Archives pour la catégorie Musique

Presqu’ile Jazz Impro
Duo Louis SCLAVIS-Bruno DUCRET

Le trio de passionnés (Guy Risbec, Irène Levauffre,Philippe Letimonnier) qui mène allègrement Presqu’île Impro Jazz, invitait en cette soirée du 4 mars 2023 un duo effervescent : Louis Sclavis (clarinettes basse et soprano) et Bruno Ducret (violoncelle).
La belle idée de Presqu’île Impro Jazz est de changer de lieu à chaque concert, afin d’aller avec ce jazz très pointu vers des publics différents. Cette fois on était dans la Halle 901, toute neuve, à Saint Pierre Eglise (près de Cherbourg). La salle était comble. Le public enthousiasmé ; la preuve, les musiciens offrirent trois longs rappels. Dès leur apparition les deux musiciens avaient déjà conquis la salle.
Louis Sclavis est sans conteste l’un des tout premiers clarinettes basse, peut-être le meilleur, et un très grand improvisateur. On ne le présente plus ; il enflamme les publics depuis près de 50 ans.
Bruno Ducret, lui, est encore peu connu. Il termine ses études en 2014 après être passé par plusieurs conservatoires. Il est né dans la musique puisqu’il est le fils de deux très grands improvisateurs bien connus dans monde du jazz, le guitariste Marc Ducret, et la contrebassiste Hélène Labarrière ; tous deux d’ailleurs sont déjà venus à Presqu’île Impro Jazz.
Dès les premières notes on entend que le violoncelliste est au niveau d’un concertiste classique, avec en plus la patte jazz. Il est l’homme orchestre du violoncelle, qu’il tient à la façon d’une viole de gambe, ce qui lui permet de jouer dans différentes positions, car il traite son violoncelle à la fois comme instrument mélodique et percussif, frappant peu la caisse, mais en jouant de toutes les possibilité des cordes, depuis les chevilles jusqu’au cordier. Il joue pizzicato avec les 5 doigts, tout en percutant les cordes en accord. On est époustouflé par tout ce qu’il peut jouer, sans jamais faire de « cirque ».
Louis Sclavis, statue du commandeur derrière sa clarinette basse, fut éblouissant. Un moment grandiose sur « l’Odyssée des Bysantins », ce fut comme si soudain on avait entendu le chant du muezzin. Il avait ôté le bec et chantait dans le bocal sur un mode bysantin ; c’était une caravane de musique qui passait sur la scène.

Leur fonctionnement est simple, on expose le thème tous les deux, et puis quand ça part en solo, l’un accompagne l’autre, de façon assez extraordinaire mêlant rythmique et mélodie. Sclavis avec ses claquements de langue sur la anche. A noter de sa part un long solo en souffle circulaire, ce qui étonne toujours un public non averti.
Ces deux musiciens puisent à des sources diverses. Louis Sclavis est plus essentiellement jazz, il y a du blues à l’intérieur. Il s’est créé un son et un style facilement reconnaissable et envoûtant.
Bruno Ducret en plus du jazz, joue également de la musique de chambre, du rock, de la musique folklorique, pour le théâtre, la danse. Il chante aussi. Lors d’un rappel il nous gratifia d’un traditionnel nivernais étonnant qui définit parfaitement la condition de la femme au temps de la paysannerie : « Je voudrais être mariée, j’irais p’t’être plus aux champs! Voilà la belle mariée, elle va toujours aux champs…elle voudrait être enceinte, accoucher, vieille…Elle va toujours aux champs…Morte, elle est
enterrée dans son champ. » Il le chante seul en s’accompagnant sobrement au violoncelle. Belle idée de reprendre ces chants anciens, ce qu’avaient fort bien réussi les Bretons en les mêlant à la Pop.
Un dernier rappel plein d’émotion et de douceur. Les deux musiciens s’assoient côte à côte pour un blues sobre et intimiste. Fulgurante ovation.
Un grand concert, qui prouve qu’il ne faut pas avoir peur de programmer de la grande musique, même pour un public non initié. Celui-ci sait reconnaître d’instinct le grand art.
Les musiciens arrivait de Bourg en Bresse et n’avait pas encore mangé. Comme quoi la musique permet tous les dépassements.

Serge Baudot

STONE : sa vie dans tous les sens

Ma première rencontre avec Annie Gautrat, (alias Stone) remonte à la tournée “Inventaire 66” qui réunissait Hugues Aufray, Michel Delpech, Pascal Danel, mais aussi Pussy Cat,  Karine, Noël Deschamps, les Sharks (Que sont-ils devenus ?). Ils en étaient tous à leur première tournée et Aufray, Danel, Delpech et Stone et Charden ont fait le chemin que l’on connaît.
De ce jour, on n’a jamais cessé de se croiser,de  se rencontrer, de se voir en tournées

Autre tournée mémorable de rires et de folie avec C Jérôme et Michel Jonasz et un Charden au pied plâtré mais chantant quand même. Il y a eu aussi une tournée avec CloClo et Topaloff qui n’était pas triste non plus.
Si, avec Charden, ce ne fut souvent pas très sympa, avec Annie ça a été l’amitié « A la vie à la mort »… Et ça continue !
Et si, depuis longtemps, c’était terminé avec Charden, on a continué à se voir, car Annie n’a jamais cessé de travailler, devenant comédienne, écrivant une biographie de cette période Stone-Charden qui, en fait, n’a duré que quatre années intenses avec retrouvailles du couple sur les tournées « Âge Tendre ».
Et la voilà qui s’est piquée au jeu de l’écriture et qu’elle nous offre sa « Vie dans tous les sens » (Editions Champs-Elysées) où elle nous parle de beaucoup de choses plus intimes, de sa vie de femme, de mère et pas du tout de sa vie d’artiste.
Elle vit aujourd’hui avec le comédien Mario d’Alba… que j’ai très vite adopté car il est, lui, sympa et drôle. Je les avais d’ailleurs invités à Saint-Raphaël pour « Stars en cuisine », où ils vinrent cuisiner un plat végétarien pendant que je cuisinais de mon côté avec Fabienne Thibeault.
Bon, le livre sorti, il fallait qu’on en parle !

