Archives de catégorie : Ecriture

Notes de lectures


Christos MARKOGIANNAKIS : Omero, le fils caché (Ed Plon – 443 pages)
Christos Markogiannakis est un écrivain grec installé à Paris, spécialiste de romans policiers.
Il y a dix ans, il rencontre à Paris un certain Omero Lengirini. Ils deviennent amis puis un jour Omero disparaît. Et voilà que Christos est convoqué chez un notaire qui lui remet  une grande boîte de la part d’Omero qui vient de disparaître, cette fois définitivement.
Parmi des objets, un manuscrit : l’histoire de la vie de Romero qui n’est autre que le fils caché de Maria Callas et d’Aristote Onassis. Il lui confie ce texte en lui disant d’en faire ce qu’il veut… Mais lorsqu’on est écrivain, de polars qui plus est, Christos va découvrir une histoire extraordinaire digne d’un thriller.
Enfant joyeux mais solitaire, éloigné de tout, Omerol vivra avec un couple qu’il croit être ses parents, avec, au-dessus de lui, un parrain fantôme qui le comble de cadeaux. A la mort de celle qu’il croit sa mère, il apprend qui sont ses vrais parents avec un acte de naissance stipulant qu’il était… mort à la naissance, ce qu’Onassis avait toujours fait croire à Maria Callas.
A partir de là, il va démarrer une vraie quête d’identité, remonter à la source de sa vraie famille, essayer de rencontrer les gens qui font partie de cette famille et qui n’en savent rien ou alors, qui ont occulté et dénié cette naissance.
Ce sera une quête obsessionnelle de 40 ans, durant lesquels il va suivre les pas de tous ceux qui ont gravité autour de ses parents, ceux qui  sont toujours vivants mais qui, durant ce long chemin de croix, vont disparaître à leur tour. Il a failli rencontrer sa mère biologique, il n’a vu que qu’une fois son père biologique qu’il croyait alors être son parrain et qui l’a viré avec pertes et fracas.
Beaucoup de peine, de haine, de regrets qui, malgré l’argent que son père lui a quand même laissé et lui a permis de faire le tour du monde, a été pour lui une recherche d’identité permanente et l’a empêché de vivre.
Christos n’a eu qu’à traduire cette histoire qu’Omero écrivait en français, en italien, en grec, comme un apatride qu’il a été toute sa vie.
Une grande histoire écrite comme un thriller avec tout au long des rebondissements, des découvertes de secrets bien cachés. Un livre à la fois très palpitant et très émouvant que l’auteur a voulu faire partager aux lecteurs.
Et il a bien fait.
NB. Cette année est l’année du centenaire de la Callas.

Camille PATRICE :  la maison squelette   ( Ed Leo Scheer – 259 pages)
Premier livre de Camille Patrice, roman autobiographique dans lequel chacun peut se retrouver car l’auteure nous emmène dans un voyage intime : à 30 ans, à la mort de son père qu’elle appelle « le grand singe » elle se remémore ses souvenirs, de l’enfance à l’âge adulte, à partir des maisons dans lesquelles elle a vécu (pas moins de 12 voire 13).
C’est à travers cette introspection qu’elle s’est construite et finit par accepter la mort de ce père.
Cette recherche dans le passé est une sorte d’auto psychanalyse thérapeutique. Après un effort pour entrer dans le livre, on se laisse porter par ce texte bien raconté, littéraire, original, dans lequel sont décrits très finement des souvenirs personnels. Son parcours de vie intime est jalonné de portraits, de situations relationnelles décrites avec sincérité ou se mêlent sentiments divers (colère, joies, jalousie, rage…) et descriptions de maisons dans leur environnement particulier.
Roman d’abord déroutant car elle parle d’elle à la 3ème personne et surnomme les membres de sa famille tels « bébé sourire, bébé sœur, tante teigne, maman poupée » et attribue un qualificatif évocateur à chacune de ses maisons : « appartements des rois du silence, la cabane, la maison sale…. ».
Thème original, rythmé par la vie chaotique d’une jeune femme à la recherche d’elle- même.
Charmaine Wilkerson : Les parts oubliées ( Ed.Buchet-Chastel – 505 pages)
Le « gâteau noir » est le fil rouge de ce tentaculaire roman antillais et, surtout, celui confectionné traditionnellement aux Antilles pour le mariage d’une fille, gardé au congélateur et ressorti lors de divers anniversaires.
Ici, c’est le fil conducteur d’une longue traversée familiale sur plusieurs générations.
Benny et Beneth frère et sœur qui s’étaient un peu perdus de vue, se retrouvent dans la maison familiale après le décès de leur mère. Ils ne se sont plus vus depuis des années et vont écouter ensemble l’étrange message vocal qu’elle leur a laissé.
Va s’ensuivre un étrange puzzle avec des histoires dans l’histoire, des générations, des allers et retours dans le temps. Peu à peu des pans d’ombre s’éclaircissent et permettent aux enfants de comprendre qui ils sont, ce qu’ils sont.
Des personnages fabuleux, hors du commun, parsèment ce récit plein de problèmes, d’obstacles, mais dans un parcours plein d’amour, de rencontres, de départs.
On plonge avec plaisir dans les méandres de ce récit à tiroirs bien écrit et très vivant.

Lilia HASSAINE : Panorama (Ed. Gallimard – 235 pages)
Il s’agit ici d’un roman policier qui s’ouvre sur la piste d’une enquête banale, menée par une ex-policière qui reprend du service, partie à la recherche d’un couple et de leur fils de huit ans, disparus subitement.  Sauf que nous sommes en 2049, dans une France dystopique où l’on vit à l’ère de la transparence depuis la Revenge Week de 2029, révolution à partir de laquelle, pour se libérer du MAL, les Français doivent vivre dans des quartiers transparents, composés de maisons aux parois de verre, exposés aux regards de tous.
Comment dans ce cas trois personnes peuvent-elles disparaitre ?
C’est ce que nous suivons au travers de l’imagination de cette voisine, autrice du roman, richement documenté mais d’une lucidité terrifiante qui assure et apporte des situations hors du commun
Fort bien écrit et plein de suspense mais auquel on se laisse prendre… Ou pas…
Jonathan SIKSOU : Vivre en ville (Ed du Cerf – 208 pages)
Jonathan Siksou est journaliste et écrivain, il a reçu le prix Transfuge du meilleur essai en 2021.
Dans un monde où il est de bon ton de dénigrer la ville et d’aller s’installer à la campagne, son dernier livre redonne le sourire au pauvre citadin souvent obligé d’habiter en ville.
La ville la mieux étudiée dans ce livre est Paris, bien qu’il en cite de nombreuses autres de tous les pays du globe. C’est certain, les grandes villes ont leur lot d’inconvénients, mais il faut savoir regarder avec humour la transformation, la bétonisation de nos villes, l’excroissance indécente des centres commerciaux, les embouteillages à toute heure du jour, la foule anonyme toujours pressée dans le métro…
Alors l’auteur va nous emmener dans les musées, les jardins publics, chez les petits commerçants de quartiers comme les boucheries et les boulangeries où la boulangère fait l’admiration de l’auteur en arrivant à faire tenir dans une boîte, des éclairs, des tartes, des choux à la crème sans perdre de place, c’est du talent !
Même si Jonathan Siksou a eu la chance de parcourir le monde dans sa jeunesse, dans les plus grands palaces et de vivre aujourd’hui dans un très grand appartement parisien, il amènera régulièrement le lecteur à sourire et même à rire, car oui on peut vivre en ville et s’y plaire.

THOMAS REVERDY : Le grand secours (Ed Flammarion – 318 pages)
Comment expliquer l’explosion de colère d’une jeunesse qui, toujours en relation avec les réseaux sociaux, s’enflamme dès la réception d’une vidéo représentant un policier dans une bagarre?
Bondy, une banlieue au nord de Paris, à proximité d’un gigantesque carrefour où se croisent autoroutes et nationales.
C’est dans un lycée, qui accueille tous les jours des centaines d’élèves et de professeurs, que Thomas Reverdy retrace méthodiquement, heure après heure, une émeute sans précédent. Tout devrait se passer comme tous les jours, c’est à dire sans heurt, malheureusement une cascade de vidéos va dégénérer.
Le jeune Momo, timide poète amoureux va se transformer en délinquant, les professeurs réunis dans la salle des profs vont réagir à ce qu’ils pressentent être une émeute monumentale au fil des heures, or c’est l’heure de sortie des cours. Faut-il ouvrir les portes du lycée en grand pour libérer les lycéens enfermés dans les locaux ou au contraire les refermer bien vite et se cloisonner en attendant la libération par les forces de l’ordre ? L’auteur étudie scrupuleusement heure après heure un scénario qui pourrait un jour se présenter dans les lycées.
Le cas de Bondy est volontaire pour dénoncer le mal-être des élèves autant que des professeurs vivant dans une des banlieues les plus défavorisées de Paris.
Un livre écrit pour déranger mais aussi pour prévenir une explosion sociale qui viendrait de la jeunesse. Un danger palpable certains jours, que les autorités redoutent et le lecteur espère que tout est déjà programmé au ministère de l’intérieur pour retourner au calme une masse de jeunes prêts à tout saccage, pillage, jusqu’au meurtre si tout n’est pas maitrisé à temps.
Cri d’alarme et appel au secours de Thomas Reverdy… Qui l’entendra ?
Marie LACIRE : Atlantique (Ed Plon – 170pages)
C’est le portrait d’une femme  Anne, qui a écrit son premier roman, dont l’éditeur la presse d’en faire un second assez vite, mais l’angoisse devant la page blanche la saisit  et cela dure  …
Son compagnon, Phil, lui propose alors d’aller dans le Médoc, non loin de l’Atlantique, passer quelques jours dans la maison de son enfance.
Le jardin n’est pas entretenu, la maison n’a pas été habitée depuis trente ans, les meubles sont d’un autre âge, la vaisselle en trop grand nombre encombre les pièces et le village est tout petit.
Lui, est heureux et ne veut rien ranger et surtout ne rien jeter
Elle, c’est le contraire. Elle voudrait ranger et trier. Elle veut créer son propre présent. Le couple souffre et va ainsi passer trois étés..
Le ton est vif, peu de dialogues, mais des chapitres courts et même très courts, ce qui est original et augmente l’intérêt du lecteur.
Se présente  alors, dans ce village si petit, un deuxième écrivain. Il est célèbre et a déjà écrit  une vingtaine de livres.
Va-t-il lui faire douter de son talent ? Elle pense que lui, a choisi sa vie et qu’elle, subit la sienne. 
Mais est –on vraiment libre de ses choix ?
La fin du livre nous éclairera.



