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Loïc NICOLOFF : Un Marseillais qui tourne bien !


Il a le regard bleu Méditerranée… Normal, il est né à Marseille !
Illustrateur, scénariste, réalisateur, bientôt écrivain, Loïc Nicoloff est né dans le cinéma tout petit. Exactement à 6 ans, lorsqu’il découvre le film « L’empire contre-attaque » avec son grand-père.
De ce jour le cinéma lui est resté chevillé au cœur et au corps et aujourd’hui il en a fait son métier.
Belle idée qu’a eue Pascale Parodi, présidente de l’association « Lumières du Sud », de l’inviter pour deux jours au Six N’Etoiles pour une carte blanche, choisissant pour le public, trois films totalement différents et venus de pays différents : La France, l’Argentine, le Japon.
Installé à Aix-en-Provence où il enseigne l’écriture de scénario, ça ne l’empêche pas de tourner des films, d’écrire des BD et un roman qui ne saurait tarder de voir le jour.
Le sourire avenant et le rire sonore, il nous raconte tout sur sa vie liée au cinéma.

« D’abord, je  suis né à la maternité de la Belle de Mai… devenue la Maison du Cinéma… C’était prémonitoire, non ? nous dit-il en riant !
Alors cette révélation cinématographique à 6 ans ?
Ça a été le choc visuel, après avoir vu un ou deux Walt Disney avant… Je me rappelle de la grande salle sur la Canebière, en plus, le film finit mal, ça a remué plein de choses en moi et j’ai été tout de suite accro. Tous les lundis, journée du tarif réduit, ma mère m’y amenait. J’ai vraiment bouffé du cinéma et c’est ça qui a tout déclenché.
Tu te disais déjà que tu serais réalisateur, comédien ?
Comédien jamais, réalisateur oui, mais alors je ne pensais pas en faire et je suis tombé un jour dans une librairie à Saint-Tropez sur un hors-série de « Starfix » consacré aux effets spéciaux. D’un coup j’ai eu la vision qu’on fabriquait un film et que c’était de l’illusion. Et j’ai eu envie de faire des effets spéciaux, de raconter des histoires mais c’était un rêve, comme on rêve d’aller sur la lune. J’ai fait un diplôme d’informatique et de comptabilité mais j’ai eu la chance d’aller au premier festival des scénaristes de la Ciotat en 98. Je me suis présenté, on devait écrire un scénario de court-métrage en 24 heures et j’ai gagné ! Le prix m’a été remis par Jean-Claude Iso et c’est ça qui m’a permis d’entrer dans le milieu du cinéma.
Et alors ?
Alors j’ai commencé à rencontrer des producteurs, des réalisateurs, j’ai bossé six ans, j’ai fait tous les métiers du cinéma sur le tas… La seule chose que je n’ai pas faite est… maquilleuse ! J’ai même fait costumier ! Je me suis retrouvé en 2004 sur une énorme série télé et c’est là que je me suis dit que je voulais être réalisateur.

C’était quoi cette série ?
Elle s’appelait « Bin’o Bin ». C’était tourné à Marseille pour Canal Algérie. J’étais premier assistant, ce qui était loin de ce que je res mais ce qui m’a permis de me dire que je voulais être réalisateur et à l’origine de projets. J’ai alors fait beaucoup de courts-métrages, quinze autoproduits et cinq produits dont mon dernier « Rocambolesque » en 2016 avec Amaury de Crayencourt et Nicolas Marié. Budget de 135.000 euros, cinq jours de tournage, des effets spéciaux, des cascades, des animaux exotiques… Le pied absolu ! On a fait 70 festivals, on a eu dix prix… surtout à l’étranger. Depuis, je me consacre à mon long-métrage, on part en financement avec un producteur.
Tout ça à Marseille ?
Non, j’ai fait une parenthèse de dix ans à Paris car il faut avoir les réseaux et ils sont à Paris. Donc j’y suis parti en 2008, j’ai créé mes réseaux, j’ai rencontré celle qui allait devenir ma femme, qui était d’Aix-en-Provence et je suis redescendu en 2018. Je fais toujours des allers-retours mais depuis le Covid, on fait beaucoup de réunions en zoom.
J’ai vu que tu avais été sur la série « Nos chers voisins »…
Non, j’ai fait la BD de « Nos chers voisins ». Il y a eu quatre tomes que j’ai écrits en tant que scénariste. Et je bosse aussi sur la série « Vestiaires » depuis six ans
comment s’est fait cette BD de « Nos chers voisins » ? ?
C’était une commande très particulière : je devais m’inspirer de la série sans la copier, inventant de nouveaux gags tenant sur une planche, avec un dessinateur, les gags devant être validés par la production, les agents les comédiens. C’était quelquefois compliqué à cause de l’égo de certains comédiens. Et puis il y a eu « Léo Loden » que j’ai co-écrit avec Aleston, le créateur, à partir du tome 16. Depuis cinq ans j’écris seul les scénarios. Nous sommes sur le tome 30 qui se passe pendant la peste à Marseille en 1720.
Alors, avec ça, la réalisation ?
Je voulais réaliser un film sur Jacques Offenbach dont j’adore la musique. C’est un scénario qui se passe sur un an de sa vie, lorsqu’il crée « La belle Hélène » en 1864 mais c’est un film très, très cher qu’on n’est pas arrivé à financer. C’est un film historique, donc en costumes et en France c’est le genre de film qui ne marche pas du tout. En France, la culture histoire-musique, ça ne marche pas. Du coup j’écris un roman d’après le scénario qui me permettra peut-être de revenir sur le film… si le livre marche !

Pourquoi Offenbach ?
Lorsque j’avais 11 ans, on m’a amené voir « La vie parisienne » au parc Borelli et j’ai été ébloui. Il y avait tout ce que j’aimais : c’était rigolo, il y avait de beaux décors, de beaux costumes, de belles musiques…
Et où en es-tu avec le fantastique, qui est un genre que tu adores ?
En fait aujourd’hui je me consacre au film que j’aimerais tourner, qui est à la lisière du fantastique. Mais le fantastique est compliqué à vendre en France. Je préfère faire un film un peu plus « faisable », avec un budget raisonnable. En France, il y a quelques films fantastique qui se font, peu sont bons, peu fonctionnent. A part « Le règne animal » et « Vermine » peu s’en sont sortis. Aux Etats-Unis, il y a des moyens énormes que nous n’avons pas, le savoir-faire et le public. Notre public a une méfiance sur le fantastique Français.
Alors, parlons des trois films que tu as choisis pour cette « Carte blanche » ?
Déjà, on fait la liste au Père Noël puis il y les contingences qui font qu’on peut avoir un film ou pas.
Ce qui m’intéresse c’est que j’aime les bons films, quel que soit leur genre.
J’aime partir dans un univers, qu’on me propose un voyage. Là, ce sont trois films très différents dans la forme, dans l’expression, les thèmes mais qui m’ont à chaque fois surpris, transporté et qui proposent une vision humaine, humaniste sur trois aspecta différents.
« Ceux qui travaillent » d’Antoine Russbach est un film très simple, très linéaire. La trajectoire d’un personnage joué par Olivier Gourmet qui m’a bluffé.
« Dans ses yeux » de Juan-José Campanella a été un choc pour moi. Une thématique sur la passion déclinée, qui peut rendre heureux ou malheureux. C’est une narration d’une pureté incroyable.
« Past lives – nos vies d’avant  de Céline Song c’est une belle surprise. C’est une narration à la manière de « Quand Harry rencontre Sally » une histoire où l’on ne sait jamais où ça va, qui sort des codes. C’est un film qui m’a fasciné »

Après cette parenthèse, qui est sa première carte blanche, Loïc repart sur son roman et sur son film.
C’est une rencontre passionnante avec un homme passionné, qui aime parler de son métier, de ses métiers devrais-je dire et dont j’attends son roman su Offenbach avec curiosité… On en reparlera, on a promis de se revoir.

Propos recueillis par Jacques Brachet

Au Six N’Etoiles avec Pascale Parodi

Lucas B MASSON… La passion cinéma


A le voir arriver vers moi, souriant, silhouette filiforme, il ressemble à un étudiant. Étudiant de… 33 ans qu’il est loin de faire !
Lucas a un métier peu ordinaire puisqu’il est créateur de bandes annonces de cinéma et c’est une passion qu’il a depuis sa plus tendre enfance et dont il a fait son métier. Aujourd’hui il est un des rares à pratiquer ce métier, ce qui fait qu’en plus de son talent, il est très recherché et a à son actif nombre de bandes annonces comme « 120 battements par minute » de Robin Campillo, « How to have sex » de Molly Manning Walker, « Neuf mois ferme » d’Albert Dupontel, « Chien de casse » de Jean-Baptiste Durand et bien d’autres, la liste est longue.
Il a également réalisé pas mal de courts métrages dont certains ont été primés.
Pascale Parodi, présidente de l’association « Lumières du Sud », aime nous faire découvrir ces hommes et femmes de l’ombre qui font le cinéma car hormis comédiens et réalisateurs, tous les corps du métier grâce à qui le cinéma existe, sont assez méconnus et sont pourtant indispensables à la réalisation d’un film.
Lucas Masson est l’un d’eux et c’est un vrai plaisir que de le rencontrer.

