Archives mensuelles : avril 2015

Clovis CORNILLAC :
un film, une pièce de théâtre, une salle de cinéma

A

Quoi de plus original qu’une histoire d’amour à travers un mur ?
J’explique : un ours solitaire, inventeur de jeux style « casse tête » ou « solitaire » vit dans un appartement qui n’est pas insonorisé.
Afin de ne pas être dérangé par un voisin, il a truffé l’appartement mitoyen de trucs insensés pour faire peur à l’éventuel locataire qui, à chaque fois, part sans demander son reste.
Mais voilà qu’une jeune pianiste promise à un bel avenir, découvre la machination et décide de rester.
Chacun va donc à sa façon, essayer de rendre la vie impossible à l’autre jusqu’à ce que, baissant les armes, un dialogue aveugle s’instaure entre « Machin » et « Machine »…
Cela donne « Un peu, beaucoup, aveuglément »,  une comédie romantique insensée, réjouissante malgré l’énormité de certains événements, avec des situations burlesques et jubilatoires jouées par un quatuor drolatique et plein de charme : Clovis Cornillac, Mélanie Bernier, Lilou Gogli et Philippe Duquesne et l’intrusion clin d’œil de Manu Payet.
Clovis et Lilou sont venus présenter ce film au Pathé Liberté de Toulon. Le soir même Clovis se retrouvait sur les planches pour jouer son énorme succès, la reprise de « La contrebasse » et trois jours après, on le retrouvait au Six n’étoiles de Six-Fours pour inaugurer l’une des trois  salles qui désormais portera son nom, après celle qui porte déjà le nom de Claude Lelouch.

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Toulon
Clovis, alors que le comédien est on ne peut plus gâté par le cinéma, la télévision et le théâtre, ce qui est rare de nos jours, pourquoi ces velléités de devenir réalisateur ?
Il y a déjà deux, trois ans que l’idée me trotte dans la tête. Je pense qu’aujourd’hui je suis mûr pour sauter le pas. Il fallait l’occasion et Lilou Fogli, qui est ma compagne, me l’a donnée.
Elle m’a parlé de cette histoire d’un couple séparé par un mur et dont les relations vont évoluer sans qu’ils ne se rencontrent, sans même connaître leurs prénom, se dénommant « Machin » et « Machine ».
J’ai trouvé l’idée assez habile et je l’ai incitée à développer. Durant un an, elle a écrit son scénario. J’ai voulu aussi m’inscrire dans ce projet et durant encore un an  de travail, de rencontres, d’échanges avec Tristan Schulmann et Matthieu Oullion qui sont venus nous rejoindre, nous y avons travaillé.
Le film était là, la première étape était franchie. Restait à trouver des producteurs et à tourner le film.
Vous multipliez les difficultés : comédien, scénariste, réalisateur… et même chanteur !
(Rires). En tant que chanteur, je ne pense pas faire de l’ombre à quiconque !
Par ailleurs, si l’on me connaît et me fait confiance comme acteur, on ne me connaît pas comme réalisateur. Devenant les deux, le films était bien moins cher et cela rassurait les investisseurs. Ca devenait une réalité économique. Et je voulais faire un beau film, qui ait de la classe, avec des moyens que je n’aurais pas eu si j’avais dû payer un réalisateur et un comédien.
Ce qui veut dire qu’au départ le rôle ne vous était pas dévolu ?
Pas du tout et heureusement car si l’on part sur l’idée d’écrire pour quelqu’un, on est toujours déçu à l’arrivée, soit parce qu’il n’est pas libre, soit parce qu’il n’aime pas le rôle, soit encore parce qu’il n’est en définitive pas le personnage. Il y a donc de grandes chances qu’on se plante. Mais une fois écrit, c’est Lilou qui a pensé que je pouvais être crédible dans le rôle, comme elle pouvait l’être dans celui de la sœur de Mélanie.
Quel effet cela fait-il de jouer avec un mur ?!
Eh bien en fait, bizarrement, cela m’a rassuré car, Mélanie jouant ses scènes seule, elle aussi, puisque nous avons peu de scènes ensemble même si nous sommes tous deux à l’écran, je pouvais totalement me concentrer sur elle. Après ça, jouant seul, je pouvais totalement me concentrer sur moi!
Ça m’a en fait simplifié la vie.

F

La musique est très éclectique, allant de Chopin à Aretha Franklin en passant par Serge Lama…
La musique a beaucoup d’importance pour moi. C’est le seul art immédiat et il est vecteur d’émotion incroyable. C’est la première source de communication. J’aime toutes les musiques, la variété, le classique, le jazz et dans ce film la musique est totalement bordélique… et elle me ressemble !
Dans quel état d’esprit étiez-vous lors du premier jour de tournage ?
Je n’avais aucune appréhension car j’ai derrière moi trente ans de métier et je savais que cette expérience pouvait m’éviter beaucoup d’écueils. En amont, j’ai travaillé en équipe réduite sur tous les postes durant deux mois à raison de quatorze heures par jour. Ce n’était pas le caprice d’un comédien qui veut devenir réalisateur mais une vraie démarche personnelle.
Je trouvais l’aventure excitante et elle l’a été. Tout le monde était habité et joyeux. Je n’ai jamais été aussi épanoui et heureux dans ma vie professionnelle. Jamais je ne me suis autant régalé.
Et aujourd’hui, à quelques jours de la sortie du film puisque c’est le 6 mai ?
Maintenant, ça ne m’appartient plus. C’est au public de donner sa sanction et c’est vrai que je suis fébrile et que… c’est l’angoisse absolue ! Mais si ça ne marche pas, je ne pourrai m’en prendre qu’à moi-même. Et si ça marche, je serai le plus heureux du monde !
Mais j’avoue que je suis un peu rassuré par cette tournée où, chaque soir, j’entends rire des salles entières. C’est un bon présage.
En parallèle avec la promo de ce film, vous jouez au théâtre… Il n’y a pas de problème de connexion, de concentration pour jouer ?
Non car je fais la promo dans la journée et le soir, il me suffit d’une demi-heure de concentration pour tout oublier et être totalement connecté sur la pièce.

La Contrebasse
Le théâtre Liberté de Toulon présentait en cette soirée d’avril « La Contrebasse » dans la version mise en scène (et lumières) par Daniel Benoin et jouée par Clovis Cornillac. Cette contrebasse écrite en 1981 par Patrick Süskind, qui est une pièce pour un seul personnage, plus la contrebasse, a été jouée par plusieurs comédiens dont le plus célèbre est le regretté Jacques Villeret. Ce soir nous allions voir Clovis Cornillac dans l’habit du contrebassiste.
Décors dépouillés de Jean-Pierre Laporte. En fond de scène une fenêtre, côté cour et côté jardin, des murs gris verts striés par des lignes qui marquent des portes. Derrière ces portes que le comédien ouvrira quand nécessaire se trouvent l’archet, la discothèque, la Hi-fi, le frigo, la table à repasser, le canapé, la cuisine, etc… Côté cour trône une contrebasse penchée sur son socle, sculpture hiératique, présence étrange, presque féminine, en attente de quelque chose.
Clovis Cornillac apparaît, trapu, forte présence physique, en vêtement décontracté d’intérieur. D’emblée il s’empare du texte et le vit tant avec la voix qu’avec le corps. Il joue à l’énergie, avec un rythme d’enfer ; il parcourt la scène en tous sens, l’occupe entièrement. C’est un déluge bondissant et rebondissant, vibrionnant, avec des attitudes d’un effet comique imparable, des ruptures de rythme époustouflantes, des colères, des moments de détresse ; c’est toute une vie en raccourci.

J K

Ça commence comme une conférence sur la contrebasse, son rôle dans l’orchestre classique, dans le jazz qu’il n’aime pas à cause de l’improvisation, qui dit-il, est du n’importe quoi, ce qui montre d’emblée le côté rigide du personnage dans une vie bien réglée. Et cette contrebasse va polariser toutes ses fêlures, ses espoirs perdus, ses regrets, sa vie ratée. Elle est aussi la femme qu’il n’a pas. Il a 40 ans et cela fait deux ans qu’il n’a pas vu une femme. Il vit seul dans son appartement isolé à 95%, à cause de la contrebasse, et pourtant quand il joue mezzo-forte, une voisine du dessous cogne au plafond. Démonstration. Et puis il y la jeune Sarah, 25 ans, la mezzo-soprano dont il est amoureux, avec laquelle il rêve d’un improbable duo, mais qui ne l’a jamais regardé, qui va au restaurant avec des ténors manger des soles à 45€. Petit à petit apparaît son mal être, sa névrose, son désespoir. Il est la huitième contrebasse de l’orchestre symphonique, instrument relégué à l’arrière plan, comme lui. Il s’en prend à Wagner, Mozart, et tant d’autres, qui n’ont rien fait pour la contrebasse. Il faut voir Clovis Cornillac mimer « Les dents de la mer » sur « les Walkyries », ou bien »le gros crétin »  Siegfried. Il ne sauve guère que Schubert grâce à son quintette « La truite ». Il s’en prend aussi à la psychanalyse. Il consomme bière sur bière, car, dit-il, il est déshydraté, tant et si bien qu’à la fin il est ivre. Il a choisi la musique pour ne pas être fonctionnaire comme son père qui le méprisait, et il se retrouve fonctionnaire anonyme dans un orchestre symphonique à 1500€ pas mois, impôts déduits. Il nous livre ainsi par touches la réalité de la vie d’artiste, quand on n’est pas en haut de l’affiche.
Et par dessus tout il y a Sarah qui le hante, à qui il n’a jamais parlé, qui ne l’a certainement jamais vu, mais qu’il aime. Alors après tant de canettes de bière, prêt à partir, il hurle qu’il va crier Sarah juste  à l’ouverture de « L’Or du Rhin », pour qu’elle le remarque enfin, pour être son héros, et se faire virer de l’orchestre. Il s’est tout à l’heure moqué de la névrose de l’emploi stable de ses concitoyens. Mais le fera-t-il ?
Clovis Nicolas rend tout cela et bien d’autres choses encore, par le seul truchement du corps et de la voix. Force insurpassable du théâtre.
Je n’ai pas vu la version de Villeret, je suppose qu’elle devait être plus en demi teinte, plus en subtilités. Mais dans cette version la mise en scène est au cordeau, le spectacle est total, balayant toute réticence.

