Il y a longtemps que l’on avait vu une salle déchaînée comme celle qui accueillait le prodige pianistique qu’est Sofiane Pamart. Mais avant la venue de la star, apparaissait sur scène Anabelle, issue de l’émission « La nouvelle star ». Sculpturale et belle, elle déboule avec de l’énergie à revendre, le rythme dans la peau, la voix superbe et elle accroche tout de suite le public tant elle est souriante et a le contact immédiat avec lui. Avec ses immenses tresses dont elle joue lascivement, elle nous chante la lune et le soleil, soleil qu’elle est elle-même. Il faut savoir happer le public lorsqu’on démarre un spectacle alors qu’il fait encore jour et qu’il est venu pour un autre artiste. Mais sa voix, sa beauté, son sourire, ses chansons qu’elle compose sur un rythme très actuel et surtout son dialogue avec le public nous ont séduits, totalement charmés. A suivre… De très près !
Et puis vient Sofiane Pamart qui semble arriver de la plage avec son bob, ses lunettes de soleil et sa chemise hawaïenne. Il s’avance lentement, sourit sous les applaudissements déjà bien nourris. Il s’assied au piano et, dès les premières notes, c’est l’enchantement. Ses doigts glissent sur le clavier, comme une caresse, avec légèreté et une grande dextérité. C’est du « classique » pur jus et l’on est déjà sous le charme. Mais alors qu’on se laisse bercer par sa musique intimiste, un coup de tonnerre explose et le batteur nous annonce une autre musique et piano et batterie mettent aussitôt le public en transe. Une orgie de rythme, nous submerge, appuyée par des images qui nous laissent voir « de près » ses mains qui dansent sur les notes, entremêlées de celles du batteur et d’images animées oniriques et superbes.
L’ensemble nous entraîne dans un autre monde. C’est de la haute voltige et il nous fait passer du romantisme au hip hop, du rap à la musique arabisante, il nous fait voyager et le public le suit avec bonheur. Sans dire un mot de tout le spectacle, il se lève, fait lever le public qui n’attend que ça et qui tape frénétiquement dans les mains avec lui, totalement subjugué. C’est presque irréel et on est totalement sous le charme de cet artiste hors du commun qu’on ne veut plus laisser partir. Une voix s’élève : « Reviens, on n’en a… pas marre !!! » Il y a longtemps que je n’avais vu un tel engouement pour un artiste qui ne chante pas et l’on se dit que, lorsque le talent est là, un piano et une batterie… Ca suffit largement ! Un moment magique : lorsque, du piano, il s’installe au synthétiseur et nous joue une partition qui semble émaner de Brahms… Impressionnant ! Ce fut une soirée à laquelle il y a longtemps que je n’avais participé, pleine de talent, d’énergie et de folie, à l’unisson d’un public déchaîné. Un pianiste venu d’ailleurs dont on se souviendra longtemps.
Toledano-Nackache. Eric et Olivier… Deux prénoms qui, comme le chantaient les Beatles, vont très bien ensemble ! Acteurs, scénaristes, réalisateurs, les deux inséparables ont le sens de la fête ! Les voici donc en tournée-promo avec leur tout nouveau film : « Une année difficile » C’est une phrase qui est toujours venue, un jour ou l’autre, à tous les présidents de la République sans exception. On les retrouve tous en ouverture du film d’ailleurs ! Et qui leur a donné l’idée, et du titre et du film. Albert (Pio Marmaï) et Bruno (Jonathan Cohen) sont dans la dèche la plus noire. Le premier vit de petits larcins après avoir « tapé » famille, amis, collègues. Le second a vu partir femme et enfant avant de vouloir se suicider. Albert le sauve et pour manger – et boire ! – ils se retrouvent dans une association écologique de fous furieux, (où il tombe amoureux d’une fille on ne peut plus radicale) qui accumulent les actions et les happenings les plus fous et y entraînent nos deux pieds nickelés. Le film regroupe les problèmes de notre vie actuelle, le surendettement, la terre menacée, des problèmes dramatiques que nos deux compères désamorcent avec l’humour qu’on leur connait. A la fois tendre et fou, émouvant et bruyant, le film est tenu par les deux comédiens qui sont empotés, drôles, charmants, attendrissants dans leur médiocrité, leur naïveté, leurs malversations. Et la fin onirique est inattendue ! Bon point aussi pour Noémie Merlant qui joue les viragos au grand cœur. Nous rencontrons nos deux complices le lendemain au Hameau des Pesquiers de notre ami Stéphane Lelièvre.
« Éric, Olivier, comment vous est venu ce thème ? Éric : Nous écrivions la saison 2 de « Thérapie » plus un autre film, lorsqu’est arrivée la crise sanitaire. Les rues désertes, les magasins fermés, le monde mis en pose, ont rabattu les cartes pour tout le monde et pour des gens comme nous qui écrivent. Nous nous sommes dit que ne pouvions pas détourner le regard. Nous avons remonté le passé pour voir comment nous en étions arrivés là, comment cette crise a déclenché la névrose des français. Toutes ces images nous ont appelés à la réflexion : « Où on en est » ? Le surendettement, l’écologie, ne sont pas des sujets particulièrement drôles… Éric : Nous avions passé quatre années à faire des choses dramatiques alors nous avons décidé de passer par l’humour, comme l’ont souvent fait les cinéastes italiens ou anglais, en abordant des sujets sérieux avec une note de légèreté. Nous nous sommes arrêtés sur cette photo où l’on voit des gens qui empêchent les autres à entrer dans un magasin de « Black Friday ». On s’est posé les questions : Comment en arrive-t-on là ? Qui vient dans ces magasins pour acheter de façon frénétique : ceux qui en ont besoin, vraiment besoin et qui sont ceux qui les empêchent ? Nous avons enquêté des deux côtés. Nous avons essayé de traverser les ponts entre les associations qui s’occupent de surendettement et les activistes militants radicaux. Olivier : Par ailleurs, nous avions travaillé enfermés dans un cabinet de psy pour la série et nous avions envie de respirer, de retrouver le monde, l’énergie d’un esprit de groupe comme du temps de « Le sens de la fête » ou « Les jours heureux » et de nous offrir des scènes d’action. Nous avons aussi essayé de montrer par l’absurde des flux contradictoires qui en fait peuvent converger. Un peu comme « Intouchable » où deux mondes se rencontrent : le riche hémiplégique et le jeune de banlieue. Éric : Nous avons voulu, qu’à travers une société de plus en plus violente, des situations de plus en plus tendues, il y a le rire thérapeutique et nous avons abordé le sujet par l’humour, comme une façon de se poser des idées autrement que par le biais d’un message anxiogène. Vous nous parliez de personnages à l’italienne… Éric : Oui, car le cinéma, dans une époque pas si lointaine, avait le don de parler de gens au malheur joyeux, des personnages flamboyants et qui étaient pourtant dans la détresse et la précarité, avec un grand instinct de survie. Et on en a rencontré beaucoup, de ces personnages-là, des losers sympathiques qui pratiquent le système débrouille.