« Alors Annie, tu t’es prise au jeu de l’écriture ?
Au départ, ce n’est pas voulu. C’est durant le confinement que je me suis remise à écriture. Petite déjà, j’écrivais mon journal intime. Je l’ai d’ailleurs retrouvé en rangeant des affaires. J’ai fait ça durant des années et en le relisant j’ai trouvé ça sans intérêt. Mais c’était enfantin et je racontais tout ce qui m’arrivait !
Ce que tu as fait là !
Oui, en écrivant au jour le jour ce qui me passait par la tête, comme ça venait, ce que je vivais avec ma famille, ma mère, ma belle-mère mais aussi mes souvenirs d’enfance et en parlant de plein d’autres sujets. Voilà pourquoi le titre « Ma vie dans tous les sens » !
Par contre tu nous parles de ta vie personnelle et pas de ta vie d’artiste !
Non, je l’ai déjà fait dans mon premier livre, ça n’avait plus d’intérêt d’y revenir.
Par contre au départ, je n’ai pas écrit pour en faire un livre. J’ai toujours aimé écrire et je le faisais pour le plaisir. J’adore aller dans les fêtes de livres pour y rencontrer les auteurs que j’aime. A la Fnac de Montluçon j’ai rencontré Dominique Filleton qui est écrivain et éditeur. Nous avons discuté et il m’a proposé de m’éditer. Ça s’est fait tout naturellement. Et puis, j’ai rencontré une responsable d’un salon animalier et comme j’ai toujours aimé et eu des animaux elle m’a suggéré de parler d’eux. Dominique a trouvé l’idée sympa et ce sera mon prochain livre !
Et écrire des chansons ?
Je n’ai jamais pu. J’ai essayé mais c’était lamentable ! Je suis juste arrivée à écrire un conte pour enfants.
Comment écris-tu ?
Comme je te dis, au jour le jour. Il me vient une idée, un souvenir et j’écris. C’est comme ça que j’ai écrit notre bio même si là, il fallait tout de même écrire dans l’ordre des événements que nous avons vécu.
Mais j’écris toujours sans aide d’ordinateur, je ne sais pas faire. Et c’est ma fille qui s’en occupe !

Dans ton livre, tu ne ménages ni ta mère, ni ta belle-mère !
Même si j’ai de bons souvenirs d’elles et surtout de ma maman adorée, elles ont fini très vieilles et malheureusement dans un triste état. A la fin, elles n’étaient plus les femmes qu’elles ont été et de les voir dépérir ainsi, perdre la tête, se faire dessous, engueuler tout le monde, ne pas vous reconnaître, on finit par espérer qu’elles disparaissent. Aussi bien pour elles que pour nous. Et en fait d’espérer cela, ça nous permet de rendre leur disparition moins cruelle.
Lors d’une des nombreuses discussions que nous avons eues, tu m’avais annoncé ta mort prochaine aux alentours de tes 70 ans… Tu les as passés… Et tu es toujours là !!!
(Elle rit) Oui et j’en suis très heureuse. C’est une voyante qui me l’avait prédit et je l’attendais sereinement ! Je suis ravie qu’elle se soit trompée.
Mais tu sais, dans ma famille, il y a toujours eu des médiums… Dans le Berry on les appelait des sorcières. Et ma grand-mère a été médium. Elle a même vu des choses qui se sont réalisées et elle me les a racontées. Ma mère, qui pourtant, était cartésienne, a été confrontée à des entités. Elle n’en parlait pas de peur de passer pour une folle.
Et toi ?
Moi ? Rien ! Ca a sauté une génération car il est arrivé à ma fille plein de choses étant adolescente. Je m’y suis faite, c’est une vieille habitude dans la famille !
Par contre, je suis persuadée qu’il y a autre chose après la mort et ça, ça vient de l’influence de ma mère. Comme celle de vivre et de manger bio. Déjà, elle tenait une boutique diététique, même si on ne parlait pas encore de bio. D’ailleurs, je n’ai plus jamais mangé de viande depuis quarante ans ! Et je ne m’en porte pas plus mal.
Une chose qui, dans ton livre, m’a fait marrer : ta nuit de noces avec Eric Charden… qui n’a pas été consommée !
Oui parce que, sa mère, qui était très excessive, ne supportait pas de le voir épouser une saltimbanque et le persuadait en même temps de quitter ce métier qu’il pratiquait aussi. Elle lui avait bourré le crâne. D’ailleurs elle s’enfuit juste après le mariage, sans rester au repas, et, se sentant coupable il a passé sa nuit… Dans la salle de bain à pleurer… Charmante la nuit de noces ! Déjà qu’il n’avait pas voulu me toucher avant le mariage… Ca faisait beaucoup. D’autant qu’il ne se gênait pas pour aller batifoler ailleurs ! Enfin, après, on s’est rattrapé !
Tu écris aussi une phrase incroyable : « Il faut que l’Homme disparaisse de la surface de la terre… » Ce n’est pas un peu excessif ?
(Elle rit encore) Je dis l’Homme en général peut-être pas tous les hommes parce qu’en fait, on a besoin d’eux pour la reproduction… Même s’ils peuvent aussi faire des garçons !
C’est un cercle vicieux  ton affaire !
C’est vrai  mais depuis toujours, l’Homme est tout-puissant, la femme est toujours derrière. Tous les malheurs de la terre viennent de l’Homme. OK, aussi de quelques femmes… C’est difficile tout ça !

Aujourd’hui s’est passé un triste événement : l’accident de Pierre Palmade qui, sous l’emprise de la drogue, a blessé et tué. Qu’en penses-tu, toi qui racontes avoir touché à la drogue ?
C’est terrible, ce qui s’est passé, monstrueux ! C’est vrai nous avons pris de la drogue et j’avoue que j’y ai pris du plaisir car on est déconnecté de la réalité, on est dans un trip agréable. Mais d’abord, le peu de fois qu’on l’a fait, on l’a fait à la maison et il n’était pas question de sortir, de prendre un volant. Ce peut être une expérience sympa à condition que ça ne devienne pas une habitude, que ce soit occasionnel car ça devient très vite un piège. C’est comme de boire trop. Prendre une cuite de temps en temps OK mais attention à l’addiction car alors ce peut être terrible. C’est ce qui s’est passé avec Pierre Palmade »…

Je vais laisser ma belle amie à ses chats et ses chiens… En attendant qu’elle continue à raconter longtemps d’autres histoires avec son humour et sa joie de vivre… Puisque la date de sa mort annoncée est passée !!!

Propos recueillis par Jacques Brachet


Une vague classique va déferler sur Six-Fours

Gérald Lerda, Fabiola Casagrande, Colette Gluck, Jean-Sébastien Vialatte

Foule des grands jours au Six N’Etoiles de Six-Fours. Non pas pour parler cinéma mais pour parler de la déferlante de musique classique qui va avoir lieu cet été dans trois lieux devenus aujourd’hui incontournables à Six-Fours : La Maison du Cygne, la Collégiale Saint-Pierre, la Maison du Patrimoine.
Le festival « La vague classique » se déroulera donc à la Maison du Cygne du 27 mai au 18 juin, puis la Collégiale prendra le relais du 1er au 19 juillet et enfin les concerts de la lagune se dérouleront à la Maison du Patrimoine du 2 au 16 juillet.
Ouverture en majeur le 2 avril à la collégiale St Pierre avec l’extraordinaire mezzo-soprano Cécilia Bartoli, qui sera accompagnée par l’ensemble Matheus dirigé par Jean-Christophe Spinosi. Cécilia Bartoli qui sera parmi nous grâce à Colette Gluck, conseillère municipale déléguée à la culture de la Mairie de Toulon, amie fidèle du festival, précise le maire.
« Le besoin de culture – nous confie Jean-Sébastien Vialatte – a été immense durant le confinement mais en même temps, ça été pour nous l’évidence de recevoir, durant cet enfermement, ces artistes qui ne pouvaient plus travailler et qui ont été heureux de découvrir la Maison du Cygne dans laquelle ils veulent tous revenir ! Malheureusement, nous ne pouvons pas toujours recevoir les mêmes artistes, hormis les frères Capuçon qui sont un peu devenus les parrains du festival ».