Voyage à Venise avec Macha MERIL


Mélusine Marvel est une star française qui a ses coups de cœur, ses coups de gueule, ses caprices mais qui sait que, vieillissante, il va falloir qu’elle se batte avec la profession, avec la caméra pour rester ce qu’elle est. Elle est au tournant de sa carrière et de sa vie et elle sait que ce rôle de Desdémone dans ce film italien, adaptation d’Othello, sera sa gloire ou sa perte.
On va donc la suivre dans les dédales de sa carrière, de ses doutes,  de ses joies, de ses crises de nerfs, la boisson, le sexe, auxquels elle se raccroche pour pouvoir dire qu’elle existe encore.
Très beau portrait de femme par une femme qui connait tous ces sentiments dans ce métier qui ne fait pas de cadeau.
Le roman s’intitule « La grille du palazzetto » (Ed l’Archipel
L’auteure est Macha Méril, lumineuse comédienne, auteure pleine de finesse et d’humour, même si dans ce roman, elle se consacre plus à l’état d’âme d’une comédienne qui sent que sa jeunesse fout le camp.
En plus de ce portrait, elle nous fait entrer dans les coulisses d’un tournage, ce qu’elle connaît bien, et nous guide dans une Venise belle et mystérieuse qu’elle a l’air de connaître aussi.

Avec Macha, c’est une histoire d’amitié qui ne date pas d’hier, puisque voici des décennies qu’on se rencontre, qu’on se parle, qu’on s’écrit, qu’on se téléphone et tout est prétexte à ce qu’on se retrouve. Du coup, ce roman est une aubaine.
Macha, tu nous parles de choses que tu connais par cœur : , les comédiens, le tournage d’un vu de l’intérieur et Venise… vu de l’extérieur !
(Elle rit) Il n’y avait personne que moi pour parler de tout cela : le métier d’actrice, mais aussi l’ambiance d’un tournage et de tous les métiers que le spectateur ne voit jamais : les techniciens, producteurs, agents et autres métiers de l’ombre. Mais aussi l’inquiétude d’un tournage, le questionnement de chacun, l’adrénaline, l’ambiance d’un tournage. Tout le monde est plus ou moins inquiet, il y a des affinités, des problèmes et la fin d’un tournage qui est toujours traumatique : On se quitte après être restés ensemble, que va-t-on faire après…
Et surtout cet état de star que Mélusine vit quotidiennement !
Oui, Mélusine est à un virage. Elle est une star mais une star vieillissante et elle a peur de ce qui va se passer, comment elle va passer à l’écran et pour combien de temps encore.
Ce sont des choses que tu as connues en fréquentant ces actrices.
Oui et d’abord, pourquoi devient-on star ? Comment le vit-on ? Beaucoup de stars ont mal tourné comme Marylin Monroe, Romy Schneider, Natalie Wood et même des hommes comme Patrick Dewaere. Beaucoup ont sombré dans l’alcool, la drogue car être star est un poids sur les épaules et si l’on ne vit que par et pour ça, ça peut finir mal.
Ça aurait pu t’arriver ?
Comme à tout artiste mais il se trouve que j’ai tout fait pour être l’antistar. Je suis née avec la Nouvelle Vague où déjà tout changeait et je n’ai jamais voulu m’enfermer dans ce style de vie. J’ai toujours voulu être libre de mes choix et, quittant un plateau, j’ai toujours eu une vie à côté, je me suis intéressé à la culture, à la lecture, à la cuisine, au jardin, j’ai écrit des livres, j’ai fait du théâtre et tout cela, même si ça ne m’a pas toujours enrichie, a fait que j’ai eu une autre vie que celle d’actrice. Et plus ça va, plus j’ai envie de ne faire que des choses que j’aime. Grâce à Michel Legrand, je suis à l’abri du besoin, même si je n’ai pas de gros besoins et je peux choisir ce que j’ai envie de faire et de tourner ! Je me suis toujours surprotégée et j’ai tout fait pour brouiller les cartes ; je peux dire non quand je le veux. Je n’ai pas à enquiller des films si ça ne m’intéresse pas.

Être star, c’est quoi au fait ?
Ce peut être quelque chose de magique au départ. Pourquoi une actrice est choisie plus qu’une autre ? Pas seulement parce qu’elle est belle car toutes ont un défaut particulier mais qui justement peut être photogénique. Mais il ne faut pas que ça et toutes les stars l’ont compris.  Après, elles sont souvent brut de décoffrage et il faut qu’elles continuent à être ce qu’elles sont et elles vivent dans la peur de ne pas être autre chose que ce qu’elles sont devenues et surtout de le rester. C’est pour cela que souvent, elles sombrent dans l’alcool, la drogue. Regardez Martine Carol, qui m’a inspirée pour Mélusine, elle était droguée, nymphomane, alcoolique. J’ai rencontré Louis Grospierre qui la suivait vingt-quatre heures sur vingt-quatre et pour lui c’était l’enfer. La notoriété abîme les gens et certains ne tiennent pas le coup quand ils la perdent.
C’est toujours pareil aujourd’hui ?
Beaucoup moins car être star est aussi garder de mystère et aujourd’hui les artistes veulent être des femmes comme les autres, amener leurs enfants à l’école, étaler leur vie privée sur les réseaux sociaux. A part Catherine Deneuve ou Isabelle Adjani, qui tiennent le coup, qui se préservent
Il y a aussi dans ce roman de très belles descriptions de Venise que tu connais bien…

Oui, je suis souvent allée à la Biennale et surtout, j’ai un ami qui vit à Venise, qui me reçoit chez lui… Et à qui je fais la cuisine, chose que j’aime faire, tu le sais. Bien sûr on connaît la place Saint-Marc mais ce n’est pas que cela,  et les balades en bateau, Venise. D’ailleurs, les habitants quittent souvent la ville et n’en connaissent pas tout.
Quand on vit dans une ville on ne la connait pas en fait. Moi, je suis partie visiter les ruelles, les petites places mon ami m’a amenée dans des lieux mal famés où vit la pègre, les boîtes plus ou moins louches et j’ai trouvé tout cela très amusant !
Alors aujourd’hui, que devient Macha ?
Je suis toujours très occupée. En ce moment je suis sur les routes pour présenter et signer mon roman dans les salons du livre. Je serai d’ailleurs à Marseille les 24 et 25 novembre.
Je vais reprendre au théâtre Montparnasse « Une étoile » d’Isabel le Nouvel, Je viens de tourner pour France 3 le pilote d’une série « Enquête parallèle » avec Florence Pernel, où je joue sa mère, une mère un peu barrée… J’adore Florence qui est une femme adorable de gentillesse et qui a beaucoup de talent. Si le pilote marche, il y aura une suite… Et puis, j’ai un autre projet qui me tient à cœur : monter une conversation entre Catherine II  et Voltaire, d’après leurs échanges épistolaires, Catherine qui s’est insurgée lorsqu’on a guillotiné Marie-Antoinette. On le créera au festival de Grignan en juillet prochain. Et je me vois bien en Catherine… C’est mon sang bleu qui parle !

Et il y a l’œuvre de Michel Legrand !
C’est ce qui me donne le plus de travail car depuis quatre ans j’ai créé dans son manoir un festival consacré aux compositeurs de musiques de film qui ont de plus en plus de problèmes pour imposer leur musique, les droits d’auteurs coûtant paraît-il de plus en plus chers, beaucoup de producteurs veulent s’en passer.
Du coup, ce festival est un concours avec un jury et un président. J’ai eu Jacques Perrin, Claude Lelouch, Jean-Jacques Annaud pour les trois premiers. On a rendu hommage à de grands compositeurs comme Nicola Piovani, Gabriel Yared. C’est un travail énorme, il faut trouver de l’argent, des artistes, des musiciens. C’est une grosse organisation qui me prend beaucoup de temps.
A propos de Michel, la Poste va créer le 24 février 2024 un timbre pour ce qui aurait dû être ses 92 ans. Il y a plusieurs projets très excitants et il va falloir choisir.
Prochain roman ?
Laisse-moi respirer ! Mais écrire est toujours pour moi un jeu littéraire, un challenge. J’y ai pris goût et je vais continuer. »

Propos recueillis par Jacques Brachet

Notes de lectures

Valérie PINEAU VALENCIENNE : Belles à tout prix (Ed Albin Michel – 352 pages)
Deux frères Pablo et Franscisco gèrent le Spa de luxe « Alphonso» en Andalousie. Cet établissement est spécialisé dans les cures d’amaigrissement, les suites de dépression, les soins de rajeunissement, en faveur d’une clientèle riche, avec des techniques avant-gardistes assurées par un personnel hautement qualifié et rémunéré.
En 2020 deux françaises s’offrent un séjour pour prendre soin d’elles et oublier leurs difficultés personnelles .
,Marie Claude, 52 ans, énarque, séparée de son mari qui lui a préféré une jeune femme et Isabelle, décoratrice d’intérieur, veuve inconsolable, vont se lier d’amitié, dans ce cadre à priori idyllique.
Pourtant à la suite de plusieurs morts suspectes dans la communauté du Spa, les deux femmes motivées s’improvisent détectives et vont mener leur propre enquête.
Le roman mêle humour, suspens, relations amoureuses.
Le  décor de Spa luxueux en Andalousie, les résidents internationaux, la personnalité des héroïnes font de cette comédie policière une lecture de détente.

David GARCIA : Quête (Ed David Garcia C. Saint Jean – 584 pages)
Toulousain d’origine espagnole, l’auteur présente son premier roman.
Dans le style des livres de Dan Brown, cet ouvrage entraine le lecteur à travers le monde dans une longue narration remplie de péripéties et d’inventions historiques et ésotériques. Le héros est Philip Lewis, un étudiant en histoire à l’université de Columbia à New York, qui va, bien malgré lui ;se trouver face à deux sociétés secrètes à la recherche d’une arme dévastatrice composée de crânes de cristal.
Accompagnée de son amie Virginie, Philip Lewis devra utiliser sa force dé déduction et toutes les connaissances qu’il a engrangées lors de ses études et pendant les cours du Professeur Abernathy.
La férocité de leurs adversaires ne les ménagera pas.
C’est un roman qui séduira les amateurs de ce genre de fiction car tout est fait pour tenir le lecteur en haleine.

Gilles PARIS : « Les 7 vies de Mlle Belle Kaplan » (Ed Plon – 217 pages)
Curieux cheminement que celui de la star internationale Belle Kaplan.
Avant d’être star, elle est née à Montréal mais abandonnée à l’orphelinat avec son frère Ben. Une religieuse la prénomme Grâce. Enfant difficile et colérique, elle sera, avec son frère, adoptée par le couple Matuchet, sorte de Thénardier, lui homme insensible et violent, elle timorée et silencieuse, devant les violences qu’il fait endurer à Ben. Un accident de voiture va sauver les enfants de ce couple maltraitant. Ils vont errer, vagabonder, chaparder jusqu’à ce qu’ils rencontrent Pierre. Elle se fait alors prénommer Paradis et apprend avec lui à voler dans la rue. Les  deux ados tombent amoureux de Pierre qui a un penchant pour Paradis, ce que ne supportera pas Ben qui s’en ira. Elle deviendra Jade avant de devenir Talia, lorsqu’elle rencontre Madeleine, mère maquerelle, qui en fait une escort girl, belle, raffinée,  une guerrière qui n’a peur de rien, dont la devise est « Apprendre à écouter, à satisfaire et à se taire ». Après de multiples aventures, elle rencontrera un magnat du cinéma qui, sous le nom de Belle Kaplan, en fera uns star mondiale.
A chaque étape, elle va prendre un pseudo, une nouvelle identité, changeant de physique telle un Frégoli. Refusant toute rencontre, toute interview, toute photo, elle reste un mystère pour tous. Jusqu’au jour où une première lettre anonyme arrive lui disant connaître toute son histoire. Et là, sa vie va s’emballer.
Une fois de plus, Gilles Paris nous entraîne dans une aventure romanesque, teintée de thriller, sur les aléas et la quête d’une vie qui oblige l’héroïne à errer entre ses diverses personnalités, à la fois ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre.
Une histoire à la fois captivante et poignante dont on a du mal à se détacher et dont on espère une fin heureuse pour notre Belle.
Le sera-t-elle ?