Ce sont en fait des pieds nickelés ! Olivier rit : En fait, je ne connais pas cette bande dessinée mais on m’en a déjà parlé et l’expression est descendue dans la rue. Ce sont des personnages hâbleurs, magouilleurs et qui ont toujours existé. Je vais aller voir cette BD ! Au départ, le personnage de Jonathan ne devait-il pas être joué par Alban Ivanov ? Éric : Très juste mais il n’était pas libre et Jonathan est arrivé, comme Bacri était arrivé sur « Le sens de la fête ». Il s’est tout de suite adapté et c’est la magie d’un film. La rencontre entre lui et Pio a tout de suite fonctionné. A tel point qu’au départ dans le film ils ne se connaissent pas, ne sont pas proches mais eux se sont tellement entendu qu’il a fallu les freiner ! Mais après, Noémie s’est jointe à eux et tout a bien fonctionné. L’art vient quelquefois de la contrainte et c’est dans cette contrainte qu’on devient créatif. Pensez-vous avoir fait un film engagé ? Éric : Le cinéma, pour nous, n’est pas d’être militant ou engagé et dire aux gens ce qu’ils doivent penser. On n’est pas dans un film engagé même s’il s’en dégage quelque chose car on n’est pas neutre bien sûr ! Après, chacun a une réflexion à se faire. Ce sont des sujets qui nous préoccupent mais ce n’est pas la posture de départ. Avez-vous rencontré des activistes ? Olivier : Ils sont dans le film ! Ils sont tous issus d’un mouvement qui s’appelle « Extinction Rébellion ». Nous avons enquêté avec eux et nous avons fait des actions avec eux ! Nous avons été très clairs : on leur a proposé de participer s’ils en avaient envie. C’est ce qui s’est passé. Ils ont tous un surnom qu’ils se donnent afin qu’il n’y ait aucune origine sociale ou ethnique entre eux. Nous-mêmes avons eu des surnoms…
Lesquels ? (Ils rient) Vous n’en saurez rien ! La musique est importante dans ce film… Éric : Toujours, nous y sommes connectés très fort. Nous voulions des chansons des années 70 et « Le fric, c’est chic » s’imposait. Et pourquoi Brel ? Éric : Parce que c’est un grand poète… même s’il est belge ! Et puis, le sujet de « La valse à mille temps » est le sujet du film : On est au milieu d’un pont et l’on valse entre les idées consommation/sobriété, on ne sait plus sur quel pied danser. C’est la valse entre le plus, le moins, le plein, le vide c’est la valse… à militant ! On est dans le reflet de l’époque ».
En pleine saison de la programmation « Sanary sous les étoiles », alors qu’il y manquait quelque chose, Claudine d’Arco, directrice du théâtre Galli de Sanary, a décidé d’y ajouter du théâtre. Il est vrai qu’à part le festival de Ramatuelle et après l’abandon du Théâtre In Situ de Carqueiranne, les amateurs de théâtre étaient quelque peu frustrés. C’est ainsi que Claudine a demandé à un comédien d’organiser un mini-festival. Ce comédien est connu des téléspectateurs pour avoir, durant quelques années, joué dans la série « Sous le soleil » puis, après quelques beaux rôles à la télé, s’est acoquiné avec l’équipe Lellouche-Vadim-Gélin pour nous offrir une série de pièces à succès ; « Le Jeu de la vérité, « L’appel de Londres », « Boire, fumer et conduire vite », « Le temps qui reste ».
Beau palmarès, et il a très vite été convaincu de venir tous les étés parrainer ce festival et même y jouer. Le voici donc entre Eze, où il prépare aussi un festival de théâtre et Sanary où il présente trois pièces dont la première a eu lieu mercredi soir : « Pour le meilleur », jouée par ceux qui l’ont écrite : Arnaud Gidoin et Gaëlle Gauthier. En présence du maire, Daniel Alsters, de nombreux élus, Arnaud a présenté la pièce lors d’un très sympathique cocktail, avant de faire rire le théâtre qui, à cause du vent, recevait la pièce impossible à jouer à l’extérieur. Ce qui, entre nous, n’était pas plus mal.
David présenta alors les deux autres pièces, la seconde étant de Michaël Sadler « Brexit sentimental », qu’il interprètera avec Mélanie Page le 31 juillet « sous le soleil » si le vent décide de s’apaiser ! Le 1er août, Manon Gauthier et Mila Michaël entre autres, nous proposeront la pièce « Gazon Maudit », tirée du film de Josiane Balasko. Toute l’équipe était heureuse de se retrouver pour la troisième saison à Sanary et Claudine et David espèrent faire évoluer ce festival en y ajoutant des dates l’an prochain. On y sera !