« Le cinéma est arrivé comment dans ta vie ?
Très tôt, cette passion m’a été transmise par mon père. Il n’était pas du tout dans le cinéma mais c’était un passionné. J’ai donc regardé dès quatre ans des films avec lui… notamment des films fantastiques et des films d’horreur ! Pour certains je n’avais pas le droit de les voir car ma mère veillait au grain ! En fait, on m’autorisait à voir seulement les bandes annonces. Du coup, très jeune j’ai voulu faire du cinéma et bien l’envie de faire des bandes annonces certainement grâce à ça.
Et tu n’avais pas envie de réaliser des films ?
Bien sûr, d’ailleurs j’en faisais avec le caméscope de mon père et je prenais ma petite sœur pour actrice mais j’ai toujours gardé cette passion pour la bande annonce. Ça m’a toujours beaucoup inspiré c’était pour moi très vecteur d’inspiration. Je suis heureux d’en faire et je réalise aussi des courts métrages. Malheureusement (ou heureusement) j’ai été extrêmement accaparé par mon métier et j’avoue que réaliser me manque mais c’était difficile de coupler les deux. C’est pour cela que cette année, j’ai décidé de ralentir la « BA » pour me remettre à la réalisation de mes propres projets.
Quelles études as-tu faites ?
Oui, j’ai fait des études techniques, après mon bac, j’ai fait un BTS des techniques de cinéma et d’audiovisuel durant deux ans puis une licence histoire d’avoir un bac + 3. Mais très tôt j’ai travaillé sur des tournages en tant qu’assistant réalisateur, assistant chef opérateur, J’ai beaucoup appris sur le terrain et parallèlement je faisais beaucoup de montage en autodidacte.

Comment entre-t-on dans ce métier ? Tu avais des relations ?
Je n’avais aucune connaissance, pas de piston ! Il faut, je crois, avoir beaucoup de détermination alors que je suis quelqu’un de relativement réservé. Mais il faut mettre ça de côté et foncer. Ça s’est fait un peu comme ça : je suis parti en vacances aux Etats-Unis à 19 ans mais je suis allé frapper au culot à la porte d’une grosse société de bandes annonces qui faisait celles de Steven Spielberg, JJ Abrams et le directeur de l’époque, Benedict Coulter qui était américain et avait vécu en France, a aimé mon culot car j’ai eu beaucoup de mal avec le vigile et avec sa secrétaire. Lorsque tu arrives à provoquer la rencontre, je pense que c’est plus facile qu’en France où c’est beaucoup plus cloisonné, il y a chez eux ce truc de « méritocratie » où l’on t’écoute.
Tu as donc travaillé avec eux ?
Non parce que j’habitais en France, je n’étais là que pour les vacances. Mais j’ai été « mentoré » par Bénédict Coulter qui m’a recommandé à une boîte française, « Sonia tout court » et durant trois ans j’y ai travaillé comme chef de projet. Je gérais la création de A à Z. Mais j’avais peu de flexibilité sur les choix des films. Du coup je me suis lancé en free lance depuis dix ans.
Ça n’était-il pas risqué?
Oui bien sûr, théoriquement mais j’ai eu cette chance que je n’ai jamais eu besoin de demander du travail, il est toujours venu à moi. Je refuse beaucoup plus de travail que ce que j’accepte. La chance a fait que le bouche à oreille a très vite fonctionné, j’ai eu de plus en plus de demandes. Aujourd’hui 50% des propositions !
Qui te choisit ?
C’est le distributeur à qui incombe la responsabilité du marketing du film et sa promotion et toute la communication du film.

Comment travailles-tu ?
Il faut connaître le film par cœur, le voir absolument et le regarder plusieurs fois. La première fois, je le regarde en spectateur pour recevoir les émotions puis je dissèque le film plan par plan, dialogue par dialogue, j’y reviens souvent dessus pour bien le connaître. Après ça, je travaille en toute liberté et le client vient me voir en toute connaissance de cause, aime avoir des propositions de ma part. J’ai besoin d’avoir cet échange en amont pour qu’il adhère à ma proposition. Le produit fini je le présente et, c’est rare, mais ça peut ne pas plaire et l’on voit les modifications à faire. Il y a des échanges pour que tout le monde soit content.
T’arrive-t-il de travailler sur des films Américains ?
Ça peut se faire lorsque le distributeur français n’aime pas la bande annonce américaine, lorsqu’elle ne s’adapte pas au marché français par exemple Chacun a sa version marketing par rapport à la culture.
Alors, tes courts métrages ?
Le dernier, « Baby sitting » remonte à une dizaine d’années mais il a été présentés dans beaucoup de festivals et a reçu une quinzaine de prix. J’ai décidé d’y revenir cette année. J’ai plusieurs projets dont un sur lequel je travaille en ce moment, qui se tournera entre la France, en Nouvelle Aquitaine et le Portugal, avec justement une grande actrice portugaise. J’ai encore trois autres projets, après il faudra que j’aille sur un long métrage. Du coup je vais ralentir  la bande annonce mais je n’arrêterai pas car c’est un métier qui me donne beaucoup de bonheur.
Ne vas-tu pas regretter de rater des films ?
Il y aura certainement des regrets comme j’en ai déjà eu. J’ai dû refuser des films parce que je ne pouvais pas tout faire mais ça ne m’empêche pas de dormir. Ça ne s’est pas fait parce que ça ne devait pas se faire.
Et en ce moment ?
Je travaille sur des bandes annonces pour le festival de Cannes qui approche à grands pas. Mais je ne peux pas en parler.
On peut parler de ces films que tu vas tourner ?
Celui que je vais tourner c’est court métrage… d’épouvante ! Ça se passe dans un hôtel de province en France. Ça met en scène une femme franco-portugaise émigrée d’une soixantaine d’années, jouée par Rita Blanco, grande actrice portugaise… On va lui faire passer une nuit cauchemardesque dans cet hôtel.
Tu reviens à tes premières amours !
Que veux-tu, on ne se refait pas !!! »

Propos recueillis par Jacques Brachet

Six-Fours – Six N’Etoiles
Alexandra LAMY : La première salle à son nom !

Nous avions deux hommes : Claude Lelouch et Clovis Cornillac. Le troisième homme… est une femme : Alexandra Lamy !
Venue, avec le réalisateur Edouard Bourgeon présenter en avant-première leur film « La promesse verte », La direction du Six N’Etoiles, Noémie Dumas en tête, a décidé qu’une femme serait la marraine de la troisième salle. Et tout cela s’est fait dans la joie, la bonne humeur et un brin de folie.
Nous avions pu voir le film le matin en projection où Alexandra est d’une force dramatique intense et l’on retrouvait, après une rencontre presse en toute intimité la comédienne, accompagnée de son réalisateur, une femme pétillante, lumineuse et pleine d’humour heureuse qu’on lui ait offert sa première salle de cinéma.
C’est accompagnée de nombre d’élus, d’invités et de Jean-Sébastien Vialatte, maire de Six-Fours que le champagne coula. Le maire dit sa joie qu’elle ait accepté d’être l’une des marraines de ce cinéma, son plaisir aussi de voir le succès non démenti de ces quatre salles, succès qui invite à penser à une… cinquième salle ! L’idée d’installer ce cinéma en cœur de ville et à proximité des spectateurs, fait que son succès va grandissant.


Le film
Quant à Alexandra, qu’on a souvent vue dans des comédies pétillantes, elle porte là sur ses épaules un drame à la fois humain, écologique et politique : la déforestation des forêts d’Indonésie afin d’exploiter l’huile de palme.
Martin (Félix Moati), étudiant qui fait une thèse sur ce sujet, y part pour enregistrer des preuves… Ce qui ne plait pas à beaucoup de gens qui en font fortune. Un complot est monté contre lui, on cache de la drogue dans son sac, il est arrêté et suite à un procès bidon, le voici condamné à mort.
Sa mère, Carole (Alexandra Lamy), qui vit à Paris, va monter au créneau et tout faire pour qu’il sorte de ce cauchemar. La route sera longue car elle va avoir à se battre contre les exploitants d’huile de palme, la police indonésienne, les milices, et les gouvernements, dont la France, qui profitent tous de cette industrie.
Mais ce que femme veut…


Félix Moati, qui a une déjà belle carrière débutée par « LOL » en 2009 y est son fils, beau, émouvant, ne sachant comment il va finir. Quant à Alexandra Lamy, elle est prodigieuse dans ce rôle de femme blessée qui va devenir une lionne pour défendre son « petit ».
Le film est violent, comme ce qui se passe dans ce pays et Edouard Bergeon signe là un film d’une force et d’une intensité inouïes,  qui dénonce ce qui se passe vraiment, non seulement en Indonésie mais partout dans le monde, pour le profit, soutenu hélas par nombre de pays qui y trouvent leur compte au passage. Un drame humain, un drame écologique qui met le doigt sur ce que va devenir l’univers si l’on n’y prend garde.
Un film coup de poing, tout à la fois fiction, docu et thriller mené de main de maître par de superbes comédiens.


La rencontre
C’est encore autour de ces petits bonbons multicolores et ces petites fraises (contiennent-ils de l’huile de palme ??) que nous retrouvons donc ce duo magnifique et volubile.
« D’où est parti ce scénario, Edouard ?
D’une manif d’agriculteurs. Dans mon film « Au nom de la terre », je racontai mon père, l’histoire que j’ai vécu à la ferme car je suis fils et petit-fils d’agriculteurs, très ancré dans ma terre et j’ai déjà produit quelques docs comme « Les fils de la terre », « Ferme à vendre », « Du miel et des hommes » et mon premier film de fiction « Au nom de la terre ». Je suis en train de terminer un doc intitulé « « Les femmes de la terre » qui fera l’objet d’une soirée sur France 2 le 27 février. Le sujet étant le combat des femmes qui sont passées de statut d’invisibilité à, aujourd’hui, actrices de la transition écologique.
Et le sujet du film donc ?
Des gens comme mon père avaient été encouragés à faire dans la culture du colza pour le transformer en diesel. Aujourd’hui on importe de l’huile de palme de Malaisie ou d’Indonésie qu’on retrouve un peu partout. Et pour cela, on tue le poumon de la vie, on déforeste, on brûle des villages. Le film est dans l’actualité et je pense qu’il y est pour un bon moment. Je pars donc de cette histoire qui résonne en moi. Etant journaliste et grand reporter, je suis allé au Brésil, en Argentine et j’avais déjà vu cette déforestation. A partir de là, très vite, je tombe sur un scénario dont l’héroïne est une femme.
Et cette femme…
(Rire d’Alexandra) Elle est là !