André PEYREGNE : Petites histoires de la grande musique (Ed Desclée de Brouwer – 298 pages)
Ce n’est pas un roman. Ce n’est pas une bio…
Comme son nom l’indique, ce sont des histoires. Des histoires pas comme les autres puisqu’elles concernent les grands compositeurs de la musique dite « classique ».
Livre passionnant s’il en est où les amateurs de cette musique vont être comblés.
Car, outre qu’André Peyrègne, grand chef d’orchestre reconnu, musicologue, conférencier, il nous raconte comment sont nés les chefs d’œuvre qui ont fait, et continuent de faire, le tour du monde, comme « Le boléro » de Ravel, L’Ave Maria de Schubert ou celui de Gounod « La flûte enchantée » ou « Don Giovanni » de Mozart, « La Modau » de Smetana, « Le barbier de Seville » de Rossini, « La Symphonie fantastique » de Berlioz, Turandot » de Puccini… Bref, des dizaines de musiques célèbres qui traversent le temps et les pays.
Mais à côté de ce magnifique travail de recherche sur l’Histoire de la Musique, André Peyrègne y ajoute avec humour des anecdotes qu’on appellerait aujourd’hui des « scoops people ».
Ainsi, savez-vous que le dernier mot de Gustav Malher sur son lit de mort fut « Mozart » ? Que Lully est mort d’un coup de canne qu’il s’est donné en dirigeant l’orchestre et lui a causé la gangrène ?
Et Purcell qui est mort de froid parce que, revenant d’une beuverie, sa femme ne lui a pas ouvert la porte de leur maison. Que le cadavre de Paganini fut volé…
Rassurez-vous, il n’y a pas que des morts, il y a l’histoire de cet extraordinaire voyage du violon de Stadivarius, à travers  plusieurs collectionneurs. Bach qui fit de la prison pour rupture de contrat. Ce dernier, tout comme Haendel, qui devinrent aveugles à cause d’un même ophtalmo qui procéda à l’opération de la cataracte.
Savez-vous que Casanova participa à la composition de « Don Juan » de Mozart ? Mozart qui créa sa dernière œuvre pour la mort de la femme d’un client… Mais qui n’eut pas le temps de terminer ce requiem et du coup celui-ci servit à son enterrement !
Pom pom pom pm… Ça vous dit quelque chose bien sûr : ce sont les quatre premières notes de la 5ème symphonie de Beethoven, qui ont servi depuis, maintes fois au générique d’émissions dont le fameux « Français parlent au Français » de de Gaulle.
Il y eut aussi des ennemis notoires comme Schumann et Brahms qui se disputèrent Clara, ou encore Strauss père qui était jaloux du succès de son fils…
Ainsi entre-t-on dans l’intimité de ces grands musiciens qui n’en n’étaient pas moins des hommes pour autant !
Une dernière pour la route : alors que l’on préfère Charles Garnier à Gustave Eiffel pour la construction de l’Opéra de Paris, lors de son inauguration son créateur a failli ne pas y assister… car on l’avait « oublié » sur la liste des invités !
Ce livre est un véritable bonheur pour qui aime la grande musique et ses grands compositeurs

Marc JOLIVET 
« Je ne suis qu’un vieux clown
qui fait les choses à son niveau ! »

On connaît ce trublion plein d’énergie qu’est Marc Jolivet. Un trublion génial car il n’est jamais là où on pense le trouver, commençant en duo humoristique avec son frère Pierre, il fera plus tard cavalier seul mais on le retrouve comédien au théâtre, au cinéma, où il est aussi scénariste, réalisateur et retrouver avec son frère dans un des films de celui-ci. Mais il est aussi écrivain puisqu’il a huit livres à son actif, son neuvième venant de sortir. Il a été brièvement dans la politique, puisqu’il s’est présenté aux élections municipales de 86 comme candidat écologiste !
Il faut dire qu’il a de qui tirer puisqu’il est le fils de la comédienne Arlette Thomas et du comédien Jacques Jolivet.
Mais là encore, avec son sixième livre « Tueur hors-série » (Ed Plon), il est là où on ne l’entend pas : un thriller sanglant retraçant l’histoire d’un petit garçon rieur, Paul, qui, entre un père incolore et une mère étouffante, suite à une varicelle, va se retrouver criblé de pustules. Là il ne rit plus, devient « le grêlé » et ce qu’on ne sait pas, c’est qu’il possède les gênes MAOH qui en fait un homme violent et CDH13 qui lui occasionne un trouble du contrôle de l’impulsivité. Les deux mêlés sont une bombe qui va très vite exploser et en fera un tueur en série recherché dans toute la France mais jamais pris.
Et l’on va suivre, à la fois avec horreur et curiosité, le cheminement de ce monstre, jusqu’au jour où… On n’en dira pas plus mais l’histoire est faite de coups de théâtre, de violence mais aussi de moments de pauses qui font que, malgré ses actes macabres, on s’attache peu à peu à ce Paul… Et on a envie de savoir le mot de la fin !
Un livre qui nous tient en haleine, où, si l’on ne reconnaît pas le Jolivet rieur et plein de drôlerie, on y retrouve des réminiscences d’humour, de jeux de mots et de petites histoires dignes d’un one man show. Et avec sa compagne, Julie Guinard, il nous offre un roman haletant qu’ils ont écrit à quatre mains.
On devait se rencontrer à Aix-en-Provence mais rendez-vous manqué et voilà qu’en l’appelant au téléphone il dit être à Hyères, avec « son amoureuse » comme il l’appelle, au bord de l’eau… Où nous les rejoignons au Robinson à l’Almanarre. Et où nous rejoindront quelque amis dont le chef d’orchestre Alain Chiva, chef de l’Harmonie Hyèroise et Fabrice Drouelle journaliste sur France Inter où il anime l’émission « Affaires sensibles » avec qui on va trinquer et grignoter !

Signature à la librairie Goulard d’Aix-en-Provence
Avec son « amoureuse » Julie Guinard

Marc, ton personnage est horrible et pourtant, au fil des pages, on s’y attache !
Mais c’est exactement ce que voulais faire. Je voulais qu’on finisse par l’aimer.
Julie : Et moi, je ne voulais pas ! Mais il a eu gain de cause.
Quand on te connait, tu es drôle, sympa, plein d’humour et rigolard. Comment peut-on écrire un roman aussi noir ?
Je suis venu sur terre pour réaliser le maximum de mes désirs. L’un d’eux était d’écrire un roman policier… Et je l’ai fait à 72 ans ! Je me suis tourné vers mon amoureuse qui est auteure et je lui ai demandé de l’écrire avec moi.
Pendant un an, j’ai cherché un sujet. Je suis en admiration devant les films des frères Cohen et j’ai remarqué qu’avec le nombre de séries télé, tout avait été fait. Julie me disais que, tout étant fait, je n’y arriverais pas. J’ai alors décidé de tout arrêter et je suis parti sur un pamphlet sur la gauche « Ma gauche à moi » Et à ce moment là – on était au début septembre – j’allume ma télé et je tombe sur un reportage : « Un ancien policier, tueur en série, vient d’être découvert trente ans après ».Je dis à Julie : « Ca y est, j’ai trouvé mon sujet ! ». Je le dépose à la SACD et décide de romancer cette histoire.
Il y a trois temps dans ton roman : l’histoire que toi tu racontes, celle que « Le grêlé » alias Paul raconte, et les cauchemars qu’il en fait. Comment tout s’est-il imbriqué ?
J’ai tout de suite pensé à sa rédemption, même si Julie ne voulait pas. Il y avait donc son cheminement psychologique. J’ai bien sûr changé son nom, vu des amis avocats pour savoir ce que je pouvais écrire et j’ai aussi pensé à sa famille et à sa souffrance. Le vrai policier était pédophile. Je n’ai pas voulu en faire un pédophile mais un meurtrier qui opère sur impulsion.
Je ne me suis intéressé à sa vie que lorsqu’il devient policier. Une policière va, durant des mois, s’acharner à le retrouver sans jamais penser qu’il était des leurs. Mais l’arrivée de l’ADN va changer la donne.
A noter, et c’est important, que Nous avons décidé de partager les droits d’auteur à 50% Avec l’association « France Victimes »
Comment travaille-t-on à deux ?
Julie : Marc a beaucoup d’idées, ça bouillonne dans sa tête et lorsqu’il les déverse, il faut trier ! Mon métier de traductrice c’est quand même les mots et la transcription de ceux des autres. On est en fait très compatible.
Marc : C’est notre quatrième roman qu’on écrit ensemble !
Julie : Du coup, je relis, je réécris certaines choses, je lui dis quelquefois des choses pas très gentilles !
Marc : Lorsque je lui apporte une scène, elle peut me lancer : « C’est du niveau de CM2 » ! Comme j’ai confiance, comme à l’école, je repars travailler !
Julie : Ce qui est bien c’est qu’il n’a jamais peur de se remettre en question !
Marc : C’est ça un travail d’équipe !
Dans ton livre, on retrouve ton humour car tu ajoutes quelques blagues mais surtout on peut imaginer que ce roman fasse l’objet d’un film.
France Info m’a dit que c’était digne des frères Cohen ! Ça ne pouvait pas me faire plus plaisir. Mais tu ne crois pas si bien dire puisque ça va d’abord devenir une pièce de théâtre et c’est Fabrice Drouelle qui sera le narrateur. On cherche les comédiens. Ce pourrait être Éric Métayer pour le rôle du grêlé. Pour le film, ce sera plus long et si l’on ne trouve pas de producteur… Je le produirai moi-même !