Jean-Pierre CABANES : L’annonce faite à Goering (Ed Albin Michel – 395 pages) L’auteur a écrit un superbe roman, extrêmement bien documenté sur la seconde guerre mondiale. En prenant pour sujet « L’annonce faite à Marie » de Vermeer, imaginée par un faussaire de génie Han van Meegerer, l’auteur retrace le parcours d’un jeune allemand, Werner, terminant une thèse sur les faux dans la peinture européenne. L’art du roman est de croiser des personnages fictifs avec des hommes et des femmes ayant réellement vécu la période 1938-1946 Le lecteur côtoiera Hitler, Mussolini, Ciano, Ribbentrop, Goering et tant d’autres Jean-Pierre Cabanes colle à l’Histoire, rapporte les éléments historiques vérifiés et vérifiables, il a un talent merveilleux pour faire rebondir ses personnages, notamment la sœur de Werner, interprète d’italien-anglais, donc espionne en puissance en temps de guerre. C’est un roman haletant, le lecteur qui connait bien sûr le déroulement de l’histoire en apprendra sûrement sur Ciano, le gendre de Mussolini, sur Rose Valland qui a sauvé tant d’œuvres d’art destinées à être détruites, sur le procès de Nuremberg. En moins de quatre cents pages, le lecteur vivra des temps forts de l’Histoire, les rebondissements sont nombreux, acrobatiques parfois mais ne ménageons pas notre plaisir de lecture. Laurent SCALESE : A nos jours heureux (Ed Plon – 332 pages) Judith est éditrice. Elle vit avec sa fille Chrystal, ado rebelle, et son nouveau compagnon Sébastien. Sa vie est heureuse mais tout bascule quand elle apprend qu’elle a un cancer du sein. Le combat contre le « crabe » qui s’est installé dans son corps commence. Auprès de qui trouver le réconfort alors que Sébastien la quitte suite à cette nouvelle ? Ce sera auprès de ses compagnons d’infortune rencontrés lors des séances de chimiothérapie L’auteur nous emmène avec beaucoup de délicatesse et de vérité dans ce monde des crânes rasés suite à leur chute de cheveux. Tristesse, humour, amour, amitié, rémission, fin de vie, espérance, suicide assisté sont évoqués. Oui, « c’est quand la mort frappe à notre porte qu’on comprend que la vie est un miracle ».
Muriel AUDURAND : Trois jours (Ed Plon – 185 pages) Muriel Audurand écrit un premier roman plein de promesse. Le lecteur est immédiatement pris dans les turbulences d’un avion qui perd dramatiquement de l’altitude. Réussira-t-il à se redresser avant la chute finale? Dans cet avion une femme se rappelle sa mère qui a organisé avec sérénité sa fin programmée de vie en Suisse, sa vie de femme mariée puis quittée par un mari volage, une vie professionnelle de professeur d’anglais qui ne tiendra pas sa promesse de passer son agrégation, une femme qui désormais mène sa barque avec ses enfants et les hommes qui désormais entreront dans sa vie. Oui, les minutes de la chute d’un appareil font ressortir l’essentiel d’une vie et l’essentiel se résume à l’amour et dans ce cas particulier l’amour de ses jeunes enfants. Un roman attachant, mené avec habileté jusqu’à une fin à choisir selon que vous êtes pessimiste ou optimiste. Oui cette jeune femme doit vivre, nous raconter la suite de sa vie dans un prochain livre, une manière d d’encourager Muriel Audurand à reprendre la plume. Frédéric GRANIER : Imagine (Ed Perrin – 359 pages) Frédéric Granier est journaliste, il écrit pour le magazine Géo mais, passionné de rock, il a déjà écrit plusieurs livres sur cette musique, particulièrement sur les Beatles qui restent son groupe préféré. Dans ce livre « Imagine » (tiens donc !) sous-titré « 12 chansons qui ont fait l’histoire », il nous raconte par le menu l’histoire de chansons et de chanteurs qui ont marqué l’histoire de la musique. Son histoire en fait et la nôtre puisqu’il s’agit de John Lennon et « Imagine », Scott McKenzie et « San Francisco », Abba et « Waterloo », Queen et « Innuendo » et quelques autres groupes et chanteurs américains. Un seul français dans cette litanie américaine : Serge Gainsbourg avec « Aux armes etc ». Dommage pour les français ! Mais le bougre maîtrise bien ses sujets car, de la création d’une chanson à sa parution, il nous offre, avec une précision d’horloger, le pourquoi du comment est née la chanson, dans quel contexte l’artiste a conçu un tube universel et c’est passionnant, On raconte aussi The Cranberries et « Zombie », Bruce Springteen et « The rising » et quelques autres qui nous rappellent automatiquement des souvenirs. 12 chansons incontournables, tout autant que les chanteurs, auteurs, compositeurs qui les ont créées, qui font à tout jamais partie de l’Histoire avec un grand H de la Musique avec un grand A.
Philipe DELERM : Les instants suspendus (Ed.Seuil – 105 pages) Quarante trois petits contes que l’écrivain nous livre tout à trac, passant d’une pensée, d’un coup d’œil qui capte un moment, un objet, remplit le temps du rêve, de la réflexion fugitive, d’un lieu qu’on entrevoit, d’un objet qui nous captive. Il nous fait toucher du doigt toutes ces choses qui nous habitent, des plaisirs qui nous ravissent un instant et qui fuient comme un rêve. C’est par ces petits mots pleins de poésie que l’auteur nous fait partager sa quiétude et sa sérénité. Tout son art est de réveiller chacun en douceur et d’aimer la quiétude, la simplicité, le vide de l’âme Anne Le MAITRE : Le jardin nu (Ed.Bayard – 120 pages) Autrice, illustratrice, aquarelliste, Anne le Maitre a publié des carnets de voyages et participé à un collectif d’auteurs influencés par la religion et la méditation. Dans ce court ouvrage elle se livre et ouvre son cœur après la perte de l’homme qu’elle aime. Elle est alors poussée par un impératif : trouver un lieu nouveau pour s’installer et soigner son chagrin alors que la vie s’est arrêtée. Et c’est dans l’immobilité et le silence qu’elle va trouver l’apaisement auprès d’un cerisier peuplé d’oiseaux, une promenade enchanteresse en terre de silence. En petits paragraphes de quelques lignes parfois ou de quelques pages, elle s’extasie sur les arbres, les fleurs, les oiseaux qui l’entourent, baignant dans la quiétude et le ressourcement après la lourde peine du deuil. D’une écriture d’aquarelliste elle brosse des petits paysages plein de quiétude et de poésie. A garder en livre de chevet pour les jours sombres.