Comment y êtes-vous arrivée ?
Ce que j’ai aimé dans ce film est qu’au départ, Carole est madame tout le monde et qu’elle va devenir une héroïne. De plus, le scénario était très documenté et ça, c’est très agréable. C’est un sujet très important que le journaliste qu’est Edouard a réussi à en faire un film de fiction, très riche, très juste car tout est vrai.
J’aime aussi ce personnage pour tout un tas de raisons, entre autres parce qu’elle est l’œil du spectateur.
Le spectateur est comme elle, tout de suite en train de découvrir ce qui se passe là-bas. Pour moi comme nombre d’entre nous, l’huile de palme s’arrête à Nutella. Et en fait, on se rend compte qu’elle est partout.
Le personnage aurait aussi pu être un père à la recherche de son fils…
Alexandra :
Le fait est qu’elle soit une maman, ça veut dire aussi un sentiment d’impuissance. Comment se retrouver face à un lobbying industriel énorme devant lequel elle ne peut se battre qu’avec ses moyens ? C’est une mère avant tout, c’est viscéral et c’est d’autant plus fort car avec un homme il y aurait eu plus de violence. Elle est à la fois naïve, impuissante et cassée par tout ce qui se passe.
Le fils, Martin, a aussi un grand rôle…
Edouard : Il représente la jeunesse militante qui a beaucoup plus conscience de l’écologie aujourd’hui, qui se bat jusqu’au sacrifice.
Y aurait-il un peu de vous, Edouard ?
Bien sûr, ça me raconte un peu quelque part, pour aller témoigner jusqu’au bout du monde. Mais j’avais envie de raconter une femme au quotidien qui va devenir malgré elle une héroïne, prête à déplacer des montagnes pour aller sauver son fils. Je reste toujours à la hauteur de Carole, écrasée sous le poids de la République, dans un monde de diplomatie, du lobbying. Elle se pose plein de questions : Qui est en face  d’elle ? Quel pouvoir a vraiment chacun ? La mène-t-on en bateau ? Peut-elle faire confiance ?
Alexandra : Au milieu de tout ça, elle est bien obligée de faire confiance car elle doit sauver son fils à n’importe quel prix. Une mère est prête à tout, même à l’humiliation totale et à prendre tous les risques. Mais si elle arrive à le sauver elle sait qu’il continuera le combat car on ne peut pas faire taire la jeunesse.

Edouard, n’avez-vous pas eu des problèmes pour tourner en Indonésie et même en France ?
D’abord nous avons tourné en Thaïlande et on a la chance de vivre en démocratie où l’on a encore la liberté d’expression. Nous avons aussi tourné au Quai d’Orsay où nous avons rencontré des gens qui nous ont aidés.
Alexandra : Nous sommes des artistes et l’art permet de pouvoir débattre autour d’une projection. C’est important car on peut en parler avec le public, on a un vrai échange. L’art permet ça, il permet de gagner du temps, de voir mieux les choses et les comprendre et c’est mieux qu’une leçon qu’on pourrait nous donner. Ça permet une réflexion. Dans les pays où il n’y a pas de culture, c’est catastrophique. Nous sommes tous des « consom’acteurs » ! Si tout le monde prend conscience de ça, on est capable d’aller très loin et de faire changer les choses.
Edouard, le choix des comédiens qui entourent Alexandra est parfait : Félix Moati, Julia Chen, Sofian Khammen, David Chin, Antoine Bertrand, Philippe Torreton…
Alexandra est une actrice populaire, dans le bon sens du terme. Il fallait autour d’elle un casting cohérent, tout en nuances car les personnages sont assez ambivalents car pour la plupart, on ne sait jamais quel jeu ils jouent. Avec eux, ça a été une belle aventure, même si les conditions de chaleur et d’humidité ont été quelquefois difficiles à supporter. En février, il fait très chaud en Thaïlande !
Alexandra, vous avez joué presque sans maquillage. Pour une actrice est-ce difficile ?
Pas du tout car c’est le rôle qui veut ça. Que ce soit dans les forêts ou même à Paris ou aux Sables d’Olonne, ce n’est pas sa priorité d’être bien maquillée, bien coiffée. C’est même très loin de sa priorité car elle vit un drame. J’ai joué un rôle où le personnage avait un cancer et là, on était dans un autre monde. Avec la chimio, la femme essaie d’avoir un visage présentable, par des perruques et des maquillages et c’est compréhensible. Mais là, elle n’a qu’une idée en tête, c’est sauver son fils et lorsqu’elle se lève le matin, elle ne pense pas à son physique. Elle pense à son fils.
Vous avez eu une année chargée : quatre films et une série, comédienne, productrice, réalisatrice
Oui, j’ai fait « Alibi.com 2 », « La chambre des merveilles », « Zoch et Tenu », je termine « Louise Violet » qui se passe en 1889 et je joue une ancienne communarde qui part au fin fond de la France pour enseigner… Nous sommes encore dans le monde rural. J’ai aussi un peu produit « La promesse verte ». Et j’ai tourné une série « Killer Coaster » avec ma fille, Chloé Jouannet et ma sœur, Audrey Lamy. Et j’ai d’autres projets !
Et vous Edouard ?
Je continue dans le cinéma agricole et je voudrais réaliser un grand récit assez positif, une grande fresque sur la vie à la campagne mais pas comme on l’idéalise ou on la fantasme, mais dans la réalité.
Mais je ne lâche pas le documentaire ».


Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Alain Lafon

Maxime GASTEUIL soigne son burn out !

Benjamin Demay, le producteur, Maxime Gasteuil, le comédien,
Edouard Pluvieux, le réalisateur

Maxime (Maxime Gasteuil) fils d’un couple qui tient une modeste droguerie (Michel Boujenah et Chantal Lauby), a des ambitions telles qu’il est prêt à tout pour arriver, pour satisfaire son patron (David Salle), dont la fille,  Nadège (Anne Serra) est sa fiancée. Il cache ses parents dont il a honte et fait tout et n’importe quoi, jusqu’à en arriver au burn out. Son futur beau-frère Romain (Romain Lancy), lui propose alors de faire un stage de bien être animé par deux animateurs dits « claivoyants » quelque peu déjantés (Zabou Breitman et Lionel Abelansky). Mais ils n’ont pas l’air d’être les seuls dans ce superbe château, les « malades » étant plutôt dans un équilibre instable. Ainsi va-t-il se retrouver dans ce qu’il croit être une maison de cinglés… Et pourtant…. Ce sont peut-être ces cinglés qui vont lui faire retrouver sa « zenitude » perdue.
« 14 jours pour aller mieux » est un film choral signé Edouard Pluvieux et Maxime Gasteuil, d’une grande drôlerie, avec quelques jolis moments d’émotion, des scènes iconoclastes, et dont le scénario a été vécu par Maxime, Benjamin Demay, leur producteur et Edouard lui-même.
Les dialogues sont percutants, les gags se succèdent à vitesse grand V et Maxime, dont c’est le premier film (Et pour un coup d’essai…), percute l’écran. Cet humoriste s’essaie donc pour la première fois au cinéma avec Edouard, plus que son complice mais plutôt son frère, tant ils ont déjà de vécu ensemble, au théâtre, à la télé et aujourd’hui au cinéma.
Et tous les deux nous font la joie de nous rencontrer au Six N’Etoiles entre deux rires et dix fraises Haribo !
Il sont presque chez eux puisqu’ils nous avouent passer tous leurs étés au Brusc !

« Max, comment est né ce film ?
Il est né d’un stage que j’ai fait avec Benjamin, le producteur de mes spectacles. C’était un moment de ma vie où j’avais des doutes, où je faisais des choses sans jamais savoir si ça allait plaire au public. Ne connaissant jamais notre avenir dans ce métier, il arrive qu’on doute beaucoup. A tel point  que je me demandais si je ne devais pas changer de boulot et trouver un boulot « normal ».
Benjamin, qui connaissait un couple d’amis très calés dans le bien être, m’a proposé d’organiser un stage, une sorte de retraite. Moi qui suis grande gueule, plein de préjugés, qui déteste ce genre de truc, je finis par lui dire OK.
Je viens d’une famille assez ancrée, épicurienne, pragmatique et là, je me retrouve avec des illuminés. Il me semble être dans un sketch. On se retrouve confronté à des gens qui ont des plaies ouvertes et on se rend compte qu’après avoir vu des médecins, des psys, pris des médocs, ces stages sont leur dernière chance. Je dis alors à Ben qu’il faut en faire un film.
Edouard : Mais l’idée est de faire un film sincère, sans tomber dans la caricature. Ces gens semblent être « normaux », avec des métiers classiques mais ils sont en souffrance et on veut faire un film sans faire de mal à personne.
Max : On s’est rendu compte qu’au fil des jours ils allaient mieux, d’où le titre du film. Moi, je n’allais pas si mal en entrant et à la sortie je ne me suis pas senti mieux ! Mais cette expérience m’a fait grandir et j’ai rencontré des gens superbes.
Edouard : Après ça, moi j’y suis allé en observateur en jouant franc jeu et leur disant pourquoi j’étais là. J’ai énormément ri avec eux car ils ont beaucoup d’autodérision. Le maître-mot était la réalisation de ce projet mais c’était vraiment de ne pas faire une parodie mais une comédie où on allait rire ensemble.