Serge Baudot

L

Six-Fours
C’est trois jours après que Clovis, accompagné cette fois, outre de Lilou, de Mélrnie Bernier, « colocataire murale » baptisée « Machine ».
Beau trio qui a semé la folie au Six n’étoiles où d’abord, les trois salles étaient prises d’assaut, chose encore jamais vue.
Et puis a commencé l’attente car notre trio allait avoir une heure de retard suite à un problème d’avion à Marignane puis à un accident sur la route.
Chacun attendit patiemment, tout comme la presse qui fut… pressée d’en finir car, vu le retard, ce fut une brève rencontre de dix minutes. Heureusement, nous avions pu le rencontrer plus calmement à Toulon !
Et puis ce fut la course aux trois salles où tous trois allèrent dans chacune présenter le film.
Auparavant, Jean-Sébastien Vialatte, maire de Six-Fours, Dominique Ducasse, adjointe à la Culture, nombre d’adjoints et bien sûr toute l’équipe du Six n’étoiles, se groupèrent autour de lui pour dévoiler la plaque de la salle qui, désormais, portera son nom à côté de celle de Claude Lelouch.

M N

Voilà que la ville de Six-Fours vous dédie une de ses salles de cinéma. Quel effet ça fait ?
Ca fait surtout plaisir et c’est aussi émouvant, non pas pour me glorifier d’avoir une salle à mon nom mais parce que c’est dû au travail que j’ai donné et qui a été apprécié. C’est une reconnaissance et ça fait plaisir.
Aujourd’hui vous avez pris goût à la réalisation ?
Oui, vraiment et je crois que si le film marche, je récidiverai, si l’occasion se présente car c’est pour moi devenu nécessaire aujourd’hui. Je dirais même : vital.
Jusqu’à arrêter d’être comédien ?
Non car réaliser c’est une énergie, une autre façon de voir le métier. Mais peut-être que je ralentirai le métier d’acteur. C’est ma fonction première, ce grâce à quoi je suis là depuis trente ans… déjà !

Lilou et Mélanie
Lilou, c’est votre premier scénario… Comment avez-vous trouvé l’idée ?
Il y a un peu d’autobiographie dedans car j’ai vécu quelque chose d’analogue lorsque j’étais étudiante et, de mon studio mal insonorisé, j’entendais mon voisin et je m’étais fait tout un cinéma – déjà ! – je le voyais incroyablement beau, exceptionnel et lorsque je l’ai rencontré… ce n’était pas tout à fait ça ! J’ai raconté cette histoire à Clovis qui m’a dit que je devrais essayer de développer… et j’ai développé !
Y avez-vous pris du plaisir ?
Énormémentet je suis prête à récidiver car j’ai trois malles complètes d’histoires !
Mélanie, j’ai déjà posé la question à Clovis : quel effet cela fait de jouer avec un mur ?
Ça change tout ! C’est vrai qu’au départ c’est un peu déroutant mais c’est le sujet qui veut ça. Et donc, quand on a admis ce principe, ça devient tout à fit cohérent. puis ça devient un challenge et peu à peu ça devient même confortable et c’est plutôt agréable !
J’aime l’idée que cette rencontre est faite d’absence de préjugés physiques et sociaux et que seule la voix, au départ, rapproche les personnages.
C’était un rôle original à jouer.

O P

Et originale l’idée tout comme ce film qui nous emporte dans une comédie pleine d’humour, de finesse, non dénuée d’émotion et surtout superbement interprété par un vrai quatuor de charme.
D’ailleurs, tout le monde était sous le charme de Clovis, Lilou et Mélanie qui, très vite, sont repartis vers Marseille où les attendaient une autre avant-première à Plan de Campagne.
C’est ça la vie d’artiste !

Reportage : Jacques Brachet

 

NOTES de LECTURES
par les PLUMES D’AZUR

Millet guenassia

Richard  MILLET : Dictionnaire amoureux de la Méditerranée (Ed Plon)
Autour de cette mer aux multiples noms : Mare Nostrum, Mer blanche du milieu, Adriatique, Egée, l’auteur nous offre de petits chapitres traitant de la façon dont chaque peuple a rattaché des souvenirs, des couleurs, des légendes, des coutumes, personnages, des plats.
Se lit au petit bonheur la chance en ouvrant une page puis l’autre en picorant de-ci de-là mille évocations autour de cette mer mythique.

Jean-Michel GUENASSIA : Trompe le mort  (Ed Albin Michel)
Roman d’aventures, haut en couleurs, Trompe la mort est le nom donné par l’auteur à son héros, véritable pourfendeur de catastrophes et qui sort indemne de tous ses avatars.
Fils d’un Anglais et d’une Indienne, fruit de sa double culture, il vivra successivement en Inde puis en Angleterre  avant de revenir vers ses sources sous les traits d’un détective privé mandaté par un père à la recherche de son fils disparu. Toujours abattu, toujours ressuscité, il passera à travers mille aventures sortant chaque fois cabossé mais vainqueur des terribles péripéties qu’il côtoie. Il est l’archétype de l’innocent qui surmonte l’insurmontable, Volontaire, généreux, naïf, discret, Tom avance dans la vie, une vie cruelle mais qui lui offre à chaque épreuve une échappée vers l’espérance.
Jean-Michel Guenassia a dû s’amuser en écrivant « Trompe la mort », les évènements s’enchainent sans ennui,les invraisemblances ne trompent personne puisqu’elles sont l’essence même du livre, Quelques longueurs toutefois,mais l’auteur décrit magnifiquement l’Inde, New Dehli avec ses contrastes, ses habitants attachants ou détestables,
Une lecture agréable,un roman d’aventures un brin mélodramatique, une nouvelle facette du talent d’écrivain de Guénassia un bonheur pour les aficionados

Author Russell Banks, August 2013. photo by Nancie Battaglia Photo 1 Bruno Carlisi Editions Carpentier DR

Russell BANKS : Un membre permanent de la famille (Ed Actes Sud)
Les douze nouvelles qui composent le dernier ouvrage de Russell Banks sont sa perception très pertinente de la société américaine d’aujourd’hui. Autour de New York ou en Floride, elles décrivent en quelques pages la fragilité des êtres, leur indifférence, leur solitude, leur refus de regarder une vérité dérangeante.
Russell Banks aime ses personnages, il les comprend, il les accompagne dans leur désarroi ou leur délire, c’est particulièrement frappant dans « Blue ». Une femme noire venue acheter une voiture d’occasion avec les quelque milliers de dollars difficilement économisés, est attaquée par le chien de garde du parc-automobile. Réfugiée sur le toit d’une voiture, elle cherche à attirer l’attention du premier passant, un jeune noir qui judicieusement appelle une chaîne de télévision ; rapidement sur place l’équipe filme et repart vite vers un nouveau fait divers plus vendeur.  Cette nouvelle est cruelle, tout comme celle où un ancien marine à la retraite est acculé par la crise immobilière des subprimes, ou celle qui porte le titre du livre, le membre permanent de la famille étant le chien difficile à partager après un divorce et qui finit sous les roues de la voiture.
Chaque nouvelle est une petite pépite de la vie américaine. Fort bien traduites de l’américain par Pierre Furlan, elles représentent  la réalité du quotidien, une réalité troublante, émouvante, pitoyable et parfois jubilatoire. Russell Banks fouille l’âme humaine. Pas besoin de chercher le vécu dans ces nouvelles, elles sonnent juste pour notre plus grand plaisir de lecture

Bruno CARLISI : Alzahel ou les Nuits que Shahrazad n’eut l’audace de conter
(Ed Didier Carpentier

Bruno Carlisi est libraire. C’est son premier roman et il a été finaliste  du prix Matmut du premier roman en 2014.
A l’époque du calife Haroun al-Rachid,  Alzahel naît et sa naissance a été  précédée de présages.  Détenteur du verbe droit qui donne à la parole le pouvoir du tuer, il est amené à  partir à la recherche des ravisseurs de ses « mères » prisonnières d’un livre aux pages blanches.
Dans la tradition des contes arabes, le narrateur interpelle régulièrement le lecteur.
Cette quête étrange nous emmène dans des aventures extraordinaires faites de rencontres étranges, de phénomènes surnaturels, de joutes verbales… mais que c’est long!
Les situations critiques et périlleuses se succèdent sans fin et cela devient lassant et sans grand intérêt.  Difficile d’en venir à  bout

viktor Alexakis -®-áJohn Foley 1

Viktor LAZLO : Les tremblements intérieurs (Ed Albin Michel)
Tout commence avec un entrefilet dans le journal annonçant qu’AlmaSol, chanteuse caraïbaine, célèbre dans les années 80 a disparu. Cette nouvelle replonge Aurèle qui l’a connue autrefois dans leur passé
Ce qui est intéressant dans ce roman c’est que trois narrateurs se succèdent et chacun  présente un aspect d’Alma, rendant plus opaque encore le personnage qui exerce peu à peu sur le lecteur la même fascination que sur ses narrateurs.
Ainsi s’accumulent les questions.
Le titre est aussi énigmatique que le personnage principal, c’est seulement dans la dernière partie que le lecteur en découvre le sens puisque ces tremblement sont ceux qui s’emparent d’Alma de manière irrépressible après avoir subi les coups de celle qui prétend l’aimer
En résumé, un roman agréable au style sec et nerveux qui construit par petites touches un personnage principal particulièrement attachant.
On sent que l’auteure s’appuie ici sur son expérience personnelle donnant ainsi encore plus de relief au personnage.