Thomas GUNZIG : Rocky, dernier rivage (Ed Au Diable Vauvert – 358 pages) Que faire quand l’avenir est sombre, le monde devient fou, que c’est l’escalade de l’horreur ? Le père de famille a la chance d’être multimilliardaire, d’avoir acquis une petite île dans l’océan Atlantique et d’y avoir fait construire par une société spécialisée une maison à l’abri de toute attaque, des réserves de nourriture, d’eau, d’alcool, d’électricité pour un avenir illimité. Mais que devient l’avenir pour cette famille heureuse avec deux enfants, et qui aujourd’hui ne se parle plus ? Que sont devenus les deux domestiques qui du jour au lendemain ont changé d’attitude et pioché dans les réserves de grands crus ? Que devient une fillette qui veut retrouver le temps d’avant, vivre quoiqu’il en coûte avec des jeunes de son âge ? Et Rocky, pourquoi Rocky ? C’est le clin d’œil amusant de Thomas Gunzig, un Rocky qui rassemble la famille malgré lui. Un roman qui se lit facilement et il faut sourire que ce roman soit édité par la maison d’édition Au Diable Vauvert. Paulina PONASSENKO : Tenir sa langue. (Ed l’Olivier – 186 pages) C’est le récit d’une jeune fille, née le 3 mars 1969 à Moscou. Sa famille lui donne le prénom de Polina Elle arrive à St Etienne à la chute du mur de Berlin . Son enfance se déroule en France, mais ce n’est pas facile, car elle ne parle que le russe ! Il faut s’adapter dit elle. Elle voulait garder son prénom de Polina sans le modifier mais elle n’y réussira que vingt ans après en entamant une action en justice. Pour s’adapter elle se « dédouble », elle se dit russe à l’intérieur et française à l’extérieur, russe à la maison, d’où Polina orthographié Po et française à l’école : Pauline, Pau… Son histoire familiale juive est riche, elle a l’expérience de l’exil. L’auteure vit actuellement à Montreuil, c’est au tribunal de Bobigny que se déroule cette histoire. Ce livre est son premier roman, il a reçu le prix Fémina des lycéens en 2022, elle est à la fois écrivaine, traductrice et comédienne ! Le roman est drôle, le style est vif, humoristique, inventif, il faut le lire avec attention.
Robert Guédéguian est un réalisateur et producteur marseillais, d’origine arménienne, qui a construit un monde cinématographique tout autour de Marseille. Mais loin d’être un réalisateur « de province », ses films ont très vite dépassé les frontières marseillaises pour être vus dans le monde entier. 70 ans, 40 ans de cinéma, 23 films à son actif, de « Dernier été » en 1981 à « Et la fête continue » qui sortira à la rentrée, sans oublier l’incontournable « Marius et Jeannette » en 1997, il n’a jamais cessé de réaliser et de construire une œuvre forte, humaine, politique et, pour cet anniversaire, le Mucem de Marseille lui rend hommage par une rétrospective, du 26 au 29 juillet, suivie d’une exposition du 20 octobre au 15 janvier, qui se tiendra à la Friche de la Belle de Mai. Mais avant cela, le voici sur les routes provençales où il est accueilli dans nombre de villes dont un arrêt à Six-Fours ce 17 juillet où j’ai eu le plaisir de le retrouver car nos chemins se sont souvent croisés. Grand bel homme aux cheveux et la barbe poivre et sel, le sourire rare mais pourtant oh combien chaleureux et la voix de basse à l’accent « de chez nous », il se raconte en toute intimité.
« Robert, pas d’avant-première avant quelques mois et vous voilà sur les routes pour présenter tous vos films tout au long des étapes. Pourquoi ? Cette rétrospective a été organisée par le Mucem. Mais si tous les films y seront proposés durant quatre jours, à raison de quatre par jour, on a souhaité sortir hors les murs et faire quelques dates dans des salles que nous aimons, de Six-Fours à Vitrolles en passant par l’Estaque, l’Etang de Berre et d’autres salles qui m’ont toujours bien accueilli. Chaque ville présente donc un ou plusieurs films. Est-ce vous qui les avez choisis? Non, j’en aurais été incapable et j’aime que ce soient les gens qui choisissent en fonction de leurs goût ou de leurs idées ou encore de leurs envies. Chaque cinéma a fait son choix. Puisqu’il y a rétrospective, remontons le temps. Il y a trois comédiens que l’on voit dans tous vos films : Ariane Ascaride, votre épouse, Gérard Meylan et Jean-Pierre Darroussin. Parlez-nous de ces rencontres. La plus vieille rencontre est celle de Gérard puisque nous sommes amis d’enfance et que nous avons grandi ensemble. Ariane, je l’ai rencontrée à l’université. Elle était déjà militante, ce qui nous a rapprochés. Puis je l’ai suivie au conservatoire où elle m’a fait rencontrer Jean-Pierre avec qui nous sommes devenus amis. Les événements de 68 ont amené un souffle nouveau, entre autre au théâtre où se sont créés des mouvements, des attitudes collectives. Nous parlions des nuits entières, nous voulions changer le monde et c’est ainsi que des liens se sont tissés. Des liens qui, au fil du temps, n’ont fait que se resserrer. Pas seulement avec les artistes mais aussi avec les techniciens. C’est un phénomène générationnel post soixanthuitard. Qui a perduré. Vous vous êtes juré fidélité ?! Ça s’est fait tout naturellement et ça dure depuis quarante ans ! A quelques personnes près, c’est toujours la même équipe, certains commencent d’ailleurs à être âgés ! Notre aventure est quand même très rare dans le cinéma.