Je crois qu’il y a longtemps que vous travaillez ensemble, justement…
Max : Dans ce métier, je suis pourri-gâté car Ben et Edouard sont vraiment des frères. Nous sommes trois mousquetaires et les deux s’évertuent depuis des années à me mettre en valeur. Nous n’avons qu’une envie : continuer à travailler ensemble, on a des idées plein les valises !
Edouard : Nous adorons notre métier et nous ne le faisons pas pour les paillettes mais pour rendre les gens heureux, et continuer à vivre des choses ensemble. Et dans cette tournée d’avant-premières, voir les gens rires, Aimer le film est un grand bonheur de les rencontrer. Ça nous rend fiers et heureux.
Jusque dans les petits rôles, vous avez des pointures !
Edouard : Lorsque j’ai montré le film au festival d’Alpe d’Huez, à Max, Ben et Zabou et que Zabou m’est tombée dans les bras j’étais le plus heureux. C’est ça mon salaire. Zabou est une immense actrice, Je l’avais vue au théâtre deux ans avant dans « Comment vous raconter la partie » de Yasmina Reza, j’avais pris une claque. Deux ans après, je la mets en scène… Normal, non ???
Et puis Michel, Chantal… C’est une chance hallucinante ! On peut se dire qu’on n’a pas fait ce film pour rien.
Justement, avoir Chantal Loby et Michel Boujenah pour trois scènes… Comment fait-on ?
Max : Michel m’a vu un jour sur scène et de ce jour il a été derrière moi. Nous avons développé une relation père-fils, il m’a invité à Ramatuelle.
Je connaissais la fille de Chantal Loby, Jennifer Ayache, chanteuse du groupe Superbus. Elle est venue avec sa mère voir le spectacle. A quelque temps de là, je reçois un message de Chantal, je n’en croyais pas mes yeux ! Elle avait envie de jouer avec moi ! En réunissant un jour Michel et Chantel, je leur ai dit : « Un jour vous serez mes parents dans un film ». Ils m’ont répondu qu’ils étaient prêts à faire n’importe quoi. Et ils ont tenu leur promesse !
Edouard : C’est vrai qu’ils n’ont que trois scènes mais leur personnage est important. Ils sont de modestes artisans qui aiment leur métier et Leur fils, mais lui a de grandes ambitions, il se détourne un temps car il a honte d’eux alors qu’en fait, son bonheur est là, sous ses yeux.
Le reste de la distribution est magnifique …
Edouard : Ma responsabilité et mon plaisir aussi étaient de me mettre à la hauteur de ces grands comédiens. Tous ont été bienveillants et ils nous ont tous portés.
Max, comment passe-t-on d’humoriste à comédien de cinéma ?
J’ai toujours voulu faire du cinéma mais passer de l’un à l’autre risquait d’être casse-gueule. Est-ce que les gens qui me suivent vont me suivre au cinéma car ils s’attendent peut-être à se taper sur les cuisses durant une heure et demie. Mais nous n’avons pas fait « Les Charlots », on a vraiment fait du cinéma et on embarque les gens quelque part.

Et comment passe-t-on d’un BTS commerce à humoriste ?
J’ai un père qui le plus marrant de la planète. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un d’aussi instinctif, avec autant d’esprit et moi petit, je prends ça comme une éponge. Mes dons, mon aisance, viennent de là. Du coup il est fier et il fait une projection sur moi car ma mère m’a dit qu’il aurait voulu faire ce que je fais. J’avais donc le choix de devenir, comme mon père et mon grand-père, compagnon du devoir… ou comédien ! J’ai hésité de 16 à 19 ans puis je suis  parti à Paris. Grâce à mon père qui m’a aidé dans mes galères et à tout fait pour que je réalise mon rêve. Pour moi et pour eux, je n’avais pas le droit de me rater.
Edouard : Lorsque j’ai vu Max pour la première fois sur scène, j’ai tout de suite vu un comédien. Je me suis dit qu’il irait tout droit au cinéma, avec son air à la Belmondo ! Et Dany Boon qui l’a fait jouer a dit qu’il lui faisait penser à Philippe Noiret jeune… Nous avons vu la même chose. C’est un grand acteur en devenir. Ma seule peur était de ne pas rater « son » premier film.
Et toi Edouard, comment es-tu arrivé au cinéma ?
A 8 ans, je savais que je voulais écrire et réaliser des films… Mon premier film, je l’ai réalisé à 36 ans ! J’ai toujours écrit, j’ai été journaliste, j’ai été rédacteur en chef et j’ai commencé à écrire des conneries pour la radio, pour les Guignols. Puis j’ai rencontré Kev Adams et depuis on a écrit ensemble tous ses spectacles. J’ai fait mon premier film grâce à lui.

Les 3 mousquetaires face au public
Et avec Noémie Dumas, directrice du Six N’Etoiles

En fait, vous avec tous les deux Kev Adams en commun !
Max : Il faisait un spectacle avec Gad Elmaleh et, me voyant sur scène, il m’a proposé de faire leur première partie. Le public m’a vraiment porté et du coup j’ai décidé de me projeter seul en scène. Et en plus, c’est grâce à lui que j’ai rencontré Edouard. Dix ans plus tard… Nous voilà !
Aujourd’hui, toujours des projets tous les trois ensemble ?
Max : Oui, je termine ma tournée avec mon spectacle « Retour aux sources » et on a des projets.
Edouard : Nous sommes en train de finaliser le prochain tournage qui devrait se tourner en Juin-Juillet. C’est pour ça que Benjamin va arriver en retard pour nous rejoindre car il a des rendez-vous.
On peut en parler ?
Edouard : Oui… et non. Tout ce qu’on peut en dire c’est que ce ne sera pas un film choral, qu’on retrouvera quelques comédiens avec qui on a formé une famille et que ce sera une sorte de… « Maman, j’ai raté l’avion » !
Max : Et puis, on a l’idée d’une pièce de théâtre. Notre rêve ce serait de faire « Un singe en hiver » avec Jean Dujardin. Mais c’est encore un peu loin ! »

Propos recueillis par Jacques Brachet
Photos Alain Lafon

Chasse gardée : Les ruraux contre les parisiens


Simon (Hakim Jemili) et Adélaïde (Camille Lou) vivent une vie trépidante et bruyante à Paris. Métro, boulot, embouteillages, bruits en tous genres sans compter les cris incessants de leurs deux enfants survoltés qui vivent dans un étroit appartement.
Ils ne rêvent que nature, grands espaces et silence.
Et voilà qu’ils dégottent une annonce inespérée : immense maison, grand champ, forêt… pour une bouchée de pain… Trop beau pour être vrai !
Et justement si, au départ tout semble un conte de fée, tout va changer à l’ouverture de la chasse où tout le village mené par deux gentils cinglés (Didier Bourdon et Jean-François Cayrey) vont envahir leurs bois, tirer dans tous les sens, sur leur maison entre autres, sonner de la trompette dès l’aube… Bref, pire qu’à Paris.
Abusés par la directrice de l’agence (Chantal Ladesou) qui leur a fait visiter la maison au printemps, ils se rendent comptent qu’ils ont été dupés. Sans compter que l’ancien propriétaire a été retrouvé mort dans leur puits…°
La guerre étant déclarée, tous les coups sont permis de part et d’autre dans un bruit effrayant,des pétarades, des engueulades, des cris et des courses effrénées.

Le film est signé Antonin Fourlon & Frédéric Forestier. C’est une immense et très bruyante guerre de territoire, dans une ambiance complètement iconoclaste… Situation impossible entre les gentils ruraux un peu limites et les gentils parisiens qui viennent en pays conquis.  Un film drôle, dingue, avec une équipe chorale de comédiens, d’un côté les naïfs parisiens, de l’autre les ruraux pas méchants mais obnubilés par la chasse aux sangliers. En prime un Thierry Lhermite (père d’Adélaïde), qui, en avocat coincé vient essayer de calmer les esprits et se retrouve bourré comme un cochon. Une scène d’anthologie !
On rit beaucoup… Et on continue à rire en rencontrant les deux réalisateurs qui ont commis cette grande farce qui pourtant n’est pas si loin de la vérité. « Promis – nous dit Antonin – on n’a rien amplifié, rien exagéré. La vie à Paris est aujourd’hui invivable, hostile, il y a de plus en plus de surpopulation, l’enfer de la vie parisienne existe vraiment.
J’ai écrit le scénario durant le confinement, dans 60 mètres carrés avec deux jeunes enfants, deux fauves en cage. Du coup, on rêvait d’un jardin, d’un coin de campagne, comme beaucoup de gens l’ont fait.

C’est donc du vécu ?
Oui – dit Fréderic – nous sommes deux parisiens et, malgré notre différence d’âge (Je suis un peu plus vieux !) nous avons vécu les mêmes choses avec des enfants vivant dans un lieu étroit. Avec l’envie de prendre l’air ailleurs.
Avec le Covid, beaucoup de gens sont partis à la campagne en pensant pouvoir tout maîtriser mais beaucoup vont se rendre vite compte qu’ils ne maîtrisent rien du tout, ni la flore, ni la faune… ni la population.
Il faut beaucoup d’espoir et de naïveté car en fait ce sont deux cultures et il faut pouvoir s’adapter.
Lorsqu’on parle d’un film de chasse, on pense tout de suite à Didier Bourdon et son sketch de la galinette cendrée ?
C’est vrai que ça nous vient tout de suite à l’esprit, c’était une référence… mais pas une évidence pour lui ! Pour lui c’était de la caricature et le sketch date de trente ans ! Il n’avait pas forcément envie de refaire ça. Mais lorsqu’il a lu le scénario, il a vu que l’esprit était différent, que même la chasse était différente même si les clichés sont toujours là comme l’âge des chasseurs, le plaisir de se retrouver, de boire, de chanter. A la campagne, si vous quittez la chasse, vous quittez la sociabilité.
Comment arrive-t-on à mettre en scène une meute de sangliers ?
Un sanglier, c’est très docile et très intelligent… surtout lorsqu’on les trouve dans une réserve ! Nous avons reconstruit le jardin de la maison à l’identique où, durant un mois, on les a habitués à être nourris tous les matins à la même heure. Un jour, on les a filmés en caméra cachée, dans le vrai jardin, avec beaucoup de nourriture !

