne le regrette pas car je pense que lors de nos rencontres sur un plateau, je prenais le meilleur d’eux, que je n’aurais peut-être pas eu dans la vie. J’ai été très émue et heureuse de recevoir mon idole, Georges Brassens. Sylvie Vartan, Dalida étaient des femmes merveilleuses, en dehors du fait qu’elles étaient de magnifiques artistes.
Mais avant tout, je considère l’humain et je n’admire pas les gens en fonction de leur célébrité, de leur position sociale. Plein de gens inconnus méritent qu’on s’intéresse à eux.
Y a-t-il des artistes qui ont refusé de venir à votre émission ?
Aucun ! Vous savez, lorsqu’on fait 14 à 18 millions d’audiences, si l’artiste ne voulait pas venir, c’est son producteur qui l’obligeait à venir ! Mais je ne pense pas qu’il y en ait eu beaucoup qui rechignaient à venir.

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« Famille, ma boule d’affectionr » : Patrick, son compagnon – ses neveux et nièces

Alors aujourd’hui, que faites-vous ?
Plein de choses ! Je vais en août faire une tournée littéraire et je m’arrêterai pour des vacances à St Tropez où j’ai des amis et où m’attend le sympathique petit hôtel « Le St André » du côté de Pampelonne. A la rentrée je remonte sur les planches avec Jeane Manson pour une pièce intitulée « Je t’aime moi aussi ».
Je vais là où on me demande en sachant que je vais rencontrer les gens. Je fais de la radio, de la télé, des animations, du théâtre, j’écris… C’est ma vie, du moment qu’il y a du bonheur à partager !

Propos recueillis par Jacques Brachet