C’est ainsi que chacun viendra pour deux soirées : Renaud, le 27 mai accompagné de Paul Zientara, alto, Stéphanie Huang, violoncelle et Guillaume Bellom, piano pour une soirée Mozart. Le 28 mai nous retrouverons les mêmes sauf Paul Zientara, mais complété par Violaine Despeyroux et Manon gay, révélation des Victoires de la Musique Classique 2022, violons, pour une soirée Brahms.
Quant à Gautier, il sera parmi nous le samedi 17 juin, soirée consacrée aux jeunes talents de sa fondation qui l’accompagneront : Anastasia Rizikov, piano, Sarah Jégou, violon, Lisa Strauss violoncelle. On retrouvera au piano Frank Braley l’un des pianistes qui a très souvent accompagné Gautier. Un autre de ses complices, le pianiste Jérôme Ducros, sera à ses côtés le 18 juin, soirée où un mélange savant réunira des musiques de son dernier album « Sensations » de « Singing in the rain » en passant « le magicien d’Oz », « Les moulins de mon cœur » « Les parapluies de Cherbourg » de Michel Legrand, « Mission » d’Ennio Morricone, « Hallelujah » de Léonard Cohen, « Quand on n’a que l’amour » de Brel… Entre toutes ces musiques célèbres, s’immisceront Brahms, Dvoràk, Puccini, Prokofiev… De beaux moments en perspective.
Autour de ces deux frères amis du festival, nommons les pianistes David Kadouch, Alexander Malofeev jeune génie russe, David Fray et bien d’autres artistes de renom qui, aujourd’hui disent oui sans hésiter au trio six-fournais, le Maire, l’adjointe à la culture Fabiola Casagrande et Gérald Lerda, collaborateur du cabinet du Maire.

Fabiola qui nous annonce une saison enthousiasmante à la Collégiale  qui fêtera son dixième anniversaire avec son complice Jean-Christophe Spinosi. Dixième anniversaire qui sera fêté le 16 juillet avec un magnifique concert de l’ensemble Matheus, Jean-Christophe y invitant la sublime contralto Maria Sala où Monteverdi, Vivaldi seront entre autres au programme. Vivaldi dont Jean-Christophe nous offrira « Les quatre saisons » le 18 juillet. Quant à la symphonie N°6, dite « la Pastorale » de Beethoven, elle sera au programme de la clôture du festival le 19 juillet.
N’oublions pas l’invité exceptionnel du 1er juillet : le ténor Rolando Villazon.
On ne peut pas vous citer tous ces programmes si riches et si divers que vous pourrez retrouver sur le site sixfoursvagueclassique.fr dont les abonnements sont ouverts.
Les concerts de la Lagune, concerts gratuits, démarreront le 2 septembre avec le premier lauréat de la Fondation Gautier Capuçon, le pianiste Kim Bernard. Nous retrouverons Benoît Salmon, violon e Pierre Laïk, piano le 9 et l’ensemble Meliphages et l’accordéoniste Julien Beautemps le 16.
« La vague classique – ajoute le maire » est une vague de magie, de bonheur partagé, qui aujourd’hui fait rayonner notre ville et fait d’elle une terre de culture ».

Jacques Brachet

Notes de Musique

ESPRIT JAZZ 01 – France Musique – Wagram 3425992 – Coffret 5 CD
Laurent Valéro anime l’émission « Repassez-moi le standard » tous les dimanches à 19h sur France Musique, émission dans laquelle il propose plusieurs versions du même standard. Il y a parfois plusieurs dizaines de versions. Pour ce coffret « Esprit Jazz » il a choisi des thèmes pour l’excellence de leur interprétation, parmi les centaines qu’il a présentés.
En 5 CD on a un florilège des standards les plus joués et les plus célèbres. C’est à dire 100 interprétations exactement. C’est un magnifique panorama permettant d’entendre quelques unes des riches voix du jazz moderne. On y retrouve des grands noms mais aussi des seconds couteaux qui brillent par leur excellence et ont leur part dans l’histoire du jazz. Ce sont ceux qui, pour différentes raisons, n’ont pas connu la célébrité, mais qui ont œuvré dans leur coin pour l’évolution et la gloire de cette musique.
C’est un éventail époustouflant. La majorité des tendances, des expressions s’y retrouvent, du lyrisme feutré de Ben Webster à la modernité de Richard Galliano, en passant par toutes couleurs de l’arc en ciel du jazz du XX° siècle.
Que vous soyez amateur confirmé, musicien, ou simple curieux, ce coffret est pour vous. C’est plus qu’une compilation, c’est un trésor du jazz dans le meilleur de son esprit. Et à petit prix.
AUREN IL S’EST PASSÉ QUELQUE CHOSE – 9 titres
Auren fut d’abord pianiste et guitariste, avant de se consacrer au chant. Elle fut marquée par le groupe Calexico, qui lui réalisa son deuxième disque « Numéro » à Tucson (Arizona). La voici à la tête de son troisième album, réalisé en collaboration avec Nicolas Dufounet, et dont elle a écrit et mis en musique les textes ;  le tout arrangé par Romain Galland. Elle dit « qu’elle s’adresse à la Terre comme à une putain qu’on écrase dans un Monde fini ». Dommage, les paroles des chansons ne sont pas du tout le reflet de cet engagement, si on excepte « Monde fini », très aéré, où elle chante la désespérance :« On aura vu la beauté du monde ». Ajoutons, ce n’est pas rien, qu’elle a fait les premières parties de Vanessa Paradis, Olivia Ruiz et Benjamin Biolay.
Une voix très sage, souvent nostalgique, avec quelque chose de Vanessa Paradis ;  des arrangements simples avec une rythmique mécanique de poids pour entourer  le chant d’Auren.
Elle chante la nuit, l’ennui, le souvenir. « J’ai eu mon heure, on m‘a aimée ». Par contre « Vivante » en duo avec Jeanne Cherhal chante l’espoir, sur des tenues efficaces de l’orchestre « Vois-tu comme je suis vivante…j’ai fain en moi ». Voilà un gage d’avenir pour cette jeune chanteuse.