La scène du banquet a-t-elle été difficile à tourner ?
Techniquement… il a suffi de remplir les verres !!! Nous avons tourné la scène en sept chapitres. Il faut savoir que tous les figurants étaient de vrais chasseurs. Au fur et à mesure du tournage, ça s’échauffait. Alors qu’on leur donnait à boire du jus de groseille, certains y ont ajouté de l’alcool… Ils apportaient leurs munitions !
La scène de Thierry Lhermitte, avocat parisien psychorigide se transformant en poivrot va devenir culte !
Au départ il veut le prendre de haut et vient pour les laminer. L’alcool aidant il se laisse aller à l’euphorie, aux chansons, à l’alcool et devient ami avec l’ennemi, sous les yeux atterrés de sa fille et de son gendre… Thierry s’est beaucoup amusé à tourner cette scène.
Comment s’est fait le choix des comédiens ?
Au départ tout commence avec Didier Bourdon. Puis on a pensé à Thierry Lhermite et le fameux « Dîner de cons », avec son côté snob qui va plonger dans l’alcool. Hakim, Fred avait déjà travaillé avec lui et je le suivais sur les réseaux sociaux. Camille a été une proposition du directeur de casting. On l’avait surtout vue dans des rôles dramatiques. J’adore sa voix (elle est aussi chanteuse), sa spontanéité, sa fraîcheur. Et en plus, elle est belle !
Antonin est chasseur mais pas vous Frédéric…
(Il rit). Je suis le parisien type et tout à fait néophyte. Mais je n’ai pas d’à priori sur la chasse, pas de clichés et j’avoue avoir appris beaucoup de choses. Ça ne m’a pas fait devenir chasseur pour autant. Mais j’ai découvert la complexité et le paradoxe de la chasse, ses tenants et ses aboutissants. Ça m’a éclairé sur la chose !

Avez-vous eu des problèmes avec les vrais chasseurs ?
Il faut avouer qu’on ne leur a pas fait lire le scénario… On le leur donnait au jour le jour ! Ils ont quelquefois été dubitatifs mais se sont vite rendu compte que c’était une comédie bon enfant et que tout le monde en prenait pour son compte. Et surtout que c’était sans méchanceté.
Connaissaient-ils toutes ces chansons paillardes ?
Mais oui, bien sûr. Evidemment, il ne fallait pas que ça aille trop loin car c’est tout de même une comédie familiale. Il y a, c’est vrai, pas mal de gros mots dans cette scène mais aujourd’hui ça ne choque même plus les enfants.
Le disque sortira-t-il ???
Oui bien sûr, chanté par Thierry Lhermite et Chantal Ladesou !!!
Comment avez-vous eu l’idée de travailler-t-on à deux sur le scénario ?
Antonin :
Au départ, c’est moi qui écris et au fur et à mesure je passe les scènes à Fred qui donne son avis. J’ai déjà écrit des scénarios pour lui. C’est donc venu tout naturellement, d’autant qu’il y avait des scènes un peu compliquées pour moi dont c’est le premier film. On se connait bien et on a l’habitude de travailler ensemble. Les décisions sont plus rapides en travaillant à deux, nous avons gagné beaucoup de temps.
Frédéric : J’avais envie de guider ce petit jeunot dans le métier !
Antonin :   Et moi d’accompagner la retraite du vieillard !
Ça vous a donné envie de récidiver ?
Antonin : Pourquoi pas, si le film marche. J’ai déjà deux scénarios sous le bras et si Fred est OK, on continue ! »

A suivre donc
Jacques Brachet
Photos Alain Lafont

Vahina GIOCANTE… Sept ans de réflexion


« Femmes »… 22ème !
Eh oui, le festival varois a aujourd’hui 22 ans et, après loucha Dassa qui l’a créé, c’est, depuis quelques années, Luc Patentreger qui l’a repris de main de maître, mettant toujours dans les projecteurs, la femme dans tous ses états.
Du Six N’Etoiles au Liberté en passant par le Casino Joa, le Royal, le centre Tisot, le centre Nelson Mandella ou encore le Chapiteau Circoscène, la femme est sur les écrans varois, venue de tous les pays, avec de belles ambassadrices telles que Virginie Peyre, présidente de l’association « Les amis de Romy » qui œuvre contre les violences faites aux enfants, Béatrice Metayer Chargée de mission politique de santé publique à Six-Fours et partie prenante de ce festival et celui-ci  a été inauguré au Six N’Etoiles par la lumineuse comédienne Vahina Giocante.
De racines corse et andalouse, ayant vécu à Aix-en-Provence, cette belle femme blonde au regard bleu horizon est on ne peut plus méditerranéenne. Après une carrière débutée à 13 ans, cet ex danseuse a tourné avec les plus grands réalisateurs : Benoit Jacquot, Claude Chabrol, Gabriel Aghion, François Ozon, Philippe Lellouche… et bien d’autres.
Partenaire de Depardieu, Bruel, Emmanuelle Béart, Sandrine Bonnaire et aussi bien d’autres, elle a un jour décidé de tout arrêter pour aller se reposer, faire un retour sur elle-même et pour cela, elle a choisi Los Angeles où elle est restée sept ans. Sept ans de réflexion dit en riant l’invitée du festival

Soirée d’inauguration…
… Avec Luc Patentreger

Aujourd’hui elle s’en revient pleine d’usage et raison, pleine de projets, pleine d’énergie… Et toujours aussi belle !« Vahina, vous voilà redevenue méditerranéenne. Est-ce que cela vous a manqué ?
Evidemment car mon cœur est attaché à la région. Ici, je me sens chez moi. Je me sens d’ailleurs chez moi sur tout le pourtour de la Méditerranée !
Aujourd’hui j’habite à Paris, après être passée sept ans aux Etats-Unis dont je suis revenue en mai dernier mais il se trouve que mon compagnon est de Nice et l’on se débrouille toujours pour venir y passer du temps.
Votre premier amour n’a pas été le cinéma mais la danse…
C’est vrai, ça a commencé par la danse à l’Opéra de Marseille, avec les ballets Roland Petit. La danse a été mon premier amour, je me rêvais en danseuse étoile, puis mon chemin a bifurqué.
Pour l’avoir rencontré, Roland Petit n’était pas un gentil !
(Elle rit) Oui, bien sûr, mais la danse est un métier de rigueur. Il faut accepter d’être formatée pour ça, mais en même temps, c’est très constructif. C’est important d’avoir ce cadre très jeune. C’est beaucoup de travail et je suis partisane de la discipline. Sans cela on n’arrive pas à grand-chose. En tout cas, cette discipline m’a beaucoup aidée pour la suite. Elle m’a donné une structure.
La danse ne vous a pas manqué ?
Oui, beaucoup car ça m’a appris à avoir un rapport au corps. Il y a mille façons de marcher, de se mouvoir, de bouger, de se tenir. J’ai continué les pratiques de la danse, avec plus de souplesse, moins de rigidité.

« 99 francs » avec Jean Dujardin
« Secret défense »
« Bellamy » avec Gérard Depardieu

Alors, pourquoi avoir arrêté ?
Parce qu’à 13 ans, on m’a proposé un premier rôle dans un film. J’en ai parlé à la directrice qui m’a dit de faire un choix : faire la belle devant une caméra ou être présente 22 heures par semaine pour m’entraîner ! Faire un choix si jeune a été un peu compliqué mais comme j’avais l’esprit rebelle, j’ai choisi le cinéma, la liberté, sans savoir où ça allait me mener. Mais c’est pareil en danse, devenir étoile n’est pas une promesse. Je ne regrette absolument pas d’avoir fait ce choix.
Alors, ce premier film ?
« Marie, baie des anges » de Manuel Pradal. Ce qui est drôle c’est que nous avons tourné dans les parages et il y a une scène où l’on voit en fond les deux frères… comme aujourd’hui ! Retour au bercail !
Après ce premier film ?
Tout a continué, je me suis retrouvée face à Emmanuelle Béart et Sandrine Bonnaire dans « Voleur de vie » d’Yves Angelo, ont suivi « Le libertin » de Gabriel Aghion, « Pas de scandale » de Benoît Jacquot, tout a continué avec « Un lever de rideau » de  François Ozon, « Bellamy » de Claude Chabrol… J’ai vraiment eu de la chance, sans jamais devoir frapper aux portes, même s’il y a quand même eu beaucoup de travail. Et tout s’est enchaîné jusqu’à mes 35 ans. Là j’en ai eu marre d’être toujours exposée sur les plateaux, dans les médias. J’ai voulu prendre du recul, savoir qui j’étais vraiment en dehors du cinéma.
Et alors ?
Je suis partie à Los Angeles pour me faire oublier, pour me retrouver… Plutôt pour me trouver,  me découvrir. A Los Angeles il y a quelque chose de très léger, les gens sont accueillants et n’ont pas de jugement de valeur sur vous. C’était une page blanche pour moi, même si la page blanche pouvait être dangereuse. Mais ça m’a fait du bien.

Sept ans, c’est long !
(Elle rit) Sept ans de réflexion ! Ce qui m’a fait revenir en France et tourner de nouveau avec plaisir et gratitude.
Avez-vous tourné là-bas ?
Oui, dans des films indépendants, dans une autre langue, dans d’autres structures, d’autres façons de faire. Mais mon cœur est ici !
Vous n’aviez pas peur d’être oubliée ?
Non, car je n’ai jamais été rongée par l’ambition. La célébrité ne m’a jamais vraiment excitée. J’ai toujours eu envie de jouer, de m’amuser. Et si l’on m’a oubliée, ce n’est pas grave. C’est même bien car aujourd’hui je ne suis plus la même, je suis plus solide, je me connais mieux. Je suis sereine et cette parenthèse, ça a été quelque chose d’extrêmement salvateur. Je prends les choses avec recul et j’ai des projets à moi !
Parlons-en
Je n’ai pas encore envie d’en parler car c’est en phase de développement. Je vous en parlerai en temps utile ! Ce que je peux vous dire c’est que ce n’est pas seulement en tant que comédienne mais aussi scénariste, réalisatrice et possiblement productrice.
J’ai plein d’envies, il y a mille manières de raconter des histoires. Jusqu’ici j’ai toujours raconté les histoires des autres, il est temps que je raconte mes propres histoires.