Vassilis ALEXAKIS : La clarinette (Ed Seuil)
La clarinette ! Un mot qui résonne joyeusement aux oreilles alors qu’il occasionne pour l’auteur un trouble, un trou de mémoire angoissant qui lui donne envie d’écrire un livre sur la mémoire, les souvenirs, l’oubli et leurs impacts dans la vie quotidienne.
Ce livre s’adresse à son ami et éditeur Jean-Marc Roberts en phase terminale de cancer. La traduction en grec de son dernier roman « L’enfant grec » est le fil conducteur  d’une analyse pertinente, personnelle, haute en couleur, accusatrice.
Ce livre tellement plein de vérité ne peut être seulement un roman, c’est un appel au secours d’un pays si beau, marqué par son histoire antique, un pays auquel le mot vérité a été banni du vocabulaire. La peine immense du décès de Jean-Marc Roberts travaillant jusqu’à son dernier souffle augmente l’intensité de ce merveilleux livre.

Gary Shteyngart (c) Patrice Normand Photo 1 Laurence Barry Copyright DR

Gary SHTEYNGART : Mémoires d’un bon à rien (Ed de l’Olivier)
Comment se construit-on lorsqu’enfant on a peur de tout, qu’on a d’effroyables crises d’asthme, qu’on est né juif  et qu’on est une source de déception pour ses parents : « morveux » pour son père « petit raté » pour sa mère ?
En écrivant ses mémoires, car le bon à rien se révèlera  écrivain à succès.
De sa naissance jusqu’à l’âge adulte, des premières années en Union Soviétique jusqu’à son installation et sa jeunesse aux Etats-Unis, le garçon rejeté endossera une série de personnages  pour se faire accepter, jusqu’à ce qu’au fil des rencontres il accepte d’être lui même. C’est également une quête du père à travers plusieurs images paternelles.
Ce qui fait l’intérêt de ce récit c’est l’humour et la dérision, « le bon à rien » n’hésite pas à se présenter sous un jour ridicule comme pour confirmer le jugement de ses parents, pour se faire, il se cache derrière des personnages dérisoires. A travers ses mémoires, il dépeint également sans concession et avec humour les travers des deux sociétés l’ex Union Soviétique et les Etats-Unis d’autant que ses parents ont bien du mal à décrypter les règles de ce pays dont ils veulent devenir citoyens à part entière.
C’est cette richesse et ce foisonnement qui rendent parfois la lecture de ces mémoires un peu  laborieuse

Laurence BARRY :T rois jours ( Ed Didier Carpentier)
Trois jours.
C’est le temps dont dispose Judith, appartenant à une famille juive immigrée en Israël  pour séparer  sa sœur Juliette de Mehdi, un tunisien musulman qu’elle a rencontré à Paris où elle vit
Pour Judith cette union détruira leur père déjà fortement ébranlé par la mort de Jonathan, le jumeau de Juliette, engagé dans l’armée et tué dans un attentat sept ans plus tôt.
Trois jours donc, pour mener à bien son projet. Chaque journée est partagée en sept  petits chapitres; seule  la dernière journée n’en contient que six, comme s’il restait encore une page à écrire, comme le suggèrent les dernières lignes.
L’auteure, qui a vécu à Paris avant de s’installer en Israël  aborde avec justesse de nombreux thèmes universels : difficultés à renouer des liens fraternels distendus par des modes de vie différents, souffrance qu’engendre  le deuil , difficulté à dépasser la haine que le conflit israélo-palestinien a fait naître
Ce premier roman est très habilement construit. Jusqu’à la fin, on se demande si le projet de Judith va réussir et si même, elle le souhaite Le lecteur  s’attache  aux deux sœurs à Juliette qui a choisi  de tourner le dos à l’intolérance et à Judith qui  croit pouvoir recréer les liens familiaux en séparant sa sœur de l’homme qu’elle aime.

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Milena AGUS – Luciana CASTELLINA : Prends garde (Ed  Liana Levi)
Traduit de l’Italien par Marguerite Pozzoli et Marianne Faurobert
Le même épisode de l’Histoire : le lynchage à Andria dans les Pouilles le 7 Mars 1946 des sœurs Porro, par une foule d’ouvriers agricoles, affamés par les propriétaires terriens. Lynchage de ces vieilles demoiselles vu par une historienne et une romancière.
Les deux auteurs se penchent sur les événements qui se sont passés dans les Pouilles en 1946. Deux des quatre sœurs Porro, très riches, mais qui vivent pauvrement et recluses dans leur palais, ignorent tout du monde qui les entoure, ont été assassinées lors d’une révolte  des ouvriers agricoles, dans le contexte trouble de l’époque, la situation sociale étant au  bord de l’explosion avec le débarquement des alliés  à Tarente, en Italie du Sud, la dissolution du parti fasciste, l’établissement du roi à Brindisi et la famine.
Cet épisode, peu connu de l’Histoire de l’Italie est envisagé de deux façons : L’historienne relate les faits et la situation des Pouilles entre 1943 et 1946, la romancière y ajoute du  romanesque, ce qui permet de voir les personnages s’animer et vivre. Elle nous font entrer dans la psychologie des sœurs Porro que l’on peut voir tout à la fois comme victimes d’une situation dont elles n’ont pas conscience, mais aussi comme responsables de cet aveuglement. C’est ici que le titre prend tout son sens.

Val McDERMID : Lignes de fuite ( Ed Flammarion)
Traduit de l’anglais par Perrine Chambon et Arnaud Baignot

Stéphanie Harker, citoyenne anglaise est un « nègre », qui écrit dans l’anonymat l’autobiographie d’une jeune femme, Scarlett, ancienne star de télé réalité. Elle est sortie de la cité après une enfance très difficile et s’est créé un personnage public. Une amitié sincère naît entre les deux femmes.
En transit dans un aéroport américain le fils de Stéphanie, Jimmy est enlevé. Mais le petit garçon enlevé est en réalité le fils de la star. Situation complexe, car Stéphanie sera de plus en plus impliquée dans ce thriller psychologique.
Le sujet de ce roman, au style clair et fluide n’est pas seulement un kidnapping d’enfant mais une réflexion sur la télé réalité et le pouvoir de l’image.
L’auteur britannique a publié plus de 20 romans en France.

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Le Maître Patrick RAMBAUD : « Le maître »  (Ed Grasset)
Nous sommes en Chine il y a vingt-cinq siècles, le récit nous parle de Tchouang , jeune adolescent élevé par son père Chou et une ribambelle de servantes très attentionnées.
Plutôt qu’un roman ce texte raconte les étapes de la vie du futur maître à penser de l’Asie féodale. Une biographie donc, où nous suivons les étapes de sa formation, rencontrons ses amours, et participons à ses aventures, de la naissance à la mort.
Le style est alerte, la langue actuelle ; il nous est très agréable de parcourir le royaume de Chine et de déambuler aux cotés de Tchouang dans l’immensité de cette nature Le texte fourmille d’anecdotes. « Le monde était une source d’impressions » dit l’auteur et pour nous matière à réflexion.
Dans les villes, son arrivée provoque l’étonnement ; on le questionne, il répond selon ses principes ; il déconcerte souvent. Entre cynisme et sagesse il parle du « danger des convictions », affirme que « la vertu n’est qu’un déguisement de l’intérêt ». Les guerres sanguinaires l’affligent, il fuit les courtisans idiots, reste ferme face aux tyrans. Le récit devient fable philosophique lorsque nous comprenons que son détachement est une réponse à la folie des hommes.
Ainsi de réflexions en réflexions, nous nous immergeons dans un peu de la culture chinoise et si nous ne maitrisons pas Confucius, Mao ou les racines du Taoïsme cette sagesse naturelle nous séduit et semble d’actualité en Europe aussi.