Lorsque vous écrivez un scénario, pensez-vous à eux à chaque fois ? Ce n’est pas tout à fait ça mais lorsque j’écris, j’écris selon les préoccupations de mon âge… qui est le leur ! En fait, ils m’incarnent, ils me racontent. J’écris sans leur demander quoi que ce soit puis je leur propose mes idées. Et souvent, lorsqu’une idée me plait, ça leur plaît aussi. Mais il n’y a aucune obligation. Au contraire de Pialat qui avait écrit « Nous ne vieillirons pas ensemble », film superbe, nous, nous avons décidé de vieillir ensemble ! J’avoue que j’écris quand même « un peu » pour eux ! J’écris des choses que je ressens, des choses très différentes, je les préviens… Et ils marchent ! Est-ce qu’ils ont leur mot à dire ? (Il rit) Pas vraiment. Il est très rare qu’ils veuillent proposer ou changer quelque chose. Il se trouve qu’en dehors des tournages, nous nous voyons tout le temps. Il peut se faire que je retienne des idées, des choses qu’ils disent… Je capitalise et je rebondis selon ce qu’ils disent. Dans « L’argent fait le bonheur » Gérard un jour eu envie d’incarner un curé à l’ancienne. Ça allait très bien avec le personnage et ça ne changeait pas l’histoire… Et il est devenu curé ! Cette tournée en plein cagnard, ça n’est pas épuisant ? Oui, c’est un peu fatigant mais c’est loin d’être désagréable. Je rencontre un public qui m’aime bien, qui est attentionné, curieux, les débats sont toujours sympathiques et enrichissants. Et tout se passe bien. A la rentrée vous savez un film qui sort je crois… Oui. Il s’intitule « Et la fête continue » et il se passe à Marseille lorsqu’il y a eu les effondrements d’immeubles rue d’Aubagne. Le film raconte tout ce qui se passe autour à ce moment-là. Ca raconte aussi l’effondrement des manières anciennes de la politique. Mais je suis déjà sur un autre film. On peut en parler ? Il s’intitulera « La pie voleuse ». C’est une fable dont l’héroïne est une aide à domicile qui a la main « un peu » légère et qui vole « un peu » ses clients. Mais ça se termine bien ! En ce moment, avec ce que l’on vit, j’ai envie de voir des films réjouissants. Et du coup j’en fais un dans ce sens. Vous parliez tout-à-l ‘heure de la création d’une cinémathèque à Marseille. Vous en êtes ? En vérité, c’est la cinémathèque française qui a décidé de créer une antenne à Marseille et dans d’autres villes. C’est une déclinaison de celle de Paris afin de la décentraliser. Je participe au côté financier, au lieu, au lancement mais après, si ça marche, je laisserai d’autres la gérer. Ce que j’aime, c’est créer des choses, après, une fois sur les rails, je laisse le projet à d’autres. »
Les Six-Fournais ont eu le privilège de revoir « Marius et Jeannette » place des poilus et « Mon père est ingénieur » que Robert Guédéguian a présenté, suivi d’un débat. Pour l’heure, après cette tournée et l’exposition, il y aura la sortie du film « Et la fête continue » et le tournage de « La pie voleuse » qui se fera dans la foulée. 70 ans, bon pied, bon œil… et plein de projets ! La fête continue !!!
Déchaîné !!! Notre ami Jean-Christophe Spinosi était déchaîné pour fêter ce dixième anniversaire du festival de la collégiale ! L’ayant rencontré la veille, tout à son excitation il m’avait résumé ce concert mais c’était au-delà de ce qu’il m’avait raconté. Tout d’abord il arrive sur scène après que tous ses musiciens se soient installés et c’est déjà une ovation d’un public qui a investi le lieu. Souriant, sautillant, on le sent prêt à nous proposer un spectacle incroyable, original, avec tous les invités qu’il a réunis. Il a décidé de nous offrir un voyage à travers la France, l’Italie, l’Egypte, l’Argentine, Cuba… Bien sûr Haendel et Vivaldi, ses compositeurs de prédilection, ne seront pas oubliés, interprétés par son orchestre et la voix ample et généreuse de Margherita-Maria Sala qui va jouer un duo d’amour et d’humour avec le maître, s’envoyant des œillades, se frôlant, s’embrassant. On sent entre eux une complicité incroyable. Il ira jusqu’à lui faire chanter du Monteverdi… en salsa ! Fallait oser !
Mais les surprises s’enchaînent car il a invité deux musiciens qu’il a connus en Egypte avec qui il a joué : Mohamed Abozeky qui joue de l’oud et John Samir qui joue du ney. Tous deux, accompagnés au violon par Jean-Christophe, nous emmènent aux fins fonds de la naissance de la musique, sur des rythmes arabisants ensorcelants. N’oublions pas le flûtiste Jean-Marie Goujon, qui nous a offerts de brillants solos.Parmi les surprises, notons aussi une très belle version de « The girl from Ipanema » que Margherita-Maria chantera sur des rythmes brésiliens avec des poses et des regards langoureux. Autre moment inattendu que celui où il interprète un extrait des « Quatre saisons » de Vivaldi … sur des rythmes cubains. Encore un très beau moment de communion avec le public lorsque Jean-Christophe entame au violon, accompagné de l’accordéoniste Alexis Lambert, la chanson éternelle de Prévert et Kosma « Les feuilles mortes » et qu’il fait chanter la salle qui connait cette chanson par cœur. Et il terminera sur un débridé « Joyeux anniversaire le festival de la Collégiale » qui fera lever tout le public sous une standing ovation bien méritée.