BT93 – BT2033 – Dragon Accel / Modulator – 11 titres.
BT93 c’est Bernard Tanguy qui a d‘abord passé 10 ans dans le cinéma, il fut même nommé aux César. Dans ce disque il décrypte le milieu du cinéma, et il n’est pas toujours tendre, ni fair play, avec cependant des hommages comme celui à François Truffaut, « François, I miss You », morceau dans lequel il joue avec les titres des films de Truffaut, avec au piano Patrick Goraguer (qu’on trouve sur d’autres morceaux, également batteur et compositeur), le fils d’Alain qui fut l’un des premiers à composer et jouer du rock en France : « Fais moi mal Johnny » avec Boris Vian et Magali Noël.
Bernard Tanguy possède une voix bien timbrée, du charme, il chante parfaitement en place, entouré, encadré par des synthés, quelques effets de chœurs menés par Sainte Victoire, qui a aussi réalisé cet album, et chante agréablement en duo sur « Tu m’as aimé », le plus « chanson » du CD. La rythmique, plutôt basique et mécanique, est du genre Dance-Hall – DJ, mais colle au propos. L’auteur s’en prend au « CNC » pour ses tonnes de papiers avant d’obtenir quelque chose, ou rien. Et au « Boulet de l’art et essai », en en faisant un clan de l’entre soi (Mais les salles d’art et essai protègent le cinéma et donnent les films en V.O). On traverse divers atmosphères musicales, on se promène à travers des sentiments parfois contradictoires. Tout cela est sérieux mais ne m’enthousiasme pas.
JEAN-MICHEL PILC – SYMPHONY – Justin Time Records JTR 8632-2 – 10 titres
Jean-Michel Pilc est né à Paris en 1960, maintenant Américain. Il s’est mis au piano après avoir été impressionné par Martial Solal. Il joue et a joué avec une foule de grands noms, dès le début, avec Michel Portal, François Moutin, puis avec Roy Haynes, Michael Brecker, Dave Liebman, Marcus Miller, Biréli Lagrène, John Abercrombie, pour ne citer que les plus connus
En 2021, c’est après avoir assisté au Portugal à l’enregistrement de « Contradicto » du saxophoniste espagnol Xose Miguelez que Jean-Michel Pilc fut inspiré par les conditions parfaites des Studios OJM et la vue d’un magnifique Steinway qu’il se dit qu’il était temps pour lui de réaliser son nouvel album en piano solo. Jean-Michel Pilc : « Uniquement porté par la musique j’ai alors commencé. Lorsque l’inspiration s’installe, vous quittez le monde réel et la musique vous entraîne dans un nouvel univers totalement unique ».
Nous voici avec dans les oreilles un album digne des solos de Keith Jarrett, la même faculté d’improvisation sur le vif. Jean-Michel Pilc est un pianiste brillant, prolixe d’une grande invention rythmique et harmonique, avec une sonorité claire, des notes bien détachées même dans les traits les plus rapides. Il sait laisser respirer la musique, jouer du silence, comme sur les romantiques « The Encounter », ou « Understanding ou « Just Get up » assez impressionniste, relevé de coups de tonnerre. Il déclare explorer aussi les possibilités orchestrales du piano, comme par exemple dans « Discovery » ou « Not Falling This Time ». A noter un bel hommage à Xose Miguelez, « Waltz For Xose », qui est une sorte de valse fuguée.
Magnifique. Cinq étoiles, pour tout amateur de piano, jazz ou pas.

Serge Baudot

Notes de musiques

Delphine COUTANT  : 2 systêmes solaires ( LC6 – L’autre Distribution -11 titres)
Delphine Coutant, chanteuse, compositrice, musicienne, se définit comme une Trobairitz (femme troubadour) du XXI°. Que voilà un joli titre ! La voici pour son sixième album, parée des oripeaux de la fonction qu’elle s’octroie. Une voix qui rappelle un peu celle d’Anne Sylvestre, c’est dire un charme certain, avec une diction parfaite.
Elle se promène, relax, entourée de 8 musiciens et chœurs sur des arrangements fleuris qui entourent bien la chanson.
Delphine Coutant s’exprime dans un univers très particulier, et rare dans la chanson. On est dans le minéral, le végétal, l’hiver, la glace, la sculpture, la mythologie (Méduse, Pégase), les plantes rares. Elle sait bousculer la langue et les images assez surréalistes, exemple « …voir la montagne bouger/sur une plage bretonne/l’Himalaya sous les pieds/dans un salon de glace… »
A écouter pour sortir des petites histoires quotidiennes et faire un doux voyage incongru

thumbnail_Numériser thumbnail_Numériser - copie 3

LOCO CELLO : Tangorom
(Well Done Simone ! Record – Abbaye de Noirlac WDS003 – 11 titres)
Le « Violoncelle en folie » c’est un trio avec François Salque au violoncelle, Samuel Strouk à la guitare et Jérémie Arranger à la contrebasse, auxquels, pour ce disque s’adjoignent des invités de marque : Biréli Lagrène et Adrien Moignard à la guitare. A la tête de plus de 40 disques et de multiples récompenses le trio Tangorom s’empare du tango avec plusieurs titres d’Astor Piazzolla, du jazz avec des morceaux de Django Reinhardt, et même le classique avec Robert Schumann.
Le disque s’ouvre avec « Oblivion », le tango de Piazzolla le plus sensuel, joué bien dans la tradition mais avec un son nouveau. Une « Csardas » (en deux parties)  avec la guitare dans le rôle du  cymbalum et le violoncelle dans un lyrisme à fond tzigane. Une réussite avec toutes les couleurs du genre. « Tears » de Django et Grappelli, et « Clair de Lune » de Django avec Biréli Lagrène et la contrebasse, du grand art. Le Schumann « Auf einer Burg », ou encore « La Prière » d’Ernest Boch, joués façon tango, permettent à François Salque d’extraire toute la force d’âme que peut exprimer le violoncelle dans toutes ses nuances.
Ce violoncelle n’est pas fou, ou alors fou de musique, pour notre plus grand plaisir.
Élodie RAMA : Constellations ( Label 10h10 – 11 titres)
Fille d’Hilaire Rama célèbre bassiste et chanteur de blues et de musique bretonne, voilà qui lui a permis de s’ancrer dans la musique sans frontières. Elle se réclame de la créolisation conceptualisée par Patrick Chamoiseau dont le poème « Frères migrants » est dit par une voix d’homme sur une rythmique, texte qu’on peut résumer par l’un des vers « Le combat de l’un est le combat de tous ». Ce qui fait d’elle une chanteuse engagée.  Vivant à Marseille elle se frotte au Hip Hop et fait sa place dans ce riche milieu multi culturel. Akhenaton vient en duo avec elle sur « Indigo ».
Un voix nasale acidulée, très particulière et assez étrange. Elle chante avec une décontraction à la Lana Del Rey, mais sans la sensualité ni la diction. Son chant repose sur de belles rythmiques parfois très riches. « Ko » est assez emblématique de son style. Elle se montre plus rock lent dans « Home », une autre facette de son style. Elodie Rama a déjà trouvé sa « façon » et a toute sa place dans la chanson d’aujourd’hui.