Avec Alain Chiva & Fabrice Drouelle

En fait, tu sais tout faire ! As-tu des projets avec Pierre, ton frère ?
Aucun. Je ne sais pas pourquoi il ne veut pas m’aider pour le film. Peut-être a-t-il peur que je fasse une m…e ou alors que je le surpasse ! Il faudra lui demander. C’est son problème.
Et le one man show ?
Alors là, note : Le 23 octobre je serai au Casino d’Hyères, le maire me prête la salle, je serai accompagné par l’orchestre d’Alain Chiva et des choristes. Avec aussi quelques invités surprise. La soirée sera dédiée à l’association Doc4Ukraine. Auparavant je serai le 27 septembre à Vitrolles, et le 11 octobre au Mucem de Marseille et là, j’ai convié Poutine à vouloir se mettre à genoux et à demander pardon à Zelinsky… Et grâce à moi la guerre s’arrêtera ! On peut rêver !!!
Autre corde à ton arc : tu es écolo à fond !
Aujourd’hui je ne veux plus qu’on me dise ça car l’écologie c’est Sandrine Rousseau, les fascistes verts, le futur quarteron stalinien. Je suis amoureux de ma planète depuis toujours et l’Europe Ecologiste les verts c’est le drame absolu. Je crois qu’ils sont responsables d’une partie du drame de la planète La preuve c’est qu’à chaque élection le meilleur candidat a été Noël Mamère avec… 5% des voix ! C’est bien la preuve qu’ils sont nuls et inadaptés.*
Mais il n’empêche que je suis le président d’honneur d’Ecologie sans frontières, ambassadeur de la nouvelle association de Nicolas Hulot et de mon association Rire pour la planète.
C’est ce qui t’a amené à te présenter aux législatives en 86 ?
Je suis allé me présenter chez les verts sans prendre la carte. Face à Jacques Chirac dans le cinquième arrondissement. Au premier tour j’ai fait le meilleur score mais Tibéri a annoncé « Marc Jolivet, non élu ». J’ai fait un procès que j’ai gagné… Six ans après ! Ainsi s’est terminée ma carrière politique !
Moi qui espérais devenir président des Etats-Unis… C’est raté !
En fait, je ne suis qu’un vieux clown, non pas pathétique mais qui fait les choses à son niveau.
Mais la planète mérite mieux que Médine… Tu ne crois pas ?

Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Patrick Carpentier
*Avec l’autorisation de l’artiste

Romain VIDAL : Un grand cri d’amour


J’ai connu Christophe, Hervé Vilar et Michèle Torr au tout début de leur carrière, tous trois étant partis sur une tournée ensemble, l’année de leur éclosion, première tournée que je suivais en tant que journaliste. J’avais connu Michèle l’année d’avant en tournée avec Claude François et les deux autres l’année d’après, tout trois bondissant au sommet du hit-parade. Pour l’anecdote, Hervé avait alors une secrétaire-habilleuse nommée Nicole Grisoni, qui changea de nom quelques temps plus tard pour s’appeler… Nicoletta. Mais ça, c’est une autre histoire !
On sait comment s’est terminée la tournée, Michèle attendant un bébé de Christophe, Romain, qu’alors il n’a pas reconnu.
Chacun a continué sa vie d’artistes et je les ai rencontrés souvent. Michèle et Hervé sont devenus des amis. Avec Christophe c’était plus laborieux car, taciturne et pudique, les interviewes qu’il ne me refusait pas, étaient toujours très courtes car il détestait ça. Mais on s’est toujours très amicalement croisés, comme avec Hervé, plus avec Michèle qui habitait souvent dans le sud, avant qu’elle n’y vive définitivement. Je la rencontrais plus souvent, la suivant de maison en maison. Je vis donc grandir Romain que Jean-Sauveur Vidal, le mari de Michèle, avait adopté et Émilie qui arriva un peu plus tard.
Mais jamais on ne parla de cette paternité, ni d’un côté, ni de l’autre. C’était leur vie privée et j’ai toujours occulté le sujet. J’ai toujours respecté ce coin de vie privée… Même si certains journaux ne s’en sont pas… privés !

Première tournée avec Michèle, Hervé…
… Et Christophe qui ne voulait pas être sur la photo !

Le livre s’appelle  « Christophe, mon père inconnu » (Ed Robert Laffont), livre qu’il a écrit avec sa mère, le journaliste Bernard Pascuito, ses compagnes, Gérard Bevilaqua, le frère aîné de Christophe, son autre frère, Yves qui a fait beaucoup pour le rapprochement du père et du fils avant qu’il ne fut emporté par un cancer et quelques intimes dont l’ami Daniel Mecca, musicien et régisseur de Michèle, Frédérick Planke l’ami de Romain.
Un livre on ne peut plus émouvant où, pour la première fois, Michèle, Gérard et Romain se livrent et font un portrait d’un Christophe mystérieux, fantasque, instable, qui a l’impossibilité de s’engager, de se projeter dans l’avenir, dans une vie de famille, d’assurer ses responsabilités.
Ceci est peut-être dû à une vie de famille dans laquelle les trois frères vivaient avec des parents qui se déchiraient.
Michèle, droite dans ses bottes, a accepté le fait d’élever seule Romain, comprenant très vite qu’elle ne pourrait pas compter sur Christophe. Courageuse dans sa solitude, elle dût assumer la mort de sa mère, et du coup dût élever Brigitte, sa jeune sœur, l’absence de son père qui préféra s’éloigner devant « le déshonneur » de sa fille (On était dans les années 60 et être « fille-mère » était honteux), ainsi que sa carrière débutante.

Le soir où Vidal est décédé
Avec Samuel et Raphaëlle.. et Michel Drucker !
Ses trois enfants, Samuel Raphaëlle et Charlotte

Heureusement, deux ans après, elle rencontrait celui qu’elle a toujours appelé « Vidal », qui adopta Romain qui fut un vrai papa, avant que ce dernier ne découvre à 6 ans à l’école que son père n’était pas son vrai père mais une vedette comme sa mère.
Évidemment, tous les journaux ayant parlé de l’histoire, il était difficile qu’elle ne parvienne pas aux oreilles de l’enfant. Ce fut pour Romain un cataclysme qui changea sa vie de petit garçon qui martelait : « De toutes façons, mon papa c’est celui que j’aime ».
Une blessure que personne ne pouvait guérir et que Romain, enferma dans son mutisme car il ressemble à son « père de sang », il ne parle pas beaucoup et surtout ne se confie pas, se cachant derrière un sourire  de façade car Romain sera traumatisé à vie, même si, après un très, très long chemin semé de difficultés, il arrivera en partie à retrouver ce père, grâce aux frères de Christophe et surtout grâce à Yves qui a tout fait pour réunir les deux hommes.
Des rencontres furtives chargées de secrets, de non-dits, de timidité de part et d’autre, tout aussi mutiques l’un que l’autre.
Michèle aussi ouvre son cœur pour la première fois sur cette histoire qui fit couler beaucoup d’encre et dont la presse fit des choux gras. Tout ce qu’elle n’a pu dire à son fils, elle l’écrit dans ce livre chargé d’émotion.
Quant à Romain, lui aussi s’ouvre à ce qu’il a vécu à la recherche du père perdu que la femme de celui-ci tenta d’empêcher par tous les moyens, jalouse de l’histoire d’amour que Christophe vécut avec Michèle, de ce fils qui encombrait sa vie, peut-être ayant peur qu’il lui prenne une part d’héritage, alors qu’elle était séparée mais pas divorcée de l’artiste. D’autant que Romain ne demanda jamais rien sinon de se rapprocher de ce père et qu’ils se connaissent un peu.

Sur scène avec Samuel
Avec l’équipe du Professeur Pelletier

C’est peut-être à cause de tous ces chocs, ses peines, ses drames que Romain a vu se développer en lui cette sclérose en plaque qu’il doit affronter chaque jour avec un courage exemplaire.
Chacun avait tant à se dire mais la pudeur et la timidité ont fait que le père et le fils n’ont pas pu aller au bout de leur histoire et la mort de Christophe a tout interrompu hélas. Ni l’un ni l’autre n’a pu vraiment briser la glace. Et pourtant ils avaient tant à se dire !
J’ai vécu beaucoup de moments avec Michèle et Romain, je les ai accompagnés durant plus de cinquante ans, sans qu’il ne soit jamais question de parler de Christophe. Même malgré le nombre d’interviews que j’ai pu faire d’elle. Tout comme avec Christophe, je n’ai jamais parlé de Michèle et de Romain. Ils étaient tous trois trop discrets pour aborder ces sujets. Avec Michèle, j’ai vécu des moments magnifiques, tout comme des moments difficiles comme le jour de la mort de Vidal où le soir même elle chantait à Saint-Raphaël, et où elle a fait monter Émilie et Romain sur scène. Moment émouvant où tout le public, debout, les a applaudis. J’ai vécu aussi par intermittence, l’évolution de la maladie de Romain qui, quoiqu’il se passe, a toujours gardé sa gentillesse, sa patience, son sourire. Je ne l’ai jamais entendu se plaindre une seule fois.

Avec un ami commun qui a le même problème
Lorsque l’enfant paraît !
Dernière photo avec Christophe

Ma dernière rencontre avec Christophe date de 2010 où nous avions passé un grand moment ensemble à Sanary. Je l’avais eu au téléphone, il m’avait invité à le rejoindre et bizarrement, ce soir-là, il m’a beaucoup parlé, ce qui était rare mais jamais nous n’avons évoqué leurs histoires.
Romain n’a pas eu la vie facile. Abandonné par son « père de sang », perdant son père adoptif qui était en fait son vrai papa, puis, perdant Yves avec qui il avait tissé de vrais liens d’oncle et neveu, et grâce à qui il devait d’avoir pu enfin de rapprocher de Christophe, toujours en secret malgré cette femme qui mit toujours entre eux des bâtons dans les roues…
Cette dernière lettre qu’il adresse à Christophe pour clore ce livre est bouleversante, poignante et je n’en aime que plus encore cet homme blessé qui a vécu sa vie à rechercher ce père perdu, avec pugnacité, avec courage, malgré les écueils qui ont barré sa route.
Ce livre est un grand cri d’amour.

Jacques Brachet

DORIAND : Parolier cœur fidèle


Il se nomme Laurent Lescaret, se prénomme Dorian mais, afin qu’on ne l’appelle « Doriann » il a ajouté à son prénom un D, devenu son nom d’artiste « Doriand ».
Sur la couverture de son livre « Un homme de paroles » paru aux éditions Léo Scheer, il apparaît en dandy mâtiné Gainsbourg, regard sûr de lui, presque arrogant.
Dans la vie c’est tout autre : timide, peu sûr de lui, doutant sans arrêt.
Parolier talentueux, homme de l’ombre, il eut aimé être chanteur dans la lumière mais l’auteur a pris le pas sur le chanteur qui a écrit avec bonheur et succès pour Lio, Etienne Daho, Julien Doré, Héléna Nogueira, Camélia Jordana, Sylvie Vartan, Mika, Michel Polnareff, les L5…
La chance et le hasard vont lui faire se rapprocher de ses idoles : Lio, qu’il adore tout jeune, qui possède ses poster dans sa chambre et qui, par miracle va venir s’installer près de chez lui. Il ira sonner à sa porte et elle le recevra en toute simplicité, alors qu’elle n’a pas la réputation d’être simple ! Il adore Daho et a beaucoup de points communs avec ce chanteur qui, découvrant une de ses chansons; lui laisse un message… sans coordonnées. Et voilà qu’un peu plus tard il se retrouve à ses côtés dans un bar ! Au fil du temps, il deviendra l’un de ses plus fidèles amis. Pareil pour Bashung, pour Mika, pour Polnareff !
Ce dernier tient tête depuis 20 ans à sa maison de disques pour finir un album. Alors que nombre d’auteurs se sont fait virer, on l’envoie à Palm Spring se frotter à lui… Et c’est la chance. Outre qu’il ne se fait pas virer, il va travailler avec lui et devenir son ami ! N’oublions pas sa rencontre avec Karen Ann avec qui il collabore depuis des années, complice et amie. Et ça dure !
Si Doriand a une carrière en dents de scie en tant que chanteur, qu’il doute toujours autant de lui et de son talent, il se rend compte de la chance qu’il a eu de rencontrer de beaux artistes avec qui il a collaboré.
Malheureux en amour, heureux en amitié. Malheureux en chanteur, heureux en parolier, un métier qui se perd aujourd’hui.