Bientôt sur les écrans : « Valensole 65 »

Depuis votre retour, une série est sortie ?
Oui, « La jeune fille et la nuit » de Bill Eagles qui a d’ailleurs été tournée dans la région, et qui a eu une belle audience. Et puis, j’ai tourné dans un film « Valensole 65 », de Dominique Filhol, avec Mathias Van Khach. C’est tiré d’une histoire vraie où un couple d’agriculteurs a vu ou cru voir un engin au milieu de leurs lavandes, à Valensole le 1er juillet 65. On en a beaucoup parlé à l’époque.
Parlons un peu de ce festival « Femmes » qui vous a amenée chez nous en tant qu’invitée.
J’y ai été invitée par Virginie Peyre, qui est ambassadrice du festival. J’ai trouvé le concept extraordinaire car il y a de plus en plus de réalisatrices et qu’elles ont une façon différente de travailler. C’est pour moi un festival précurseur car on y voit les choses, les problèmes, la façon de faire de façon différente. Evidemment, au niveau des femmes, il y a encore beaucoup de travail mais on y arrive plus facilement par le dialogue. Ce genre d’événement nous offre la possibilité d’échanger et pas nécessairement en étant en colère, même si quelquefois il y a de quoi l’être. On a la chance que le cinéma soit pour les femmes un vecteur important.
Au bout de sept ans d’absence, comment trouvez-vous le cinéma français ?
Je le trouve encore vivant, diversifié, je pense qu’il a bien résisté à la pandémie. Il reste toutefois encore un peu frileux mais il n’est pas formaté. Il se tourne encore de belles œuvres. Je pense qu’en France nous sommes des chanceux et c’est de vivre aux Etats-Unis que ça m’a permis de m’en rendre compte !
Aujourd’hui je reprends le chemin de ce cinéma pour pouvoir explorer toutes mes envies avec plein d’autres bagages. »

Propos recueillis par Jacques Brachet

Leïla Messaï, Virginie Peyre, Vahina Giocante, Luc et Martine Patentreger, Hicham Mrabit


Serge REGGIANI aurait 100 ans

Avec ses enfants

Si je vous parle aujourd’hui de Serge Reggiani, c’est qu’il aurait eu cent ans cette année et que ma carrière de journaliste a commencé (très mal !) avec lui
je viens tout juste d’entrer à Var-Matin, au milieu des années 60, alors que les «yéyés» sont en pleine explosion et que ma seule envie est de les rencontrer.
Et voilà que ma rédactrice en chef me demande, pour ma première grande interview, d’aller rencontrer… serge Reggiani qui passe à l’opéra de Toulon avec Jacques Martin et de faire un papier sur les deux artistes.
Martin, passe encore mais Reggiani, ce «vieux» comédien (qui n’a alors pas encore 50 ans !) je connais son nom, quelques titres de ses films mais le chanteur me parle peu
Contre mauvaise fortune bon cœur, de toutes manières je n’ai pas le choix. Je prends donc rendez-vous avec lui, bosse sa bio et me pointe à l’opéra où le monsieur m’attend et m’accueille chaleureusement, ce qui me rassure un peu.

A l’Opéra de Toulon
Encore à Toulon, quelques temps après

Il m’invite à m’asseoir, je sors mon petit magnéto de poche dont je me sers pour la première fois et je pose ma première question à laquelle il commence à répondre. Mais très vite, il s’arrête de parler et me dit : «Votre magnéto ne tourne pas».
Panique. Quand on m’appelle «jako la bricole» c’est par ironie car je ne sais pas planter un clou ! Alors la mécanique, n’imaginez même pas !
Après plusieurs essais infructueux, de plus en plus paniqué, Reggiani voyant ça, me dit : «attendez, je m’y connais un peu donnez-moi l’appareil». Et la sentence tombe très vite : «Vous n’avez pas mis de pile !».
Je rougis de confusion mais notre Reggiani, toujours d’une gentillesse extrême (il a très vite compris qu’il a affaire à un néophyte, dans tout le sens du terme !) me dit alors : «Ce n’est pas grave, c’est pour un journal, prenez des notes…»
Et re-panique car je n’ai ni papier ni stylo. Je sens le fiasco et surtout j’appréhende la colère de l’artiste… qui me propose alors son stylo et son bloc-notes !
De plus en plus confus, je reprends en tremblant l’interview mais j’écris vite, mes questions le rassurent car il voit que j’ai bossé, que je sais ce qu’il a fait et qu’en fait mes questions sont pertinentes.
Comme il doit se préparer pour aller chanter, que Jacques Martin a presque terminé et que je lui dis que je dois à son tour l’interviewer, il me dit en souriant : «Gardez mon stylo et mon bloc, vous les déposerez dans la loge en partant»

A Aix-en-Provence durant son exposition
Après le spectacle

Je pousse un grand ouf de soulagement, m’excuse et le remercie chaleureusement. Il me dit en riant : «Il y a un début à tout et vous saurez ce qu’il faut faire la prochaine fois. Bon courage».
On ne pouvait pas être plus gentil.
Mais là ne s’arrête pas l’histoire.
Je vais donc à la rencontre de Jacques Martin et là, tout se passe bien, je suis équipé. Même si le monsieur n’est pas aussi simple et gentil que le premier. Mais bon, j’ai mon interview et je peux passer dans la fosse d’orchestre pour aller faire quelques photos de Serge Reggiani.
J’ai un appareil photo… qui marche… et qui flashe malheureusement.
Au premier flash, l’artiste s’arrête de chanter, pointe son doigt vers moi (heureusement, je suis dans le noir !) et s’écrie : «J’ai dit pas de flash… Sortez !».
Je ne demande pas mon reste… Courage, fuyons !
Revenu dans les loges, je me dis que je vais attendre la fin du tour de chant pour m’excuser, arguant que je n’étais pas dans la fosse quand il a demandé de ne pas flasher. Aujourd’hui, on n’a plus de flash mais à l’époque…
Je rencontre le directeur de l’opéra, qui est un ami de mon père, à qui je raconte mon histoire. Il rit de bon cœur et me suggère : «Je serais toi, je partirais sans le revoir. Il ne t’a sûrement pas reconnu »

Je crois qu’il a raison. Je vais déposer bloc et stylo dans sa loge… Et je m’enfuie comme un voleur.
C’aurait pu être la fin de «ma carrière» si je n’étais pas tombé sur un type épatant comme Serge Reggiani qui, ce jour-là, m’a donné une belle leçon. De ce jour j’ai toujours été précautionneux, vérifiant le magnéto, ayant toujours un bloc et plusieurs stylos (on ne sait jamais !) dans ma sacoche.
Deux, trois ans plus tard, j’ai de nouveau rencontré Serge Reggiani pour l’avant-première du film «Comptes à rebours» qu’il était venu présenter à Toulon avec le réalisateur Roger Pigaut. Je lui rappelai notre première rencontre dont d’ailleurs il ne se souvenait pas mais cela l’a fait rire.
Je devais le retrouver une  fois encore à la fin de sa vie. Invité d’honneur au Festival de la Chanson Française à Aix-en-Provence. Il était déjà très affaibli et venait présenter son livre, une exposition de ses œuvres car il avait découvert la peinture sur le tard et donner un récital. Qu’il donna d’assis car il avait du mal à se mouvoir. C’était à la fois pathétique et émouvant. Émouvant surtout car  il était entouré de ses enfants Karine et Simon qui vinrent le rejoindre pour chanter avec lui.
Mais le repas donné en son honneur fut joyeux et brillant car il nous raconta plein d’anecdotes.
Voilà comment je débutais dans ce métier qui aurait ne pas avoir de suite… Et que je poursuis depuis plus de 50 ans !

Jacques Brachet

Céline GAILLEURD & Olivier BOHLA
nous racontent une Italie muette


« Italia » est un film documentaire unique en son genre, signé Céline Gailleurd et Olivier Bohla, un couple de réalisateurs, qui retrace la naissance du cinéma italien – muet évidemment – en 1895 à l’arrivée du parlant en 1929.
Un cinéma alors prospère, qui a rayonné dans le monde avant de tomber en désuétude à l’arrivée du parlant. Nos deux réalisateurs ont fait de nombreuses recherches pour trouver ces images rares qui ont échappé aux incendies, à la destruction, à la guerre, aux vols.
Au départ, comme partout ailleurs, les films étaient surtout des documentaires, historiques, de propagande, des chroniques de guerre, des témoins d’une époque, avant qu’en 1902 naissent les premiers films de fiction, souvent tirés de romans célèbres comme « Otello », « Roméo et Juliette », « Hamlet »… Sans voix bien sûr, ce qui faisait dire à Pirandello qu’il haïssait le cinéma, lui l’homme de théâtre et des mots.
Petit à petit le cinéma attira de plus en plus de monde et naissaient alors les premières stars comme Lyda Borelli ou Bartomoméo Pagane premier Maciste du cinéma.
Le parlant arrivant certaines stars disparurent, leur voix ne passant pas l’écran.
Ce documentaire est un témoignage de ce que furent les premiers pas du cinéma italien et pour accompagner ces films sans son, c’est Fanny Ardant qui dit des textes d’auteurs comme Dali, Fellini et quelques autres. Sa voix unique, suave, reconnaissable entre toutes, pour dire des textes d’hommes donne à ce film une autre dimension.
Par contre, la musique paraît parfois dissonante, sinistre, intempestive.
Par ailleurs, ce film nous fait découvrir un cinéma que l’on connaît très peu par rapport à notre cinéma muet français ou même américain. D’ailleurs le film est également sorti en Italie car les Italiens eux-mêmes n’ont plus personne pour s‘en souvenir.


« Olivier, pourquoi ce film sur le cinéma muet italien ?
Au départ, c’est un projet de Céline. C’est le sujet de sa thèse qu’elle a choisi en 2010 à l’Université d’Aix-en-Provence.
Et pourquoi le film ?
A l’époque il y avait très peu de choses accessibles sur ce sujet. On a dû faire des recherches sur place, rencontré des chercheurs. De plus les restaurations en Italie n’étaient pas ce qu’elles étaient en France. A l’époque, il était plus vendeur de restaurer un film de Visconti et de le présenter à Cannes en présence d’Alain Delon ! Mais peu à peu, Céline a commencé à défricher les choses et s’est rendu compte qu’il y avait énormément de choses à montrer. En fait, il y avait très peu de spécialistes en Italie car il n’y avait pas comme en France d’obligation à sauvegarder et conserver tous les films. C’est venu très tard et beaucoup de films ont été niés, négligés et détruits.
La cinémathèque a quand même gardé des choses ?
Il faut savoir que si, en France, il n’y a qu’une cinémathèque qui centralise tout, en Italie il y en a cinq qui ne communiquent pas entre elles. Il n’est pas rare qu’une d’entre elle ait une bobine de film et qu’une autre ait la suite. Et ils ne partagent rien ! Il y a peu de restaurations complètes dans une seule cinémathèque.