Serge Baudot

 

 

 

Notes de musiques

BAIJU BHATT & RED SUN. – PEOPLE OF TOMORROW (Neuklang NCD4269 – 15 titres)
Le violoniste Baiju Bhatt est né de père Indien (Rajasthan) et sitariste, et de mère Suisse. La vie s’ouvrait pour lui sur les mélanges. Ce qu’on retrouve dans sa musique qui repose sur un fond de musiques indiennes qui se mêlent à différents styles musicaux : musiques classiques, traditionnelles, rocks, orientales, vaguement jazz. C’est un arc en ciel de tours du monde, de tourbillons chatoyants, partagés par son groupe habituel : Valentin Conus (ss, ts), Mark Priore (p, clav), Blaise Hommag (eb), Paul Berne (dm), plus quelques invités de marque : Nguyên Lê (g), Raphëlle Brochet (voc) , Robinson Khoury (tb), Prabhu Edouard (tablas) et d’autres.
Baiju Bhatt  a étudié au Conservatoire de Lausanne et à l’École des hautes études de musique. Il découvre le jazz au piano, mais swingue au violon dans les bars. Il a également étudié avec Didier Lockwood et Jean-Luc Ponty ; le jeu de violon de celui-ci, et la sonorité de celui-là, sans parler, et surtout, des inflexions indiennes.
On a affaire ici avec une musique brillante, vibrante, reposant sur 15 nouvelles compositions du leader qui emportent aussi bien le groupe Red Sun en osmose totale qu’un joli nombre d’invités. A noter un morceau duo piano-violon pizzicato « Postlude » très réussi. Et encore le morceau titre, qui décale « The People of Tomorrow » dans lequel le violon marie l’indien au celtique.
Un disque pour amateur de mélanges savants. Mais à mélanger les cultures que restera-t-il à mélanger pour les prochaines générations ?

thumbnail_Numériser (2) thumbnail_Numériser (3) thumbnail_Numériser 1 (1)

LEHMANNS BROTHERS – THE YOUNGLING (vol 2
(Alhambra Studios Live session (10H36) – 5 titres)
Revoici le quintette de base des Lehmanns Brothers avec une kyrielle d’invités. Eux aussi sont des adeptes (air du temps oblige) du mélange des cultures musicales et des influences multiples. Ceci posé ils s’en sortent bien.
Un début à la Beatles. En 2012, cinq Lycéens d’Angoulême se réunissent dans un garage pour créer leur propre son en partant de  leur passion du funk et du hip-hop. Ce sont Clément Jourdan à la basse, Alvin Amaïzo à la guitare, Dorris Biayenda à la batterie, Jordan Soivin au trombone, Julien Anglade au chant et aux claviers.
Ils ont un son de groupe qui fait plaisir à entendre. Julien Anglade est à la charnière du funk, de la soul, du gospel et de Sting, dont il a hérité du timbre de velours et du charme, avec un excellent groove ; écouter par exemple « Rain ». Les Brothers ont su s’accaparer avec maestria des courants actuels, par exemple le Hip-Hop complètement renouvelé dans « Picture Perfect », ou le jazz avec « Far Into The Jungle’s Depth » où domine un beau solo de sax.
Les cuivres des invités, les chanteurs du chœur, tout ce beau monde se lance en background façon big band sur des tenues à l’unisson. Effets garantis, avec une rythmique défonce.
KIMYA ENSEMBLE – BETWEEN MIST AND SKY
(Urborigène Records 005 – Inouïe Distribution – 7 titres)
Amir Amiri (santour) et Olivier Marin (alto et viole d’amour) viennent de la scène montréalaise. A Paris ils fondent le groupe  Kimya en accueillant Roméo Monteiro (perçus indiennes) et Andrew Briggs (violoncelle). Ce quatuor de chambre mêle musiques classique et contemporaine européenne, du Moyen-Orient et de l’Inde. La pochette nous indique que Kimya signifie alchimie en Arabe. Reste à savoir si ces musiciens réussissent l’alliage des musiques pour obtenir de l’or ? Rien n’est moins sûr.  Entre « La brume et le ciel » je reste dans la brume.
Certes ce sont d’excellents musiciens, munis d’une technique sans failles et d’une culture musicale sans reproches. Mais je préfère l’original aux triturations Musiques du monde. Je ne suis pas compétent pour juger du rapport aux musiques indiennes, bien que je les aime beaucoup, ici ça manque de vie, c’est très, trop, appliqué. Seule l’interprétation de « Les folies d’Espagne » de Marin Marais, et « Habib » (parce que j’adore le santour) me titillent l’oreille.

Serge Baudot

 

La Seyne sur Mer – Casino Joa : Les Rockers ont du cœur

5

A l’origine, les Rockeurs ont du cœur est un festival musical qui a lieu chaque année à Nantes depuis 1988 à l’initiative de groupe Elmer Food Beat. Sous l’impulsion de leur guide, Manou, ils décidèrent de réunir dans une même soirée d’autres adeptes de leur adoration « rock’n roll » pour permettre à des enfants, dont l’adresse a été égarée par le Père Noël, d’avoir quelques cadeaux en fin d’année…. « Les Rockeurs ont du cœur » étaient nés ! Ce sont quelques 2000 jouets neufs qui sont récoltés chaque année à Nantes et redistribués !
Ce festival a ensuite été décliné en région dans d’autres formats. Depuis sept ans, l’association les Rockeurs ont du Coeur dans le Var font vivre cet événement avec une équipe de plus de 40  bénévoles solidaires pour une belle cause et passionnés.

Plein son sur la 7éme édition des Rockeurs ont du Cœur :
Un concert solidaire organisé le samedi 26 novembre à la Joa de la Seyne, destiné à récolter des jouets neufs pour les enfants, à l’approche de Noël !
Le principe de cette nouvelle édition comme chaque année est assez simple : pour assister au concert, il suffit de ramener un jouet neuf. A l’occasion de cette future manifestation caritative, le président des Rockeurs ont du Cœur Var, Martial Feniou, et son équipe organisent une conférence de presse le mardi 15 novembre au casino la Joa de la Seyne pour lever le rideau sous la programmation et échanger sur les coulisses d’un concert qui se veut avant tout caritatif et rockn’roll !
Le rendez-vous est officiellement lancé ! Le samedi 26 novembre prochain, la 7ème édition des Rockeurs ont du Cœur va faire du bruit. Au programme, des artistes résolument rock qui feront sonner les guitares au profit d’enfants n’ayant pas la chance de voir souvent la hotte du Père Noël pleine. Depuis plus de sept années, le concept reste le même, les spectateurs doivent se munir d’un jouet neuf d’une valeur de 10 euros qui fait office de place. Une manifestation qui réunit des artistes et des bénévoles au grand cœur avec comme seul diapason celui d’offrir du plaisir et du partage aux petits comme aux grands. Un événement en partenariat avec la commune de la Seyne, le Casino Joa la Seyne, et de nombreuses entreprises locales.