Jérôme GARCIN : « Le voyant » ( Ed Gallimard)
Cette fois encore Jérome Garcin nous propose une biographie, lecture découverte d’un personnage bouleversant.
En 1924 à Paris, nait Jacques Lusseyran, celui qui deviendra un héros de la Résistance curieusement tombé dans l’anonymat.
Nous ne le connaissions pas. Le livre est l’histoire de son parcours, de son amour fou de l’existence, de son engagement, de son tragique destin.
Né d’une famille bienveillante, entouré d’affection, le petit garçon de huit ans voit pourtant son destin basculer lorsqu’à l’école, suite à une bousculade, il perd la vue. « Ses yeux ne se sont pas fermés, ils se sont seulement renversés » nous dit l’auteur. Et c’est en effet à partir de ce moment, que le jeune héros va développer une sorte de regard intérieur une force mentale et psychologique exceptionnelle.
Ignorant son handicap, dès la classe de 6ème au Lycée Montaigne il se fera des amis « pour la vie », tombera amoureux, sera remarqué par sa vitalité, son désir d’engagement. Il s’engagera ainsi dans la Résistance à seize ans, recrutera « Les volontaires de la Liberté » en 1941, rédigera les éditos du Journal de la France à dix-neuf ans !
Emprisonné à Fresnes puis déporté à Buchenwald, il échappera à l’extermination, et se mariera à deux reprises ! Mais « a-t-il sa place dans cet après guerre confus où les purs dérangent et les héros gênent ? » Il sombrera alors dans une longue nuit mentale, morale, et affective, sera séduit par un mouvement sectaire (le groupe Unité), et quelques femmes aussi. Interdit d’enseignement en France, il fera carrière comme professeur d’université en Virginie et dans l’Ohio. Il décédera en 1971, dans un accident de voiture, dans l’anonymat.
Un beau livre, une belle personne, une biographie fraternelle rédigée dans un style fluide qui
séduit par sa force de conviction. Nous nous révoltons contre l’amnésie française.

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François-Henri DESERABLE : Evariste (Ed Gallimard )
Evariste Galois (1811 , 1832) découvre les Mathématiques à quinze ans au lycée Louis le grand, à dix-huit ans il écrit un mémoire tellement révolutionnaire que les matheux de l’époque n’y comprennent rien. Refusé deux fois à Polytechnique, mis à la porte de Normale Sup, les mémoires qu’il envoie à deux éminents professeurs sont incompris et égarés, seul Cauchy comprendra ce génie précoce et préservera le dernier mémoire écrit la veille de sa mort .
Le roman démarre à la vitesse d’un cheval au galop, au tiers de ce petit livre on est essoufflé et on voudrait bien ralentir mais le rythme continue et finalement convient très bien à cette vie fulgurante et si brève qui nous est racontée  Fulgurance de ce cerveau exceptionnel d’adolescent mais aussi de l’époque agitée par des évènements historiques importants.
Il convient de préciser que l’auteur nous propose une biographie et qu’il n’est question de mathématiques que pour fustiger les scientifiques de l’époque qui n’ont rien compris à l’importance de ces travaux précurseurs de la théorie des ensembles .
Ce livre intéressant et émouvant, qui nous plonge non seulement dans une âme tourmentée, mais aussi dans un cerveau en ébullition, est donc accessible à tout un chacun et se lit très facilement

Fred VARGAS : Temps glaciaires (Ed Flammarion)     
La nouvelle enquête du commissaire Adamsberg va nous balader de la région parisienne à l’Islande, à la recherche d’un tueur récidiviste. Il y aura des touristes aventureux désireux de mettre un pied sur le cercle polaire, des amateurs d’Histoire et plus précisément de Robespierre, des éleveurs de chevaux, un marcassin prénommé Marc…
Tous les détails sont intéressants, qu’il s’agisse de la brigade à l’atmosphère baroque, des autres policiers, des suspects, des victimes, de la famille, des amis ou des inconnus de l’Histoire, et nous mèneront doucement mais surement à la résolution de l’enquête .
Ce volume, beaucoup plus long que les précédents, possède néanmoins les mêmes qualités : personnages attachants et bien campés, énigme plausible malgré l’originalité des situations, rythme soutenu, suspense maintenu jusqu’au bout de l’histoire.
Bref nous voilà encore devant un très bon polar ! Un vrai plaisir de lecture !

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Ingrid ASTIER : Quai des enfers (Ed Gallimard)
Initialement publié en Série Noire, « Quai des enfers » a reçu lors de sa parution plusieurs Prix, tous venus récompenser un nouvel auteur talentueux :
Prix Paul Féval 2010 de la Société des Gens de Lettres
Prix Lafayette 2010
Ingrid Astier est devenue la marraine de la brigade fluviale, ce corps prestigieux qui apparait dans ses pages.
Afin de rechercher l’ambiance de son ouvrage, elle a effectué la traversée de l’Oise glacée, à la nage, en plein hiver, aux côtés de ces rudes plongeurs, tous formés spécialement dans ce monde subaquatique où ils ont à rencontrer journellement l’eau froide, le courant, la turbidité et les nombreux obstacles au fond de la Seine dans sa partie la plus  dangereuse.
Il va bien falloir les 480 pages de ce roman dans sa version poche, pour vivre complètement  cette série noire.
L’auteur décide de vous faire connaître dans des détails précis ce drame qui à pour cadre la seine et ses mystérieuses profondeurs, à travers son héros qui va rencontrer des personnages troubles, des jalousies naturellement féminines, des rebondissements entre sexe et drogue. Un tableau de l’ensemble se remettant en cause à chaque page.  Pages qui vous tiendront en haleine jusqu’au matin d’une nuit blanche passée dans l’enfer des quais de la Seine.

Metin ARDITI : Juliette dans son bain (Ed Grasset)  
Le titre de ce livre reprend le nom donné à deux tableaux respectivement peints par Braque selon les critères du fauvisme et Picasso dans sa période cubiste. Un multimillionnaire d’origine modeste se propose de les offrir au musée du XXème siècle. Toute la presse en parle. C’est alors que sa fille unique est enlevée par une soi-disant association des victimes du mécène. Elles se propose de révéler à la presse, par des messages successifs, quelques-unes de ses turpitudes .
Metin Arditi avance pas à pas dans les profondeurs de l’âme humaine. Les meilleures actions cachent-elles les pires infamies ? Le passé, les injustices refont-elles surface à l’âge adulte ? En quoi  « Juliette dans son bain » déclenche un tel désir de vengeance ? Qui est la véritable Juliette ?
L’auteur reprend ses thèmes favoris, le pensionnat, la beauté, la réussite de l’opprimé, la musique.
Roman cruel où l’esthétique tend à effacer les blessures comme ce magnifique « Alleluia » chanté à la perfection, avec plénitude, dans une maîtrise parfaite .
L’auteur nous offre un policier doublé d’une satyre sociale aux personnages simplistes et attachants .

SOLLIES-PONT – FESTIVAL DU CHÂTEAU
Et s’il n’en reste qu’un…

A

Cet été dans le Sud, si le soleil sera là (du moins, nous l’espérons !), il sera assombri par la disparition de nombreuses festivités et de nombreux festivasl qui ont baissé les bras.
Et le combat cessa… faute de fric.
Mais s’il n’en reste qu’un, ce sera le Festival du Château de Solliès-Pont qui, outre le fait qu’il résiste, nous offrira quatre dates au lieu des trois habituelles !
Et en plus quatre dates recevant ce qu’il y a de mieux aujourd’hui dans la musique, l’humour, la fête.
Cela est dû à un maire dynamique et volontaire, André Garron, entouré de deux femmes aussi énergiques que lui, Chantal Simon et Marie-Aurore Smadja. Sans oublier  bien sûr, celui sans qui rien ne serait possible : Rabah Houia, grand ordonnateur de Sud Concers, qui apporte sur un plateau le nec plus ultra de ce qui se fait en spectacles.
On les a retrouvés dans ce splendide château tout remis à neuf au milieu d’un cadre de verdure qui fait de ce lieu un endroit idyllique

CALOGERO MPOKORA
FORESTI Exclusif - Premier jour du spectacle de Gad Elmaleh "Sans tambour…" au theatre Marigny le 28 mai 2013

« C’est vrai – nous confie le maire – beaucoup de festivals ont fermé leurs portes dus aux conditions financières des communes qui sont à la baisse. Pour notre part, nous espérons continuer à vous offrir ce festival car nous avons deux atouts : un lieu privilégié : le château, et cette année, un château totalement rénové, à notre grande satisfaction, et un partenaire privilégié : Sud Concerts en la personne de Rabah Houia ».
« Ici – ajoute Rabah – on construit une histoire tout à fait viable parce que, d’abord, le lieu s’y prête mais aussi parce qu’il y a des deux côtés une démarche saine, un potentiel énorme et ce site formidable. On eut donc y inscrire de belles pages artistiques et festives.
Cet échange est tellement sain que cette année, ayant une belle opportunité, nous avons proposé de rajouter Florence Foresti, qui est une belle personnalité, que je suis depuis ses débuts et que j’avais très envie de faire venir dans ce lieu. C’est en ce moment ce que l’on fait de mieux dans ce créneau humoristique ou Florence excelle ».
Et le choix s’est donc porté sur trois hommes et une femme, deux chanteurs et deux humoristes. Heureusement que « Madame Foresti » est donc arrivé car en trois concert, on était loin de la parité ! Et c’est elle qui fera la clôture le 18 juillet.
Mais c’est vrai que Rabah nous gâte encore cette année puisqu’il nous propose M’Pokora qui est déjà venu au château mais qui, après son succès de « Robin, des Bois », a comme l’a souligné Rabah, récupéré un nouveau public, celui des amateurs de comédies musicales qui ont vu le showman qu’il était vraiment. Il sera sur la scène du château le 16 juillet.
C’est Calogero qui ouvrira le festival le 15 juillet, dont, le soulignait encore Rabah, en dix ans de carrière, les chansons font déjà partie du patrimoine de la chanson française.
Et Gad Elmaleh, le chouchou du public, fera son show le 17 juillet. Gad, superbe comédien à la scène comme au cinéma, qui a fait du rire une arme redoutables, qui porte un vrai regard sur les choses de la vie et nous les rend à sa manière.