Aujourd’hui il nous raconte cette vie d’artiste dans ce livre à la fois drôle et émouvant, évidemment superbement écrit où il nous parle de ses rencontres, ses chemins de traverse, ses joies et ses peines, ses succès et ses déceptions, avec une certaine naïveté, car il est resté fan et est à la fois surpris, heureux de ces rencontres, lui le « petit parolier de l’ombre » qui est si rafraîchissant, si étonnant, si détonnant dans ce show biz sinistre, superficiel et sans pitié.
A le lire, on a comme Mika, Michel, Etienne et les autres, très envie d’être son ami.
D’autant qu’après avoir écrit, il accepte qu’on en parle.

« Alors, cette couverture « à la Gainsbourg », pourquoi ?
(Il rit) Vous n’êtes pas le premier à me le dire et pourtant, lorsqu’on l’a fait, on n’a pas du tout pensé à Gainsbourg mais à… Lucky Luke ! Au départ il avait une cigarette mais il dû la changer pour une paille et moi je l’ai transformée en stylo, ce qui me représente mieux. Et quoique j’adore Gainsbourg, ce n’est pas un hommage !
Sur les photos ou les pochettes de disques, vous ne souriez jamais… Pourquoi ?
Et pourtant je crois sourire souvent et même rire mais sur les photos… Je souris intérieurement ! Ce n’est pas si facile de sourire devant l’objectif. Disons que je suis le nouveau Sardou ! (Et là il rit carrément !)
Bon, vous êtes timide mais vous osez quand même aller frapper chez votre idole : Lio. Et en plus, elle vous reçoit !
Je crois que lorsque je suis motivé, j’ose, je ne veux passer  à côté de ce que j’ai envie de faire. Je crois que c’est une force qui me pousse malgré ma timidité et la situation complexe. J’avais passé une heure  et demie de route en voiture, j’étais devant la porte et je ne pouvais plus reculer. On était en pleine campagne, ce qui est déjà plus facile que de trouver une maison dans une ville. Par contre j’étais dans le froid et la neige, on se serait cru dans un film suédois ! Au départ ce n’était pas gagné mais je crois que Lio et son mari ont eu pitié de nous. Le rêve se concrétisait et finalement je n’étais pas plus surpris que ça et ce qui m’a fait le plus plaisir c’est que je sentais que j’existais dans leurs yeux.
La chance est avec vous puisqu’à la sortie de votre premier disque c’est Etienne Daho « in person » qui vous téléphone pour vous dire qu’il a aimé !
Daho faisait aussi partie de mes idoles et, alors que j’étais absent de chez moi, il me laisse un message sans laisser ses coordonnées. Ça a été un grand regret. Trois semaines plus tard, je monte pour la première fois à Paris avec deux copains, nous allons boire un verre aux Folies Pigalle… et je tombe sur Daho ! Pourquoi on est venu là ? Le hasard, la chance… La vie vous attend quelque part !

Encore une chance : On vous envoie à Palm Spring essayer de convaincre Polnareff de finir l’album que sa maison de disques attend depuis… vingt ans ! D’autres auteurs se sont fait virer, vous, vous vous installez chez lui et vous terminez ce disque !
C’est vrai que je pratique un métier de l’ombre, que je manque souvent d’assurance mais quand je veux quelque chose, je m’accroche. Ça devient pour moi un défi, je ne laisse pas ma place. J’avais décidé !
Facile de travailler avec lui ?
C’est un peu comme les montagnes russes, un jour tout va bien, le lendemain tout est à refaire. Mais si ce n’est pas toujours simple, c’est envisageable ! Sans compter que si j’aime l’artiste, l’homme me touche. Il faut faire le dos rond, mettre son égo dans la piscine et comme elle est à 50°, on n’a pas froid !
Alors que dans ce métier on se tutoie très facilement, vous vous êtes toujours vouvoyés. Pourquoi ?
Ça vient surtout de moi, j’aime qu’il y ait une distance, ça m’est plus facile pour travailler. Je veux garder mon espace, mon territoire et rester « moi » dans une relation.
Alors que votre talent est reconnu et pas par les moindres, vous avez toujours l’air surpris qu’on s’intéresse à vous !
C’est vrai que je suis toujours étonné qu’on s’intéresse à mon travail. Comme je suis timide, j’ai toujours peur qu’après une rencontre, les gens ne se souviennent pas de moi. Mais malgré mon manque d’assurance, mes doutes, j’aime répondre aux défis.
Vous avez fait de belles rencontres mais il y a eu quelques loupés. Comme Camélia Jordana.
Ce n’est pas un loupé puisque sa première chanson, que je lui ai écrite  « Non, non, non (écouter Barbara) » a été son premier tube. Mais son succès a fait qu’on ne parlait pas de l’album et elle a fait un rejet et n’a plus voulu la chanter. C’est souvent le cas lorsqu’un premier succès est trop envahissant qu’il occulte tout le reste. Il n’y a que le temps qui fera qu’un jour elle pourra la rechanter.


Et Françoise Hardy ?
C’est une de mes chanteuses préférées et, là encore, le jour où j’ai entendu sa voix au téléphone, ça m’a paru bizarre tellement c’était intime. C’était perturbant. Elle m’appelait après avoir entendu la chanson de Julien Doré « Les bords de mer » et voulait que je lui écrive un texte sur une musique d’Alain Lubrano. Elle a aimé le texte mais Lubrano n’aimait plus sa musique et a refusé de la lui donner. Du coup, ça ne s’est pas fait et c’est un grand regret car je crois que le texte lui allait bien. Mais ce sont les aléas du métier.
Alors, que voilà un drôle de trio : Philippe Katherine, Mika… et vous !
C’est une drôle d’histoire. Avec Philippe on se connait depuis vingt ans et pour rigoler on écrit un jour une chanson marrante « Danser entre hommes ». Que Barclay refuse, c’était trop rigolo pour lui ! Vingt ans après, on reparle de cette chanson, Mika était là et on décide de l’enregistrer tous les trois !
Vous êtes très éclectique, passer de Françoise Hardy aux L5, de Polnareff à Sylvie Vartan, de Lio à Bashung…
Pour moi il n’y a pas de différence tant que c’est de la chanson pop, que ça n’est pas de la variété, ça reste dans mon domaine et que ce soit au second degré si possible. J’ai aimé écrire « Toutes les femmes de ta vie » pour les L5 tout comme j’ai aimé écrire « Elle me dit » pour Mika ou encore « Nos âmes à l’abri pour Bashung…
Et votre rencontre avec Emmanuelle Seigner ?
Une très belle rencontre. J’avais écrit « Dingue » avec Karen Ann et il se trouve qu’Emmanuelle adore et décide de faire tout un album avec nous. On l’écrit entre Paris, Barcelone, Tel Aviv, on l’enregistre et au moment de sa sortie l’affaire Polanski éclate et il est arrêté en Suisse. La presse s’emballe et plus question de sortir le disque. Un an de travail, un an de notre vie. Il ne sortira que six mois après mais les radios sont frileuses, elles ont peur de prendre parti. On a eu seulement quelques beaux articles. Plus tard, Dani a repris « Dingue ». Ça a été son dernier enregistrement.
Alors, avec tout ça, où en est le chanteur ?
Il chante toujours ! Il reste stable, dans l’ombre ! Pour moi qui suis très discret c’est un confort de ne pas avoir la notoriété d’un chanteur, je ne le supporterais pas. J’aime faire des disques pour les autres et quelquefois j’en fais un pour me faire plaisir. Le 31 août sortira un single inédit « Himalaya » écrit avec Karen Ann au piano, qui parle de la froideur de l’amour. Mais j’ai toujours besoin des deux. Un jour Etienne Daho m’a dit : « N’oublie pas pourquoi tu es monté à Paris ». Je ne l’oublie pas ».

Nous nous sommes donné rendez-vous, non pas dans vingt ans, ce serait trop pour moi, mais un jour dans le Midi, d’autant qu’il a de très beaux souvenirs de ses premières vacances… à Six-fours !


Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Audoin Desforges
Photo couv : Ludovic Sarmento

Notes de lectures

Jean-Pierre CABANES : L’annonce faite à Goering (Ed Albin Michel – 395 pages)
L’auteur a écrit un superbe roman, extrêmement bien documenté sur la seconde guerre mondiale.
En prenant pour sujet « L’annonce faite à Marie » de Vermeer, imaginée par un faussaire de génie Han van Meegerer, l’auteur retrace le parcours d’un jeune allemand, Werner, terminant une thèse sur les faux dans la peinture européenne. L’art du roman est de croiser des personnages fictifs avec des hommes et des femmes ayant réellement vécu la période 1938-1946
Le lecteur côtoiera Hitler, Mussolini, Ciano, Ribbentrop, Goering et tant d’autres
Jean-Pierre Cabanes colle à l’Histoire, rapporte les éléments historiques vérifiés et vérifiables, il a un talent merveilleux pour faire rebondir ses personnages, notamment la sœur de Werner, interprète d’italien-anglais, donc espionne en puissance en temps de guerre.
C’est un roman haletant, le lecteur qui connait bien sûr le déroulement de l’histoire en apprendra sûrement sur Ciano, le gendre de Mussolini, sur Rose Valland qui a sauvé tant d’œuvres d’art destinées à être détruites, sur le procès de Nuremberg.
En moins de quatre cents pages, le lecteur vivra des temps forts de l’Histoire, les rebondissements sont nombreux, acrobatiques parfois mais ne ménageons pas notre plaisir de lecture.
Laurent SCALESE : A nos jours heureux (Ed Plon – 332 pages)
Judith est éditrice.
Elle vit avec sa fille Chrystal, ado rebelle, et son nouveau compagnon Sébastien. Sa vie est heureuse mais tout bascule quand elle apprend qu’elle a un cancer du sein. Le combat contre le « crabe » qui s’est installé dans son corps commence.
Auprès de qui trouver le réconfort alors que Sébastien la quitte suite à cette nouvelle ? Ce sera auprès de ses compagnons d’infortune rencontrés lors des séances de chimiothérapie
L’auteur nous emmène avec beaucoup de délicatesse et de vérité dans ce monde des crânes rasés suite à leur chute de cheveux. Tristesse, humour, amour, amitié, rémission, fin de vie, espérance, suicide assisté sont évoqués.
Oui, « c’est quand la mort frappe à notre porte qu’on comprend que la vie est un miracle ».