2 1

Gaelle Buswell : elle est une chanteuse française, auteure et compositrice d’Alfortville. Son style musical s’inspire du blues, de la folk et du rock des années 70. Finaliste à l’European blues union au Danemark en avril 2017, elle a été révélation française à Cognac Blues Passions, et prix national France Blues en 2016 et elle a reçu en 2015 le Prix coup de cœur de Cahors Blues Festival et Le prix All That Jazz en 2015. Son dernier clip « Freedom Tonight » a reçu le 1er prix du meilleur clip à l’Azalea Film Fest d’Alabama aux Etats-Unis en avril 2018.
Will Barber, son visage vous dit peut être quelque chose ? Il a participé récemment à l’émission The Voice. Son univers particulier est tourné vers la country, le blues. Depuis cette expérience, Will Barber enchaîne les concerts en France et en Europe, toujours dans sa salopette, guitare Weissenborn à la main. C’est Ben Harper qui lui a fait découvrir cet instrument , un musicien dont Will Barber s’inspire.
Mireil m’a tuer  est un groupe de rock varois déjanté qui chante dans la langue de molière  !C’est comme si Mireille Mathieu avait rencontré les Clash, si Demis Roussos avait chanté avec Green Day, si Nana Mouskouri avait flirté avec Marilyn Manson ! C’est un show plein de dérision mais aussi de poésie et de textes en français soutenus par une musique rock’n roll.

3 4

Samedi 26 novembre 2022, Casino Joa, la Seyne sur Mer, 340 CRS Toussaint Merle
Entrée / heure :  accès moyennant un cadeau de 10 euros  / à partir de 19h30 
Réservations sur place le jour J

Sanary – Théâtre Galli
Jean-François ZYGEL , conteur et musicien

7

Une scène noire où l’on aperçoit l’ombre d’un piano à queue.
Une salle noire où l’on entend, plus qu’on ne le voit, Jean-François Zygel qui règle, avec les techniciens du théâtre Galli, les lumières du spectacle avec minutie et exigence.
Directif mais toujours aimable et poli, il demande un soleil plus jaune, un éclairage rasant, une scène plus bleue. Il sait ce qu’il veut et veut travailler dans le silence et le noir.
Il vient me saluer, je lui rappelle notre rencontre au conservatoire de Toulon et dans la foulée, je lui demande si l’on pourra faire quelques photos.
« Tout ce que vous voudrez mais après le spectacle. On pourra même faire un numéro ensemble, si vous le voulez ! »
J’acquiesce… pour les photos, après, pour le numéro, on verra une autre fois !
Françoise Gnéri, belle musicienne sanaryenne et présidente du collectif « Fractales » grâce à qui notre artiste est là, est aux petits soins et le mène à la baguette, ce qui le fait rire.
Voici trois jours qu’il a débarqué à Sanary pour préparer ce concert, certes improvisé, comme il le fait toujours, mais celui-ci sera un hymne à Sanary et il a voulu s’imprégner de la ville pour adapter ses improvisations.

3 4

Ce qu’il fera en évoquant musicalement les éléments, la mer, les vagues, le vent, les pointus dont le maire, Daniel Alsters, lui a fait connaître l’histoire, les fonds marins, la tour et ses marches qui ressemblent à la gamme musicale au fur et à mesure qu’on les monte, le chanoine Galli, qui fut comédien avant d’être prêtre et grâce à qui on a cette belle salle, qui aurait eu 100 ans cette année, qui porte les trois prénoms de ses oncles et qui sont nés tous les deux le même jour… à quelques années près !  Michel Pacha, le fameux manège qui est sur la place depuis la première fois qu’il est venu à Sanary, les intellectuels allemands qui sont venus se réfugier à Sanary durant la guerre, le musée océanographique Frédéric Dumas, le chemin de croix, le jardin des oliviers… Bref, c’est une plongée dans la ville qui va l’inspirer tout au long de ce concert où il mêle habilement l’Histoire et les histoires de la cité, avec humour et volubilité, avec des apartés, des parenthèses (« Vous avez cinq minutes ? » demande-t-il à la salle) et dont vont naître sous ses doigts des musiques dont seul le public de ce soir se souviendra.
Une imagination musicale débordante, une érudition sans failles… Le spectacle fut magnifique, original, passionnant, malgré une bronchite qui le tient depuis une semaine et une toux qu’il mêlera aux applaudissements pour que ça ne s’entende pas !

5 6
Avec le Chanoine Galli et avec Françoise Gnéri !

« Le pouvoir de l’improvisation ? – nous avoue-t-il – c’est que l’on n’a jamais de trou de mémoire et que s’il y a une fausse note on peut dire qu’on l’a fait exprès ! »
Il n’y eut pas de fausse note… sinon l’orage qui surprit tout le monde à la sortie.
Mais malgré cela et sa bronchite, durant une heure il signa programmes, CD*, DVD, avec des marqueurs de toutes les couleurs et en discutant avec chaque personne avec une gentillesse extrême.
Au XVIIIème siècle, on l’aurait certainement appelé « un honnête homme » !

8 10

Jacques Brachet
* Son dernier CD « L’alchimiste », dans une magnifique pochette, réunit des chansons comme « Mistral gagnant », « Y a d’la joie », « Lucie », « Ne me quitte pas », « Amsterdam » « Jacques a dit », façon classique, contrairement à nombre de morceaux classiques qui sont devenus des chansons.

Vladimir COSMA l’as des as de la musique !

1

Vladimir Cosma est né le 13 avril 1940 à Bucarest.
Hasard des événements : ses parents ayant fui leur pays, étaient venus s’installer en France où sa mère s’est retrouvée enceinte. Normalement, il aurait donc dû naitre en France mais la mort de son grand-père les a ramenés en Roumanie… où il est né. Et d’où ils n’ont pu ressortir.
Il lui faudra attendre 22 ans pour se retrouver à Paris. Mais déjà, dans son pays, à 8 ans, super doué, il était devenu violoniste soliste. Il avait de qui tirer car sa grand-mère et sa tante étaient pianistes, un de ses oncles était chef d’orchestre, son père était musicien de jazz.Il n’y a que sa mère qui, elle, était… championne de natation !
Inutile de préciser qu’il fut baigné… de musique. De toutes les musiques, du jazz au classique en passant par la musique folklorique et la variété, la musique était omniprésente. Et tout au long de sa vie, il a su mêler toutes ces musiques entendues depuis son enfance. S’il a appris le violon c’est qu’à la maison où ils vivaient il n’y avait pas de place pour un piano… A quoi ça tient !
S’il fallut que, de retour en France, il recommence à zéro, très vite il trouva sa place grâce à de grands musiciens qui l’y ont aidé, comme Jean Wiener ou Michel Legrand qui le prit sous son aile et lui fit faire les arrangements de ses musiques.

