Au départ, c’était un disque imaginé par Julie Zenatti, ex Fleur de Lys, ex Esméralda de la comédie musicale « Notre-Dame de Paris ». Son idée était d’offrir un album où seraient représentées toutes les musiques méditerranéennes, chantées par des artistes méditerranéens.
Tous ont répondu présent, de Chimène Badi à Sofia Essaïdi, d’Enrico Macias à Slimane, d’Elisa Tovati à Claudio Capéo, de Rose à Samira Brahmia et quelques autres moins connus…
Ainsi dans ce disque magique qu’est « Méditerranéennes », nous visitons les pays bordant la Méditerranée avec des chansons pleines de soleil comme « Zina », « Le café des délices », « Le dernier qui a parlé » et même « Mustapha » !
Le projet était original mais pour un spectacle, réunir tous ces gens sur une scène le même jour n’était pas des plus faciles. Pourtant, ça s’est passé en février au Bataclan dans la joie et l’émotion qu’ont voulu prolonger Julie Zenatti et Chimène Badi en partant toutes les deux sur les routes de France, ce qui était encore un projet original, partager à deux une scène en tournée n’étant pas si courant que ça.
Et les voici, sur l’esplanade de Sanary sous les étoiles où ce fut une nuit magique, accentuée par une éclipse qui ajouta au charme de la soirée.
Car ce fut une soirée de charme avec ces deux belles filles du Sud, aux voix puissantes et ensoleillées. On n’avait pas vu, depuis longtemps, un tel spectacle fait d’amour et d’émotion, de sensualité et de bonne humeur, les deux filles se partageant la vedette en duo, en solo, en trio parfois avec un violoniste magnifique, plus trois autres musiciens énergiques, qui nous entraînés sur les chemins de l’Orient et d’ailleurs car les langues se mélangent, de l’arabe au turc, de l’espagnol au grec… sans oublier le français.
Leurs voix s’accordent à merveille, l’une, Chimène, dans les graves, l’autre, Julie, dans les aigus, l’une, Julie, volubile, entraînant le public avec un grain de folie, l’autre, plus réservée, plus hiératique, plus en retenue, mais toutes deux respirant la complicité et le bonheur de partager cette scène.
Elles sont lascives, ondulantes, elles ont un charme fou et se partagent les chansons qu’elles ont chantées en duo sur le disque et quelques autres que chantaient les autres artistes, avec un plein soleil dans la voix. Entre toutes ces chansons méditerranéennes, quelques succès personnels comme « Si je m’en sors » pour Julie, « Entre nous » ou la bien nommée « Je viens du Sud » de Chimène.
Ça a été un régal pour les oreilles et pour les yeux, un vrai grand spectacle festif où le public venu nombreux et se bagarrant pour avoir les meilleures places, s’est mis à l’unisson pour chanter, danser, taper des mains.
Une soirée unique avec, cerise sur le gâteau, une rencontre après concert car, après avoir mouillé leurs belles tenues de scène, elles prennent le temps de nous recevoir, ce qui devient rare à l’heure d’aujourd’hui.
A peine reposées et heureuses, les voici toutes deux, belles, rayonnantes et heureuses.
« Mon projet – nous confie Julie – est né d’une envie de rendre hommage à mes origines. J’ai un héritage familial que, devenant maman, j’ai eu envie de raconter et transmettre à ma fille, afin d’éveiller son intérêt à la fois pour son passé et son présent.
Je suis Méditerranéenne avant tout et je n’avais jamais encore exploré cette partie de moi. Et comme j’aime le partage, je n’avais pas envie d’être seule sur ce projet mais d’y emmener des chanteuses qui ont un parcours semblable au mien, qui ont la trentaine et sont mamans.
Et vous, Chimène, comment êtes-vous arrivée sur ce projet ?
Avec Julie, nous nous connaissons depuis le départ de ma carrière. Dès le début elle a été l’artiste la plus sympa avec moi, elle est venue vers moi, avait envie de me découvrir. Nous avons fait des promos ensemble, les Restos du cœur, elle est venue me rejoindre sur mon troisième album. Des liens très forts d’amitié se sont noués et lorsqu’elle m’a parlé de ce projet, j’ai bien sûr été tout de suite partante. D’autant que nous avons, sinon une histoire, du moins des origines communes.