Le cinéma muet les intéressait peu en fait ?
Exactement. Il n’y avait ni intérêt, ni de moyens et ce n’est que la cinémathèque de Bologne a commencé à s’y intéresser en 1980. De plus, les copies étaient composées de nitrate, très inflammables et explosives. Et il y a eu beaucoup d’accidents graves. Du coup, lorsqu’on les a reproduites, c’était en noir et blanc même si la copie était colorisée et on a ensuite détruit les copies d’origine. Heureusement, on a trouvé beaucoup de copies à l’étranger car ce cinéma a eu un rayonnement mondial à l’époque. Aujourd’hui, il y a 15% de films préservés.
C’est peu ?
En effet, ce n’est pas énorme, mais c’est pareil à peu près partout. Et même pire dans certains pays. A l’époque, les films ont disparu pour nombre de raisons : la destruction mais aussi les guerres, les vols, les incendies… Donc beaucoup de films ont été perdus. D’où aujourd’hui l’intérêt du numérique, même si ce n’est pas le top car on perd aussi des disques durs. Mais ça permet de mieux conserver les documents.
Comment est venue Fanny Ardant à ce projet ?
Etant producteurs de nos films, nous voulions faire celui-ci entièrement en France, malgré le sujet car au départ il n’était pas question d’une version italienne. On cherchait donc une actrice qui ait une voix particulière et l’on a très vite pensé à Fanny Ardant, tout en restant un rêve inaccessible.
Hors, devant tourner un film dans les Hautes Alpes, nous avions choisi une maquilleuse, qui nous apprend ne pas être libre tout de suite car elle doit travailler à Marseille… avec Fanny Ardant ! Nous lui demandons donc de lui parler de notre projet sans grand espoir. Mais elle a tenu sa promesse. Le premier jour du tournage, son agent nous appelle pour nous dire qu’elle est intéressée et qu’on lui envoie le scénario. Nous n’en revenions pas ! Mais on était en 2017 et le film devait se faire en 2021. Elle nous dit alors qu’elle attendrait. Et effectivement lorsqu’on a été prêt, elle était toujours d’accord. Elle a vu le film, a lu les textes et en une après-midi elle a tout enregistré et nous a proposé de le faire pour la version italienne.
Pourquoi choisir une comédienne pour dire des textes d’hommes à la première personne ?
Nous avons pensé qu’avec un homme ce serait trop redondant. Et puis c’est le cinéma italien qui a inventé la diva avant la star. Sans compter qu’on reconnaît aussitôt la voix et la façon de parler de Fanny Ardant !

N’avez-vous pas pensé que ça risquait de troubler le spectateur ?
On a pensé que ça pouvait le désorienter au début mais qu’il se rattraperait en prenant le train en marche. En fait, il finit, au bout d’un moment, de comprendre que ce sont des textes écrits par des hommes. Il faut juste un temps d’adaptation, accepter d’entrer dans cet univers et se laisser aller au texte et à la voix. De regarder la beauté des choses et d’écouter la poésie des textes.
Vous avez fait d’autres films avec Céline !
Oui, on travaille presque toujours ensemble.
En 2010 nous avons fait un film sur André Labarthe qui faisait une exposition à Paris, en même temps que deux autres expositions : Agnès Varda et Jean-Luc Godard.
Nous avons fait un petit film sur lui puis un sur Godard. A l’expo de Godard on s’est rendu compte qu’il ne voulait rien garde car il fallait tout ramener en Suisse et c’était trop cher. Il a décidé de jeter beaucoup de choses et d’en donner d’autres aux Emmaüs. Mais donner deux enceintes surmontées d’un tire-bouchon, entre autres, les Emmaüs n’en n’ont pas voulu… Et on a tout récupéré !
Qu’en avez-vous fait ?
On a pensé faire un film avec tous ces objets, en ajoutant les interviewes et ce qu’on avait déjà tourné. On a proposé le sujet à l’INA. Du coup, on a remonté une fausse exposition, les archives nous ont donné des extraits d’interview. C’est le portrait mélancolique de toute une génération, de reportages, de films. Aujourd’hui tout est entreposé… chez ma mère !

Pascale Parodi, Olivier Bohla, Noémie Dumas

Et Agnès Varda ?
Lorsque Céline Faisait sa thèses, elle a appris qu’Agnès Varda cherchait une assistante. Elle s’est présentée. Agnès aimait bien que ce soit une jeune femme et de plus elle aimait les sujets quelle abordait. Elle avait énormément besoin d’un archivage de ses affaires, car elle était très désordonnée. Elle préparait « Les plages d’Agnès » et elle voulait faire des images-souvenirs avec entre autres ses photos. Céline a travaillé deux ans avec elle. Ce n’était pas toujours facile car elle avait un sacré tempérament. Mais tout s’est bien passé. Sauf lorsque Céline lui a proposé d’apparaitre sur le film de Godard : « Je ne vais quand même pas lui servir la soupe ! » lui a-t-elle répondu. Il s’est vengé car à la fin, lorsqu’elle a voulu le voir, elle a eu une fin de non-recevoir ! »

Noémie Dumas et Pascale Parodi sont venues nous rejoindre et l’on aurait pu encore longtemps discuter tous les trois avec Olivier, homme disert, volubile, passionné si l’heure d’entrer en scène devant le public n’était arrivée. Mais entre Marseille et Aix-en-Provence, il n’y a pas loin. Et l’on se reverra pour parler de notre passion commune : le cinéma, italien ou français !

Jacques Brachet

Octobre rose
« Le souffle du dragon » est passé sur le Six N’Etoiles


Le Dr Stéphanie Guillaume, Stépanie Pilonca réalisatrice, Noémie Dumas, directrice du Six-N’Etoiles, Luc Patentreger, président du festival « Femmes »

Elles sont toutes de Reims Elles ont toutes un point commun : le fait de s’être battues contre un cancer du sein.
Au départ elles ne se connaissaient pas mais leur oncologue commun leur conseille de s’unir dans un projet original : Monter sur un bateau, ramer pour gagner une course à bord d’un dragon-boat. Elles ont toutes des vies et des âges différents mais toutes la même envie : combattre le dragon qui est en elles en s’unissant dans une même énergie pour chasser cette peur de la récidive qui est en elles, se reconstruire et tourner cette dramatique page de leur vie.
Ce ne sera pas sans problèmes, sans difficultés mais cette rage qu’elles ont en elles, cette envie de vivre, elles vont l’exorciser en ramant toutes ensemble.
« Le souffle du dragon » est un superbe film signé Stéphanie Pilonc –  Farlédoise de naissance et ayant travaillé dans la compagnie d’André Mairal à la Seyne – qui est venue le présenter grâce à la collaboration du Docteur Stéphanie Guillaume, adjointe à la santé de la ville de Six-Fours et de la directrice du Six N’Etoiles, Noémie Dumas, dans le cadre de cet « Octobre rose » annuel, qui a pour vocation de parler d’un fléau : le cancer et de rassembler malades (et non malades car ça peut arriver à tout le monde), chirurgiens, oncologues, association qui gravitent autour de ce mal qui, s’il ne répand pas la terreur est un mal grave mais qu’on peut aujourd’hui enrayer si on le prend à temps.
Stéphanie Pilonca a mis tous les atouts de son côté pour en parler et réunir une distribution de rêve : Julie de Bona, Julie Gayet, Lola Dewaere, Annie Grégorio, Firmine Richard, Bérangère Krief.
Les hommes n’en sont pas moins importants : Arié Elmaleh, Amaury de Crayencourt, François Berléand… Un film choral plein de tendresse, d’émotion, plein de rose et de rires aussi, une ode à la vie et la guérison.


« Comment vous est venue l’idée de ce film, Stéphanie ?
Parce que le cancer est un sujet qui concerne toutes les femmes et surtout parce que l’idée m’est venue de le traiter ainsi en découvrant que ce genre de course sur les bateaux-dragons existait au Canada depuis 1996, créé par le Dr McKenzy, cancérologue  et à Reims en 2009 par le Dr Cutuli. Ces femmes qui s’unissent dans une sorte de sororité pour retrouver leur intimité, se rapproprier leur corps, revenir à la vie m’ont touchée.
Ce que je voulais aussi montrer aussi ce sont les dégâts collatéraux avec le compagnon, les enfants, la famille en général. Il faut savoir regarder de l’autre côté. Un cancer ce n’est pas anodin, ce n’est pas que la femme, c’est un ensemble de choses à gérer. Et il est important que l’entourage soit un allié.
Un tournage en bateau, comment ça se réalise ?
(Elle rit) Avec difficulté ! D’abord il faut dire que rester assise sur une planche durant des heures, ça n’est pas tellement confortable,  il faisait chaud et il y avait les comédiennes mais aussi les figurantes et les bénévoles. Quelquefois ça râlait un peu. Quant à filmer de bateau de l’extérieur, je l’ai fait avec mon fils… sur une trottinette ! C’était vraiment artisanal. Mais j’avoue que les comédiennes ne se sont jamais plaintes et qu’il y avait une joyeuse ambiance.