Muriel AUDURAND : Trois jours (Ed Plon – 185 pages)
Muriel Audurand écrit un premier roman plein de promesse.
Le lecteur est immédiatement pris dans les turbulences d’un avion qui perd dramatiquement de l’altitude. Réussira-t-il à se redresser avant la chute finale?
Dans cet avion une femme se rappelle sa mère qui a organisé avec sérénité sa fin programmée de vie en Suisse, sa vie de femme mariée puis quittée par un mari volage, une vie professionnelle de professeur d’anglais qui ne tiendra pas sa promesse de passer son agrégation, une femme qui désormais mène sa barque avec ses enfants et les hommes qui désormais entreront dans sa vie. Oui, les minutes de la chute d’un appareil font ressortir l’essentiel d’une vie et l’essentiel se résume à l’amour et dans ce cas particulier l’amour de ses jeunes enfants.
Un roman attachant, mené avec habileté jusqu’à une fin à choisir selon que vous êtes pessimiste ou optimiste.
Oui cette jeune femme doit vivre, nous raconter la suite de sa vie dans un prochain livre, une manière d
d’encourager Muriel Audurand à reprendre la plume.
Frédéric GRANIER : Imagine (Ed Perrin – 359 pages)
Frédéric Granier est journaliste, il écrit pour le magazine Géo mais, passionné de rock, il a déjà écrit plusieurs livres sur cette musique, particulièrement sur les Beatles qui restent son groupe préféré.
Dans ce livre « Imagine » (tiens donc !) sous-titré « 12 chansons qui ont fait l’histoire », il nous raconte par le menu l’histoire de chansons et de chanteurs qui ont marqué l’histoire de la musique. Son histoire en fait et la nôtre puisqu’il s’agit de John Lennon et « Imagine », Scott McKenzie et « San Francisco », Abba et « Waterloo », Queen et « Innuendo » et quelques autres groupes et chanteurs américains. Un seul français dans cette litanie américaine : Serge Gainsbourg  avec « Aux armes etc ». Dommage pour les français !
Mais le bougre maîtrise bien ses sujets car, de la création d’une chanson à sa parution, il nous offre, avec une précision d’horloger, le pourquoi du comment est née la chanson, dans quel contexte l’artiste a conçu un tube universel et c’est passionnant,
On raconte aussi The Cranberries et « Zombie », Bruce Springteen et « The rising » et quelques autres qui nous rappellent automatiquement des souvenirs.
12 chansons incontournables, tout autant que les chanteurs, auteurs, compositeurs qui les ont créées, qui font à tout jamais partie de l’Histoire avec un grand H de la Musique avec un grand A.

Philipe DELERM : Les instants suspendus (Ed.Seuil – 105 pages)
Quarante trois petits contes que l’écrivain nous livre  tout à trac, passant d’une  pensée, d’un coup d’œil qui capte un moment, un objet, remplit le temps du rêve, de la réflexion fugitive, d’un lieu  qu’on entrevoit, d’un objet qui nous captive.
Il nous fait toucher du doigt toutes ces choses qui nous habitent, des plaisirs qui nous ravissent un instant et qui fuient comme un rêve.  
C’est par ces petits mots pleins de poésie que l’auteur nous fait partager sa quiétude et sa sérénité.
Tout son art est de réveiller chacun en douceur et d’aimer la quiétude, la simplicité, le vide de l’âme
Anne Le MAITRE : Le jardin nu (Ed.Bayard – 120 pages)
Autrice, illustratrice, aquarelliste, Anne le Maitre a publié des carnets de voyages et participé à un collectif d’auteurs influencés par la religion et la méditation. Dans ce court ouvrage elle se livre  et ouvre son  cœur après la perte de l’homme qu’elle aime.
Elle est alors poussée par un impératif : trouver un lieu nouveau pour s’installer et soigner son chagrin alors que la vie s’est arrêtée. Et c’est dans l’immobilité et le silence qu’elle va trouver l’apaisement auprès d’un cerisier peuplé d’oiseaux, une promenade enchanteresse en terre de silence.
En petits paragraphes de quelques lignes parfois ou de quelques pages, elle s’extasie sur les arbres, les fleurs, les oiseaux qui l’entourent, baignant dans la quiétude et le ressourcement après la lourde peine du deuil.
D’une écriture d’aquarelliste elle brosse des petits paysages plein de quiétude et de poésie. A garder en livre de chevet pour les jours sombres.

Thomas GUNZIG : Rocky, dernier rivage (Ed Au Diable Vauvert – 358 pages)
Que faire quand l’avenir est sombre, le monde devient fou, que c’est l’escalade de l’horreur ?
Le père de famille a la chance d’être multimilliardaire, d’avoir acquis une petite île dans l’océan Atlantique et d’y avoir fait construire par une société spécialisée une maison à l’abri de toute attaque, des réserves de nourriture, d’eau, d’alcool, d’électricité pour un avenir illimité.
Mais que devient l’avenir pour cette famille heureuse avec deux enfants, et qui aujourd’hui ne se parle plus ? Que sont devenus les deux domestiques qui du jour au lendemain ont changé d’attitude et pioché dans les réserves de grands crus ? Que devient une fillette qui veut retrouver le temps d’avant, vivre quoiqu’il en coûte avec des jeunes de son âge ?
Et Rocky, pourquoi Rocky ? C’est le clin d’œil amusant de Thomas Gunzig, un Rocky qui rassemble la famille malgré lui.
Un roman qui se lit facilement et il faut sourire que ce roman soit édité par la maison d’édition Au Diable Vauvert.
Paulina PONASSENKO : Tenir sa langue. (Ed l’Olivier – 186 pages)
C’est le récit d’une jeune fille, née le 3 mars 1969 à Moscou. Sa famille lui donne le prénom de Polina
Elle arrive à St Etienne à la chute du mur de Berlin . Son enfance se déroule en France, mais ce n’est pas facile, car elle ne parle que le russe !
Il faut s’adapter dit elle.
Elle voulait garder son prénom de Polina sans le modifier mais elle n’y réussira que vingt ans après en entamant une action en justice. Pour  s’adapter elle se « dédouble », elle se dit russe à l’intérieur et française à l’extérieur, russe à la maison, d’où Polina orthographié Po et française à l’école : Pauline, Pau… Son histoire familiale juive  est riche, elle a l’expérience de l’exil.
L’auteure vit actuellement à Montreuil, c’est au tribunal de Bobigny que se déroule cette histoire.
Ce livre est son premier roman, il a reçu le prix Fémina des lycéens en 2022, elle est à la fois écrivaine, traductrice et comédienne !
Le roman est drôle, le style est vif, humoristique, inventif, il faut le lire avec attention.

On lirait le Sud

Du 2 au 30 juin 2023, « On lirait le Sud » revient pour sa troisième édition dans toute la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. À cette occasion, plus d’une centaine de librairies, éditeurs et médiathèques s’allient pour mettre à l’honneur les acteurs du livre de toute la région Sud autour de rencontres et d’animations gratuites.De nombreux événements sont ainsi organisés sous la bannière « On lirait le Sud »pour valoriser le travail des maisons d’édition et des auteurs en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Des rendez-vous à ne pas manquer pour promouvoir le circuit court du livre et faire briller les talents littéraires du territoire de Marseille, Nice, Toulon, Antibes, à Grasse, Aix-en-Provence, Salon-de-Provence, en passant par Hyères, Avignon, Gap, Aubagne, Orange, Briançon…
Parmi les quelque 50 rendez-vous proposés, le public pourra rencontrer des auteurs et autrices de romans, de livres jeunesse, de textes engagés ou de poésie, comme Marcus Malte, Françoise Laurent, Dominique Sigaud-Rouff, Elsa Valentin, Erika Nomeni, Daphné Ticrizenis ou encore Monique Grande et Mo Abbas, ainsi que les illustratrices Maguelone Du Fou, Amélie Jackowski, les éditrices Juliette Grégoire et Mathilde Chèvre, l’explorateur Raphaël Sané, le plongeur Samuel Jeglot ou la journaliste œnologue Romy Ducoulombier….
En plus de ces nombreuses rencontres, ateliers et dédicaces, 50 libraires feront découvrir leurs coups de cœur parmi une sélection unique d’ouvrages « 100% local ».
Porté par Libraires du Sud, Éditeurs du Sud, Jedi Sud et l’Agence régionale du Livre Provence-Alpes-Côte d’Azur, ces temps forts littéraires entièrement gratuits sont réalisés sous l’égide de la Région Sud, avec le concours du dispositif Sofia/Fill Territoires du Livre.