Après cette performance, on retrouvait le maître autour d’un somptueux gâteau, avec le maire, Jean-Sébastien Vialatte, l’adjointe à la culture Fabiola Casagrande, que Jean-Christophe coupa et distribua lui-même. Puis ce fut la ruée, d’une part sur le buffet, comme toujours pour certains, mais aussi autour de Jean-Christophe qui aime ce moment de communication avec ce public qu’il aime et qui le lui rend bien. On se souviendra longtemps de ce moment suspendu dans la chaleur de l’été. Et on est prêt pour dix ans encore à venir !
« Je déteste mes petits seins, mes grosses fesses, mes dents de cheval, mes jambes maigres… » sans compter son accent à couper au couteau, sa langue française faite de néologismes dont on ne savait s’ils étaient français ou anglais, ses mots d’argot glanés çà et là… C’est ce qu’elle me confiait lors de notre première vraie rencontre aux studios Baobab de Toulon, créés par mon ami d’enfance le photographe Pierre-Jean Rey, qui m’avait pris comme attaché de presse afin de m’occuper de ses artistes. Dont Jane qui venait pour une publicité des laines « Bouton d’Or ».
Elle arrivait avec Lou Doillon, alors toute petite qui, ravie de rencontrer un monsieur qui se prénommait Jacques, comme son père, ne me quitta plus, toujours accrochée à un grand pantin qu’elle ne quittait pas et qui s’installait sur mes genoux pendant que maman posait. Ce qui fit dire, bien longtemps après à Jane : « Tu la reprendrais bien sur les genoux aujourd’hui ! » Nous avons passé des journées extraordinaires et des soirées fantastiques à l’écouter, autour d’une table, raconter plein de choses, tantôt drôles, tantôt tristes à nous faire venir les larmes. Elle était belle, lumineuse, d’une sincérité désarmante, d’une grand humanité et on ne pouvait que l’aimer. Avec tous les défauts qu’elle m’énumérait, elle est devenue une chanteuse adorée, une comédienne magnifique et malgré son accent, grâce à Patrick Cherreau, elle a eu le cran de jouer sur scène du Marivaux !
Depuis Baobab, le temps a passé mais on n’a jamais cessé de se rencontrer au Midem, au festival de Cannes, à Sanary où elle vint tourner « Daddy nostalgie », à Ramatuelle où nous passâmes avec Jean-Claude Brialy, des soirées qu’on ne peut oublier, les dernières année au théâtre Liberté avec Michel Piccoli et Charles Berling ;. Avant Baobab, je la rencontrais au festival de Cannes où elle présentait avec Jacques Doillon « La pirate » qui fit scandale parce qu’il parlait d’homosexualité ! Et l’on était en 84 ! Lors d’un déjeuner de presse où m’invita Claude Davy, elle défendit le film bec et ongles entre deux sanglots : « La passion est un sentiment fort, violent, que ce soit pour un homme, une femme, un chien, un perroquet… Sans passion la vie ne vaut pas d’être vécue. C’est la plus belle chose au monde », tentait-elle de dire aux journalistes qui, pour la plupart, s’en foutaient pas mal et se concentraient sur leur repas « gratuit » !
Je la rencontrais encore au festival de Cannes avec Serge Gainsbourg et nous passâmes des moments épiques avec le chanteur passablement alcoolisé ! Mais avec Jane ce furent toujours de belles rencontres faites de rires et de larmes tant elle pouvait passer de l’un à l’autre avec une facilité déconcertante. Elle fut toujours fidèle et je passai des moments magiques avec elle. Merci Jane, pour tous ces beaux moments passés ensemble. Good bye…
Une voix, une énergie… et un accent italien marivigiloso ! Elle dit parler « un po » en français, tout en s’excusant et, avec cet accent chantant qui est déjà musique, on la comprend parfaitement. Elle est toute joie, tout sourire et, à l’ombre de la Collégiale, elle nous parle de sa vie qui n’est que musique. « Je viens, comme vous l’avez compris d’Italie, née dans une famille musicienne, mon père étant pianiste et chanteur et ma mère musicologue. Donc difficile de ne pas aimer la musique et de ne pas chanter ! Je suis la quatrième de cinq enfants et les trois premiers sont aussi musiciens. Le cinquième viendra plus tard. J’ai commencé à chanter à 5 ans, Avec mes frères nous avons joué dans des opéras en tant qu’enfants, dans « Tosca » et dans « Werther ». Chanter, c’était pour nous très naturel.. Nous avons même créé un groupe vocal où nous chantions du classique, du jazz, des variétés comme les Beatles. Ca dépendait du contexte ! Comment êtes-vous devenue soliste ? Nous avons d’abord chanté comme choristes, entre autre dans les chœurs de la Fenice à Venise. Puis, j’ai voulu devenir soliste. Je me suis présentée au concours de musique baroque d’Innsbruck où j’ai gagné le premier prix et le prix du public. L’on m’a engée au Concert House de Vienne. Vous avez découvert la musique baroque ? Oui, au départ j’étais alto et j’ai trouvé plus de choses à chanter en tant que contralto dans la musique baroque. C’était plus facile pour moi de trouver un répertoire qui s’adaptait à ma voix. Mais j’ai toujours aimé varier les plaisirs, je ne me ferme aucune porte et c’est ce qui me fait être en progrès continu. Je suis curieuse de savoir ce que l’avenir m’apportera.