B

Comme l’on peut le voir, ce festival du Château, cinquième du nom avec l’équipe de Sud Concerts, ne va pas engendrer la mélancolie et chacun pourra y trouver son compte.
A noter que chaque spectacle aura en première partie un jeune talent prometteur :
Le choix se fait en partenariat avec la SACEM et s’inscrit comme une véritable étape dans la vie de l’artiste. Très bientôt nous vous en communiquerons les noms.
Voilà donc un beau festival qui s’annonce sous les meilleurs auspices et l’on ne peut que lui souhaiter, succès, pérennité et espérer que le temps soit avec lui !

Jacques Brachet

Toulon – Théâtre Liberté
Les Mardis Liberté

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Pour l’avant dernier « mardi Liberté », en ce beau mois d’avril, le Théâtre Liberté accueillait le jazz avec le Christophe Leloil & Enzo Carniel Duo, en coproduction avec Jazz à Porquerolles. Voilà un mariage heureux !
Le duo trompette piano est la chose la plus difficile en jazz. Louis Armstrong en a créé les fondements avec son pianiste Earl Hines dans les années 1920, et depuis, bien peu ont tenu la gageure. Il faut dire que Christophe Leloil est un habitué des duos, on l’a entendu dans ce type de prestation avec Nicolas Pacini, Ben Paillard, et d’autres. Disons le tout de suite : ce fut une réussite complète.
Près du mur recouvert de dazibaos, le pianiste, le jeune Enzo Carniel (né en 1987 à la Seyne sur Mer, fils du contrebassiste Jean-Marie Carniel), assis derrière son piano ; debout à ses côtés, le trompettiste qui ne compte plus les éloges, Christophe Leloil ; autour d’eux sur trois côtés, le public, fermant le rectangle, offrant ainsi un espace scénique parfait pour la prestation.
Chritophe Leloil possède l’une des plus belles sonorités de trompette d’aujourd’hui :  un son cuivré, chaud, d’essence nouvelle-orléanaise. Il monte dans l’aigu, descend dans les graves avec une grande douceur ; il parcourt ainsi une grande tessiture avec la souplesse d’un violon. Son phrasé peut être lent, chantant, ou bien staccato, avec des ruptures de phrases volubiles. Avec toujours un grand feeling, le sens des nuances et la beauté du son.

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La force et la réussite du duo reposent sur le jeu du pianiste. Enzo Carniel joue avec  une conception orchestrale du piano, c’est dire qu’il occupe de clavier de ses dix doigts, marquant chaque temps du rythme par des accords de la main gauche ou de la main droite, ou des deux mains, laissant planer parfois un arrière goût de stride fort bien venu. Ou alors il laisse s’envoler ses doigts en des phrases d’une volubilité extrême, mais toujours swingante. Y ajouter une invention permanente dans l’improvisation, et nous avons tous les ingrédients pour faire un grand pianiste de jazz.
Le répertoire était des plus variés. Trois moments majeurs à souligner. Une interprétation sidérante de « Bye-Ya » de Thelonious Monk prise en 7 temps ; un moment de belle émotion sur « How long has it been going on » que Christophe Leloil avait entendu dans sa prime jeunesse sur France Musique ; et une Bossa, que jouait Stan Getz, très décalée et très prenante. Mais tout le répertoire fut joué sur les cimes du plaisir.
Il ne reste qu’à souhaiter qu’on puisse entendre ces deux musiciens, avec aussi leur groupe respectif, dans les festivals de l’été, du moins dans ceux qui auront survécu.

Serge Baudot
Prochain mardi : 12 mai- Bélouga Quartet (Tambourinaires et galoubets)
04 98 00 56 76 –  www.theatre-liberte.fr

CD INTEMPORELS

En Ardèche... Au fond, Antraigues

COUP DE COEUR
Jean FERRAT « Des airs de liberté » (Meys-Sony Music)
C’est un projet que Marc Lavoine avait depuis la disparition de Jean Ferrat. Mais, réunir des chanteurs très choisis qui n’ont pas la même maison de disques, c’est un travailt de longue haleine.
Aidé de Gérard Meys, producteur de Ferrat, le projet a enfin abouti et c’est un fervent hommage que tous ces artistes rendent à l’un de nos plus grands auteur-compositeur-interprète français, même si le disque est un peu inégal, quelques interprétations n’étant pas à la hauteur du grand artiste, ni dans l’esprit de ses chansons.
Malgré ce petit bémol, il y a de superbes moments de grâce et d’émotion, comme Grégoire qui nous donne le frisson avec « Tu aurais pu vivre », Catherine Deneuve et Benjamin Biolay qui interprètent « C’est beau la vie », le magnifique « Que serais-je sans toi » par un Patrick Fiori tout aussi magnifique et inspiré, Patrick Bruel qui interprète « Ma môme » sur un tempo de valse, « La matinée » superbe duo de Marc Lavoine avec Patricia Petibon. Des perles, des chanson éternelles dont l’interprétation, pour ceux-là, reste fidèle à Ferrat tout en montrant que les grandes chansons, bien interprétées traversent le temps, les rythmes, les générations.
Et pour finir en beauté « Ma France » où l’on retrouve l’artiste dans toute sa plénitude.
Merci à Marc et Gérard de nous avoir fait ce beau cadeau.

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Maria de ROSSI  « Chanson tendres » (Universal)
Faute d’avoir de nouvelles chansons d’elle, on est heureux de retrouver notre petite marseillaise sur cette compilation.
Maria fut  un bel espoir des années 70 et sa carrière en France semblait prometteuse avec des titres comme « Vivre libre », « Manana », « Un pont de musique », « Il est marseillais », « Adieu joli menteur »…. Et entre autre avec un superbe album regroupant les plus belles chansons de Provence comme « A Toulon », « Les marchés de Provence », « Magali »….
Et puis la France l’a un peu oubliée mais pas l’étranger car elle mène toujours une carrière internationale. Le Midi a eu la chance de la retrouver sur une tournée varoise voici quelques temps où la jeune fille rousse est devenue une grande dame blonde mais toujours avec cette voix de soleil.
Cette compilation nous ramène donc à ces belles années et à ces chansons que l’on n’a pas oubliées, avec aussi quelques-unes moins connues mais qui valent le détour.
Alors Maria,  à quand une tournée française, qu’on retrouve ton sourire, ton accent et ta voix ensoleillée ?

Guy BONNET : « En simples troubadours » (MGO)
Restons en Provence avec Guy Bonnet, artiste hors normes puisque cette auteur-compositeur qui a d’ailleurs écrit pour Maria de Rossi (Il est marseillais, où va-t-il, où nous mène-t-il ?), d’autres chanteurs issus de Provence comme Michèle Torr, Franck Fernandel, Massalia Sound System, Mireille Mathieu mais aussi pour Sylvie Vartan, pour Isabelle Aubret qui a représenté la France à l’Eurovision avec « La source ». Il a d’ailleurs souvent été sélectionné pour ce concours comme chanteur ou auteur-compositeur. Il nous a offert aussi un superbe album « Chante Trenet » traduit en provençal et nombre de spectacles et disques dans cette langue qui lui colle à la peau.
Avignonnais pur et dur il n’a jamais coupé les racines et son show biz, il le fait en Provence. Et il est heureux.
Voici un « live » piano-voix, accompagné par Eric Breton, justement enregistré au « Chien qui fume » à Avignon où il mêle français et provençal, ses propres chansons et Brel et Trenet à qui il rend hommage à sa manière. Belle manière, pleine de chaleur et de soleil, ce soleil qu’il a dans la gorge.
Guy Bonnet ? Un vrai artiste. Un artiste vrai.

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Lisa ANGELL : « Noubliez pas » (Sony Music)
Restons dans l’Eurovision avec Lisa Angell qui représentera la France en cette année 2015.
Fera-t-elle oublier les cuisants échecs de ces dernières années et prendra-t-elle enfin la succession de Marie Myriam, dernière gagnante française… en 1977 !!!
Il serait temps que le vent tourne pour la France et avec Lisa Angell on a peut-être une chance. Voix ample et superbe, magnifique chanson très d’actualité sur ce que vit le monde, « N’oubliez pas » a des chances. En tout cas tous les ingrédients sont là avec rien moins que trois personnes, deux auteurs : Laure Izon et M.Albert, ce dernier qu’on retrouve à la musique avec Michel Illouz. Trois minutes de pur bonheur et d’émotion.
Tout cela permettra-t-il aux différents jurys de voter en masse ? En tout cas, l’espoir est au bout du chemin afin d’effacer presque 40 ans de malchance… Alors, espérons !