Dans ce film, il est aussi question de mort…
Evidemment car la vie sans la mort, ça n’existe pas. Le scénario de Clément Koch est ainsi écrit. Moi, j’arrive à la fin d’une chaîne, je réalise une fiction. On ne peut pas parler de cancer sans parler de la mort même si ça devient plus rare. Ce qui nous fait dire qu’on est que de passage et qu’il faut profiter de la vie.
Lorsqu’elles rament, les femmes sont très maquillées…
Oui et c’est voulu. Aujourd’hui après leurs opérations, les femmes sont souvent prises en main pour se faire coiffer et maquiller, pour avoir une plus belle apparence. J’ai décidé qu’elles seraient Maquillées un peu plus que prévu. Et c’est une bénévole qui s’est écrié : « Allez, envoyez les paillettes ! »


Nos deux Stéphanie étaient entourées  pour le débat des docteurs Saadouni, oncologue, Manique et Rousset-Rivière, chirurgiens-gynécologue Nathalie Sebban, patiente, référente CapSein, c
Ils ont tous bien réagi au film tant il est vrai que tout ce qui s’y dit est réel, et ils le vivent journellement. Il répètent qu’il ne faut pas attendre que ce soit trop tard, ne pas être dans le déni, d’autant qu’aujourd’hui s’il est pris à temps, nombre de cancers du sein se guérissent très bien.
Aujourd’hui, les chirurgiens, les oncologues, les médecins se préoccupent plus souvent de l’entourage de la malade, d’abord pour elle, car elle besoin d’un entourage qui la soutienne, la famille en priorité. Et il faut aussi prendre en compte la famille, qui, elle aussi, subit un choc. Il faut pouvoir la rassurer.
Aujourd’hui c’’est pour cela que nombre de bénévoles, d’associations viennent moralement en aide à ces femmes qui ont subi un traumatisme ; leur offrir des animations, les aider à faire du sport, à prendre soin d’elles.
Il faut dire qu’à Six-Fours, le Docteur Stéphanie Guillaume et Béatrice Métayer, chargée de mission politique de santé publique de la ville de six-Fours, organisent un mois on ne peut plus rose, aidées par nombre de bénévoles et d’association, que ce soit des soins esthétiques à des cours de divers sports, de sorties à pied ou en bateau et beaucoup d’autres manifestations, d’ateliers qui permettent à ses femmes de s’éloigner un moment de leurs problèmes et surtout de rencontrer, d’échanger, de se faire des amies, de ne pas sombrer dans la solitude.


Du coup, le Dr Guillaume a eu le mot de la fin : « Cette maladie est une traversée du désert, un changement de vie. On n’en sort pas indemne mais on en sort grandie ». Dans la foulée, de proposer de former un équipage de dragon-boat pour l’année prochaine.
Et Stéphanie Pilanca d’ajouter : « OK, je vous aide à voler un bateau ! »

Jacques Brachet


Clovis CORNILLAC… Un nouveau maire à Six-Fours !


Paul Barral (Clovis Cornillac) est à la fois menuisier et maire d’un petit village, Cordon, qui se déserte.
Afin de ne pas avoir à faire fermer l’école faute d’élèves, il cherche des solutions. Il construit donc des appartements afin de recevoir de nouveaux habitants. Mais le lieu étant éloigné de tout, il n’y arrive pas. L’un de ses adjoints a trouvé une entreprise qui voudrait installer un complexe avec piscine, mais la solution ne lui convient pas.
Arrive alors Joe Lynn « Eye Haïdara) une jeune femme, chanteuse épisodique avec deux enfants qui vivent en foyer mais que l’âge des enfants fait qu’elle doit le quitter. Si au départ, il n’est pas très chaud pour les recevoir, il finit par lui louer un appartement. Et elle arrive… avec une amie du foyer qui est enceinte !
A partir de là, le village sera en ébullition car il y a les pour, les contre dont un adjoint qui voit son projet menacé et va tout faire pour que repartent ses femmes seules avec leurs enfants.. Peu à peu, aidée par une de ses adjointes, l’idée de faire de ce pâté d’immeubles un centre pour ces personnes prend forme. D’autant que Joe s’adapte aux villageois, leur donne des cours de country et peu à peu le village reprend vie.
Est-ce que Monsieur le Maire arrivera à ses fins ?
Ce premier film  de Karine Blanc et Michel Tavarès est un film à la fois drôle, émouvant, il s’y dégage une humanité, Clovis Cornillac, comme à son habitude, y est formidable en Maire un peu paumé et Eye Haïdara, en plus d’être belle et d’avoir une belle voix, y est lumineuse en mère tout aussi paumée qui se raccroche à l’espoir de trouver un vrai foyer pour ses enfants.

Michel Tavarès, Karine Blanc, Clovis Cornillac, Noémie Dumas, directrice du Six N’Etoiles


Le Six N’Etoiles a eu la chance d’avoir la  visite de ce maire pas comme les autres et de ses réalisateurs. Ce sera en coup de vent, le temps de boire un coup avec quelques « vrais » élus, mais sans le « vrai » maire et quelques membres du Rotary. Chance d’autant plus grande que, passant du Pathé la Valette au Six N’Etoiles, il a pu rester un moment avec nous, avant de repartir pour Paris à 6 heures du matin le lendemain !
« Clovis on vous voit chaque fois en tournée avec chacun de vos films et à Six-Fours entre autres où une salle porte votre nom…
Oui car, que je sois réalisateur ou comédien, je ne vis que grâce au public et lorsque j’en ai le temps, je suis heureux de partager un moment avec lui et qu’il puisse découvrir un film sur un grand écran. Je trouve quelque chose de magique de me déplacer dans les villes, de le rencontrer et de passer un moment ensemble.
Karine, Michel, c’est votre premier film à tous les deux… Vos impressions ?
Karine : Un premier film c’est très émouvant à montrer, c’est à la fois du stress et du bonheur et je suis très heureuses de voir les premières réactions du public.
Michel, Je suis très impressionné de voir une salle pleine pour découvrir notre film. Déjà enfant, je rêvais de faire du cinéma, de pouvoir montrer mon travail et arriver avec un premier film c’est un grand bonheur, même s’il y a un peu d’appréhension sur le fait que le public va aimer ou non notre travail.

Quelle est la genèse de l’histoire ?
Karine : C’est parti d’une histoire réelle d’un petit village de montagne des Pyrénées. Nous avons, nous,  tourné dans un petit village des Alpes où tous les habitants ont participé au film. Ça a été de véritables rencontres, ils étaient heureux de nous recevoir, tout autant que malheureux de nous voir repartir. Tout le monde était triste et, alors que nous avons eu un temps superbe, il pleuvait le jour où nous sommes partis.
Clovis, qu’est-ce qui vous a plu dans cette histoire ?
Lorsque j’ai lu le scénario, je l’ai trouvé plein d’humanité et il ressemblait à ses ambitions. L’histoire est belle car c’est une histoire vécue qui m’a beaucoup touché. Il y a des moments d’humour, des moments d’émotion, des moments d’humanité. C’est un vrai sujet et c’est un film tendre,  bienveillant qui ressemble à ses réalisateurs. C’est un film populaire dans le bon sens du terme.
Michel, avez-vous tout de suite pensé à Clovis ?
Michel : Pas en l’écrivant car je ne crois pas que ce soit judicieux d’écrire pour un comédien sans savoir s’il aimera le scénario ou s’il sera libre. Après, le scénario bouclé, c’est vrai que nous avons pensé à Clovis et la chance et qu’il a aussitôt répondu positivement.
Avez-vous galéré car faire un premier film est toujours une aventure !
Karine : En fait, nous n’avons pas tellement galéré même si le chemin a quelquefois été un peu sinueux. Très vite UGC a été d’accord pour le financer. Il faut dire que le nom de Clovis a dû faire beaucoup. On a eu la chance d’avoir la bonne personne.

Clovis, quel effet ça fait d’être maire ?
(Il rit) C’est un rôle comme un autre mais surtout, j’ai découvert ce que c’était qu’être maire. C’est un sacerdoce car dans ces villages, un maire est très mal payé il bosse 70 heures par semaine et doit avoir un « vrai » travail à côté. De plus, il n’a pas de vacances, il reçoit des doléances de partout, pour tout et n’importe quoi. C’est en fait un boulot à plein temps, épuisant physiquement et moralement, surtout dans ces petites communes éloignées de tout et qu’on oublie souvent. J’ai vraiment su ce que c’était. J’admire ceux qui le font car c’est un métier assez noble et j’espère ne pas avoir trahi cette fonction. J’avais peur qu’ils disent : « Ce n’est tellement pas ça ! »
Vous n’avez pas eu de retour ?
Oui, nous avons été invités au Congrès des Maires Ruraux de France où nous avons présenté le film. C’était très délicat de les leur présenter mais ils ont tous été heureux qu’on parle d’eux. Durant deux jours, l’ambiance était fraternelle car ils vivent tous dans une telle solitude qu’ils sont heureux de se retrouver, de picoler ensemble. Je crois que ça leur a filé un coup de jus, un coup d’énergie.
Travailler avec des réalisateurs dont on ne peut pas s’appuyer sur un précédent travail, est-ce que ça vous pose problème ?
Non, dans la mesure où on nous présente un travail abouti, une histoire intéressante. J’ai tout de suite aimé mon rôle aussi car je pouvais jouer sur l’humour, la tendresse, l’émotion. Et j’ai tout de suite aimé Karine et Michel. J’ai senti qu’on ferait du bon travail. Après, c’est toujours le public qui décide.

L’équipe du film, les élus et les membres du Rotary


Justement, Karine, Michel, si ça n’avait pas été Clovis ?
Michel : C’aurait été un autre comédien avec une autre façon de s’attribuer le rôle, avec une autre personnalité. On aurait peut-être dû adapter, changer certaines choses…
Clovis : C’est pour cela qu’il ne faut jamais écrire pour quelqu’un car l’interprétation est aussi vraiment une vision de l’interprète. Si le comédien pressenti dit non, ça peut totalement changer le film. Ça peut être très mauvais mais quelquefois ce peut être une bonne surprise. Ce peut aussi devenir un autre film. C’est une question de chance.
Michel : Nous avions besoin d’une intention, d’un regard, d’un visage qui parle et c’est ce que nous avons eu avec Clovis ».

Jacques Brachet