– Lorsque j’ai eu l’idée de ce projet – ajoute Julie – j’ai aussitôt pensé à Chimène car c’est d’elle dont je suis la plus proche. Je me suis dit que si elle aimait ce projet qui me titillait ce serait bon signe et j’irais plus loin. Elle a tout de suite été emballée et d’accord pour y participer. Du coup j’ai appelé d’autres copines : Sofia Essaïdi, Rose et Elisa Tovat qui ont été d’accord d’emblée. Je me suis donc dit que j’étais sur le bon chemin !
Comment s’est fait le choix des chansons ?
Chimène : Julie est arrivée avec une liste et nous a fait choisir ce qu’on avait envie de chanter. J’ai tout de suite eu envie de chanter avec elle « Zina » car le titre me plaisait et j’aimais ce qu’elle racontait. Et puis nous avons encore chanté ensemble « Le café des délices », « Amal », et en en fait je ne chante qu’une chanson seule : « Ssendu ». C’est la première fois que je chante en kabyle.
Les adaptations pour la scène ont-elles été faciles ?
Julie : Oui, même si nous avons dû faire un choix et réadapter des chansons que nous chantions avec d’autres. On les a aussi choisies en fonction de nos voix, de nos liens, de nos racines et ce qu’on avait envie de dire…
Et pas d’italien ?
Non car la chansons que je chante sur disque avec Claudio Capéo n’avait pas de rapport avec l’énergie du spectacle, même si la chanson est superbe, elle ne s’adaptait pas au concept de ce spectacle.
Comment s’est imposé ce choix de faire le spectacle en duo ?
Julie : Dès le départ, nous avions envie de faire cette tournée avec ces chansons car nous voulions dire des choses qui ont un rapport avec nos vies de femmes, des choses qui résonnent pour beaucoup de gens car ce sont nos racines…
Chimène : Nous venons tous de quelque part et donc, ça parle à tout le monde.
Avant la tournée, il y a eu le Bataclan…
Julie : Oui et ça a été un moment magnifique où d’abord, pour une seule soirée, tous les chanteurs du disque ont été réunis. Ça a été un grand moment d’émotion, surtout dans ce lieu aujourd’hui devenu tellement symbolique.
Avez-vous fait une captation pour un éventuel DVD ?
Chimène : C’est vrai que pour les fans ç’aurait été un joli souvenir. Mais pour nous, le souvenir est dans notre cœur, dans notre tête, ça restera un moment inoubliable et, vu les circonstance, nous avons pensé qu’il serait mieux, par pudeur, que ça ne soit pas enregistré.
Julie : Nous avons les images dans notre tête, ce sont des instants particuliers de notre vie, un moment unique que nous n’oublierons pas.
Cette tournée va-t-elle se prolonger ?
Chimène : Nous tournerons jusqu’au mois de mars 2019 et l’on est à la fois heureuses et surprise de ce succès.
Pourquoi ?
Julie : On ne pouvait imaginer un tel succès car les gens aujourd’hui sont très versatiles. Ils ne connaissent pas obligatoirement le disque et l’affiche où nous sommes toutes les deux parlent-elles vraiment au public ? Sait-il ce qu’il va venir voir ? Mais c’est vrai que le bouche à oreille fonctionne bien !
Je suppose que quelques chansons n’ont pas été enregistrées… Verra-t-on naître un second album ?
Julie : Vous savez, ça a été un moment de notre vie, un moment fort, inoubliable dont ce disque est le témoin. Mais on n’envisage pas de faire de ce projet un concept à répétition.
Chimène : Ça a été beau parce que fait dans l’instant, sur une envie, sur un instant de partage. C’est cela qu’il faut retenir et il n’est peut-être pas nécessaire de le reproduire.
Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Monique Scaletta
Prochaines dates dans la région : 27 octobre, Théâtre François Mitterrand à Lorgues – 12 janvier : Théâtre Toursky à Marseille – 9 mars : Le Galet à St Martin de Crau (Festival Voix de Femmes) – 10 mars : Théâtre Molière à Marignane.