5 6

En 67 il commença à signer des musiques de films mais c’est en 68 qu’il rencontre le réalisateur Yves Robert, qui lui demande de signer la musique du film « Alexandre le bienheureux ». L’amitié et l’admiration partagée en firent qu’ils ne se quittèrent plus et qu’il signa toutes les musiques de ses films, du « Grand blond avec la chaussure noire » à « Montparnasse-Pondichery » en 94, en passant par « Salut l’artiste », « Un éléphant ça trompe énormément, « Nous irons tous au paradis », « Courage fuyons » sans oublier les magnifiques musiques que sont « La gloire de mon père » et « Le château de ma mère ».
Il eut ainsi d’autres beaux compagnonnages avec Gérard Oury (« L’as des as », «Rabbi Jacob » qui le fit connaître internationalement), Jean-Pierre Mocky pour qui il écrivit les musiques de tous ses films,  Claude Zidi, Claude Pinoteau et la fameuse « Boum », Molinaro, Francis Veber avec qui ça ne fut pas de tout repos, Beneix et l’admirable « Diva »… Bref, son talent fit que nombre de réalisateurs et producteurs firent appel à lui…
Aimant toutes les musiques (C’est une incroyable mémoire musicale), il côtoya et travailla avec le nec plus ultra des musiciens de jazz (Ivry Gitlis, Chet Backer, Claude Bolling, Stan Getz, Bill Evans, Joss Baseli, Sidney Bechet, Tont Benett, Jean-Luc Ponty, Stéphane Grapelli… A chaque film il trouva l’originalité qui faisait de ses musiques un succès. Car en plus, il connaît tous les instruments du monde entier, donnant à chaque fois une couleur à nulle autre pareille : la flûte de pan pour l’une, la guimbarde pour l’autre, le kazoo, le bandonéon, le cromorne, le banjo les pipes écossaises,  l’harmonica, le glockenspiel (faut connaître !) et nombre d’instruments, indiens, chinois, africains que le simple mortel ne connait pas, jusqu’à tous les appareils électroniques. Et même… les cigales dont il fit un instrument de musique pour les souvenirs d’enfance de Pagnol !

11 10 9

Quel que soit le style de musique demandé, il s’adapte, aux desiderata du réalisateur, Au sujet, à l’époque, il trouve toujours l’habillage haute couture du film, qui fait qu’aucune musique ne se ressemble, que ce soit dans la comédie ou le drame… et même l’érotique ! Il a même écrit un opéra autour de « Marius et Fanny » de Pagnol, interprété par Roberto Alagna et Angela Ghorghio
Il a une culture musicale à nulle autre pareille et… une mémoire d’éléphant car il nous signe aujourd’hui, non pas une musique mais un livre, une bible de 500 pages, où il nous raconte près de 70 ans de musique et de passion en disséquant toutes les musiques qu’il a écrites, le pourquoi du comment et plein d’anecdotes autour de tous ces artistes avec lesquels il a collaboré.
Il y a beaucoup de musiciens de films mais il se compte sur les doigts ceux qui ont fait une carrière aussi prolifique que Vladimir Cosma.

2 3
 Rencontre à la Ciotat avec Nicole Croisille
Rencontre à Ste Maxime avec Vincent Perrot (Photo Christian Servandier)

Le titre de ce magnifique livre qu’il signe avec passion et humour : « Mes mémoires », tout simplement, avec en sous-titre « Du rêve à Reality » (Ed Plon). « Réality » étant le titre de chanson de « La boum » que chantait et chante toujours Richard Sanderson, qui a fait le tour du monde et continue une magnifique carrière.
Je voudrais vous raconter aussi mes rencontres avec Vladimir Cosma.
Nous étions en 2005 et j’étais alors directeur artistique du Festival du premier film de la Ciotat, durant lequel, en dehors des films en compétition, nous rendions chaque année hommage à un réalisateur, un comédien, un musicien de film. Ainsi sont venus Claude Lelouch, Robert Hossein, Annie Cordy, Claude Pinoteau, Michel Jonasz, Michel Galabru et en 2005, j’invitais Vladimir Cosma qui avait dit oui à condition de venir en train car il détestait l’avion. Ça tombait bien car le train en gare de la Ciotat fut le premier film des frères Lumière.
Le mois de juin approchait lorsque sa compagne m’appela pour me dire qu’il ne viendrait pas car il était fatigué. Panique à bord, je le rappelle et il me dit : « J’ai promis, je viendrai ».
Me voilà rassuré et, le jour de son arrivée, je reçois un appel de lui et là, re-panique. Je me dis qu’il a raté le train ou simplement qu’il a changé d’avis… Je le rappelle et il me dit : « Désolé… je suis dans le train mais… j’ai oublié mon slip de bain… Pourriez-vous m’en trouver un ??? »
Promis, juré, c’est vrai !
Me voilà rassuré et lui aussi, trouvant un slip dans sa chambre. Et, vous me croirez ou pas, il a posé ses valises et est parti se baigner, l’hôtel donnant sur la plage !
Il fit ça durant les cinq jours où il fut présent. Lorsqu’on ne le trouvait pas, on allait à la plage ! Et, comme c’est un homme qui ne sait pas ce qu’est l’heure, nous avons passé notre temps à aller le chercher ! Nous déjeunions au bord de l’eau et entre deux plats, il allait plonger… Jusqu’au dernier jour où, le car attendant les invités pour les ramener au train, il se pointa juste à temps pour ne pas le manquer, car il était allé prendre un dernier bain !
Par contre, au contraire de grandes stars très exigeantes, la seule exigence de Vladimir fut… un slip !
Étant un magnifique conteur, nombre de choses qu’il raconte dans ce magnifique livre, il nous les racontait avec la joie d’un enfant qui s’amuse avec un jouet depuis des décennies. Il retrouva mon amie Nicole Croisille que j’avais aussi invitée et qui a chanté le générique de la série TV « Les cœurs brûlés », qui s’intitule « Je n’ai pas dit mon dernier mot d’amour », chanson, nous raconte-t-il dans ce livre, qui n’a pas été gardée lors de la sortie de la série mais dont Nicole a fait malgré tout un succès !
Je devais rencontrer à nouveau Vladimir le 17 juillet 2012 lors d’un concert qu’il donnait à Ste Maxime et où je le retrouvai avec Vincent Perrot qui venait de nous offrir un magnifique album sur le musicien et Richard Sanderson que Vladimir avait invité pour chanter cette chanson de « La boum » « Reality ».