Votre rencontre avec Jean-Christophe ? Tout simplement parce qu’il a appelé mon agent car il cherchait une interprète pour un programme qu’il avait choisi. Je ne connaissais pas les œuvres qu’il voulait que je chante mais j’ai étudié son programme et ça a été le début d’une collaboration intense car depuis, nous avons fait beaucoup de choses ensemble dont, l’an passé, un concert dans un festival de jazz. Vous êtes donc multiple ! (Elle rit) Oui car j’aime toutes les musiques. Bien sûr, le baroque est la musique de prédilection de Jean-Christophe et j’ai beaucoup chanté du Vivaldi, du Haendel… Nous nous sommes vraiment trouvés, nous sommes devenus complices et c’est toujours un grand plaisir de travailler avec lui. Et en dehors de lui ? Je chante lorsqu’on m’appelle et d’ailleurs plus en France qu’en Italie. Pourquoi ? Je travaille un peu en Italie mais pas comme en France, en Allemagne, en Autriche où la musique baroque est plus jouée qu’en Italie où elle reste un peu confidentielle, même si ça commence à changer. Les Italiens préfèrent les grands opéras classiques romantiques comme Verdi ou Puccini. C’est plus traditionnel. Alors, votre prochaine aventure ? Je suis rentrée ce matin d’Innsbruck où je suis en pleine répétition de concerts qui auront lieu les 2, 4, 6, 8 août. C’est une nouvelle production. C’est difficile mais c’est très excitant. Et puis, je retrouve Innsbruck que j’adore, où tout a commencé, où j’ai trouvé une vraie famille, une vraie amitié avec les musiciens et je vais tous les ans avec plaisir y travailler Mais vous reviendrez chez nous ? Bien sûr, avec grand plaisir, si Jean-Christophe me le demande ! »
Propos recueillis par Jacques Brachet Photos Patrick Carpentier
10 ans … Déjà 10 ans que Jean-Sébastien Vialatte (au prénom prémonitoire !) le maire de Six-Fours a décidé de créer ce festival dans un lieu magique : la Collégiale. Et Jean-Christophe Spinosi et son ensemble Matheus s’y est lové, y a fait sa maison, comme il aime à le dire, et chaque année nous avons la joie de l’y retrouver avec des concerts magnifiques. Avec les années, nous sommes devenus amis et j’ai toujours un grand plaisir à retrouver ce grand musicien, aussi simple que talentueux, souriant, énergique, toujours tellement amical. Et très volubile tant il est passionné par son métier. Il regarde le superbe panorama que nous avons de cette Collégiale qu’il aime :
« Lorsque j’arrive ici, je suis heureux. Je suis amoureux de ce lieu, de ce paysage et je ne remercierai jamais assez le maire de m’avoir offert « ça » ! Dans une vie de musicien, c’est tout simplement merveilleux. Alors, Jean-Christophe, résume-moi ces 10 ans ! (Il rit) Ça ne nous rajeunit pas mais ça nous fait de beaux souvenirs ! Justement, quels souvenirs en as-tu gardés ? Je ne pourrais pas vraiment dégager de meilleurs souvenirs, tant ils sont nombreux. Plus le temps passe, plus cela prend une valeur profonde à mes yeux. Chaque année est pour moi un moment essentiel, un privilège, tant sur le plan musical qu’amical, la joie de l’échange qui se fait avec les musiciens, le public, tous les gens qui travaillent à ce festival. J’ai l’impression de prendre chaque fois un peu plus de hauteur, d’être toujours un peu plus près du ciel à chaque année qui passe… Avec les initiales de ton prénom, c’est évident ! (Il rit) Si, dans une autre vie, j’arrive à monter jusqu’au ciel, j’avoue que je suis de plus en plus profondément ému à l’idée de « monter » à la Collégiale. Cette ascension me fait monter de plus en plus haut et ça me rapproche de plus en plus des gens. La musique est pour moi de plus en plus importante vu l’état du monde qui est compliqué en ce moment. Elle nous protège, elle nous défend, elle nous répare et nous lie les uns aux autres. Elle nous fait communier. Et ça te rend heureux ? Bien sûr et ce qui me rend aussi très heureux, c’est cette volonté de l’équipe municipale d’avoir voulu et pu offrir aux gens ces moments de convivialité, des concerts qui ne se ressemblent pas qui, je l’espère, sont pour moi et pour le public, des moments incroyables qui se font dans un esprit de simplicité. Les discussions que nous avons avec le public après le concert sont des moments de grâce et c’est pour moi le but ultime de la musique. C’est peut-être aussi le lieu qui veut ça ? Oui, c’est la spiritualité de ce lieu à la fois plein de gravité, de joie, de lumière. C’est pour moi un acte spirituel que de venir y jouer car c’est un lieu d’échange, un acte d’amour avec le public car plus les années passent plus il y a de proximité. C’est une profession de foi et rien que d’en parler ça m’émeut. La collégiale est pour moi l’un des plus beaux endroits du monde.