Notes de lectures

Janine BOISSARD : « Elle parlait aux fleurs » (Ed Fayard – 336 pages)
Un nouveau roman de Janine Boissard est toujours synonyme de moments de lecture pleine d’émotion et de beauté. Loin des polars, des violences qu’on nous assène tout au long de l’année. On y retrouve l’amour, l’amitié, la fraîcheur des sentiments et des histoires de familles comme celles que  l’on retrouvait dans les films de Claude Sautet car ce sont souvent des histoires chorales.
Et « Elle parlait aux fleurs » est dans le droit fil de l’œuvre de la romancière.
Elisa est une jeune femme qui a perdu son mari voici deux ans, qui élève ses deux enfants entourée de l’amour de ses parents, de l’amitié de Claude, son amie d’enfance et de l’affection de Thomas, son beau-frère qui veille sur elle et les deux enfants qui l’aiment comme il les aime. Seule ombre au tableau : sa belle-mère qui n’a pas supporté que son fils, issu d’un milieu bourgeois ait pu s’amouracher d’une jeune femme « pas digne de leur rang ». Elle est à tel point horrible qu’elle a été surnommée Folcoche. Ce qui n’empêche personne de vivre, surtout Thomas qui se rapproche de sa belle-sœur, d’abord dans l’affection puis dans l’amour réciproque qui va peu à peu se développer.
Comment Folcoche va-t-elle le prendre ? Comment son amie va-t-elle vivre ce bonheur qu’elle, aisée mais malheureuse, lui envie et surtout les enfants qui vont voir peu à peu s’installer leur oncle au foyer ?
On suit l’aventure d’Elisa qui, plus que tout, adore les fleurs, les cultive et leur parle avec amour.
Encore une belle histoire sur laquelle flotte la bienveillance, l’amour, la joliesse des sentiments (sauf chez une !), dans laquelle on se glisse jusqu’à la fin qui arrive trop tôt et dont on aimerait suivre le voyage… Ça mériterait une suite !
Laurent SEKSIK : Franz Kafka ne veut pas mourir. (Ed Gallimard – 330 pages)
Le livre commence par la fin de vie et le décès de Franz Kafka à Kierling près de Vienne, le 3 juin 1924 à l’âge de 31 ans, des suites d’une laryngite tuberculeuse diagnostiquée en 1917. Il est inhumé à Prague. Puis, de 1923 à 1972 tous les chapitres s’entrecroisent pour nous faire découvrir les destinées de trois personnes très attachées et admiratives de Kafka, au point de le faire vivre au-delà de sa mort en le sortant de l’anonymat. Il s’agit de Dora Diamant sa jeune et dernière compagne de confession juive,
Ottla, sa sœur cadette et confidente bien aimée, la famille de Kafka étant profondément liée au judaïsme.
Enfin, Robert Klostock, un jeune étudiant en médecine et ami rencontré lors de son dernier séjour au sanatorium, de confession juive lui aussi.
Chacun va, à travers ses parcours de vie tragiques, nous rappeler l’époque turbulente du nazisme, de l’antisémitisme, des purges staliniennes mais tout au long de leur vie mouvementée ils continuent à penser et défendre l’œuvre et la mémoire de Kafka. Ainsi nous découvrons la personnalité de l’homme, fragile, terrassé par l’angoisse, chétif et taciturne, ses difficultés relationnelles avec son père à qui il écrit une lettre que sa mère ne remettra jamais au destinataire. Nous découvrons aussi les œuvres au travers des témoignages des trois admirateurs de l’écrivain dont une partie a été conservée grâce à Max Brod, son exécuteur testamentaire, à qui il avait demandé de brûler ses manuscrits à sa mort et qui n’a pas respecté la volonté du défunt.
Ce livre riche, dense qui nous fait partager une époque dramatique de l’histoire et qui nous dévoile en filigrane la vie et l’œuvre de Kafka est une incitation à le lire.
Le titre est surprenant : D’une part, Kafka demande à son ami Robert Klostockd’augmenter la dose de morphine et lui déclare : « tuez-moi sinon vous êtes un assassin ». Dora  qui dit que « l’ homme qui ne voulait plus en finir, désirait enfin et farouchement vivre »laisse entendre que Kafka tenait à la vie, mais la force d’une œuvre et d’une pensée perdure au-delà de la mort et c’est en quoi Kafka  ne veut pas mourir et cela explique probablement le titre du livre.

Roland PORTICHE : L’homme qui ressemblait au Christ
(Ed Albin Michel/Versilio – 361 pages)
Nous sommes en 1291, Alister Durward, jeune noble écossais qui s’était mis au service des Templiers à Saint-Jean d’Acre, disparait. Sa sœur Sybille part à sa recherche avec un gentilhomme écossais et l’écuyer de celui-ci.
Commencent alors de rocambolesques aventures sur fond de références historique relatives aux croisades et au trafic de reliques chrétiennes et qui emmènent les protagonistes en Haute Galilée, à Bagdad et dans l’empire mongol du grand Khan de Perse.
L’auteur a beaucoup d’imagination mais l’histoire manque de crédibilité et les héros se sortent de leurs ennuis comme par miracle.
Cependant ce roman d’aventures qui se lit facilement pourra faire des lecteurs heureux.
Anne-Lise BROCHARD : Séraphine ne sait pas nager (Ed.Plon – 254 pages)
Séraphine est une jeune femme heureuse, entourée d’un mari aimant, d’une petite fille tendre et complice qui s’octroie chaque soir des points bonheur pour se récompenser d’une vie aussi harmonieuse. Mais ceci n’est que la face visible de son existence. Elle a aussi une face cachée, celle d’une seconde vie enfouie dans le déni et le silence : Elle a un frère Paul, incarcéré pour cause de vols, à qui elle va rendre visite en cachette à la prison tous les mercredis, comme les enfants qui vont à la piscin . C’est un mensonge par omission puisqu’elle s’est annoncée fille unique à son époux, mensonge qui l’oblige à des contorsions dans son emploi du temps. Elle vit sur le fil du rasoir, surtout à partir du jour où le dit-frère bénéficie d’une sortie de prison ! Patatras ! Comment sortir de ce dilemme ? Dans vingt-cinq semaines il sera dehors alors que personne ne connait son existence et qu’il compte sur sa sœur bien-sûr. Comédie-drame… Voilà où mène le mensonge .
Nous suivons donc les affres de cette comédie dramatique
Une écriture enjouée, de l’humour, beaucoup de tendresse, l’auteure nous offre des moments pleins de malice et de profondeur à la fois.

AndreÏ MAKINE : L’ancien calendrier d’un amour (Ed Grasset-195 pages)
C’est dans le cimetière sur les hauteurs de Nice qu’AndreÏ Makine amène le lecteur à la rencontre de Valdas Bataeff. En 1913, il a quinze ans, passe ses vacances au bord de la mer de Crimée dans la belle maison de son père, auprès d’une jeune belle-mère passionnée de théâtre ; un monde de pouvoir, de séductions et de mensonges. Un milieu qu’il fuit un soir et surprend le transfert de ballots de contrebande. Pris entre les policiers et les trafiquants, il est brutalement jeté à terre et protégé sous la cape d’une femme, TaÏa qui, au fil des pages et des années, restera son unique et véritable amour. Pour Valdas désormais sa vie sera la guerre puis la fuite, une fuite jalonnée de bons moments tout de même, de nombreuses femmes, mais les décennies n’effaceront jamais les journées ensoleillées en compagnie de Taîa qui lui a rappelé que désormais pour renouer avec « le temps dans lequel vivaient les pays civilisés », les Rouges ont imposé de passer du calendrier julien au calendrier grégorien. Une Taîa morte depuis longtemps qui n’existe plus pour personne, une Taîa qu’il revoit donc dans ce cimetière, une Taïa, sa véritable patrie intérieure qui lui a fait découvrir les champs des derniers épis de blé.
Un très beau roman sur l’amour, l’errance, le souvenir des jours anciens, heureux et enfouis au fond de la mémoire, une nouvelle facette du talent de conteur d’Andreï Makine qu’on lit avec toujours le même immense plaisir.
Pamela ANDERSON : « Love Pamela » (Talent Editions – 326 pages)
Qui ne connaît cette sculpturale naïade en maillot rouge, arpentant les plages de Malibu dans une série aujourd’hui devenue culte « Alerte à Malibu » ?
Pamela Anderson doit sa célébrité à cette série et il est dommage qu’elle ne soit surtout connue que par celle-ci et surtout sa vie mouvementée, ses frasques qui faisaient les choux gras de tous les paparazzis du monde entier.
Il est vrai qu’elle fut à bonne école avec des parents on ne peut plus rock’n roll, un père qui buvait et pouvait devenir violent malgré l’amour qu’il portait à sa femme et sa fille.
Qui aussi pourrait penser qu’elle fut une fille timide et mal dans sa peau lorsqu’on voit la superbe femme qu’elle est devenue ?
C’est grâce à l’équipe du magazine « Play Boy » qu’elle a pu devenir une sex bomb alors qu’elle voulait simplement devenir star. Devenir une Brigitte Bardot américaine. Brigitte qu’elle admirait et avec qui elle lutta – et le fait encore – pour la cause animale. Autre point commun : son amour pour Saint-Tropez.
Si l’on sait aussi qu’elle a toujours eu le chic pour rencontrer des mauvais garçons, (Les hommes sont ma perte, avoue-t-elle) dont son mari Tommy qui était un homme violent, avec qui elle a vécu une folle et scandaleuse vie, ce que l’on apprend dans ce livre c’est qu’elle fut victime d’un viol, ceci expliquant peut-être cela.
Ce que l’on sait moins c’est qu’elle a toujours aimé la nature et les animaux, qu’elle est à la fois naïve et romantique, qu’elle est cultivée car elle a beaucoup appris par les livres et écrit des poésies qu’elle nous offre dans ses mémoires.
Sexy, sensuelle, sexuelle… C’est l’image qu’on se fait de cette femme qui n’a pas toujours eu une vie facile, qui a pourtant magnifiquement élevé ses deux enfants, qui œuvre pour de nombreuses organisations humanitaires, pour les enfants, les malades, les réfugiés, les animaux. Elle a même créé la Fondation Pamela Anderson.
Bref, en lisant ce livre, on découvre une femme attachante, émouvante, aussi belle de l’extérieur que de l’intérieur.
André DUBUS III : Une si longue absence (Ed Actes Sud – 447 pages)
Roman traduit de l’anglais (Etats-Unis) par France Camus-Pichon
C’est un livre dans lequel l’auteur explore les sentiments des membres d’une famille dans laquelle le mari Daniel Ahead tue sa ravissante épouse Linda devant sa fille Susan, âgée de 3 ans. Alors que quarante ans plus tard, Daniel est sorti de prison et qu’il sait qu’une maladie va bientôt l’emporter, il décide de faire mille kilomètres pour aller voir sa fille dont il a retrouvé les traces et lui envoie une longue lettre avant de la rencontrer. L’auteur donne la parole tantôt au père, tantôt à la fille, tantôt à la grand-mère maternelle qui a élevé Susan. Chacun fait son introspection. Comment le père peut-il chercher à s’excuser de s’être laissé envahir « par le serpent noir du soupçon », peut-il prétendre à demander à redevenir un père et à revoir sa fille ? Comment Susan a-t-elle vécu ce drame ? Comment peut-elle accepter de revoir le meurtrier de sa mère et peut-elle pardonner ?
Ce beau roman, à l’écriture dense, interroge avec finesse sur les drames familiaux, l’impossible pardon, les blessures inguérissables mais avec lesquelles il faut continuer à vivre.