CELTIC FANTASY (Smart)
La musique celtique a toujours été appréciée du monde entier. Des gens comme Tri Yann, Alan Stivell, Dan Ar Braz, Denez Prigent, Glenmor, plus près de nous Nolwen Leroy, nous ont communiqué cet amour d’une musique ancestrale remaniée, rock, pop, variété, jazz… Et tous les spectacles qui ont poussé autour de ces musiques et ces danses ont fait qu’aujourd’hui la musique celtique est omniprésente dans le monde entier.
Et voici que quatre musiciens se sont rapprochés pour nous offrir ce disque : le Brestois Antoine Solmiac, le Finistérien Julien Grignon, les frères McDonnel, Simon et Kevin, venus tout droit d’Irlande, nous enchantent avec ce disque de traditionnels en français et en anglais mais aussi de chansons françaises comme « Santiano » d’Hugues Aufray et « La ballade nord-irlandaise », traditionnel revu par Renaud. Avec en prime une très jolie adaptation du succès de Michel Sardou « Les lacs du Connemara ».
C’est festif, agréable à écouter et de plus, ça a donné naissance à un spectacle éponyme, chorégraphié par Shane McVinchey et Paula Goulding, issus du spectacle « Riverdance ».
Pour les amoureux de cette musique… il faut écouter et aller vois le spectacle. Et bien sûr, acheter le disque !

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Lorenzo CAMINOTTI : « Vous, mesdames » (Sony Music)
Il est jeune, il est beau, il a une voix ample et belle et en plus, il dédie ce CD aux femmes.
Attention mesdames, vous allez craquer car les chansons, si elles sont peut-être un peu trop classiques, c’est à dire pas vraiment dans l’air du temps, elles sont dans la tradition française et populaire, avec des chansons carrées, mélodiques dont beaucoup sont signées de lui, avec quelques belles signatures comme Didier Barbelivien, Claude Barzotti, Didier Concas, Dominique Gorse…
A l’instar de Dany Brillant, il est charmeur, un peu décalé par rapport aux mouvances d’aujourd’hui mais c’est peut-être de n’être pas vraiment à la mode qu’il pourra traverser les modes et surtout qu’il se fera un public très large… et pas seulement de femmes !

Phil BARNEY : « Au fil de l’eau » (Kee Ba Music)
Souvenez-vous, il y a près de 30 ans… Phil Barney nous faisait pleurer avec « Un enfant de toi ». On était en 1987 et il vendit 650.000 exemplaires de cette chanson. Passage en 2002 à « Star Academy ». Une nouvelle génération découvre cette chanson… qui se vendra à 700.000 exemplaires… Ca ne s’était jamais vu dans le monde de la musique.
Entre temps, Phil a fait des disques, des concerts, un peu oublié des médias mais gardant un public fidèle et voici qu’aujourd’hui – chose devenue, là encore, quelque chose d’exceptionnel – il nous offre un disque de nouvelles chansons et pas de sempiternelles reprises.
Son romantisme, sa nostalgie sont toujours là pour nous offrir des chansons qui ne peuvent que toucher les cœurs puisque chacun peut y retrouver un bout de sa vie : un être aimé disparu, l’adoption, l’amour-passion, l’amour sacrifice,  pour une femme, pour un enfant. Des sujets pas vraiment gais mais chargés d’émotion, de tendresse, qu’il nous offre de cette voix inchangée, un peu voilée, un peu perchée, qu’il habille de rythmes un peu jazzy, un peu brésil qui nous donnent à la fois l’envie de danser ou simplement d’écouter et de partager son émotion.
Il a choisi de grandes pointures pour l’accompagner et cela donne un album très intime, très à fleur de peau, à l’image d’un Phil Barney qu’on retrouve inchangé.

Toulon – Théâtre Liberté :
Petits contes d’amour et d’obscurité

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Ces Petits contes d’amour et d’obscurité , écrits et mis en scène par Lazare, et produits par Vita Nova ! ANAH !, étaient donnés au Liberté pour deux soirées d’avril. Il s’agit de deux pièces époustouflantes et complètement déjantées : « Les Illisibles » et « Quelqu’un est Marie ».
Dans les Illisibles on se trouve projeté à fond la caisse dans un spectacle qui commence dans la salle avec des comédiens qui s’interpellent à grands renforts de clameurs, puis on part sur scène à la rencontre d’Agnès, à la fois comédienne et acrobate, son numéro à la corde raide est stupéfiant d’adresse et de facilité apparente. Elle est l’enfant un peu vicieuse dans sa cabane, la femme que se disputent, Jérôme, très grand parmi les petits, et Léonard avec son double. Jérôme possède la voiture transformable, sorte de baguette magique qui peut tout permettre, même d’aller dans le cosmos. Cette pièce est parsemée de scènes de toutes sortes, où l’on voit par exemple Jérôme dans son bain transformé en psychiatre qui se fait appeler Alain Delon.
Dans Quelqu’un est Marie, Marie a perdu son amoureux, Vladimir, étrange petit homme, qui finalement revient de chez les morts pour exiger en rage, sa soupe à 19 heures précises. Marie est en quête de biscuits, aussi bien ceux que l’on mange que cette porcelaine blanche très en vogue au XVII° siècle, métaphores de l’amour. Marie est hallucinée, aux portes de la déraison ; les objets prennent vie, comme ce balai de cabinet qui s’ennuie. Et c’est parti pour un délire roboratif.

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Les deux pièces sont menées dans un rythme et une frénésie hallucinants. On est à la fois dans la Commedia del’Arte (bien que les textes soient écrits au cordeau), le théâtre de boulevard (portes qui claquent, armoire dans laquelle se cachent et jouent  les protagonistes), l’absurde, le burlesque, voire dans la comédie musicale avec de courtes références comiques, et surtout le cirque par les talents d’acrobates des comédiens, et des dialogues assez souvent façon dialogues de clowns.
La scénographie, la mise en scène, la direction d’acteurs, sont proprement au-dessus de tout éloge. Les textes sont un feu d’artifice verbal. Et pourtant…et pourtant il naît parfois un certain ennui. Ce rythme trépidant, cette exaspération dans l’échange des répliques, (il n’y a jamais d’espace de repos dans lequel on pourrait reprendre souffle, rêver soi-même), finissent par nous faire lâcher prise par instants. N’en reste pas moins que c’est un spectacle qui vaut le déplacement. On en sort ébloui !
Et la fête continuait dans le hall du théâtre avec l’intervention du groupe « La rue KETANOU », trois musiciens-chanteurs : deux guitaristes et un percussionniste auxquels s’étaient adjoints pour la circonstance un  accordéoniste. Ils reprennent la tradition des chanteurs de rue du début du XX° siècle, mais avec un répertoire d’aujourd’hui. Groupe éminemment festif avec un percussionniste haut en couleurs assis au milieu de ses instruments dont il joue magnifiquement. De quoi finir la soirée dans la joie.

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Serge Baudot

Propos d’artistes

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Karin Hann : Marcel Pagnol, un autre regard (Ed du Rocher)
Que n’a-t-on pas écrit sur Marcel Pagnol, qu’il n’ait écrit lui-même ?
On pensait tout savoir, tout connaître de cet illustre écrivain-réalisateur, l’un des premiers à utiliser le cinéma parlant. Ses oeuvres aujourd’hui, demeurent au Panthéon du cinéma et de la littérature.
Karin Hann, romancière, ayant un doctorat en lettres, passionnée par la vie et l’œuvre de cet artiste, se penche depuis des années sur lui.Depuis 1985, date à laquelle elle le choisit pour son sujet de maîtrise. Depuis, elle ne l’a plus lâché, lui donnant même ses lettres de noblesse dans une université où il était considéré comme un conteur provençal, un amuseur régionaliste.
Membre du jury Marcel Pagnol, elle nous offre un livre hors du commun, où elle dissèque l’œuvre de l’écrivain, qu’elle soit littéraire, théâtrale, cinématographique. Une vision qui reste dans la droite ligne de ce qu’il devait être mais qu’elle éclaire d’éléments qui nous font découvrir l’homme et l’artiste sous un nouveau jour, plus personnel, qui nous fait encore mieux comprendre ses écrits et nous prouve, si besoin était, que son oeuvre, tout en semblant simpliste, est beaucoup plus profonde, complexe, humaine que certains ne le pensent.
Loin de la galéjade provençale, Marcel Pagnol est l’un de nos plus grands écrivains et reste l’un des auteurs et réalisateurs, les plus populaires.
Karen Hann nous le présente à la loupe, décortiquant ses mots, ses phrases, ses objectifs et nous le fait doublement apprécier alors qu’en cette année, on célèbre les 120 ans de sa naissance.