Tu as dû pourtant en voir, de beaux endroits ! Oui, c’est vrai, c’est le privilège du métier de musicien d’aller un peu partout dans le monde et de découvrir des lieux magnifiques. Mais je reviens à la collégiale comme si je revenais à la source. Il y a tout ce parcours avec le public, l’organisation, la mairie. C’est comme construire une œuvre d’art depuis dix ans. Dix ans, c’est peu de temps par rapport à celui qu’il a fallu pour construire la collégiale mais ça s’inscrit dans la temporalité. C’est un lieu apaisant qui apporte la sérénité et en même temps, il y a une grande énergie qui s’en dégage. Le programme de cet anniversaire est-il particulier ? Pour ces dix ans, j’ai souhaité offrir au public à la fois des pièces nouvelles mais aussi revenir sur des choses que nous avons faites car ces dix ans ont été des rencontres musicales qui ressemblent au lieu. Il me semblait tout à fait logique d’inviter Margherita Maria Sala avec qui j’ai beaucoup travaillé dans différents pays. Elle est la gentillesse, la simplicité, l’originalité, elle n’a pas peur d’aller dans l’impro. Elle est une des plus grandes chanteuses de sa génération de l’opéra baroque. C’est l’artiste « multi-genres » qu’il nous fallait pour représenter l’histoire de la musique traditionnelle, de l’opéra, de la musique populaire. Mais je voulais aller au-delà et c’est pour ça que j’ai invité Mohamed Abozekry, qui joue de l’oud et John Samir qui jouer du ney. Deux musiciens que j’ai rencontrés en Egypte, avec qui j’ai joué. Nous allons donc remonter aux sources de la musique car on vient tous de là. Les deux autres concerts sont un hymne à la nature ! Le 18 nous proposons « Les quatre saisons » de Vivaldi et le 19 « La symphonie pastorale » de Beethoven. Ce sont deux œuvres qui m’ont toujours accompagné, deux œuvres qui se rapprochent de la nature, on pourrait dire deux œuvres qui parlent d’écologie avant l’heure à travers la musique, qui véhiculent l’émotion et sensibilisent les gens aux problèmes de la planète. On y voit la nature en cinémascope ! Ça me permettra également de présenter notre académie Haendel-Hendrix…
Raconte C’est une académie que nous avons créée pour les jeunes musiciens venus de toute l’Europe, sortant du conservatoire, ce qui nous a permis d’aller jouer à Hambourg, à Amsterdam au Parlement Européen à Bruxelles. Elle a été créée pour aider les futurs musiciens qui sont prêts à être professionnels, afin de leur donner une plus grande fantaisie que ce qu’ils ont appris au conservatoire, un esprit d’aventure qu’ils apporteront partout dans des lieux différents, pas que dans des théâtres ou des festivals mais là où l’on peut faire de la musique, afin que la musique survive. Afin aussi de leur donner une autonomie, un sens de l’improvisation… En fait, c’est la relève ! Exactement ! »
Propos recueillis par Jacques Brachet Photos Patrick Carpentier et Jacques Brachet
Des vagues qui viennent mourir sur la plage, dans un mélange bleu d’azur et sable aux camaïeux de beige. Des dentelles d’écumes qui viennent s’alanguir, portées par les vagues. C’est ainsi que Lilya Pavlovic Dear voit cette Méditerranée qu’elle a découvert et dont elle est tombée amoureuse. Et elle nous l’offre dans ses reflets dorés, comme le chantait Trenet. C’est une peinture joyeuse, pleine de sérénité et l’on y sent tout l’amour qu’elle porte à cette mer qui, dit-elle, est la plus belle du monde. Et pourtant Lilya en a vu des mers et des paysages, allant exposer un peu partout dans le monde, de Paris à Venise, de Washington à Xi’an en Chine, de Londres à Belgrade, et à Paris, Strasbourg et Bandol.
Et la voici installée jusqu’au 13 août dans ce merveilleux cadre qu’est l’hôtel la Farandole de Bandol, face à la mer, reçue par Olesya Sudzhan, définitivement installée dans ce lieu idyllique. Elle est toujours soutenue par Georges Klimoff, ce russo-seynois passionné par le cosmos, qui a vu cet hôtel sortir de terre et qui est toujours présent à l’appel d’Olesya. Celle-ci ayant dirigé une galerie en Russie, a décidé de continuer d’aider les artistes, de quelque endroit qu’ils viennent, en organisant des soirées musicales et des expositions. « L’eau éternelle » est le thème de cette dernière exposition, qui ne pouvait que plaire à Georges lorsqu’il s’agit de terre, de mer, d’espace. Quant à Lilya, elle nous offre tout ce qu’elle ressent devant cette mer qui l’a adoptée et qu’elle a adoptée.
« Lilya, pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Je suis d’origine yougoslave, je suis née à Belgrade en Serbie, j’ai suivi des cours à l’Académie des Arts de Belgrade puis au Chelsea College of Art et Design de Londres. Mon mari travaillant aux Etats-Unis, j’ai enseigné à l’Université de Los Angeles en Californie puis nous sommes rentrés à Paris en 1978. A partir de là, j’ai continué à peindre et exposer un peu partout dans le monde en Allemagne, à la Biennale de Venise, j’ai été invitée quatre fois en Chine où l’on m’a remis le Golden Price. J’ai à mon actif une soixantaine d’expositions sans compter les expositions de groupe, entre autres au Grand Palais à Paris. Votre rencontre avec la Provence ? L’effet du hasard : Mon mari, qui travaillait dans une entreprise américaine, a été muté en France et nous nous sommes installés à Paris. Nous avons décidé de partir en vacances dans le Midi. Nous avons fait Paris-Marseille puis toute la côte, Sanary, Bandol… Je suis tombée amoureuse de la Méditerranée qui est pour moi la plus belle mer du monde ! Pourtant, nous en avons connu des mers, jusqu’en Indonésie, à Bali, qui est magnifique mais c’est moins beau et pittoresque qu’ici. Alors nous avons décidé de nous installer à Bandol. Pour moi, ce n’est pas étonnant que toutes les grandes cultures soient issues de la Méditerranée.
Comment avez-vous découvert la Farandole ? J’ai déjà fait trois expositions au centre culturel de Bandol, la troisième… avec les masques ! C’est une amie qui m’a amenée à une exposition à la Farandole. J’ai rencontré Olesya Sudzhan qui a voulu voir ce que je faisais et cela lui a plu. Elle m’a proposé de venir exposer là. Pensez-vous encore exposer dans la région ? Je voudrais bien mais d’abord je me partage entre Bandol et Paris, je ne connais pas les lieux d’exposition par ici, je manque donc de contact et monter une exposition est un long processus qui se fait sur la longueur. Mais je ne désespère pas ! » En attendant, la voici installée jusqu’au 13 août à la Farandole et je vous conseille d’aller découvrir « sa » Méditerranée joyeuse, poétique et belle.