Rachel CUSK : La dépendance (Ed Gallimard – 201 pages)
Tout commence par la rencontre d’un peintre, L, que la narratrice va inviter à participer à sa vie, ou plutôt son environnement  particulier, un marais vu « comme le vaste sein nébuleux de quelque dieu ou animal endormi, mû par le lent et profond mouvement d’une respiration somnambule. »
Jeffrey sera l’oreille tranquille et silencieuse à qui s’adresse la narratrice tout au long du récit. Il apprendra donc que ce grand peintre accepte l’invitation mais arrive accompagné d’une ravissante jeune femme. Une vie étrange s’installe, un jeu de cache-cache car L ignore son hôtesse, semble même la fuir puis très vite, L exerce un phénomène de pulsion-répulsion au point de déséquilibrer son ménage. Et au fil du temps, L perçoit «  le message du marais environnant, l’illusion, le mélange d’une phase de construction de la vie qui n’est en fait qu’une construction mortuaire, oui une dissolution ayant l’apparence de la mort mais qui en réalité est son contraire. »
Tous les personnage créés par Rachel Cusk pourraient être les acteurs d’une pièce de théâtre classique avec les trois règles d’unité de temps, lieu et action, les rôles principaux seraient tenus par la narratrice et L, les autres étant cependant indispensables au déroulement du récit. Toute l’introspection de la narratrice se confiant à Jeffrey exerce une sorte d’enfermement, de dépendance du lecteur.
Ce roman est addictif et alors qu’on a de la peine à se laisser aller au plaisir de la lecture au début, il faut reconnaître que Rachel Cusk réussit à nous rendre dépendant de son roman.
Un véritable coup de chapeau.
Bernhard  SCHLINK : La petite fille (Ed Gallimard – 338 pages)
Kaspar est un allemand de l’Ouest. Il aide Birgit, sa future femme à passer à l’Ouest en 1965. A sa mort, il apprend, par le journal intime qu’elle lui a laissé, qu’elle a eu un bébé avec un autre homme, avant son mariage, mais qu’elle l’a abandonné à sa naissance, en Allemagne de l’Est, en le confiant à une amie. Kaspar quitte Berlin pour aller à sa recherche. Il finira par retrouver cet enfant qui, maintenant, est devenue une femme.
Elle se nomme Svenja, la ressemblance avec Birgit, sa mère est frappante. Elle est restée en Allemagne de l’Est et a épousé un néo-nazi. Elle a eu une fille : Sigrun qui a quatorze ans. Des relations très fortes vont naître entre cette « petite fille » et ce « grand- père »  qui ne l’est pas  vraiment. Adolescente, elle va très vite poser beaucoup de questions, auxquelles  il va lui être difficile de répondre ; il l’emmène à Berlin, chez lui, où il est libraire. Les relations familiales vont devenir difficiles et franchement insupportables, surtout avec le père néo-nazi, méfiant et haineux.
Kaspar est cultivé, désintéressé et attachant, il va lui faire découvrir beaucoup de choses qu’elle ne connaissait pas et qui lui apporteront un  bonheur personnel tout au long de sa vie.
Ce roman est magnifique, le récit passionnant et poignant, le style clair et fluide, on voyage à travers l’Allemagne et à travers le temps. K
Kaspar est encore jeune, Sigrun a tout l’avenir devant elle.

Serena GIULIANO : Un coup de soleil (Ed Robert Laffont – 226 pages)
Eléonore, française 40 ans,  mère de jumeaux ado, vit à Salerne.
Elle s’occupe seule de ses enfants depuis son divorce  et fait des ménages chez des particuliers pour assurer le quotidien. Elle bosse rêve et souffre  depuis sa rupture avec son amant marié.
Le roman est construit sur cinq semaines pendant lesquelles Eléonore nous fait découvrir, au rythme de chaque  jour, l’intimité et l’environnement de ses employeurs, au nombre de six, leur personnalité ,leurs habitudes, leurs petits arrangements avec la réalité.
Elle nous raconte dans un langage simple sa vie quotidienne et nous fait partager l’ambiance chaleureuse et ensoleillée de l’Italie.
Ce livre distrayant, drôle, qui aborde  des sujets de société tels que la précarité, les réseaux sociaux, l’amour, la violence… Il n’est jamais larmoyant il est au contraire émouvant, sensible, généreux, et nous laisse à penser qu’il faut toujours croire en ses rêves.
Armel JOB : Le meurtre du Docteur Vanloo (Ed. Robert Laffont – 332 pages)
Ce vingtième roman de cet célèbre auteur belge est un thriller psychologique rural de haute voltige.
On y trouve la Terre, la langue, le clergé, les édiles de ce petit village tranquille jusqu’au jour où le cadavre du Docteur Vanloo, chirurgien exerçant au Luxembourg, est découvert par sa femme de ménage dans le presbytère où il réside. Homme discret d’apparence mais véritable bourreau des cœurs toutes les possibilités sont permises. Le commissaire Demaret envoyé sur les lieux, confronté à une jeune magistrate face à son premier cas, va prendre l’affaire en mains. S’en suivent  un tas de fausses pistes, de faux-semblants et de non-dits où chacun semble avoir eu l’opportunité ou la bonne raison de supprimer le déduisant docteur. D’où le suspense provoqué par la mise en lumière de chaque « criminel » possible, l’abandon, ou pas, et l’émergence du possible meurtrier.
Très belle ambiance feutrée du lieu, abondance des personnages, des coups de théâtre avec quelque traits d’humour noir. Ce qui en fait un roman prenant, évoqué d’une plume élégante et d’un réalisme, tant dans la procédure que dans le réalisme.

Notes de lectures

Claire DELANNOY : Wanted (Ed Albin Michel – 123 pages )
Ancienne éditrice, Claire Delannoy est auteure de plusieurs romans. Celui-ci porte sur le bandeau la mention « la cavale d’une icône du terrorisme ». Nous découvrons une femme âgée, qui vit seule dans une maison dans la forêt. Elle reçoit un homme plus jeune, Anton, qui vient régulièrement pour l’interroger sur son passé. Au fil des pages, Elsa raconte son passé, sa jeunesse alors qu’elle était étudiante en médecine, son engagement révolutionnaire, son arrestation puis sa longue cavale à travers le monde. Que cherche Anton ? Q u’a vraiment fait Elsa ? Nous ne le saurons qu’à la fin du roman après de multiples chapitres mettant en scène le face à face des deux protagonistes.
Jacqueline TAÏEB : Je chante si on me donne des chocolats (Auto édition – 146 pages)
Milieu des années 60… Une toute jeune fille au regard aussi noir que la frange qui les balaie, vient avec une énergie et un culot grimper dans les hit parades avec « 7 heures du matin » le premier rap qu’on n’appelait pas ainsi puisque c’était alors un OVNI. Sans compter que c’était une femme qui l’assenait !
De sa toute petite enfance elle a voulu chanter et sa guitare, un cadeau de son père, a tout déclenché.
Elle a 20 ans et le monde lui appartient. Mais, si elle est toujours restée dans le métier, elle n’a pas eu le succès que d’autres ont eu et qui n’étaient pas plus talentueuses qu’elle. Malgré ça, si elle a toujours travaillé entre ombre et lumière cette battante d’origine tunisienne n’a jamais baissé les bras, a toujours enregistré des disques, écrit, composé pour elle et pour d’autres comme Jeane Manson, Michel Fugain, Maurane qui s’appelait encore Claude Maurane, Yves Montand, ces trois derniers collaborant à une comédie musicale pour enfants « La petite fille Amour chez les cousins de miel ». C’est elle qui a écrit « Les Sud-Américaines » à Fugain. C’est elle qui découvre et produit Dana Dawson, hélas trop tôt disparue. Son seul et unique tube a fait le tour du monde, souvent employé dans des pubs ou dans des films. D’autres pubs aussi dont elle signe la musique (Lolita Lepimka, Axe, Les 3 Suisses…)
Contre vents et marées, trahison et ingratitude des gens du métier mais aussi de sa famille, elle a toujours débordé d’énergie. Elle s’est toujours relevée de tout et a continué en trouvant des chemins de traverse mais toujours dans la musique qui est et reste sa seule passion.
Elle écrit comme elle parle, sans tabou, sans langue de boit, appelant un chat un chat, un con un con, un salaud un salaud.
Remerciant ses père et mère elle n’oublie pas ses profs de math qui l’ont tellement gonflée qu’elle a pu écrire ses chansons pendant leur cours !
Ses amis, ses amours, ses emmerdes… elle déballe tout avec une sincérité et un humour confondants.
Quel plaisir de la retrouver !
Peter D. MASON : Destins mortels à Chamonix (Ed Paulsen – 173 pages)
Gabriel Santonini, 28 ans, vient de perdre son père, juge d’instruction. Il trouve un dossier non résolu par celui-ci, concernant un mafieux franco-serbe de la pègre de Chambéry. Il décide de se transformer en justicier et devient tueur à gages. Et voici le lecteur parti dans des aventures rocambolesques toutes aussi improbables que drôles.
Un roman policier très réussi. On attend avec hâte le suivant.

Zoé BRISBY : LES MAUVAISES ÉPOUSES (Ed Albin Michel – 335 pages)
Dans le désert du Nevada, pas très loin de Las Vegas vivent très confortablement des jeunes femmes dont les maris travaillent sur la base militaire qui étudie la bombe atomique. Cela se passe en 1952.
La jeune femme profitant du soleil dans une piscine sur la page de couverture du livre serait-elle une de ces mauvaises épouses que l’auteure veut nous faire rencontrer ? Ces mauvaises épouses vivent dans des maisons alignées toutes identiques, leur seule occupation étant le prochain cocktail ou barbecue qu’elles qualifient d’atomiques pour singer la profession de leur mari. Tout le monde connaît tout le monde et rien ne doit transpirer d’une maison à une autre sauf les cris étouffés qui parviennent de la maison de Charlie. Sa gentille voisine Summer, découvrira la sauvagerie de son mari et s’émancipera à son contact. Rien ne doit troubler les explosions qui malgré tout provoquent des saignements de nez et troubles divers, la vie est réglée pour que les femmes vivent en vase clos avec leur cachoteries, leurs manigances, leurs mesquineries, leurs transgressions, tout est fait pour la gloire de cette fameuse bombe qui éliminera ces affreux communistes.!
Un roman qui replace bien le mode de vie de ces jeunes femmes dans une base militaire. Ce n’est pas caricatural, heureusement ces temps ont changé pour les femmes. L’auteure a voulu pimenter  son histoire en y ajoutant des amours transgressives, ce n’est pas le plus intéressant.
Etienne de MONTETY : La douceur (Ed Stock – 267 pages)
Le narrateur se présente dès la première page comme un journaliste ayant travaillé vingt-cinq ans dans les services « Arts de vivre » de magazines hauts de gamme. Il part en Australie à Constantia pour la Convention Internationale de la Rose, toujours mieux qu’un salon de la voyance pense-t-il, mais ce sera l’occasion de rencontrer une pétillante consœur allemande, Barbara et surtout la merveilleuse May de Caux, présidente de cette vingt-troisième convention. Une femme élégante, racée, distinguée qui écoute, sourit délicieusement et ne répond qu’aux questions relatives aux roses. Il y a pourtant derrière cette façade une femme cachée et le journaliste fera tout pour découvrir ce qu’elle ne veut pas révéler. Il ne sera pas facile de briser le silence de cette aristocrate élevée dans un milieu privilégié.
La persévérance, la correction, la patience amèneront May de Caux à confier les notes secrètes  écrites au fil des ans depuis sa libération du camp de Ravensbrück. L’horreur des camps ne s’oubliera jamais, d’ailleurs May a besoin de retrouver ses amies de camp, celle par exemple qui lui a mis du rouge à lèvres, donné un semblant de bonne mine alors qu’elle avait le typhus. Au fil des ans, malgré les épines de la vie  c’est la douceur qui dominera sa vie, notamment avec les roses.
Ce livre est dédié à Lily de Gerlache, figure de la résistance en Belgique, qui s’est efforcée de faire reconnaitre la place des femmes dans la lutte de celles-ci contre le nazisme.
Le titre choisi par Etienne de Montety montre la dignité face à l’horreur de la guerre, un titre malheureusement toujours d’actualité.