7 8

Nous avons passé une brillante soirée et je suis prêt à recommencer.
Alors quel plaisir de le retrouver dans ce superbe pavé qu’il nous offre, nous contant presque au jour le jour, le parcours d’un petit roumain qui aurait pu devenir français à sa naissance, disséquant chaque film, nous en racontant la genèse, avec un certain humour slave, une façons de s’exprimer, beaucoup mieux de certains artistes français, avec aussi beaucoup d’émotion lorsqu’il parle de ses chers disparus, Jean-Pierre Mocky ou Gérard Oury.
A noter au passage que s’il est surtout connu pour ses musiques de films, il a écrit des œuvres symphoniques, des musiques de chambre, des œuvres scéniques, des œuvres pour piano et orchestre, des musique de jazz car Vladimir Cosma est un compositeur prolifique et polychrome !.
Ses deux derniers CD, dont je vous ai parlé, en dehors de nombre de compilations de musiques de films sont : « 24 caprices pour mandoline solo » et « Suite populaire et œuvres pour mandolines et accordéon ».
Sans compter que Nana Mouskouri, Nicole Croisille, Lara Fabian, Guy Marchand, Marie Laforêt, Mireille Mathieu, Herbert Léonard, sans compter Richard Sanderson, l’ont chanté avec succès.
Lire ses mémoires, c’est traverser les décennies avec ses musiques qui sont toujours dans nos têtes et c’est découvrir une œuvre immense d’un homme qui est resté d’une simplicité désarmante.

12

Jacques Brachet

Jean-François ZYGEL… Tout pour la musique !

1

Jean-François Zygel est un maelstrom musical qui va de Brel à Mozart, de Barbara à Beethoven, en passant par le jazz et toutes les musiques du monde.
Mélange familial entre la grande chanson française qu’aimait sa mère et la musique dite «classique » qu’aimait son père.
Du coup, il n’a pas eu à choisir et s’y est engouffré, le piano a fait le reste, vite assimilé, vite improvisé,
Ce musicien et compositeur en est devenu un vrai grand spécialiste reconnu, pratiquant également les ciné-concerts qui consistent, comme dans le temps des balbutiement du cinéma, d’accompagner les films muets.
Sa vie est riche d’expériences musicales car il est curieux de tout. Touche à tout de génie, il a conquis un énorme public, aidé par l’émission de France 2 «La boîte à musique», où il recevait musiciens et chanteurs de tous bords. Il a l’art de décortiquer la musique quelle qu’elle soit, il sait la transformer et l’amener au public, du plus branché au plus néophyte, toujours avec une passion infinie car en plus, il est un magnifique raconteur d’histoires et sait éveiller l’intérêt et la curiosité.
Nous le retrouverons le jeudi 17 novembre à 20h30, au Théâtre Galli de Sanary, invité par Françoise Gnéri, directrice artistique de l’association « Fractales » où il improvisera, dans un voyage insolite, une évocation musicale de Sanary

3 2

«La scène c’est la vraie vie, c’est l’essence de la vie». C’est la première phrase qu’il nous assène lors de notre rencontre.
«L’improvisation – nous confie-t-il – est souvent assimilée au jazz alors que déjà, les musiciens classiques du XVème siècle improvisaient sur leurs propres musiques. On peut improviser sur tous les genres de musiques, c’est une question de changement de vocabulaire.
N’importe quel musicien peut-il improviser ?
Non, ça s’apprend, ça… ne s’improvise pas ! Depuis 15 ans, j’ai fondé une classe d’improvisation et aujourd’hui nombre de conservatoires ont une classe d’improvisation. Car on ne peut pas faire n’importe quoi, il faut connaître le sujet, travailler sur des automatismes, connaître tous les styles de musiques. Il faut un travail préalable.  Beethoven a donné à Vienne trois concerts improvisés qui restent dans les annales. Beaucoup d’autres grands compositeurs ont fait de même. Bien sûr, on connaissait leurs œuvres mais le public était friand d’entendre quelque chose de nouveau, d’inédit.
Ça a été un peu oublié un certain temps ?
Oui, durant la moitié du XIXème siècle, ça s’est perdu. Ca n’a perduré que dans les concerts liturgiques et les églises pour les messes dont on ne connaissait jamais la longueur et où alors, il fallait improviser. Aujourd’hui, l’improvisation revient en force car la musique dite «classique» connaît une mutation forte. Le rituel est remis en question et, modestement, j’y suis un peu pour quelque chose Déjà, parler durant un concert ne s’était jamais fait et j’ai eu envie de le faire pour éclairer les spectateurs et avoir un autre rapport avec lui plutôt que d’arriver sur scène, saluer et jouer.
Musique moderne, classique… Qu’en pensez-vous ?
Ce titre de musique classique est assez récent car durant des siècles, il y avait «la» musique, «les» musiques et tout à coup il y a eu cette dénomination qui partage la musique d’hier et celle d’aujourd’hui. Pour moi, quelle qu’elle soit, c’est toujours de la musique.
Alors, comment définiriez-vous la musique d’improvisation ?
C’est la fraîcheur, la liberté, c’est l’émotion. C’est l’art de la conséquence. Souvent je n’ai pas la moindre idée de ce que je vais faire.
C’est aussi un art éphémère ! N’est-ce pas frustrant ?
C’est vrai puisqu’on improvise et qu’il n’en restera rien que des souvenirs, des émotions mais c’est ce qui en fait sa beauté un peu comme lorsque Claudel parle de l’odeur d’une fleur. C’est un moment éphémère et il n’en restera que le souvenir et l’émotion que l’on aura eus sur l’instant.

 4

Et puis, aujourd’hui, il y a l’enregistrement, si l’on veut en garder une trace.
Mais vous savez, combien de compositeurs ont écrit des partitions qui sont aujourd’hui oubliées ?
Le problème de l’éphémère, moi je l’ai totalement intégré. On joue, c’est bien, moins bien, c’est fait, ça ne sera plus. C’est un instant, un moment et là, on ne peut pas jeter la partition si l’on n’est pas content !
Mais c’est le plaisir de la création en direct qui offre au public la garantie d’un œuvre unique. C’est ce que j’appelle l’art de la scène.
Et le ciné-concert ?
C’est une rencontre avec une œuvre cinématographique. C’est un art du spectacle à part entière. Au début du muet, il y avait déjà un pianiste qui improvisait et le pianiste était différent dans chaque cinéma. Donc à chaque fois c’était une autre musique. C’est un spectacle ouvert vers l’avenir et c’est un vrai travail de création et j’aime ça. J’ai improvisé sur quelque trois cents films et c’est toujours un plaisir renouvelé. «Le fantôme de l’Opéra» j’ai dû l’illustrer une vingtaine de fois avec un plaisir chaque fois renouvelé ».sur scène, saluer et jouer.
Un plaisir que nous allons partagr avec cet authentique «Honnête Homme» qui nous a éblouis par ses connaissances, son talent de conteur et de musicien et, après plus d’une heure et demi, on en redemandait encore et on avait du mal à le quitter tant il est fascinant.
Ne le ratez pas !

Jacques Brachet