Maurane : Trop forte (Ed Michel Lafon)
On connaît cette chanteuse venue de Belgique, à la voix d’or, au rire tonitruant, à la personnalité bien affirmée, à la rondeur si sympathique.
Et pourtant…
Pourtant, derrière cette belle personnalité que l’on croit dure comme roc, il y a Claudine Luyparts, une gosse mal dans sa peau parce que déjà, rondelette et moquée par les copains et sa grand mère, ce qui sera loin de la décomplexer. Il y a une adolescente blessée par la séparation de ses parents, qui n’a qu’une idée en tête : quitter la maison et voler de ses propres ailes.
Ce qu’elle fera très tôt d’ailleurs.
Mais tout cela est compensé par son amour de la musique, son envie, son besoin viscéral de chanter et de s’affirmer en tant qu’artiste.
Trop forte elle est, trop forte elle restera, dans tout le sens du terme, au propre comme au figuré, avec une force morale à toute épreuve et une envie de réussir qui lui fait sauter tous les obstacles.
Riant trop fort, pleurant trop fort, râlant trop fort, vivant et chantant… très fort, elle vit ses passions, ses émotions, ses amours, ses emmerdes, ses rencontres comme s’il en allait de sa vie à chaque fois.
Dans ce livre, elle se confie avec tendresse et pudeur, mais aussi beaucoup d’humour et de recul et l’on découvre derrière cette grande artiste, une femme douée pour donner de l’amour et avide d’en recevoir, qui a trouvé le bonheur dans son métier et voudrait le trouver dans sa vie de tous les jours.
La chanson l’a en quelque sorte sauvée, rassérénée et même s’il y a encore du chemin à faire pour atteindre la sérénité, elle reste déterminée à trouver ce bonheur et elle y arrivera car elle est… trop forte !

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Laurent Calut & Yann Morvan : Véronique Sanson, les années américaines (Ed Grasset)
Fans de la première heure, le duo Calut-Morvan accompagne Véronique Sanson depuis plus de trente ans.
Devenus amis de l’artiste, tous deux connaissent la vie et son œuvre  du bout des doigtes, du bout des oreilles, du bout du cœur.
Isl ont décidé de parler d’elle mais sous un angle encore jamais abordé, s’appesantissant sur ses fameuses années américaines, loin d’être les plus lumineuses mais peut-être les plus créatives et prolifiques.
D’un coup de tête elle quitte Michel Berger du jour au lendemain pour vivre une passion qui va changer sa vie, avec Stephen Still, ce qui nécessite de s’exiler aux Etats-Unis et de s’y marier.
Erreur qu’elle comprendra très vite, avant de sauter le pas du mariage car elle se retrouve dans un milieu qu’elle ne connaît pas, dans une langue qu’elle connaît peu, entourée de stars qui ne la calculent pas mais surtout avec un homme qu’elle ne connaissait pas et qui s’avère, buveur, drogué et violent. Tout lui est donc hostile mais elle ira jusqu’au bout, non pas de ses rêves, mais de son erreur car, malgré les exhortations de sa sœur, elle ne reviendra pas sur sa décision et vivra les plus dures années de sa vie « sexe, drogue et rock’n roll ». Elle y laissera sa santé, elle aurait pu y laisser sa vie sans la venue de son fils, Christopher et surtout, la musique l’empêchera de devenir folle. Cela donnera trois albums : « Le maudit », ‘Vancouver », « Hollywood » qui vont la porter au firmament de la chanson française où sa voix unique, ses mélodies magnifiques, sa façon de les interpréter, en feront la première vraie rockeuse française.
Malgré une grande détresse, l’Amérique lui a ouvert les portes de la gloire, du succès en France, faisant d’elle une artiste hors classe, qui traverse les décennies.
Aujourd’hui sa vie est plus calme, elle a trouvé un équilibre, elle s’est débarrassée de ses tendances alcooliques et continue une carrière formidable.
Véronique Sanson : une artiste, une femme exceptionnelle.

Françoise Hardy : Avis non autorisés (Ed des Equateurs)
Voici une chanteuse qui est l’ambiguïté personnifiée : Adolescente, elle veut devenir chanteuse. Elle le deviendra et, si sa voix n’est pas celle de la Callas, ses mots et ses mélodies accrochent tout de suite cette génération des sixties plus portée pourtant vers le rock qui ouvre ses ailes.
Mais voilà : la scène la panique. elle déteste les tournées, elle a peur du public, elle n’aime pas rencontrer la presse… Alors, tout comme Sheila, elle décide de se contenter d’enregistrer des disques. Disques qui marchent mais qu’elle défend le moins possible.
Eternelle insatisfaite, qu’elle écrive pour elle ou pour les autres, elle n’a souvent que des propos critiques et négatifs.
En amour, elle quitte un Jean-Marie Périer qui l’idolâtre pour un Dutronc qui la délaisse, qui continue sa vie de garçon, qui boit et qui la trompe. Mais, tout en se morfondant… elle reste !
La sérénité, elle ne connaît pas même si, Thomas arrivant, c’est peut-être son seul vrai bonheur mais… c’est devenu une peur, un soucis permanents.
Par contre, elle n’a jamais eu la langue dans sa poche, la diplomatie n’est pas sa vertu première et ce nouveau livre le prouve, qui est une sorte de critique de notre société. Elle égratigne tous les sujets : la politique, les idéologies, les religions, la médecine, le métier artistique dont elle fait partie mais dont elle reste éloignée, les médias bien sûr, l’environnement, l’écologie… Restent quand même ses passions : l’astrologie et la littérature.
Celle qui fut l’une des égéries des années 60 nous fait découvrir une écorchée vive dont le mal être est constant et qu’elle vit dans une semi solitude.
Ce livre est fait de vérités, certes, mais qu’elle assène d’une façon péremptoire, des critiques souvent acerbes et l’on se demande si l’on doit la plaindre de vivre dans ce monde, entrer dans son jeu ou en rire tant ses propos sont quelquefois surprenants.
Mais elle a une grande qualité : elle écrit admirablement bien.
Même si elle va quelquefois trop loin.

Jacques Brachet

Jules CESAR à l’Opéra de Toulon

Mardi 7 avril – 20h  – Vendredi 10 avril – 20h  – Dimanche 12 avril – 14h30

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Georg Friedrich Haendel
JULES CÉSAR  – GIULIO CESARE IN EGITTO
Nouvelle production de l’Opéra de Toulon  – Création à Toulon
Mise en scène Frédéric AndrauScénographie Luc Londiveau
Costumes Jérôme BourdinLumières Ivan Mathis
Avec  Sonia Prima, Roberta InvernizziTeresa IervolinoMonica BacelliDaniela PiniRiccardo NovaroBenedetta MazzucatoPierre Bessière
Orchestre de l’Opéra de Toulon dirigé par Rinaldo Alessandrini

L’intrigue se déroule en Egypte, en l’an 48 avant Jésus-Christ. Tous les personnages sont historiques, à l’exception de Nirenus, qui pourrait être, pourquoi pas, une sorte d’Ariel shakespearien…

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Jules César est vainqueur de son rival Pompée. Ptolémée, Roi d’Egypte, fait une bourde diplomatique, une tentative de séduction ratée en lui offrant la tête décapitée de Pompée. Jules César qui venait de pardonner à Pompé à la demande de Cornelia, sa femme, et Sextus, son fils, est bien obligé de se montrer profondément choqué… Au même moment Cléopâtre, soeur de Ptolémée, se prépare pour aller voir César, qu’elle va séduire par intérêt pour obtenir son aide…L’action commence donc par la course au trône entre Cléopâtre et son frère Ptolémée…
J’ai eu envie d’ouvrir le rideau sur un empire décadent, dont la contagion commence à opérer…Un Jules César assuré de son pouvoir sans limite, entouré d’une cour servile uniquement occupée à le divertir pour obtenir sa reconnaissance. Il est absurdement bon d’aller chercher une complicité imaginaire avec Haendel, en voyant dans son oeuvre, une volonté comique, voir parodique de décrire cette époque comme un miroir de notre monde contemporain… Obsession du pouvoir, renoncement à l’amour, crise identitaire. Il y a parfois dans cette fable une dimension grotesque : dans la façon de gérer le politique, d’aduler le pouvoir, ou de piétiner la plus simple humanité. J’imagine Jules César comme une histoire sans fin qui se répète à l’infini, archaïque, un monde en ruine qu’on s’évertuerait à reconstruire, pour pouvoir le détruire à nouveau : un mythe qui nous offre un peu de distance sur notre condition avec du sourire, de l’émotion et de la poésie.

Frédéric Andrau, metteur en scène
Photos : pendant les répétitions

NOTES de LECTURES
par les PLUMES D’AZUR

DE ST PIERRE Gaudé+®-®Jacques Gavard

Isaure de SAINT PIERRE : Le roi des rêves,  Louis II de Bavière   (Ed Albin Michel)
L’auteure nous donne dans ce livre une biographie de Louis II de Bavière appréhendée sous un jour nouveau. Elle met en lumière son rôle de roi qui s’opposa à Bismarck et défendit l’indépendance de la Bavière même s’il n’était pas fait pour régner. Amateur d’art, il ruina son pays en entretenant Wagner qu’il fit découvrir à son peuple, et en faisant construire d’extravagants chateaux qui font maintenant partie du patrimoine bavarois.
Très belles descriptions,  ecriture recherchée au poiint d’être parfois un peu pompeuse, cette biographie se lit facilement. Elle tente de faire connaître  l’homme qui se cache derrière le personnage extravagant de ce roi de légende.

Laurent GAUDE : Danser les ombres (Ed Actes Sud)
Lucine retourne à Port-au-Prince, ville quittée cinq ans à regret cinq ans auparavant pour s’occuper des enfants de sa sœur. Ce retour est porteur d’espoir, elle croit en la vie, elle oublie les vieux souvenirs douloureux de la dictature de Duvalier et de ses tontons macoutes. Les quarante- cinq secondes  de secousse d’un terrible tremblement de terre interrompent et broient  la vie de ce peuple peint magnifiquement par Laurent Gaudé. Car la terre a libéré les forces de l’enfer, c’est le rendez-vous joyeux d’un carnaval macabre conduit par une vieille haïtienne, meneuse de revue !
Laurent Gaudé a utilisé des tragédies naturelles ou politiques pour écrire Ouragan ou Eldorado, il a démontré son talent pour placer le lecteur au cœur du désarroi de peuples martyrisés, c’est dans ce dernier roman le tremblement de terre  de Haïti qui l’a inspiré. Son écriture suit le rythme des évènements, la magie opère, tout est dit avec le souffle puissant de ces dieux vaudous qui ranime et remonte les murs écroulés. Ce roman redonne vie à ces ombres si vivantes qu’elles ne peuvent que danser.

Ruth Rendell TRUCY-Copier

Ruth  RENDELL :  Une vie si convenable (Ed des deux terres)
Voici un beau roman traduit de l’anglais par Johan-Frédérik Guedj, écrit dans un style fluide et agréable .  Une universitaire fait une thèse sur la situation des mères célibataires fin 19ième et début 20ième siècle . Elle partage avec son frère la grande maison héritée de leur grand-mère . Quand le compagnon de celui-ci vient habiter avec eux, les problèmes commencent , plus ou moins liés à leur homosexualité et aux difficultés inhérentes à toute cohabitation .                       Elle se plonge dans un livre écrit début 20ième  et publié à compte d’auteur en raison du sujet jugé scabreux pour l’époque, livre qui traite à la fois de son sujet de thèse et de l’homosexualité  .  La juxtaposition des deux livres traitant des mêmes sujets à deux époques différentes contribue à mettre en évidence l’évolution des mœurs pour les deux problèmes de société traités . Les personnages bien campés sont présentés avec talent, on est pris par leur histoire à laquelle on porte intérêt sans hésitation . Si vous aimez qu’on vous raconte une histoire, vous serez séduit par ce roman qui vous en raconte deux .

François TRUCY : Les Suspects (Ed Livres en Seyne)
Le Docteur François Trucy, ancien Sénateur et Maire de Toulon, nous narre dans ce récit, les mésaventures de huit varois pendant la Terreur de 1793 où Jacobins, sans-culottes et fédéralistes anti-conventionnels s’affrontent  dans le Var. Ces huit varois font partie d’un convoi de trente et une personnes envoyées à Paris, sous la pression de l’accusateur public du Var Jean-Baptiste Vachier, pour y être jugés et guillotinés.
Parmi eux deux ancêtres de l’auteur, Victor Trucy, notaire à Barjols et son fils aîné François, arrêtés par le conventionnel  Barras alors en mission auprès de l’armée d’Italie et qui s’emploie à « pacifier le département du Var ».
Grâce au récit du voyage  des Trente et un Provençaux, rédigé par Mougins de Roquefort, aidé par les Trucy, et aux manuscrits trouvés dans les archives,  l’auteur nous décrit dans cet ouvrage très bien documenté et intéressant,  la haine et la terreur qui régnaient à l’époque en  France.

SHALEV WIAZEMSKY Anne photo sacha 2011 COUL 1

Zeruya SHALEV :  Ce qui reste de nos vies (Ed Gallimard)
Hemda vit sans doute ses derniers jours dans sa petite chambre et heure après heure elle dévide la pelote de sa vie depuis le Kiboutz où elle née , élevée par un Ce n’est plus qu’un fil qui la retient à la vie et c’est le lac de son enfance qui l’a toujours terrorisée qu’elle évoque à travers ses souvenirs d’enfance. Tristes souvenirs que ceux qu’elle a vécus à travers une enfance difficile , un mariage sans amour et des enfants adorés mais qu’elle n’a pas compris et qui vont se déchirer.
Etrange roman d’amours étranges où tout le monde aime mais souffre, s’étiole, se déchire mais ne sait pas donner. Ce livre écrit à la troisième personne,sans véritables dialogues est d’un abord difficile, les phrases longues et sinueuses perdent un peu le lecteur qui ne sait plus qui s’exprime .Roman puissant et très émouvant   Trop de flashback dans lesquels on s’égare. ce qui rend le roman désolant et répétitif malgré une écriture dense et évocatrice.

Anne WIAZEMSKY : Un an après (Ed NRF Gallimard)
« Un an après », c’est aussi un an de la vie d’Anne Wiazemsky petite fille de François Mauriac et jeune épouse de Jean Luc Godard.
Nous sommes à Paris, dès le début des manifestations de Mai 1968. Anne, jeune mariée, vient de s’installer Rue Saint Jacques avec Jean Luc. Elle a vingt ans, est issue de la grande bourgeoisie ; elle déteste les excès et les dérapages. Lui, trente sept ans, représente le cinéma d’avant-garde ; il s’affiche comme le gourou d’une génération. Nous le savons nerveux, velléitaire, en rupture avec tous les systèmes.
Et pourtant les voilà réunis dans ce grand élan de solidarité et d’espoir qui devait changer la société. Immersion dans la foule des manifestants, rencontre avec la brutalité policière… Lui, maoïste, milite tandis qu’avec une copine, elle découvre dans la foule, les joies du patin à roulettes ! Ils se retrouvent pourtant avec émerveillement et sensualité dans leur petit appartement du Vème arrondissement.
Le récit alerte, est souvent cocasse,(le lecteur appréciera particulièrement l’anecdote de la tasse de thé prise sous une table avec Paul Mc Cartney !) ; la peinture de cette époque nous renvoie à nos souvenirs même si la perception d’une rencontre avec l’Histoire ne nous parait pas évidente – du point de vue de l’auteure.-
Il s’agira plus de l’histoire de l’héroïne et du délitement du couple face au chaos provoqué par les évènements. Les divergences s’affichent : conflit de génération et d’opinion aggravé par la jalousie maladive du cinéaste. La tentative de suicide  de Jean Luc Godard (un an après !) mettra un terme à leur idylle.
En résumé, le récit autobiographique d’une révolution en patin à roulettes !

 

 

 

Toulon – « L’Art en Famille » au théâtre Liberté
du 2 avril au 31 mai 2015

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Pour son « Théma # 17 » le Théâtre Liberté de Toulon aborde la thématique de l’Art en Famille, dont l’idée lui a été inspirée par la présence sur scène au Liberté de Richard Bohringer et de sa fille Romane dans le spectacle « J’avais un beau ballon rouge » et « Le sorelle Macaluso » d’Emma Dante. On note qu’il y a en cette époque une floraison de jeunes, et moins jeunes, artistes issus de familles d’artistes célèbres. On peut alors se poser les questions de la place de l’art dans la famille, des vocations, ou des rejets, suscités par l’image des parents artistes, etc…
A l’encontre d’André Gide qui déclarait dans les « Nourritures terrestres » : Familles, je vous hais ! le Liberté clame : « Familles, je vous aime ». Cette déclaration a été entendue si on en juge par l’immense public qui avait investi le hall du théâtre pour la présentation de ce nouveau Théma.
Au centre du hall, une longue table recouverte d’une nappe jaune sur laquelle les spectateurs étaient invités, guidés par des hôtesses, à dessiner des arbres généalogiques imaginaires, tout en dégustant de la citronnade ou de la grenadine.

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Sur le grand mur, façon dazibao, est affichée une exposition collective organisée par « La Folie Kilomètre, 2015 ». Cette exposition, de 15m x 5, est faite de photos et de réflexions choisies parmi les expressions de 124 personnes : pensées, aphorismes, déclarations intimes, souhaits…qui finissent, en y mêlant les portraits photographiques, par créer une histoire, c’est à dire que chaque regardeur/lecteur peut se créer sa propre histoire, rejoignant la, ou les familles du mur, s’intégrant ainsi à l’imaginaire collectif ; façon de rejoindre la grande famille des artistes.
Après les présentations officielles menées joyeusement par Philippe Berling, Pascale Boeglin-Rodier et  Barbara Perraud, en la présence des membres de « La Folie Kilomètre » qui se partagèrent le micro pour énoncer leur déclaration d’intentions, la foule était invitée au buffet concocté par les participants à l’exposition.
Pendant ces deux mois de printemps on pourra voir des films : « Nos meilleures années » de Marco Tulio Giordana, « Umberto D. » de Vittorio de Sica, « Palerme » d’Emma Dante, « Voyage en Italie » de Roberto Rossellini, Les aventures de Pinocchio » de Luigi Comincini, pour l’accent mis sur l’Italie. Et encore « Tout seul avec mon cheval dans la neige » d’Alexandre Barry, « Empty Quarter, une femme en Afrique, de Raymond Depardon, et « Jacquot de Nantes » d’Agnès Varda. Et aussi la famille du cirque avec le film « Romanès » de Jacques Deschamps, qui est un documentaire sur la famille Romanès, du cirque du même nom. Un sacré beau programme cinématographique. En conclusion à cette série de films seront programmées sous le titre « Art famille et vidéo », trois vidéos  qui ont pour sujet les rapports familiaux, de Bob Wilson, Joël Bartolomeo et Nam June Paik, présentées par Jean-Paul Fargier.

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Serge Baudot

Renseignements et détails des programmes au Théâtre Liberté (04 98 00 56 76), place de La Liberté à Toulon. www.theatre-liberte.fr